garder de déraciner les propos théoriques de la psychanalyse de leur contexte thérapeutique, qui
est leur source.
Cette relation multidimensionnelle ne sera pas traitée en tous ses aspects dans le cours. La
position de Freud lui-même envers la philosophie n'est déjà pas facile à cerner. Lors de ses études
de médecine, il suivit les cours de philosophie de Brentano (à partir de 1874), et il s'intéressa à la
philosophie dans les années suivantes au point d'envisager d’y préparer un doctorat. Cet
engouement du jeune Freud pour la philosophie, en tension directe avec ses inclinations
empiriques, étroitement scientifiques à l'époque, ne dura pas longtemps. En 1914, on constate une
volte-face : Freud nie avoir ou avoir eu le goût de l'étude de la philosophie, et pendant des années
les références de Freud à la philosophie sont systématiquement péjoratives. Il caractérise
typiquement la position « des philosophes » de façon très générale, les écartant en raison de leur
niveau d'abstraction, leur idéalisme et leur volonté de systématisation. Dans certains contextes, il
déploie des éléments d'une psychanalyse de la pratique philosophique elle-même, dévoilant des
motivations psychiques latentes (et névrotiques) qui la meuvent. Plus tard dans sa vie, il change à
nouveau d'attitude, adoptant une disposition plus favorable à la philosophie, à la spéculation,
attribuant notablement une importance considérable à Schopenhauer, Kant, et Platon. Sans
minimiser pour autant la pertinence de cerner les positionnements explicites de Freud face à la
philosophie, cet aspect de la question ne sera pas foncièrement examiné dans le cours. Au niveau
du rapport de Freud à l'histoire de la philosophie, nous nous attarderons plutôt aux problèmes
philosophiques suscités directement ou indirectement par l'étude de la psychanalyse, afin
d'examiner sa contribution à la tradition philosophique. Parmi ces problèmes, on pourra
considérer le dualisme, la question de la liberté et de la responsabilité, la conscience et
l'inconscient (la transparence à soi), le systématique théorique, le rêve, le langage (l'expression,
les symboles, l'interprétation), le désir et la sexualité, la pratique théorique, le corps
(l'incorporation de la connaissance), la fonction de la religion et des croyances. Nous discuterons
les rapports entre Freud et une variété de figures dans l’histoire de la philosophie, tel que Platon,
Nietzsche, Kant, Hegel, Schopenhauer, etc..
De façon générale, dans la perspective adoptée dans le cours, la psychanalyse s'insère
historiquement parmi les façons de concevoir le soi, les conceptions du sujet. Elle est