1 Budget 2014-2015 : est-il vraiment le temps de forcer le retour du ratio moyen des dépenses? Par Gabriel Sainte-Marie GRAPHIQUE 1 Évolution de la part des dépenses consolidées (*) dans l’économie (en pourcentage du PIB), 1972-2018 Source : Budget 2014-2015 du gouvernement du Québec. Note : calculs du ministère des Finances et de l’Économie du Québec. ( ) * Excluant le service de la dette. Depuis 1997, le gouvernement capitalise ses dépenses d’investissement et impute une dépense annuelle correspondant à l’amortissement du bien capitalisable. D ans son budget 2014-2015, le gouvernement du Québec présente ce graphique et annonce vouloir restreindre ses dépenses pour retrouver un ratio moyen par rapport au PIB. Le moment est mal choisi : la conjoncture économique québécoise, comme celles des pays industrialisés et de l’ensemble de la planète, demeure fragile et incertaine. Le risque d’un ralentissement de l’économie québécoise ou même d’une récession demeure, et vouloir malgré cela chercher à contraindre les dépenses publiques paraît téméraire et risque en dernière analyse de nuire à la reprise économique… et même au ratio! Le problème avec l’objectif de diminuer le ratio dépenses-PIB est qu’il augmente automatiquement en situation de ralentissement économique ou de récession et diminue en croissance. Bref, la variation du ratio dépend avant tout de la conjoncture. En récession, le PIB diminue. De plus, les dépenses publiques sont contra cyclique, c’est-à-dire qu’elles ont tendance à augmenter lorsque le PIB diminue. Par exemple, les dépenses en services sociaux augmentent lorsque l’emploi diminue, tout comme les dépenses en éducation, puisqu’il s’agit alors d’un bon moment pour la main-d’œuvre superflue d’aller parfaire ses compétences. Règle générale, durant les périodes de difficultés économiques, le budget est aussi utilisé pour relancer l’économie, en augmentant les dépenses en infrastructures routières par exemple. Il n’est donc pas étonnant que les sommets atteints sur le graphique correspondent aux trois dernières récessions que le Québec ait connues. Cette volonté de toujours réduire le poids des dépenses dans l’économie semble s’inscrire dans une dynamique qui mène à un accroissement des écarts de richesse et à la diminution du rôle de redistribution qu’assume l’État. Ce cercle vicieux semble s’établir dans la majorité des pays industrialisés. La tendance est davantage prononcée au niveau fédéral. C’est aussi leurs compressions dans les transferts aux provinces qui placent le Québec dans une situation intenable. Si ce cercle vicieux est moins important ici, il n’en demeure pas moins que le gouvernement du Québec suit cette tendance. Son obsession du contrôle des dépenses dans l’actuel budget en témoigne. Que la corruption, la bureaucratie, l’inefficacité et les dépassements de coûts soient mieux gérés est un objectif essentiel, mais difficile à atteindre et à faire respecter. Couper dans les services à la population pour compenser les diminutions de taxation des mieux nantis est non seulement condamnable par l’accroissement des injustices sociales qui en résultent, mais aussi dommageable pour l’activité économique générale, surtout dans une conjoncture aussi fragile que la situation actuelle.