MARIE-PIER CHENEL BEAULIEU LA NATURE DES FONCTIONS DU TROUBLE DES CONDUITES ALIMENTAIRES ET LEUR ASSOCIATION AVEC LA SÉVÉRITÉ DES SYMPTÔMES ET LA MOTIVATION AU TRAITEMENT Mémoire doctoral présenté à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval dans le cadre du programme de doctorat en psychologie pour l’obtention du grade de Docteure en psychologie (D.Psy) ÉCOLE DE PSYCHOLOGIE FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC 2012 © Marie-Pier Chenel-Beaulieu, 2012 Résumé Les troubles des conduites alimentaires (TCA) sont reconnus comme étant des désordres complexes causés par une multitude de facteurs. Toutefois, ils sont la plupart du temps évalués et traités selon les manifestations comportementales observables. Comme plusieurs difficultés liées au traitement de cette clientèle sont relevées et qu’une proportion considérable des personnes souffrant de TCA montre une chronicité de la pathologie ou une rémission partielle des symptômes, il importe d’élargir nos connaissances sur cette problématique. Certains auteurs soulignent l’importance de s’attarder à une vision plus subjective et individualisée de ces troubles afin de mieux comprendre le contexte dans lequel ils s’inscrivent. C’est dans ce contexte que le présent projet s’est intéressé aux fonctions auto-rapportées par les patientes souffrant de TCA, c’est-à-dire aux raisons pour lesquelles les personnes souffrant de ces troubles adoptent des attitudes et comportements alimentaires dysfonctionnels. Le premier objectif de l’étude visait à reproduire auprès de notre échantillon une classification de fonctions élaborée par Nordbø, Espeset, Gulliksen, Skårderud et Holte (2006), qui comprend les huit fonctions suivantes: sécurité, évitement, puissance, confiance, identité, prise en charge, communication et mort. Par la suite, l’étude s’est attardée au lien entre ces fonctions et le diagnostic (anorexie ou boulimie), la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques (dépressifs et anxieux), la motivation au traitement et l’évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement. Pour ce faire, des questionnaires concernant les symptômes alimentaires (Eating Attitudes Test (EAT-26)), cliniques (Inventaire de Dépression de Beck (Beck Depression Inventory-II), Inventaire de l’anxiété de Beck (Beck AI)) et la motivation au traitement (Questionnaire sur la motivation au traitement) ont été administrés de façon hebdomadaire à 81 personnes souffrant d’un ii TCA (anorexie, boulimie ou TCA non-spécifié) et participant à un programme de jour. La question « Quelles sont les fonctions de mon trouble des conduites alimentaires que j’ai identifiées cette semaine (à quoi me sert-il)? » était également à répondre à chaque semaine. La présente étude a permis d’une part, de valider la possibilité d’utiliser la classification proposée par Nordbø et ses collaborateurs (2006), et ce, auprès d’un échantillon à grand échelle et composé à la fois de personne souffrant d’anorexie et de boulimie. Un taux de fonction classifiable de 79,68% ainsi qu’un excellent accord inter- juge de 0.91 ont été répertoriés. Les résultats montrent des différences entre les groupes de fonction en lien avec le diagnostic, F (1,79) = 9,137, p = .003, la fonction évitement étant davantage endossée par les personnes souffrant de boulimie. Également, les groupes de fonction se distinguent quant aux symptômes dépressifs F (9,72) = 3.375, p = .005, le groupe mort tendant à présenter des symptômes plus sévères. Enfin, la motivation au traitement se présente également différemment selon les groupes de fonction, F (6,72) = 2.242, p = .049, le groupe sécurité montrant généralement moins de motivation envers le traitement que les autres groupes de fonctions. Cette étude a permis de mettre en évidence l’importance des fonctions psychologiques associées aux TCA et de soulever des différences entre ces fonctions quant au profil clinique, suggérant la possibilité d’utiliser celles-ci dans l’évaluation et le traitement de ces troubles. iii Avant-Propos À la fin de cette ultime étape qui clôt mon cheminement académique, j’aimerais faire part de ma gratitude envers tous ceux qui ont été présent pour moi dans la réalisation de ce projet. C’est grâce à eux si aujourd’hui, je dépose fièrement ce mémoire doctoral et débute ma carrière en tant que professionnelle. D’abord, je tiens à remercier toute l’équipe ayant participé de près ou de loin à réaliser avec moi ce mémoire. Au-delà de ce produit se cache toute une équipe de professionnels qui, par leur généreuse contribution, m’auront permis de vivre une expérience passionnante et enrichissante. Merci à Madame Catherine Bégin qui, en tant que directrice de thèse, a su me procurer un encadrement soutenu. Catherine, merci pour ta disponibilité, ta patience, ton ouverture, ton discernement, ta confiance. Ce fut un privilège de travailler à tes côtés et d’avoir la chance de profiter de ton savoir et de tes précieux conseils. Un merci tout particulier aussi à Madame Marie-Pierre Gagnon-Girouard, superviseure clinique et de recherche. Ton soutien, ton dévouement, ton implication infinie, furent essentiels pour moi dans la réussite de ma formation. À vous deux, merci d’avoir permis de faire de ce projet de recherche un travail de qualité, mais aussi de m’avoir supporté et guidé pendant tout le long de ce cheminement qu’est le doctorat en psychologie. Merci de m’avoir permis de voir plus juste dans ma compréhension clinique, ainsi que sur moi-même. Malgré les doutes et les moments de découragements, toujours vous m’avez poussé à dépasser mes limites. Milles fois merci. Merci aussi à Monsieur Stéphane Sabourin, membre de mon comité de thèse, ainsi qu’à ma correctrice externe, madame Marie-Hélène Gagné, pour votre suivi rigoureux et vos judicieux conseils au cours des diverses étapes de ce projet. Également, je tiens à souligner l’implication de nos collaborateurs du PITCA, Madame Carole Ratté, Monsieur Olivier Pelletier et Madame Nathalie St-Jacques, pour avoir permis l’accès au programme de jour et d’avoir assuré le bon fonctionnement de la collecte de données auprès des participantes. Merci à Madame Hélène Paradis, pour avoir donné généreusement temps et énergie dans la tâche laborieuse, mais ô combien importante, que sont les analyses statistiques. J’en profite également pour remercier tous les bénévoles qui ont participé à ériger la banque de données. Enfin, merci aux participantes, à ces femmes souffrant de troubles des conduites iv alimentaires qui, comme moi, ont pour souhait de mieux comprendre et améliorer le traitement de cette problématique. J’en profite pour souligner le soutien incommensurable de tous mes parents et amis, car cet aboutissement n’en serait rien sans leur présence. Merci à toutes les filles du laboratoire, Annie, Sarah, Katrine, Isabelle, Mélodie, Marilou, et particulièrement à Catherine qui fut ma fidèle compagne au travers de toutes les étapes du doctorat. Merci pour vos conseils et votre support en tant que collègues, mais comme amies aussi. Ce fut un plaisir de partager avec vous tous ces beaux moments ces dernières années. Comment clore ma vie d’étudiante sans citer ma fidèle cohorte d’amies. Un merci spécial à Raquel, voisine de laboratoire, coéquipière, collègue, colocataire, amie, pour m’avoir inconditionnellement écouté, supporté, contenue et accueillie dans mes pires moments comme dans les meilleurs. Ta présence dans ma vie m’est précieuse. Un gros merci également à Léonie et Élizabeth, ainsi qu’a Pascale et Dominique avec qui j’ai partagé mon appartement pendant toutes ces belles années. Avec vous j’aurai vécu joie, tristesse, peine, colère. Grace à vos conseils, votre compréhension, votre soutien. Grâce aux moments de folie que vous m’avez permis de partager. Grâce à vous, les épreuves inhérentes aux études doctorales certes, mais aussi les épreuves de l’amour, de l’amitié, de la vie, furent sans contredit plus légères à traverser. J’en profite pour remercier mes plus vieilles copines d’enfance. Malgré la distance et leur réalité bien différente de la mienne, votre amitié sincère et fidèle est sans égale. Enfin, merci à mes parents, Bernard et Jacinthe. Depuis toujours vous avez cru et encouragé mes nombreux projets de vie, les plus fantaisistes soient-ils. C’est sans contredit votre confiance, votre amour, votre soutien moral infaillible, vos sacrifices, qui me permettent jour après jour de me dépasser et d’aspirer toujours à plus de la vie. Pour tout, merci. À tous, de tout mon cœur, merci d’avoir contribué à cet accomplissement personnel. Marie-Pier Chenel-Beaulieu Table des matières Résumé..................................................................................................................................... i Table des matières................................................................................................................... v Liste des tableaux.................................................................................................................. vii Liste des figures ....................................................................................................................viii Introduction .............................................................................................................................1 Chapitre 1 ................................................................................................................................4 Description de la problématique .............................................................................................4 1.1 Symptomatologie des TCA ............................................................................................4 1.1.1 Anorexie .................................................................................................................5 1.1.2 Boulimie .................................................................................................................6 1.2 Prévalence et incidence ................................................................................................7 1.3 Évolution et pronostic ...................................................................................................8 1.4 Conséquences..............................................................................................................10 1.4.1. Conséquences physiques .....................................................................................10 1.4.2. Conséquences psychologiques ............................................................................11 1.4.3 Conséquences économiques .................................................................................12 1.5 Facteurs de risque.......................................................................................................12 1.5.1. Facteurs génétiques ............................................................................................12 1.5.2 Facteurs environnementaux, familiaux et sociaux...............................................13 1.5.3 Facteurs individuels .............................................................................................14 1.6 Étiologie ......................................................................................................................17 1.7 Traitement ...................................................................................................................18 1.8 Fonctions auto-rapportées des TCA ...........................................................................20 Chapitre 2 ..............................................................................................................................30 Objectifs de l’étude ...............................................................................................................30 Chapitre 3 ..............................................................................................................................33 Méthodologie ........................................................................................................................33 3.1 Participants .................................................................................................................33 3.2 Traitement ...................................................................................................................33 3.3 Procédure....................................................................................................................34 3.4 Mesures .......................................................................................................................35 3.4.1 Eating Attitudes Test (EAT-26) ............................................................................35 3.4.2 Inventaire de Dépression de Beck (BDI-II) .........................................................36 3.4.3 Inventaire de l’anxiété de Beck (BAI) ..................................................................36 3.4.4 Questionnaire sur la motivation au traitement ....................................................37 3.5 Analyses statistiques ...................................................................................................38 Chapitre 4 ..............................................................................................................................40 Résultats ................................................................................................................................40 4.1 Classification des fonctions ........................................................................................40 4.2. Endossement des fonctions par les participantes ......................................................42 4.2.1 Différences en fonction du diagnostic..................................................................43 4.3 Différences quant à la sévérité des symptômes, la motivation au traitement et leur évolution pendant le traitement.........................................................................................44 vi 4.4 Regroupement de fonctions .........................................................................................45 Chapitre 5 ..............................................................................................................................47 Discussion .............................................................................................................................47 5.1 Application de la classification de Nordbø et collaborateurs (2006).........................47 5.2 Lien entre la classification et le type de diagnostic ....................................................53 5.3 Liens entre la classification, la sévérité des symptômes, la motivation au traitement et leur évolution pendant le traitement .............................................................................55 5.4 Limites de l’étude ........................................................................................................56 5.5 Implications théoriques et pratiques de l’étude ..........................................................58 Conclusion ............................................................................................................................66 Références .............................................................................................................................69 Tableau 1...............................................................................................................................82 Tableau 2...............................................................................................................................84 Tableau 3...............................................................................................................................85 Tableau 4...............................................................................................................................86 Tableau 5...............................................................................................................................87 Tableau 6...............................................................................................................................88 Tableau 7...............................................................................................................................89 Figure 1 .................................................................................................................................90 Annexe A ..............................................................................................................................91 Annexe B...............................................................................................................................93 Annexe C...............................................................................................................................96 Annexe D ..............................................................................................................................98 Annexe E...............................................................................................................................99 Annexe F .............................................................................................................................103 Liste des tableaux Tableau 1 Fonctions auto-rapportées selon la classification de Nordbø, Espeset, Gulliksen, Skårderud et Holte (2006)……………….……………………. 82 Tableau 2 Moyennes et écarts-types pour chaque fonction dans l’échantillon total et selon leur diagnostic…….………………………………...…………… 84 Tableau 3 Fréquences en pourcentage des groupes de fonction identifiés par les participantes de l’échantillon total et selon leur diagnostic………....……. 85 Tableau 4 Moyennes des symptômes alimentaires et cliniques, de la motivation au traitement et de leur évolution pour chaque groupe de fonction pour l’échantillon total .…………………………………………………..……..86 Tableau 5 Coefficients de corrélation de Pearson entre les fonctions identifiées par les participantes et la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, la motivation au traitement et leur évolution …………………………..........87 Tableau 6 Coefficients de corrélation de Pearson entre les fonctions..……….............88 Tableau 7 Les catégories de fonctions et leur score de saturation ..………..................89 Liste des figures Figure 1 Fréquences en pourcentage des catégories de fonction selon le diagnostic …………………..…………...............................................90 Introduction Les troubles des conduites alimentaires (TCA), troubles généralement caractérisés par la quête incessante de la minceur et une préoccupation intense par rapport à celle-ci, touchent une certaine proportion de la population dans notre société occidentale actuelle où les pressions de minceur sont omniprésentes (Brusset, 1998; Bulik & al., 2009; Hoek & Hoeken, 2003; Hudson, Hiripi, Pope & Kessler, 2007). Ces troubles, qui suivent une évolution chronique dans une proportion importante de cas, s’accompagnent de multiples complications médicales, physiques et psychologiques et sont associés à des coûts sociaux importants (Agence de la santé publique du Canada, 2002; American Psychological Association (APA), 2000; Bulik & al., 2005; Hudson & al., 2007; Simon, Schmidt & Pilling, 2005). D’un point de vue thérapeutique, la clientèle présentant des TCA est particulièrement difficile à traiter (Campbell, 2009). Plusieurs patientes nient leur maladie et présentent peu de motivation à changer (Zerbe, 2007). Dans ces circonstances, il est crucial de raffiner nos connaissances des TCA pour améliorer les traitements. Plusieurs auteurs stipulent qu’une meilleure compréhension de l’origine des TCA permettrait de développer des stratégies thérapeutiques plus efficaces (Costorphine, Waller, Ohanian & Baker, 2006; Deaver, Miltenberger, Smyth, Meidinger & Crosby, 2003; Lee & Miltenberger, 1997; McManus & Waller, 1995; Serpell, Treasure, Teasdale & Sullivan, 1999; Vitousek & Ewald, 1993). Jusqu’à maintenant, les TCA sont classés uniquement en fonction de l’absence ou de la présence des symptômes, ce qui correspond à une vision plutôt quantitative et objective de classification basée sur des critères déductifs fixes et observables. Conséquemment, les traitements sont pour la plupart 2 conçus dans le but de traiter ces personnes en ce sens et visent surtout la diminution de ces symptômes. Toutefois, les taux de chronicité et de rechute restent relativement élevés, soit autour de 50% (Keel & Hersog, 2004; Keel & Mitchell, 1997). Certains auteurs stipulent que cette façon de catégoriser les troubles ne semble pas refléter la complexité de leur nature. En effet, les TCA sous-tendent certaines caractéristiques importantes, autres que leur symptomatologie clinique, auxquelles il est important de s’attarder. La dynamique interne du patient et les facteurs individuels susceptibles de contribuer au développement et au maintien des comportements problématiques en sont des exemples (Andersson & Ghaderi, 2006). D’ailleurs, au cours des dernières années, la recherche s’est intéressée à la vision subjective des patientes souffrant de TCA, investiguant la perception de ces dernières face à leur maladie (Abraham & Beumont, 1982; Nordbø, Espeset, Gulliksen, Skårderud & Holte, 2006; Serpell & al., 1999). Jusqu’à maintenant, quelques auteurs se sont attardés à catégoriser les fonctions de la maladie telles que rapportées par les personnes souffrant d’un TCA, c'est-à-dire les raisons sous-jacentes à la pratique de leurs comportements alimentaires problématiques (Nordbø & al., 2006; Serpell & al., 1999). Des fonctions telles la sécurité, le contrôle, la confiance, le sentiment de puissance, l’identité, l’accomplissement, l’évitement, la communication, l’apparence physique et l’autodestruction sont rapportées. Cependant, les études à ce sujet sont peu nombreuses. À notre connaissance, aucune ne s’est intéressée au lien entre ces fonctions et la sévérité des symptômes. Le présent mémoire doctoral s’attarde donc aux fonctions de la maladie telles qu’auto-rapportées par les patientes. L’objectif de cette étude est de répliquer une classification déjà établie de ces fonctions et de les rattacher indépendamment à la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, à la motivation au traitement, à leur évolution au 3 cours du traitement et au type de diagnostic (anorexie ou boulimie). Dans ce contexte, le présent document offre une description de la problématique, en présentant tout d’abord un survol de la symptomatologie où les symptômes de l’anorexie, de la boulimie et des TCA non-spécifiés sont décrits. Par la suite, les données relatives à la prévalence et à l’incidence sont présentées ainsi qu’un portrait de l’évolution et du pronostic généralement observés de la pathologie. Le premier chapitre offre également un sommaire des multiples conséquences et des facteurs de risque liés aux TCA, ainsi qu’une section étiologie faisant part d’une explication multifactorielle du développement de ces troubles. Les traitements généralement proposés pour ce type de clientèle sont également abordés. La dernière partie de ce chapitre concerne les fonctions auto-rapportées, thème au cœur du présent projet de recherche. Celle-ci met en perspective l’importance de s’intéresser aux raisons sousjacentes à l’adoption de ces comportements alimentaires pathologiques et décrit les études effectuées jusqu’à maintenant sur le sujet. Par la suite, les objectifs de l’étude, la méthodologie employée, les analyses effectuées et les résultats obtenus sont présentés. Enfin, le présent mémoire doctoral fait part d’une discussion où les résultats sont interprétés et documentés en lien avec la littérature sur le sujet. Chapitre 1 Description de la problématique 1.1 Symptomatologie des TCA Les TCA sont des troubles d’ordre psychologique qui se caractérisent principalement par une importante perturbation des comportements alimentaires et une préoccupation excessive par rapport au poids et aux formes corporelles. À ce jour, deux types de TCA plus spécifiques sont répertoriés, soit l’anorexie mentale et la boulimie. Il existe cependant une autre catégorie, celle des TCA non spécifiés, qui regroupe la plus grande proportion (environ 60 %) de gens souffrants de TCA (Fairburn & Bohn, 2004). Toutefois, comme les critères associés aux TCA non-spécifiés n’atteignent pas le seuil pour établir un diagnostic clair d’anorexie ou de boulimie, les cliniciens se montrent souvent réticents à poser ce diagnostic et ce taux reste donc approximatif (Fairburn & Bohn, 2004) Les TCA non spécifiés font référence, par exemple, à des individus qui présentent tous les symptômes de l’anorexie sans toutefois souffrir d’aménorrhée ou encore des personnes qui, malgré une perte de poids significative, ne présentent pas un poids suffisamment inférieur à ce qui est attendu (en fonction de l’âge et la taille) pour répondre aux critères de l’anorexie. Un autre exemple fréquent est celui des individus qui présentent tous les critères diagnostiques de la boulimie, sans toutefois que les crises de boulimie n’atteignent la fréquence requise de deux fois par semaine pendant un minimum de trois mois. Malgré leur prévalence élevée, les TCA non spécifiés sont souvent perçus comme une catégorie « résidue », cette dernière étant trop souvent négligée dans les écrits scientifiques (APA, 2000; Fairburn & Bohn, 2004). 5 1.1.1 Anorexie L’anorexie mentale se caractérise par un mode général de restriction alimentaire et par une minceur extrême. En fait, le maintien d’un poids sous le seuil attendu pour l’âge et la taille est l’un des critères nécessaires au diagnostic de ce trouble. Pour évaluer celui-ci, l’indice de masse corporel (IMC : kg/m2 ) est utilisé et l’on considère le poids comme étant problématique lorsqu’il est inférieur à 85 % du poids normal attendu pour l’âge et la taille. Malgré un faible poids, les personnes souffrant d’anorexie demeurent obsédées par la prise de poids et/ou développent une peur intense de devenir grosses, d’où le maintien des comportements susceptibles de leur faire perdre du poids, tels le jeûne, la restriction sévère, l’exercice physique ou la prise de purgatifs, laxatifs et diurétiques. On constate également chez ces personnes une perception altérée de leur propre corps ou des formes de leur corps, duquel elles sont constamment insatisfaites. D’ailleurs, leur estime de soi est essentiellement basée sur leurs poids ou leurs formes corporelles. Plus elles sont minces, meilleure est leur estime. Finalement, pour recevoir le diagnostic d’anorexie, les femmes post-pubères doivent présenter de l’aménorrhée, c’est-à-dire une absence de menstruations pendant un minimum de trois cycles consécutifs. Il existe deux types d’anorexie. L’anorexie de type restrictif est associée à un mode de restriction alimentaire rigide, à la pratique du jeûne ou de l’exercice physique excessif. L’anorexie de type avec crise de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs se caractérise, tant qu’à elle, par la présence de crises de boulimie (ces dernières seront décrites plus bas) et par le recours à des moyens compensatoires tels que les vomissements provoqués ou l’emploi de purgatifs (laxatifs, diurétiques, lavements) afin d’éviter la prise de poids. La restriction demeure toutefois au 6 centre du portrait clinique en alternance avec les crises de boulimie (APA, 2000; Bulik & al., 2005). 1.1.2 Boulimie La boulimie se définit par la présence de crises de boulimie accompagnées de moyens compensatoires. Les crises de boulimie comprennent la consommation d’une quantité de nourriture beaucoup plus grande que ce qu’une personne mangerait habituellement dans une même période de temps (généralement de courte durée, c’est-àdire de moins de deux heures) et dans les mêmes circonstances accompagnées d’un sentiment de perte de contrôle sur les aliments consommés. Pour poser un diagnostic de boulimie, ces crises doivent survenir au moins deux fois par semaine pendant un minimum de trois mois (APA, 2000). Plusieurs précipitants aux crises de boulimie sont répertoriés. Les plus cités sont une humeur dysphorique, des émotions négatives telles que l’anxiété, la colère, l’ennui et l’irritabilité, des problèmes d’ordres interpersonnels, des pensées associées au poids, à l’apparence physique ou à la nourriture et enfin, la sensation de faim intense provoquée par une période de restriction alimentaire (APA, 2000; Deaver & al., 2003; Stickney & Miltenberger, 1998). Pour éviter la prise de poids suite à ces crises, des comportements compensatoires sont pratiqués, comme les vomissements provoqués, la prise de laxatifs et de diurétiques, les lavements, le jeûne ou l’exercice physique excessif. Également, bien que ces personnes présentent généralement un poids normal, elles demeurent très préoccupées par leur poids et la forme de leurs corps et c’est d’ailleurs sur ces indicateurs que repose leur estime personnelle (APA, 2000; Gabbard, 2000). Il existe deux types de boulimie, soit avec ou sans vomissements ou prise de purgatifs (APA, 2000). 7 Le premier fait référence au fait de recourir à des comportements compensatoires tels que les vomissements provoqués ou l’emploi de laxatifs, diurétiques ou lavements pour pallier aux épisodes de compulsion alimentaire tandis que le deuxième fait référence au jeûne ou à la pratique excessive d’exercices physiques pour compenser aux épisodes de compulsion. Il est aussi important de distinguer la boulimie de l’anorexie mentale avec crise de boulimie/vomissements ou prise de purgatifs. Dans ce cas, le poids est le critère le plus important permettant de distinguer ces deux troubles, car, comparativement à la boulimie, l’anorexie se caractérise par un IMC sous la normale (APA, 2000). 1.2 Prévalence et incidence La prévalence actuelle des TCA dans la population normale, incluant l’anorexie, la boulimie et les TCA non spécifiés, est autour de 10 % selon Klein et Walsh (2003). En ce qui a trait à l’anorexie, les études s’entendent généralement pour dire que le taux de prévalence chez les jeunes femmes varie entre 0 et 1,5 %. (APA, 2000; Hoek & Hoeken, 2003; Hudson & al., 2007; Simon & al., 2005; Striegel-Moore, Franko & Ach, 2006). Pour ce qui est de la prévalence à vie, elle se situerait entre 0,5 % et 0,9 % au sein de la population féminine (APA, 2000; Hudson & al., 2007). Toutefois, une grande proportion de la population présenterait une symptomatologie sous le seuil clinique et ne serait pas incluse dans ce taux (APA, 2000). Selon Hoek et Hoeken (2003), l’incidence de l’anorexie, c’est-à-dire le nombre de nouveaux cas apparaissant par année, se trouve présentement à 8 cas pour 100 000 personnes. 8 Selon certaines études, le taux de prévalence ainsi que le taux de prévalence à vie de la boulimie chez les femmes adolescentes et jeunes adultes varieraient entre 1 % à 3 % (APA, 2000; Hoek & Hoeken, 2003; Hudson & al., 2007; Simon & al., 2005; StriegelMoore & al., 2006). L’incidence serait de 12 cas pour une population de 100 000 personnes par an (Hoek & Hoeken, 2003). Selon Hudson et ses collaborateurs (2007), il semble que les cas de boulimie aient augmenté au cours de la deuxième moitié du XXe siècle, la prévalence à vie étant significativement moins élevée dans une cohorte à l’étude née avant 1944. Pour ce qui est des TCA non spécifiés, la prévalence varie selon les auteurs entre 2,37 % et 5 % lors d’études effectuées auprès de jeunes femmes et d’adolescentes (Kjelsås, Bjørnstrøm & Götestam, 2003; Machado, Machado, Gonçalves & Hoek, 2007; RodríguezCano, Beato-Fernández & Belmonte-Llario, 2005) et la prévalence à vie serait de 5,3 % (Wade, Bergin, Tiggemann, Bulik & Fairmburn, 2006). La plupart des études effectuées à ce jour s’entendent pour dire que la clientèle masculine souffrant de TCA compte pour environ 10 % de la population touchée (APA, 2000; Striegel-Moore & al., 2006; Simon & al., 2005; Hoek, & Hoeken, 2003). C’est pourquoi le présent mémoire doctoral s’intéressera plus spécifiquement à la clientèle féminine. 1.3 Évolution et pronostic Pour ce qui est de l’évolution de la maladie, l’anorexie débute généralement à l’adolescence, entre 14 et 18 ans, mais rarement après l’âge de 40 ans (APA, 2000). L’âge 9 moyen d’apparition des symptômes serait de 18,9 ans (Hudson & al., 2007). Toutefois, d’autres études suggèrent un âge d’apparition moyen plus précoce, soit entre 14 et 16 ans (Clausen, 2004; Wentz, Gillberg, Anckarsäter, Gillberg & Råstam, 2009). Le pronostic varie d’un individu à l’autre, pouvant passer d’un épisode isolé à la chronicité de la pathologie, avec rémission et/ou rechute. On constate dans un nombre élevé de cas (de 8 à 62 % selon les études) un changement dans le diagnostic alimentaire passant de l’anorexie vers la boulimie, le plus souvent pendant les cinq premières années de la maladie. Ceci pourrait s’expliquer par l’état de privation induit par la restriction alimentaire. En effet, il semble que la restriction alimentaire générerait une forme d’obsession envers la nourriture, ce qui augmenterait les risques de perte de contrôle et conséquemment, l’absorption d’aliments interdits en grande quantité, d’où l’apparition des crises de boulimie (APA 2000; Bulik & al., 2005). Pour ce qui est du taux de rémission de l’anorexie, il est évalué à 46 %, alors que 34 % des patientes anorexiques connaîtraient une amélioration des symptômes et 20 % vivraient un parcours chronique de la maladie (Keel & Hersog, 2004). La population anorexique connait un taux de mortalité particulièrement élevé, soit d’environ 5 % (Millar & al., 2005; Signorini & al., 2006; Sullivan, 1995). En fait, ex aequo avec les abus de substances, il s’agirait du plus haut taux de mortalité des troubles psychiatriques et il serait 12 fois plus élevé qu’au sein de la population générale (Bulik & al., 2005; Simon & al., 2005; Striegel-Moore & Bulik, 2007). Quant à la boulimie, ce trouble débute également dans la plupart des cas vers la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte (APA, 2000), soit à 19,7 ans en moyenne selon Hudson et al. (2007). Encore une fois, d’autres études tendent à démontrer un âge moyen différent, soit de 15,4 ans selon Clausen (2004). Comme l’anorexie, l’évolution de la 10 maladie varie d’une personne à l’autre, se caractérisant par des épisodes intermittents ou par la chronicité des comportements. Il n’en demeure pas moins que la maladie tend à se prolonger pendant plusieurs années dans un grand nombre de cas (APA, 2000). En fait, alors que 50 % des personnes boulimiques vivraient une rémission complète sans rechute, 30 % démontreraient toujours des symptômes partiels et 20 % continueraient de présenter une symptomatologie complète à long terme (Keel & Mitchell, 1997). 1.4 Conséquences 1.4.1. Conséquences physiques Les moyens parfois drastiques utilisés pour contrôler ou perdre du poids engendrent plusieurs conséquences médicales. Outre la maigreur parfois extrême, la sous-alimentation peut entraîner diverses complications comme de l’aménorrhée, de la constipation, des douleurs abdominales, une frilosité, une léthargie ou à l’inverse une énergie excessive, en plus d’affecter la plupart des organes. Certaines personnes peuvent présenter de l’hypotension, de l’hypothermie, une sécheresse cutanée, du lanugo, une bradycardie, un œdème périphérique et une diathèse hémorragique. Pour celles qui pratiquent les vomissements provoqués, on dénote l’érosion de l’émail dentaire, l’augmentation de caries dentaires, l’augmentation du volume des glandes salivaires, des callosités sur la surface des mains ainsi que des complications au niveau de plusieurs organes internes. Celles qui utilisent en plus des laxatifs, des diurétiques ou qui ont recours aux lavements peuvent souffrir d’anomalies hydro-électrolytes, d’anémie, d’insuffisance rénale, de problèmes cardio-vasculaires, de troubles dentaires et d’ostéoporose. Il arrive plus rarement des cas de 11 déchirures œsophagiennes, de ruptures gastriques et d’arythmies cardiaques. L’utilisation de laxatifs peut entraîner des complications telles qu’une acidose métabolique et une dépendance pour stimuler la motilité intestinale (APA, 2000). 1.4.2. Conséquences psychologiques En ce qui a trait aux symptômes psychologiques, bien que la plupart se manifestent suite à l’adoption des comportements alimentaires pathologiques, il est important de spécifier que ceux-ci sont parfois présents avant l’apparition du trouble également. Il est alors difficile de départager spécifiquement les facteurs étiologiques des conséquences (Jacobi, Moris & Zwaan, 2004). Toutefois, les auteurs s’entendent pour dire que les personnes souffrant de TCA sont susceptibles de développer, suite à la maladie, des symptômes dépressifs, des symptômes anxieux, telle que la présence d’obsessioncompulsion, et des troubles liés à l’utilisation de substances (Hudson & al., 2007; Simon & al., 2005). D’ailleurs, l’étude de Keys et al. (1950) démontre bien les effets psychologiques de la restriction. Après avoir soumis 22 personnes à une diète restrictive de 1 570 calories par jour pendant six mois (représentant les conditions de famine en Europe à ce moment), les chercheurs ont observé l’apparition de rituels comportementaux, des changements au niveau de l’humeur et dans les habiletés intellectuelles. L’apparition de symptômes dépressifs (le plus souvent une humeur dépressive, un retrait social, de l’irritabilité, une diminution de l’intérêt pour la sexualité et de la fatigue), et anxieux tels que des traits obsessionnels-compulsifs envers la nourriture, de la difficulté à manger en public et un déficit au niveau de l’expression émotionnelle sont observés (APA, 2000; Bulik & al., 2005). Comme conséquences cognitives, la dénutrition entraîne entre autres des difficultés 12 de concentration, une plus grande distractibilité et une tendance à garder un focus cognitif centré sur l’alimentation et le poids (Polivy, 1996). 1.4.3 Conséquences économiques Les personnes souffrant de TCA sont de grands consommateurs de soins de santé et de services sociaux, ce qui représente des coûts médicaux et sociaux importants (Bulik & al., 2005; Simon & al., 2005). En fait, depuis 1987, on remarque une hausse considérable du taux d’hospitalisation chez cette population, notamment une augmentation de 34 % chez les jeunes filles de moins de 15 ans et de 29 % chez les jeunes femmes de 15 à 24 ans (Agence de la santé publique du Canada, 2002). Un coût moyen de 17 384 $ est nécessaire pour l’hospitalisation d’une patiente anorexique et de 9 088 $ pour une patiente boulimique. Il en coûterait 2 344 $ pour le traitement à l’externe d’une patiente anorexique et 1 882 $ pour le traitement d’une patiente boulimique (Agras, 2001). 1.5 Facteurs de risque Plusieurs facteurs sont reconnus comme étant des causes directes et indirectes au développement d’un TCA. La littérature relève la présence de caractéristiques génétiques, environnementales et individuelles communes chez les personnes atteintes de TCA et ce, avant même l’apparition des symptômes de la maladie. 1.5.1. Facteurs génétiques Des études portant sur les jumeaux se sont spécifiquement attardées aux facteurs génétiques, isolant ceux-ci des facteurs environnementaux. Selon ces études, les chances de 13 développer un TCA sont plus élevées lorsqu’un membre de la famille en souffre également. En fait, l’héritabilité serait de l’ordre d’environ 56 % à 76 % pour les patientes anorexiques et de 50 % à 83 % pour les patientes boulimiques (Agence de la santé publique du Canada, 2002; Mitchell & Bulik, 2006; Striegel-Moore & Bulik, 2007). Certains auteurs suggèrent l’existence de combinaisons de certains gènes qui auraient une incidence dans l’apparition de ces troubles. À cet effet, des gènes influençant l’humeur et l’appétit, notamment dans les systèmes sérotoninergique et dopaminergique, apparaîtraient comme centraux dans l’étiologie des TCA (Striegel-Moore & Bulik, 2007). 1.5.2 Facteurs environnementaux, familiaux et sociaux Il existe aussi des facteurs de risques environnementaux, familiaux et sociaux prédisposant aux TCA. Certains auteurs énumèrent des conditions prénatales et périnatales susceptibles de mettre à risque l’enfant, comme le fait d’avoir un faible poids à la naissance, d’être né prématurément (contribuerait à 3,6 % des risques) ou d’avoir une mère elle-même souffrant de TCA (Bulik & al., 2005; Palmer, 2008). En fait, des comportements de la mère pendant la grossesse et les premiers temps de vie du nourrisson pourraient mettre à risque ce dernier, tels qu’une nutrition inadéquate pendant la grossesse, la difficulté à nourrir l’enfant au sein et des heures de repas inconvenantes (Bulik & al., 2005). D’autres facteurs provenant de l’environnement sont susceptibles de faciliter le développement d’un TCA chez un enfant. Par exemple, le fait d’être issu d’un milieu qui valorise l’apparence ou qui favorise des attitudes dysfonctionnelles par rapport à l’alimentation et au poids ainsi que le fait d’avoir subi des insultes relatives au corps sont 14 toutes des situations à risque de contribuer à l’apparition d’un TCA (Agence de la santé publique du Canada, 2002). On dénote également des expériences d’abus, d’adversité et des traumatismes affectant la perception corporelle (Agence de la santé publique du Canada, 2002; Palmer, 2008) Des relations parents-enfants caractérisées par la surprotection, ou à l’inverse par le manque d’affection et de soins, les critiques, le désengagement ou la présence d’attentes trop élevées semblent aussi être des éléments prédisposants à ce trouble (Jacobi & al., 2004). On remarque aussi une prévalence plus élevée chez certains types de population, spécialement chez les femmes adolescentes ou jeunes adultes de race blanche (APA 2000; Hudson & al., 2007; Mitchell & Bulik, 2006 ;Striegel-Moore & Bulik, 2007). Les hommes homosexuels et les athlètes féminines seraient aussi des populations particulièrement à risque (Striegel-Moore & Bulik, 2007). Les pays industrialisés au sein desquels l’idéal de la minceur comme critère de beauté et de compétence est valorisé et où la nourriture existe en abondance sont des milieux propices au développement de TCA (APA, 2000; Mitchell & Bulik, 2006; Simon & al.,2005; Striegel-Moore & Bulik, 2007). 1.5.3 Facteurs individuels Certains facteurs propres à l’histoire de l’individu sont répertoriés comme facteurs de risque au développement d’un TCA, tel que des problèmes alimentaires pendant l’enfance ou un poids élevé (obésité) (Bulik & al., 2005; Striegel-Moore & Bulik, 2007). Un autre élément susceptible de déclencher un TCA est l’apparition précoce de la puberté (Jacobi & al., 2004). L’augmentation de la masse corporelle jumelée aux valeurs sociétales prônant la minceur sont alors à l’origine d’inquiétudes quant au poids et aux formes 15 corporelles. Ces jeunes filles se retrouvent en effet soudainement confrontées à un corps de femme qui diffère visiblement de celui des autres jeunes filles de leur âge et qui ne convient plus aux modèles sociaux valorisés (Gowers & Shore, 2001). L’insatisfaction corporelle augmente alors et le risque d’avoir recours à des méthodes inappropriées pour perdre du poids afin de retrouver leur corps de jeune fille est plus élevé. Selon certaines études prospectives ou longitudinales, il existe également certains facteurs psychologiques qui semblent être des prédicteurs de comportements alimentaires problématiques. On dénote, entre autres, une faible estime de soi, une insatisfaction face à son image corporelle, un sentiment d’inefficacité, une rigidité cognitive et une tendance à se méfier des autres (Agence de la santé publique du Canada, 2002; Brusset, 1998; Bulik & al., 2005; Mitchell & Bulik, 2006; Palmer, 2008). Gabbard (2000) explique que ces facteurs occasionneraient un besoin de contrôle chez ces personnes qui trouveraient leur exutoire dans les comportements alimentaires. Le contrôle sur son corps et sur la nourriture permettrait de pallier artificiellement au sentiment d’inefficacité, le contrôle interne se voulant comme une tentative de contrôle sur le monde externe (Chassler, 1994; Gabbard, 2000; Vitousek & Ewald, 1993). L’autodiscipline de son corps et la perte de poids permettraient d’acquérir un certain sentiment d’efficacité, d’invulnérabilité, d’accomplissement et même de supériorité. Gabbard (2000) ajoute que l’entretien de fausses perceptions face à sa propre image corporelle, le recours au clivage, à la pensée magique et à des rituels obsessionnels-compulsifs seraient aussi reliés au développement des TCA. À un niveau davantage psychopathologique, le fait de présenter un autre trouble d’ordre psychiatrique est en soi un facteur de risque (Palmer, 2008). Des auteurs (Agence 16 de la santé publique du Canada, 2002; Bulik & al., 2005; Gabbard, 2000; Palmer, 2008; Striegel-Moore & Bulik, 2007) stipulent que des traits de personnalité perfectionnistes, obsessifs, impulsifs et anxieux sont davantage associés au développement des TCA. En fait, Cassin et Ranson (2005) font ressortir d’une méta-analyse des taux de prévalence des troubles de personnalité de 0 à 58 %, dépendamment des études considérées, dans des échantillons de personnes souffrant de TCA. Le plus souvent, on retrouve des troubles de personnalité obsessionnelle-compulsive pour les personnes présentant un profil davantage de restriction alimentaire et des troubles de personnalité limite pour les personnes pratiquant des habitudes alimentaires plutôt d’ordre boulimique (APA, 2000; Gabbard, 2000). Également, avant même l’expression de leur trouble, ces personnes auraient tendance à présenter une perturbation de l’humeur ainsi que des symptômes anxieux et des traits obsessionnels-compulsifs. En fait, la présence de troubles anxieux chez les personnes aux prises avec des TCA serait particulièrement importante (Kaye, Bulik, Thorton, Barbarich & Master, 2004). Les résultats de l’étude démontrent qu’environ les deux tiers de cette population auraient souffert au cours de leur vie d’un trouble anxieux, le plus souvent un trouble obsessionnel-compulsif (41 %) ou une phobie sociale (20 %). Dans un autre ordre d’idées, McManus et Waller (1995) ajoutent que la dissociation serait un facteur prédisposant aux périodes de compulsion alimentaire. En fait, les individus qui ont tendance à se couper de leurs émotions douloureuses tendent à s’engager aussi dans des comportements impulsifs, comme les crises alimentaires. 17 1.6 Étiologie En parallèle à la littérature empirique sur les facteurs de risque, plusieurs auteurs ont réfléchi d’un point de vue plus théorique à l’articulation de ces facteurs étiologiques pour en faire une compréhension plus intégrée. Certains modèles multifactoriels ont été conçus pour expliquer le développement et le maintien des TCA (Aimé & Bégin, 2007; Garner, 1993; Garner & Gerborg, 2004). Selon ceux-ci, ce serait l’interaction de plusieurs facteurs prédisposants et d’expériences développementales qui seraient en cause dans le développement des TCA. Comme énuméré précédemment, ces auteurs soulèvent la présence de facteurs génétiques, socioculturels et environnementaux (modèles culturels axés sur la minceur, événements de vie stressants, occupation, influence des pairs, etc.), familiaux (conflits, emphase sur le poids, milieu critique, faible cohésion, surprotection, etc.) et individuels (difficulté dans le développement de l’identité, faible estime de soi, puberté, traits de personnalité, psychopathologie, etc.). Ces éléments à l’origine d’insatisfaction quant à l’image corporelle, de sentiment d’inefficacité et de besoin de contrôle, mèneraient vers l’adoption de diètes et enfin au développement de troubles des conduites alimentaires. Les conséquences (dénutrition, problèmes interpersonnels, isolement) et les gains secondaires engendrés par ces habitudes alimentaires malsaines contribueraient au maintien du trouble. En effet, les changements physiques et les symptômes associés aux troubles permettraient entre autres d’avoir l’attention des proches, de maintenir la relation de dépendance avec la famille, de procurer un sentiment de performance, de supériorité, de contrôle, de diminuer les attentes d’autrui, d’apaiser les émotions difficiles ou d’éviter les conflits, l’intimité et la sexualité (Aimé & Bégin, 2007; Garner, 1993; Garner & Gerborg, 2004) 18 1.7 Traitement Le développement des TCA résulte donc d’un ensemble de facteurs issus du vécu individuel de la personne. Bien que la littérature démontre l’importance de tenir compte de ces facteurs, les traitements proposés pour ces troubles restent pour la plupart axés sur le traitement des symptômes alimentaires (Fairburn, Cooper & Shafran, 2008; National Collaborating Centre for Mental Health (NCCMH), 2004; Wilson, Grilo & Vitousek, 2007). Également, les critères du DSM-IV (APA, 2000) pour établir un diagnostic de TCA reposent sur des comportements observables et mesurables et prêtent conséquemment peu d’attention au contexte dans lequel ces troubles surviennent (Andersson et Ghaderi, 2006; APA, 2000). Comme ces troubles sont considérés comme une perturbation du comportement alimentaire et de la perception de l’image corporelle, l’évaluation et le traitement sont généralement orientés en ce sens (Fairburn, Cooper & Shafran, 2008; National Collaborating Centre for Mental Health (NCCMH), 2004; Wilson, Grilo & Vitousek, 2007). C’est dans cet ordre d’idée que les traitements visent principalement la réduction des symptômes physiques (par exemple la reprise de poids pour les personnes souffrant d’anorexie et la diminution des crises alimentaires et des vomissements provoqués pour celles montrant des symptômes se rapportant davantage à la boulimie) et cognitifs (modification des distorsions cognitives, pensées automatiques et croyances fondamentales et attitude dysfonctionnelle par rapport au poids et à la forme corporelle) par le biais de stratégies impliquant, entre autres, la psychoéducation, l’exposition, la restructuration cognitive, l’établissement d’un régime alimentaire sain et équilibré, le contrat thérapeutique, les devoirs ou l’élaboration d’un journal alimentaire. Des stratégies de gestion émotionnelle et de résolution de problèmes sont généralement intégrées au 19 traitement également. La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) s’avère le traitement de choix pour cette clientèle. Ce dernier, d’une durée d’environ une vingtaine de sessions à fréquence d’une fois par semaine, est généralement structuré de façon standardisée (Fairburn, Cooper & Shafran, 2008; Petrucelli, 2004; Wilson, Fairburn, Agras, Wilson, Grilo & Vitousek, 2007; Walsh & Kraemer, 2002). Jusqu’à maintenant, plusieurs études confirment l’efficacité de la TCC, surtout en lien avec la clientèle souffrant de boulimie (Fairburn & Harrison, 2003; NCCMH, 2004; Roth & Fonagy, 2005; Wilson, Grilo & Vitousek, 2007). Cette forme de traitement permettrait l’arrêt des crises de boulimie dans 30% à 50% des cas et faciliterait l’adoption de meilleures habitudes alimentaires, moins restrictives et plus équilibrées (Agras, Walsh, Fairburn, Wilson, & Kraemer, 2000; Wilson, Fairburn, Agras, Walsh & Kraemer, 2002). Toutefois, les études en lien avec l’efficacité des traitements pour les personnes souffrant d’anorexie semblent moins concluantes. Selon le NCCMH (2004), les études ne montrent que des résultats modestes quant à l’efficacité des traitements utilisés avec cette clientèle et aucun ne semble être à prioriser. Pourtant, la plupart des traitements continuent à investir les sphères comportementale et alimentaire comme principales cibles thérapeutiques (Fairburn & Harrisson, 2003; Wilson, Grilo & Vitousek, 2007). Également, bien que ces stratégies cognitives-comportementales semblent efficaces pour une partie de la clientèle atteinte de TCA, il n’en reste pas moins qu’une part importante de cette population connaît un pronostic plutôt défavorable ainsi qu’une chronicité élevée de leurs comportements alimentaires pathologiques. Comme mentionné précédemment, environ 30 % des patientes présenteraient toujours une symptomatologie partielle suite au traitement tandis que 20 % connaîtraient un parcours chronique de la maladie (Keel & Hersog, 2004; Keel & Mitchell, 20 1997). De plus, cette clientèle se montrerait particulièrement réticente face au traitement et un nombre considérable de patientes abandonneraient le suivi thérapeutique, le taux d’attrition atteignant 20 % à 50 % selon les études (Mahon, 2000; Waller & al., 2009). Malgré les nombreuses conséquences négatives de la maladie, plusieurs patientes nient la gravité de leurs symptômes (Vitousek, Watson & Wilson, 1998; Agras et al, 2004) ou critiqueraient les traitements qui leur sont proposés. Elles percevraient ces derniers comme mettant trop l’emphase sur leur maladie et se sentiraient oubliées comme personne, rendant conséquemment l’alliance thérapeutique difficile à développer (Brinch & Isager & Tolstrup 1988; Vitousek, Watson & Wilson, 1998; Agras et al, 2004). Dans ce contexte, plusieurs auteurs soulignent l’importance de mettre de l’avant des stratégies pour augmenter la motivation de cette clientèle face au traitement (Campbell, 2009; Nordbø & al., 2006; Serpell & al., 1999; Vitousek, Watson & Wilson, 1998; Zerbe, 2007). Selon eux, il est crucial de développer une meilleure compréhension de l’expérience personnelle de la patiente en explorant davantage les avantages et les désavantages de la maladie ainsi que le sens et la valeur attribués à celle-ci. Il serait ainsi possible de diminuer les résistances envers le traitement et d’améliorer la motivation, l’adhérence et l’engagement envers celuici (Higbed & Fox, 2010; Vitousek, Watson & Wilson, 1998). 1.8 Fonctions auto-rapportées des TCA À la lumière des connaissances actuelles, il semble important de développer une meilleure compréhension des multiples facteurs de développement et de connaître l’histoire de la personne pour mieux comprendre les enjeux sous-tendant l’adoption de ces 21 comportements alimentaires pathologiques et améliorer nos stratégies de traitement. La perception des patientes face à leur trouble semble donc importante à considérer afin d’en connaître davantage sur les motivations qui sous-tendent l’adoption de tels comportements. En fait, les fonctions que les patientes attribueraient à la présence de leur maladie seraient d’importants indicateurs du maintien des comportements alimentaires problématiques (Costorphine & al., 2006; Deaver & al., 2003; Jarry, 1998; Serpell & al., 1999; Lee & Miltenberger, 1997; McManus & Waller, 1995; Vitousek & Ewald, 1993). Elles joueraient parfois un rôle de renforçateur négatif, c’est-à-dire que le trouble permettrait à la personne d’éviter de faire face à un stimulus aversif (Deaver & al., 2003). Par exemple, les comportements pathologiques peuvent servir à éviter de ressentir certaines émotions négatives en transférant le focus attentionnel vers quelque chose de moins menaçant (Heatherton & Baumeister, 1991). Elles peuvent également jouer un rôle de renforçateur positif, où la personne tire un avantage de ses comportements, par exemple en se faisant valoriser pour le contrôle de soi qu’elle exerce ou complimenter pour sa silhouette. Bref, connaître la fonction associée au trouble aide à mieux comprendre ce que la personne évite ou recherche et de mieux cibler les résistances au changement (Vitousek & Ewald, 1993). Cette façon personnalisée de comprendre la présence du TCA permettrait de mieux documenter la contribution de la patiente dans son trouble et d’orienter nos interventions et objectifs de traitement en ce sens (McManus & Waller, 1995). Cette approche permet également à la patiente de se sentir comprise, de donner un sens au processus thérapeutique et de développer l’alliance thérapeutique essentielle pour assurer la motivation et l’adhérence au traitement (Fox, Larkin Leung, 2010; Nordbø & al., 2006). 22 À ce jour, quelques auteurs se sont intéressés aux fonctions rapportées par les patientes quant à leur TCA. Ceux-ci se sont attardés à la signification associée à la présence du trouble et aux raisons pour lesquelles les patientes adoptent ces comportements alimentaires. Bref, ils ont considéré la perception et l’expérience subjective de la personne envers sa maladie. Ces études ont permis d’élaborer des classifications de ces fonctions, qui seront décrites plus en détail. D’abord, l’étude de Serpell et al. (1999) avait pour but d’examiner les attitudes des personnes anorexiques envers leur TCA pour dégager les aspects positifs et négatifs de la maladie selon l’expérience subjective des patientes. Pour ce faire, 18 patientes anorexiques d’une unité spécialisée dans le traitement des troubles alimentaires ont été recrutées. Après quelques sessions thérapeutiques, ces dernières devaient décrire comment cette maladie les affectait en écrivant deux lettres à celle-ci, une s’adressant à leur « amie » et l’autre à leur « ennemie ». Les lettres ont été analysées selon un schéma de codage, où chaque phrase était codée comme « pro-thème » ou « anti-thème» dépendamment si l’extrait traitait d’un aspect positif ou négatif. Dans cette étude, la théorisation ancrée fut utilisée pour grouper les thèmes récurrents du codage. Cette dernière est une méthode inductive utilisée en recherche qualitative qui priorise la création d’une théorie à partir des données. Elle consiste à collecter les données et à les marquer par des codes. Les codes sont conceptualisés et groupés en catégories. L’analyse manuelle des données et leur catégorisation ont été effectuées par trois personnes. Une bonne fidélité inter-juges fut assurée avec un coefficient Kappa de 0.63 à 0.81. De cette analyse, 10 « prothèmes» se dégageaient des lettres destinées à leur « maladie-amie », référant aux différentes fonctions possibles que ces personnes attribuent à leur maladie. Tout d’abord, le thème du gardien fait référence à la maladie comme un bouclier qui veille sur la personne 23 et qui lui permet de se sentir protégée et en sécurité, lui procurant une impression de constance dans sa vie et de dépendance envers sa maladie. Le thème du contrôle est également ressorti de ces lettres, comme quoi la maladie permet de donner une certaine structure à sa vie. Se sentir plus attrayante et augmenter la confiance en soi furent deux autres pro-thèmes répertoriés. La maladie permettrait également aux patientes de se sentir spéciales, différentes et même supérieures aux autres. Parfois, ces personnes voient aussi leur trouble comme une habileté, comme quelque chose de difficile à accomplir. Enfin, quatre autres fonctions de l’anorexie ont été répertoriées, soit éviter l’affrontement des émotions et de la détresse, communiquer celles-ci aux proches, garder une belle apparence et ne plus avoir de règles. Les résultats de cette étude montrent l’importance du thème gardien, qui est en fait le thème le plus fréquemment nommé par les participantes. Pourtant, cette fonction serait peu détaillée dans la littérature. Cela met en évidence l’importance des recherches de type descriptive et phénoménologique pour obtenir une vision plus éclairée de la dynamique entourant cette clientèle. Les auteurs remarquent aussi que seulement six participantes ont souligné l’importance de se sentir plus attrayante grâce à leur trouble. Cela contredit la conception populaire qui sous-tend que les comportements restrictifs sont pratiqués principalement dans le but d’atteindre les standards de minceur promulgués par les valeurs sociales. Également, le thème contrôle est la deuxième fonction la plus fréquemment nommée, ce qui confirme l’importance de ce thème auprès de cette clientèle. En effet, cette fonction est déjà bien documentée dans la littérature, certains auteurs identifiant le TCA comme un « trouble du contrôle » (Katzman & Lee, 1997). Serpell et ses collaborateurs soulèvent aussi que la plupart des thèmes ressortis des lettres semblent en lien avec la présence de schémas cognitifs mal adaptés. Par exemple, le sentiment 24 d’inefficacité provoqué par la présence d’un schéma d’imperfection (schémas reliés au sentiment d’être constamment inapproprié ou fautif) serait compensé par la perte de poids qui procurerait l’impression de supériorité et d’accomplissement. Enfin, les auteurs soutiennent l’importance de ces thèmes dans la compréhension de la valeur que ces patientes attribuent à leur trouble et en quoi ils expliquent leur réticence face au traitement. Serpell et Treasure (2002) se sont aussi intéressées à la compréhension des fonctions reliées à la boulimie. Pour ce faire, elles ont utilisé la même procédure, méthodologie et analyses déjà proposées dans l’étude précédente. Toujours dans l’objectif de mieux connaître l’attitude des patientes boulimiques envers leur maladie, elles ont demandé à 30 participantes d’écrire une lettre à leur « maladie-amie » et une à leur « maladie ennemie ». C’est par la même catégorisation proposée par Serpell et al. (1999) qu’elles ont effectué le codage (gardien, contrôle, se sentir plus attrayante, confiance en soi, différence, habileté, évitement, communication, apparence et règles). À ces thèmes, les auteurs ont pu faire ressortir deux fonctions supplémentaires à la boulimie, dont la possibilité de manger sans prendre de poids et comme moyen pour gérer l’ennui. Les fonctions communication, apparence et règles n’ont pas été nommées par les participantes. Bien que la plupart des thèmes se retrouvent chez les deux populations, la fréquence de chacun diffère selon le trouble. Comparativement à la population anorexique, ce sont les thèmes évitement et manger sans prendre de poids qui seraient les plus souvent endossés avec celui de gardien. Les auteurs soulignent l’importance de réviser la grille de codage en tenant compte des thèmes reliés à la boulimie. Ces résultats vont dans le même sens que d’autres études portant sur la fonction des comportements boulimiques qui avaient démontré que, outre le fait de perdre ou de ne pas 25 perdre de poids, la régulation des états internes est l’une des fonctions principales pour les patientes (Abraham et Beumont, 1982; Arnow, Kenardy & Agras, 1992; Costorphine & al., 2006; Deaver & al., 2003; Heatherton & Baumeister, 1991; Kaye, Gwirtsman, George, Weiss & Jimerson, 1986; Lee & Miltenberger, 1997; McManus & Waller,1995; Milligan & Waller, 2000; Steinberg, Tobin & Johnson, 1989; Stickney & Miltenberger, 1998; Waller, Quinton & Watson, 1994). Plus récemment, une étude d’intérêt inspirée par les travaux de Serpell et al. (1999) a porté sur l’identification des fonctions psychologiques associées aux comportements anorexiques (Nordbø & al., 2006). Nordbø et ses collaborateurs ont alors tenté de pallier aux limites invoquées par la méthodologie de Serpell et al. (1999) en utilisant eux aussi une démarche qualitative basée sur la perception des patientes. Selon eux, l’utilisation de lettres pour rechercher les aspects positifs et négatifs de la maladie se veut une procédure trop directive et ne laisse pas assez libre cours au discours des patientes. L’utilisation d’entrevues semi-structurées, de formes interactives et centrées sur la patiente leur a permis d’avoir davantage accès à l’expérience subjective des patientes, de mieux comprendre la façon qu’elles vivaient leur maladie tout en leur permettant de préciser leurs pensées et d’obtenir de l’information plus valide. Cette recherche qualitative a été effectuée auprès de 18 femmes norvégiennes anorexiques recrutées dans des cliniques spécialisées pour les TCA. La méthode de saturation de données fut utilisée, c’est-à-dire que de nouvelles entrevues étaient traitées seulement si elles permettaient d’apporter de nouveaux éléments à la cueillette de données. Les entrevues étaient conduites individuellement auprès des patientes par deux chercheurs, lesquels n’avaient aucun lien avec l’institution de soins des patientes. Le verbatim des entrevues de 90 à 120 minutes a été analysé par la suite et la 26 théorisation ancrée a également été utilisée dans cette étude de type qualitatif. L’analyse de contenu de ces verbatim a été effectuée à l’aide du logiciel QSR-N’Vivo, qui permet de coder les textes selon les thématiques récurrentes. Lors de cette analyse, Nordbø et ses collaborateurs se sont intéressés uniquement aux fonctions psychologiques nommées par les patientes. Huit construits représentant les raisons subjectives que les patientes attribuent à leur maladie sont ressortis; la sécurité, l’évitement, le sentiment de pouvoir et de puissance, le sentiment de confiance, l’identité, la prise en charge, la communication et la mort. La recherche d’un sentiment de sécurité fait référence à l’application de règles et d’horaires rigides par rapport à la nourriture qui permettrait de donner une structure et une stabilité à la vie quotidienne et d’assurer l’absence de prise de poids. Les comportements anorexiques pourraient également avoir pour fonction l’évitement des émotions et des expériences négatives ainsi que l’évitement de la complexité des relations sociales, la maladie leur permettant de se centrer uniquement sur des aspects comme le corps, le poids et la nourriture. Les personnes souffrant d’anorexie n’auraient à ce moment plus le temps et l’énergie pour se concentrer sur les autres sphères plus complexes et interactionnelles de leur vie. En contrôlant l’absorption de nourriture et en perdant du poids, elles développeraient aussi un sentiment de pouvoir et de puissance, bref de maîtrise, de contrôle de soi et d’invulnérabilité. Le faible poids procurerait également de la confiance en leur permettant de se sentir belles et admirées, ce qui est souvent renforcé par l’environnement. L’anorexie permettrait aussi à ces personnes de se créer une identité. En effet, les changements physiques qu’apporte la maladie changeraient la perception qu’elles ont d’elles-mêmes et leur donneraient l’impression d’avoir une personnalité différente, qui est, selon elles, meilleure et plus attirante. Aussi, le fait de recevoir l’attention des proches ou 27 de sentir leur inquiétude quant à la perte de poids permettrait à ces filles de se sentir aimées et de combler un besoin de prise en charge. La présence de la maladie servirait également à communiquer, par le biais de la maigreur de leur corps, leurs difficultés aux autres, étant donné qu’elles en sont incapables autrement ou se sentent incomprises. Finalement, certaines d’entre elles adopteraient des comportements anorexiques par désir d’exprimer leur souhait de disparaître en se privant de manger jusqu’à la mort. Il est à noter que ces construits ne représentent pas des dimensions indépendantes et que la plupart des participantes ont accordé plus d’une fonction à leur trouble (Nordbø & al., 2006). Dans leur article, les auteurs se sont assurés de détailler chaque fonction et d’amener les précisions nécessaires afin d’éviter de les confondre entre elles, assurant du même coup que la classification soit claire et précise (voir annexe E). Nordbø et ses collaborateurs remarquent que les construits ressortis de leur étude sont reliés ou chevauchent les thèmes de l’étude de Serpell et al. (1999). Entre autres, la fonction sécurité se retrouve dans les thèmes gardien et contrôle trouvé par Serpell et al. (1999), et le thème de l’évitement des émotions aversives revient dans les deux études, soutenant par le fait même l’importance de ces fonctions dans ces troubles. Également, les construits puissance, confiance, communication et identité se retrouvent également dans les thèmes relevés dans l’étude de Serpell et al. (1999) (contrôle, confiance, habileté, communication et différence). Toutefois, comme Nordbø et ses collaborateurs se sont concentrés uniquement sur les aspects psychologiques, certaines fonctions, telles que celles en lien avec l’apparence physique ou à l’arrêt des règles, n’ont pas été investies dans cette étude. Enfin, les entrevues semi-structurées ont permis de mieux approfondir le thème du contrôle, généralement décrit comme un construit en soi ou associé à un sentiment de puissance. Toutefois, les auteurs ont constaté que le 28 contrôle était utilisé de différentes façons par les participantes et impliquait généralement une autre fonction. Une exploration plus profonde du contrôle permettait de cibler la fonction réelle rattachée, sous-tendant des enjeux de puissance, d’évitement ou même de mort. En définitive, ces études ont permis de démontrer que les patientes perçoivent leur trouble non seulement comme une maladie, mais aussi comme possédant une signification psychologique trouvant son origine dans le parcours de vie individuel à chacune. Les auteurs remarquent que les patientes décrivent souvent ces fonctions comme des facteurs de développement et de maintien de leurs comportements alimentaires pathologiques, et suggèrent donc la possibilité de diminuer ou d’éliminer ces comportements par le travail directement sur ces mêmes fonctions. En fait, comme cette clientèle s’avère particulièrement réticente aux traitements, les auteurs suggèrent l’utilisation de cette classification de fonctions comme guide d’exploration pour les cliniciens afin de mieux comprendre la valeur attribuée au trouble et les résistances au changement. Étant donné la procédure utilisée, la classification proposée par ces auteurs se veut particulièrement intéressante d’un point de vue clinique et semble un outil d’évaluation potentiel pour évaluer les fonctions des TCA. Une étude encore plus récente s’est aussi intéressée à la signification que les patientes attribuent à leur trouble et confirme également la présence de fonctions liées aux difficultés alimentaires des personnes souffrant de TCA (Fox, Larkin & Leung, 2010). Suite aux études mettant en évidence l’importance d’explorer la signification accordée au trouble par ces personnes, ces auteurs ont eux aussi voulu mieux comprendre l’expérience fonctionnelle de ces personnes avec leur trouble tout en évaluant les différences en lien 29 avec le diagnostic. Pour ce faire, l’échantillon était composé de huit personnes souffrant d’anorexie et de boulimie. Des entrevues semi-structurées ont été effectuées et les personnes étaient amenées à parler de leur expérience en lien avec leurs difficultés alimentaires et le sens qu’elles leur attribuaient. Cette étude a permis de faire ressortir trois thèmes quant à l’expérience fonctionnelle de leurs difficultés alimentaires, rejoignant les fonctions ressorties des études précédentes. Comme dans l’étude de Nordbø et ses collaborateurs (2006), les participantes ont répondu que leur trouble leur permettait de retrouver un sentiment de sécurité lorsque les événements de leur vie leur semblent hors de contrôle, leur procurant une impression de structure. Il peut aussi leur servir à éviter les expériences et émotions désagréables en leur permettant de diriger leur attention vers la sphère alimentaire. Enfin, les participantes ont affirmé que les comportements de restriction leur procuraient un sentiment d’accomplissement et d’invulnérabilité. Elles se sentent spéciales et différentes des autres. Ces auteurs font également le lien entre certains thèmes et les comportements alimentaires pratiqués. Ainsi, les crises de suralimentation seraient davantage liées à l’évitement de la détresse et la restriction alimentaire à l’augmentation de valeur personnelle. Les auteurs soulignent l’importance d’effectuer d’autres études permettant de mieux distinguer les fonctions en lien avec chaque diagnostic. En résumé, des enjeux entourant les sentiments de sécurité, de contrôle, de confiance, de puissance, d’identité, d’accomplissement, d’évitement, de communication, d’apparence physique, d’autodestruction et de régulation des états internes et des émotions seraient, selon ce qui ressort des études publiées à ce jour, au cœur de cette pathologie. 30 Chapitre 2 Objectifs de l’étude À la lumière de la littérature actuelle, il semble évident que les patientes attribuent un sens à leur trouble allant au-delà des symptômes physiques et observables généralement relevés. Étant donné les difficultés liées aux traitements, qui sont fortement orientés vers la guérison des symptômes comportementaux, les résistances aux changements et le haut taux de chronicité, il semble d’autant plus important de se pencher sur d’autres aspects de la maladie. C’est ainsi que le présent projet s’intéresse aux fonctions auto-rapportées des TCA à l’aide de données recueillies auprès d’une clientèle souffrant de TCA et ayant participé à un programme de jour spécialisé dans le traitement des pathologies alimentaires. Dans leur étude, Nordbø et ses collaborateurs (2006) ont fait ressortir huit construits d’intérêts, permettant de mettre en lumière une grille de classification pouvant s’avérer un outil d’évaluation clinique particulièrement intéressant. S’appuyant sur les travaux empiriques antérieurs, elle tient compte des fonctions psychologiques seulement et semble représenter clairement la plupart des fonctions recensées à ce jour dans la littérature. Ainsi, le premier objectif de la présente étude est de valider cette classification et donc de vérifier si les fonctions auto-rapportées par les participantes de notre étude s’harmonisent à la classification déjà élaborée par Nordbø et ses collaborateurs, c’est-à-dire selon les groupements suivants : sécurité, évitement, sentiment de pouvoir et de puissance, sentiment de confiance, identité, prise en charge, communication et mort. Il s’agit alors d’évaluer si 31 les catégories de fonctions proposées par Nordbø et son équipe s’appliquent à notre échantillon, et ce, à l’aide de données auto-rapportées. Jusqu’à maintenant, les chercheurs étudiant le sujet recueillent généralement les données à l’aide d’entrevues semi-structurées. Bien que les entrevues permettent d’amasser davantage de contenu, la procédure demeure longue et coûteuse. Le présent projet tentera donc de valider, à l’aide de données autorapportées, la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006). Un deuxième objectif de l’étude, davantage exploratoire, vise à étudier le lien entre ces catégories de fonction et la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques (dépressifs et anxieux), la motivation au traitement et leur évolution dans le temps. Également, le lien entre ces fonctions et le type de diagnostic sera étudié. Bien qu’aucune étude n’ait été effectuée sur l’ensemble de ces liens, il semble possible de présager, en se basant sur notre expérience clinique, certaines tendances quant aux résultats. Une première hypothèse est qu’il y aurait des différences quant à la sévérité des symptômes en fonction de l’appartenance à certaines catégories de fonction. Par exemple, il est possible de croire que des fonctions qui semblent refléter plus d’agressivité, comme la fonction de mort, puissent être associées à des symptômes cliniques plus sévères comparativement à des fonctions de régulation émotionnelle. De même, il est postulé que la motivation envers le traitement pourrait varier selon l’appartenance à certaines catégories de fonction. Par exemple, des fonctions procurant une valeur personnelle à la patiente, comme celles de puissance et de confiance, pourraient être associées à une motivation moindre au traitement étant donné la satisfaction importante qu’elles retirent des comportements alimentaires. Enfin, des distinctions pourraient être retrouvées entre les fonctions selon le diagnostic. Par exemple, il est attendu que la fonction 32 d’évitement, référant aux états émotionnels, soit davantage associée au diagnostic de boulimie (Fox, Larkin & Leung, 2010; Serpell & Treasure, 2002). Chapitre 3 Méthodologie 3.1 Participants L’échantillon est composé de 81 femmes âgées de 18 ans et plus et souffrant d’anorexie (n = 46) ou de boulimie (n = 35). Ces dernières ont participé au programme de jour offert par le Programme d'Intervention des Troubles des Conduites Alimentaires (PITCA) du Centre Hospitalier de l’Université Laval (CHUL). Ce programme est d’une durée de 8 (programme d’été) ou 12 (programme d’hiver) semaines à raison de 4 jours par semaine. Cependant, afin d’uniformiser le nombre de semaines considérées, seulement les données des semaines 1 à 8 pour toutes les participantes ont été utilisées dans la présente étude. Pour être incluses dans le programme, les participantes devaient répondre aux critères diagnostiques de l’anorexie mentale, de la boulimie ou d’un TCA non spécifié de type anorexique ou boulimique. Pour le présent projet, les participantes présentant un diagnostic de TCA non-spécifié ont été catégorisées selon qu’elles présentaient un profil de nature davantage anorexique ou boulimique. 3.2 Traitement Le traitement offert au programme de jour du PITCA est principalement basé sur les approches cognitives-comportementales et motivationnelles. Le but est la désensibilisation des peurs associées à la nourriture par le biais de l’exposition et de la psychoéducation. C’est ainsi que les patientes participent à des ateliers nutritionnels et à des activités telles 34 que l’achat de nourriture, la préparation et la prise de repas en groupe. Elles doivent également tenir un journal alimentaire tenant compte de ce qu’elles ont mangé, des pensées et émotions rattachées, et sont encouragées à se donner des objectifs au niveau alimentaire. Pendant le programme, les patientes participent à différents ateliers de groupe, tels que des ateliers psychoéducatifs en lien avec différents thèmes généralement associés à ces troubles (ex : estime de soi, affirmation de soi). Par le biais de l’approche motivationnelle, des groupes d’analyse de changement sont aussi effectués où l’importance de changer et les sources de motivation au changement sont explorées avec elles. Le développement de stratégies de résolution de problèmes, de gestion de l’humeur et des émotions ainsi que l’apprentissage de techniques de restructuration cognitive sont également utilisées avec les patientes afin de diminuer les fausses croyances associées à l’image corporelle et aux habitudes alimentaires. 3.3 Procédure Au début de chaque programme de jour, un psychologue attitré au PITCA et en mesure de répondre aux questions quant au projet de recherche présente ce dernier aux patientes. C’est aussi lors de cette rencontre que les patientes intéressées à participer à l’étude ont été recrutées, après quoi elles ont été invitées à signer un formulaire de consentement à cet effet. À ce moment, elles s’engageaient à remplir un questionnaire de façon hebdomadaire, soit chaque vendredi, mais pouvaient retirer le consentement en tout temps. La confidentialité de ces données a été assurée pour les participantes par l’attribution d’un numéro de sujet. Suite à la complétion des questionnaires, une double saisie des données quantitatives a été effectuée afin d’assurer une meilleure fidélité. Les 35 données qualitatives ont été transcrites par une seule personne. Les données analysées ont été collectées sur une période de quatre ans, soit de 2006 à 2010. 3.4 Mesures Un feuillet comprenant quatre questionnaires auto-administrés, le Questionnaire des Attitudes face à l’Alimentation (Eating Attitudes Test (EAT-26)), l’Inventaire de Dépression de Beck (Beck Depression Inventory-II), l’Inventaire de l’anxiété de Beck (Beck AI) et un questionnaire sur la motivation (Questionnaire sur la motivation au traitement), a été utilisé pour cette étude. À celui-ci s’ajoutait une question sur la fonction du TCA : « Quelles sont les fonctions de mon trouble des conduites alimentaires que j’ai identifiées cette semaine (à quoi me sert-il)? ». Plusieurs lignes étaient alors disponibles pour y répondre. Cette question de nature qualitative est au cœur de ce projet de recherche. Elle a permis aux participantes de décrire les raisons pour lesquelles elles pratiquent ces comportements alimentaires. C’est cette question qui a permis de recueillir l’information nécessaire à l’analyse des fonctions auto-rapportées par les participantes. 3.4.1 Eating Attitudes Test (EAT-26) Ce questionnaire de 26 items est basé sur une version originale de 40 items (Garner & Garfinkel, 1979; traduit par Leichner, Steiger, Puentes-Neuman, Perreault & Gottheil, 1994) et se répond avec un choix de réponse sur une échelle de Likert divisée en 6 points allant de toujours à jamais. Les résultats au questionnaire varient entre 0 et 78, un résultat plus élevé montrant des préoccupations plus importantes à l’égard du poids et de l’image corporelle. Un résultat de 20 est considéré comme un indice de pathologie. Cet instrument permet d’obtenir des mesures objectives de la pathologie quant aux comportements et 36 préoccupations alimentaires et corporels. Il est considéré comme fidèle et valide (Garner, Olmstead, Gohr & Garfinkel, 1982; Pomerleau, 2001; Wood, Waller, Miller & Slade, 1992). L’échelle totale démontre un coefficient de fidélité de 0.84. Les trois sous-échelles possèdent respectivement un coefficient de fidélité (alpha de Cronbach) de 0.84, 0.63 et 0.57 (Annexe A). 3.4.2 Inventaire de Dépression de Beck (BDI-II) Ce questionnaire est une traduction française du Beck Depression Inventory II (BDI-II, Beck, 1978; traduit par Bourque & Beaudette, 1982). Il comporte 21 items mesurant les symptômes dépressifs des deux dernières semaines. Ceux-ci sont cotés sur une échelle de zéro à trois et produit un résultat total entre 0 et 63. Un résultat au-delà de 28 suggère une intensité sévère des symptômes dépressifs. Des études s’intéressant à la fidélité de ce questionnaire font ressortir une très bonne cohérence interne (α = .91) ainsi qu’une très bonne stabilité test-retest (r = .72) (Beck, Steer & Brown, 1996; Dozois & Covin, 2004). Quant aux validités convergente et discriminante de l’instrument, elles ont été démontrées comme adéquate. En fait, selon une étude de Segal, Coolidge, Cahill, et O’riley (2008), le BDI-II est positivement et fortement corrélé avec d’autres échelles de dépression, telle le CATI-Depression (r = .59). La validité de contenu et divergente apparaissent également comme satisfaisantes (Beck & al., 1996) (Annexe B). 3.4.3 Inventaire de l’anxiété de Beck (BAI) Cette traduction française du BAI (Beck, 1987, traduit par Freeston, Ladouceur, Thibodeau, Gagnon & Rheaume, 1994) permet de mesurer les symptômes anxieux à l’aide de 21 affirmations où le sujet doit rapporter si elles correspondent à sa situation au cours de 37 la dernière semaine sur une échelle de Likert à 4 niveaux (pas du tout, légèrement, modérément ou fortement). Les réponses sont cotées de zéro à trois points, permettant d’établir un résultat entre 0 et 63 où un résultat supérieur à 29 indique la présence d’anxiété sévère. Les études sur la fidélité confirment une très bonne cohérence interne (α = .92) ainsi qu’une très bonne fidélité test-retest (r = .83) (Beck & Steer, 1990). Les validités de contenu, convergente et divergente sont considérées comme satisfaisantes (Beck & Steer, 1990) (Annexe C). 3.4.4 Questionnaire sur la motivation au traitement L’instrument utilisé dans la présente étude pour mesurer la motivation au traitement est un questionnaire adapté par Zuroff, Koestner et Moskowitz (2003) utilisé dans le cadre de traitement avec une clientèle souffrant de dépression (William, Freedman & Deci, 1998, traduit par Aubut & Grassia, 2005). Ce questionnaire est divisé en deux échelles mesurant la motivation autonome et la motivation contrôlée. Les participantes sont appelées à répondre à 12 items, représentant diverses raisons motivant la poursuite du traitement, sur une échelle de Likert en 7 points allant de « très en désaccord » à « très en accord ». Le résultat final varie entre 0 et 84, un résultat élevé représentant une motivation plus élevée et où 15 indique une motivation modérée face au traitement. Une étude de Zuroff, Koestner, Moskowitz, McBride & Ravitz (2005) démontre une bonne fidélité avec un alpha de Cronbach de .85 pour la motivation autonome et .84 pour la motivation contrôlée. Les deux échelles corrèlent significativement r (93) =.32, p <.01 (Annexe D). 38 3.5 Analyses statistiques D’abord, des analyses qualitatives quant aux fonctions auto-rapportées ont été effectuées. La classification des fonctions s’est effectuée de manière déductive en se basant sur les construits déjà suggérés par Nordbø et ses collaborateurs (2006) (voir détails de la classification, section 4.1). Suite à la catégorisation de ces fonctions et à leur codification dans une banque de données informatisées, des analyses quantitatives ont été réalisées à l’aide du logiciel SPSS (version 13.0). Des analyses descriptives (moyennes, écarts-types, corrélations) ont tout d’abord été réalisées sur l’ensemble des fonctions nommées par les participantes. Par la suite, des groupes ont été formés selon la fonction la plus endossée par chacune des participantes au cours des huit semaines. Lorsque deux fonctions étaient ex aequo pour une participante, le contenu était repris et analysé à l’aide de deux juges indépendants afin d’établir un accord interjuge pour décider laquelle semblait le plus se démarquer pour cette participante. C’est ainsi que chacune des participantes se voyait attribuer une fonction spécifique. Des analyses de variances (ANOVA) et des tests post-hoc (LSD) ont ensuite été effectués afin de déterminer s’il existe une différence significative entre chacune des fonctions en ce qui a trait au diagnostic et aux diverses variables dépendantes (sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, motivation au traitement, évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement). Le LSD (Least Significant Difference) est un test post-hoc développé par Fischer permettant d’explorer toutes les comparaisons de moyennes possibles, priorisé dans les analyses en raison de sa sensibilité. Pour effectuer les analyses évaluant les différences entre les groupes quant à l’évolution des symptômes et de la motivation, des deltas (différence entre deux temps de mesure) ont été créés afin de calculer la variation pour ces variables entre le début et la fin 39 du traitement. Enfin, une analyse factorielle de type exploratoire a été effectuée afin de vérifier la possibilité de regrouper certaines catégories de fonction. Une rotation varimax des axes a été exécutée pour obtenir une structure plus facile à interpréter. Comme la mesure de Kaiser-Meyer-Olkin obtenue indiquait un indice d’adéquation discutable (KMO=0.62), nous avons cherché à vérifier si la structure factorielle qui représente la relation entre nos variables pouvait tout de même s’avérer acceptable par le biais d’une analyse factorielle confirmatoire. Cette dernière analyse aura permis de juger de l’ajustement de notre structure aux données de notre échantillon. 40 Chapitre 4 Résultats 4.1 Classification des fonctions Dans un premier temps, le codage des fonctions auto-rapportées s’est effectué selon les huit construits de Nordbø et ses collaborateurs (2006) (sécurité, évitement, sentiment de pouvoir et de puissance, confiance, identité, prise en charge, communication, mort) permettant de vérifier la validité de cette classification dans notre échantillon. Pour ce faire, une description détaillée de chacun de ces thèmes a été utilisée (annexe E). Le tableau 1 résume chacune des fonctions. Il est à noter que le terme puissance a été utilisé au lieu de sentiment de pouvoir et de puissance afin d’alléger le texte. Les démarches de classification ont été inspirées d’un modèle proposé par TaylorPowell et Renner (2006). Tout d’abord, ce modèle suggère de prendre conscience de l’ensemble des données afin de s’y familiariser et d’organiser l’analyse en fonction du contenu. Cette étape permet de se familiariser avec les données en lien avec l’information recherchée. Après une lecture préliminaire des énoncés de l’échantillon, certaines spécifications ont été apportées aux définitions des fonctions conçues par Nordbø et ses collaborateurs (2006). Suite à un accord entre les juges, il semblait évident que certaines fonctions auto-rapportées par nos participantes concordaient aux catégories de fonctions même si elles n’étaient pas clairement définies dans la classification. Par exemple, les énoncés révélant le souhait de disparaître, de se faire toute petite pour ne pas déranger, de se punir ou tout ce qui a trait à l’automutilation, ont été codées comme la fonction Mort 41 même si le but de mourir n’a pas été spécifiquement nommé. Également, les participantes ayant répondu pratiquer des comportements alimentaires problématiques dans le but de combler un sentiment de vide ou d’ennui ou pour geler leurs émotions ont été incluses dans la catégorie évitement. Par la suite, Taylor-Powell et Renner (2006) proposent la catégorisation de l’information, effectuée ici en fonction de catégories prédéterminées (Nordbø & al., 2006) (tableau 1) par le biais de deux personnes indépendantes. Afin d’assurer l’uniformisation de la méthode de classification entre les juges, le processus a été expérimenté à deux reprises sur quinze participants. Un coefficient kappa de 0.91, correspondant à un accord inter-juge presque parfait, a été obtenu. De tous les énoncés, 79,68% ont pu être classifiées comme fonction. Tous les énoncés ne représentant pas une fonction psychologique ou n’étant pas assez précis pour permettre leur classification (ex : mon trouble me sert « à aimer la vie », « à être mince », « à passer le temps ») ont été rejetés et codés non-classifiables. Ensuite, toujours suivant le modèle de Taylor-Powell et Renner (2006), il a été possible d’identifier d’autres catégories émergeant des données. C’est ainsi que la présence de deux catégories supplémentaires répondant à une fonction psychologique, mais ne correspondant pas aux catégories définies par Nordbø et ses collaborateurs (2006), ont été répertoriées. Celles-ci ont été codées dans la catégorie autre. Elles incluaient le fait de vouloir répondre aux attentes, c’est-à-dire d’adopter les comportements dans le but de répondre aux attentes ou aux pressions de l’entourage, et la fonction de rébellion, où les participantes exprimaient par ces comportements leur souhait de se rebeller, de s’affirmer ou d’afficher leur mécontentement. Bien que ces catégories n’ont pas été représentées par assez de participantes pour être utilisées dans l’étude, il était possible de constater une certaine récurrence de ces réponses à travers les énoncés de notre 42 échantillon. Enfin, le modèle de Taylor-Powell et Renner (2006) propose d’analyser et d’interpréter l’ensemble des données de même que les relations entre les catégories d’information. Il s’agit alors de relever ce qui caractérise chaque catégorie, les liens possibles entre celles-ci et de réfléchir à la signification générale des résultats. Ces dernières étapes ont été effectuées à l’aide des analyses quantitatives. Cette première étape d’analyse a permis d’expérimenter la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) auprès de notre échantillon. L’accord inter-juge presque parfait (K = 0.91) et l’adhérence des fonctions de notre échantillon à cette classification (le taux de fonctions classifiables atteignant 79,68%), démontre la possibilité d’utiliser cette classification, et ce même avec des énoncés brefs auto-rapportés. 4.2. Endossement des fonctions par les participantes Par la suite, des analyses quantitatives ont été effectuées à l’aide du logiciel SPSS afin de répondre au deuxième objectif de l’étude. À chaque semaine et pour chaque fonction nommée, les participantes se voyaient attribuer le chiffre 1 dans une colonne identifiée à cet effet. Par exemple, si la participante répondait la première semaine utiliser ses comportements alimentaires pour fuir certaines situations difficiles, le chiffre 1 était inscrit dans la colonne "évitement semaine 1", sinon c’est le chiffre 0 qui apparaissait à l’endroit indiqué. L’endossement des fonctions par les participantes a été mesuré de deux façons. Le tableau 2 présente la moyenne de semaines où chaque fonction est rapportée par les participantes. Il est possible de constater, pour ce qui est de l’échantillon total, la prédominance de la fonction évitement, suivie de puissance, sécurité, mort, confiance, identité, prise en charge et communication. Également, chaque participante s’est vue attribuer une fonction prédominante, soit celle qu’elle avait nommé le plus souvent au 43 cours des huit semaines. Ainsi, le tableau 3 représente la catégorisation finale de nos participantes selon la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006). La fonction évitement a été identifiée le plus souvent, puis puissance, sécurité, mort, prise en charge et enfin confiance et identité. Aucune participante n’a endossé principalement la fonction communication. 4.2.1 Différences en fonction du diagnostic Des analyses de variances (ANOVA) ont été effectuées sur l’ensemble des fonctions endossées par les participantes dans le but d’évaluer la présence de différences selon le diagnostic. Ces analyses ont permis de constater que le groupe de personnes souffrant d’anorexie et celui souffrant de boulimie diffèrent significativement sur la fonction évitement, signifiant que les participantes souffrant de boulimie s’y identifient plus souvent, F (1, 79) = 9,137, р = .003 (tableau 2). Aucune autre différence significative n’a été relevée. Toutefois, en observant les fréquences obtenues pour chaque groupe de fonctions, il est possible de constater que les personnes boulimiques ont tendance à endosser en majeure partie la fonction d’évitement au détriment des autres fonctions, comparativement aux personnes anorexiques qui semblent s’identifier à une plus grande variété de fonctions, dont sécurité, puissance et mort (figure 1). Le tableau 2 montre quelques différences quant à l’ordre d’importance des fonctions rapportées selon le diagnostic. Suite aux fonctions évitement, puissance, sécurité et mort, ce sont, dans l’ordre, les fonctions identité, confiance, prise en charge et communication qui sont rapportées pour les personnes souffrant d’anorexie et confiance, communication, prise en charge et identité pour les personnes souffrant de boulimie. Lorsque l’on réfère à la fonction la plus endossée pour chaque participantes (tableau 3), les fonctions évitement, 44 puissance et sécurité sont les trois premières fonctions rapportées à la fois par les personnes souffrant d’anorexie et de boulimie. Les autres fonctions se distinguent par rapport au diagnostic. Ainsi, les personnes souffrant d’anorexie se caractérisent par la suite davantage par la fonction mort, puis identité et prise en charge ex aequo, et enfin confiance. Pour ce qui est des personnes souffrant de boulimie, ce sont les fonctions confiance, prise en charge et mort, avec des fréquences égales, qui sont rapportés par la suite. Aucune personne n’est caractérisée par la fonction identité. 4.3 Différences quant à la sévérité des symptômes, la motivation au traitement et leur évolution pendant le traitement Des ANOVAS et des tests post-hoc (LSD) ont été effectués afin de définir si les groupes caractérisés par les différentes fonctions diffèrent significativement entre eux en ce qui a trait à la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques (dépressifs et anxieux), à la motivation au traitement ainsi que par rapport à leur évolution au fil du traitement. Il est à noter que le groupe identité n’a pu être inclus dans l’analyse car il n’était représenté que par une seule participante et ne permettait donc pas d’être comparé à titre de groupe. Les résultats de l’ANOVA font ressortir des différences significatives entre les fonctions pour les symptômes dépressifs et sur la motivation (tableau 4). Les résultats montrent une différence significative entre les groupes pour les symptômes dépressifs, F (9, 72) = 3.375, p = .005. Plus spécifiquement, le groupe mort présente des symptômes dépressifs plus sévères que les groupes évitement (p = .011), puissance (p = .003), confiance (p = .043) et prise en charge (p = .004). Également, les groupes diffèrent significativement entre eux en ce qui a trait à la motivation au traitement, F (6, 72) = 2.242, p = .049. Les participantes du groupe sécurité sont moins motivées face au traitement que celles des groupes évitement (p 45 = .024) et prise en charge (p = .030). Il est à noter que les fonctions de sécurité et de puissance sont corrélées négativement avec la motivation au traitement (tableau 5). Plus une personne tend à endosser ces fonctions, moins elle montrerait de motivation en début de traitement. Aucune différence significative entre les groupes de fonction n’est relevée quant aux symptômes alimentaires et anxieux (tableau 4). Toutefois, en observant le tableau 4, il est possible de remarquer que ces symptômes tendent à être plus sévères pour les groupes de fonction mort et sécurité que pour les autres groupes. Le groupe de la fonction puissance, quant à lui, tend à montrer des symptômes anxieux moins sévères que les autres groupes de fonctions. Le tableau 5 fait également ressortir une corrélation positive entre la fonction mort et les symptômes anxieux, suggérant que plus une personne endosse cette fonction, plus elle présente des symptômes anxieux. Pour ce qui est de l’évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement, aucune différence significative n’a été relevée entre les groupes (tableau 4). Il est à noter que les données de 62 participants seulement ont alors pu être utilisées en raison de l’attrition au cours du traitement. 4.4 Regroupement de fonctions Des analyses de corrélation ont été effectuées sur l’ensemble des fonctions rapportées par les participantes. Celles-ci ont permis de constater certains liens entre les groupes de fonctions (tableau 6). Entre autres, les fonctions confiance, prise en charge et communication sont corrélées positivement entre elles, comme confiance, identité et puissance. Plus une personne endosse une de ces fonctions, plus elle endosse également les autres fonctions associées. L’observation de ces patrons de corrélations a mené à une analyse factorielle de type exploratoire afin d’évaluer la possibilité de regrouper nos 46 fonctions en construits plus larges. Trois facteurs ont été formés par cette analyse, comme suggéré par l’obtention de trois valeurs propres supérieures à 1 pour un pourcentage de variance expliquée de 62%. Les scores de saturation sont présentés dans le tableau 7. Les trois facteurs proposés par l’analyse factorielle ont été respectivement nommés évitement (sécurité et évitement), relationnel (confiance, prise en charge et communication) et narcissisme (puissance, mort et identité). Il est à noter que la fonction sécurité était également reliée aux variables du regroupement narcissisme. C’est à partir de notre jugement clinique que celle-ci fut regroupée avec la fonction évitement. Le lien sera approfondit dans la section Discussion. Un KMO discutable de 0.62 a été obtenu, référant à un faible indice d’adéquation entre les variables. Également, l’ANOVA effectuée sur ces nouvelles catégories ne laisse voir aucune différence significative entre les groupes quant aux symptômes, à la motivation et à leur évolution dans le temps. Malgré ces résultats peu concluants, l’analyse factorielle aura permis d’apprécier la possibilité de regrouper nos fonctions en trois nouvelles catégories qui se révèlent intéressantes d’un point de vu clinique. De plus, une analyse factorielle de type confirmatoire a par la suite été effectuée sur la nouvelle catégorisation à trois facteurs. Sans pouvoir être considéré comme excellent, les résultats de cette dernière permettent de constater un ajustement du modèle à nos données tout de même intéressant, χ² 23.77, p = 0.21; CFI = 0.88, RMSEA=0.055. C’est résultats nous incitent à considérer cette nouvelle structure proposée et à pousser notre réflexion clinique quant à la possibilité d’utiliser une telle catégorisation. 47 Chapitre 5 Discussion La présente étude avait pour objectif de mieux comprendre les fonctions psychologiques sous-tendant l’adoption de comportements alimentaires chez les personnes souffrant de TCA et d’étudier le lien avec le diagnostic, la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques (dépressifs et anxieux), la motivation au traitement et l’évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement. Pour ce faire, la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) a été reproduite auprès d’une population de 81 patientes souffrant d’anorexie mentale (46) et de boulimie (35) participant à un traitement intensif de type programme de jour. Le but était d’évaluer la validité de cette classification auprès de notre échantillon à l’aide d’énoncés auto-rapportés et d’étudier les différents profils cliniques associés aux fonctions. 5.1 Application de la classification de Nordbø et collaborateurs (2006) La présente étude a permis tout d’abord de confirmer la possibilité d’appliquer la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) à notre échantillon. Ces chercheurs, par le biais d’entrevues semi-structurées, centrées sur le patient et menées de manière interactive, ont pu approfondir et mieux saisir les fonctions psychologiques sous-jacentes aux comportements alimentaires pathologiques. Cette méthode a permis d’apprécier davantage la réalité des patientes et d’établir une classification à huit construits, cette dernière permettant de représenter l’ensemble des fonctions psychologiques rapportées dans les études portant sur le sujet. La présente étude a permis de reproduire la même 48 classification à l’aide d’énoncés auto-rapportés et ainsi de valider cette dernière à l’aide d’une méthode significativement moins longue et moins coûteuse. Les patientes n’avaient qu’à répondre à une simple question, « Quelles sont les fonctions de mon trouble des conduites alimentaires que j’ai identifiées cette semaine (à quoi me sert-il)? », et c’est à partir des réponses obtenues que nous avons pu reclasser les différentes fonctions. À cet effet, l’excellent accord inter-juge obtenu (K= 0.91) et l’adhérence des fonctions rapportées à la classification (79,68% des fonctions classifiables) assure la fidélité de l’instrument et montrent la possibilité d’utiliser cette classification auprès de notre échantillon, ajoutant un appui empirique à l’utilisation de celle-ci chez les personnes souffrant de TCA. Également, le recours à une définition exhaustive des fonctions lors de la classification a permis d’assurer un maximum de validité. De plus, certaines fonctions psychologiques distinctes et n’étant pas décrites par Nordbø et ses collaborateurs (2006) ont été nommées par les patientes de notre échantillon, notamment répondre aux attentes et de rébellion. Ces nouvelles fonctions ressortent aussi dans la littérature et il n’est donc pas surprenant de les retrouver parmi nos données. En effet, certains auteurs soulèvent la dépendance que présente souvent cette clientèle quant aux attentes des autres et la difficulté dont elles peuvent faire preuve à se définir autrement que par les autres (Ronze, Mamelle, Combe & Pugeat, 2010). Plusieurs de ces patientes ressentent un profond sentiment d’impuissance et d’inefficacité et se trouvent donc dépendantes des demandes externes. Entre autres, la discipline du corps leur donnerait l’impression d’être de bonnes filles qui tentent de convenir aux attentes parentales (Gabbard, 2000). Pour ce qui est de la rébellion, cette fonction peut être vue comme un moyen de communication, cependant plus agressif que ce qui est suggéré dans la grille de 49 Nordbø et ses collaborateurs (2006). En effet, il n’est pas rare de voir ces filles pratiquer ces comportements dans le but de s’opposer activement à leur famille ou aux demandes de leur entourage (Chassler, 1994; Gabbard, 2000). Gabbard (2000) explique que le refus de s’alimenter peut être vu comme un rejet face à une mère trop intrusive. Cette attitude provocante pourrait aussi permettre d’exprimer leur mécontentement face à certains désirs qu’elles ne pourraient assouvir. Ces nouvelles fonctions seraient intéressantes à investiguer dans de futures recherches sur le sujet. En lien avec nos résultats, il est possible de constater que les fonctions les plus fréquemment nommées par nos participantes, soit celles en lien avec l’évitement et les sentiments de puissance et de sécurité, sont également celles les plus souvent répertoriées dans les études antérieures (Nordbø & al., 2006; Serpell & al., 1999; Serpell & Treasure, 2002). En effet, dans la première étude de Serpell et al. (1999), ce sont les thèmes gardien et contrôle qui sont les plus souvent nommés dans les lettres écrites par les participantes, ceux-ci faisant référence aux enjeux des fonctions sécurité et puissance utilisés dans la présente étude. Dans l’étude de Serpell et Treasure (2002) portant sur une population souffrant de boulimie, le thème gardien est toujours celui le plus souvent répertorié, suivi de ceux d’évitement et de contrôle. Nordbø et ses collaborateurs (2006) ont également démontré l’importance de ces fonctions dans leur étude, où la majorité des participantes ont répondu se servir de leurs comportements alimentaires pour se procurer un sentiment de sécurité, éviter des stimuli aversifs et ressentir un sentiment de puissance. Également, comme Nordbø et ses collègues (2006) l’ont soulevé dans leur conclusion, nos résultats laissent voir que les fonctions confiance, prise en charge et communication sont fortement liées entre elles. À cet effet, Nordbø et ses collaborateurs 50 (2006) voyaient en ces construits un côté plus relationnel qui pourrait constituer un renforçateur social de la maladie. Suite à ce constat, il convenait de se questionner sur la possibilité de regrouper certaines fonctions, ce que nous avons voulu valider par le biais d’une analyse factorielle suivie d’une ANOVA. L’analyse factorielle permet de trouver la variance commune entre plusieurs variables et a donc permis de regrouper ici les différentes fonctions. C’est ainsi que trois regroupements de fonctions ont été relevés, lesquels ont été nommés évitement (sécurité et évitement), relationnel (confiance, prise en charge et communication) et narcissisme (puissance, mort et identité). Malgré le faible indice d’adéquation de la solution factorielle, les résultats obtenus de cette analyse nous ont permis de réfléchir à la signification et à l’implication clinique d’une telle catégorisation. Comme proposé par Nordbø et ses collaborateurs (2006), il est possible de déduire du groupe confiance-prise en charge-communication les aspects plus relationnels et sociaux qu’ils représentent. En effet, le comportement alimentaire semble alors en réaction à un besoin relationnel et d’affiliation, la maladie servant à attirer le regard de l’autre, l’attention de l’extérieur. Les fonctions sécurité et évitement semblent similaires de par l’évitement de stimuli aversifs. Sous le besoin excessif d’organiser et de structurer son quotidien, la personne qui répond à la fonction sécurité évite d’être en contact avec tout ce qui pourrait être imprévu ou surprenant, que ce soit au niveau des émotions, des relations ou du poids (Nordbø & al., 2006). Quant au groupe mort-puissance-identité, ces trois fonctions semblent liées par le fait qu’elle implique un certain narcissisme. À ce sujet, la littérature, davantage d’approche psychodynamique, soulève l’importance du narcissisme chez la clientèle souffrant de TCA, où les défenses et les blessures narcissiques s’exprimeraient à travers les habitudes alimentaires pathologiques et les préoccupations alimentaires et 51 corporelles (Lehoux, Steiger & Jabalpurawa, 2000; Sines, Waller, Meyer & Wigley, 2008; Waller, Sines, Meyer, Foster & Skelton, 2007; Steiger & Shaw, 1997; Steiger, Jabalpurawa, Champagne, Stotland, 1997). Selon certains auteurs, les TCA trouveraient leur origine au niveau de certains conflits développementaux, plus spécifiquement pendant la phase développementale caractérisée par l’égocentrisme et le développement du narcissisme chez l’enfant, occasionnant une faible estime de soi, un sentiment d’incompétence et d’inefficacité (Johnson, 1991). Pour remédier à ce sentiment d’insatisfaction et pour rétablir leur estime personnelle, le narcissisme serait investi dans l’image corporelle et le contrôle alimentaire. Bref, le contrôle sur son corps et sur la nourriture et la poursuite de la perfection permettraient de pallier artificiellement au sentiment d’inefficacité, le contrôle interne se voulant comme une tentative de contrôle sur le monde externe (Chassler, 1994; Gabbard, 2000; Johnson, 1991; Vitousek & Ewald, 1993). À ce propos, Gabbard (2000) appuie l’idée que c’est en développant une autodiscipline de leur corps que ces personnes développeraient un certain sentiment d’efficacité et d’individualité. Devenir le plus mince possible leur donnerait ainsi l’impression d’être quelqu’un d’unique et spécial (Gabbard, 2000; Johnson, 1991) et d’affirmer leur indépendance (Vitousek & Ewald, 1993), d’où la fonction identité. Les symptômes du TCA, comme la perte de poids, permettraient la construction d’un soi fort et puissant et d’acquérir ainsi un sentiment de fierté, d’accomplissement, de supériorité et de contrôle (Vitousek & Ewald, 1993), tel que le suggère la fonction de puissance. À l’extrême, en réaction à ces sentiments de vulnérabilité et d’inefficacité, les comportements alimentaires peuvent même être utilisés de façon masochiste (Lerner, 1991), comme le veut la fonction mort. À ce moment, l’impression de n’avoir pu assouvir ses besoins développementaux créerait une frustration intense et des 52 fantaisies de contrôle omnipotent et destructeur. N’ayant pu développer une identité intégrée, le clivage devient un mécanisme de défense permettant de pallier à l’image non intégrée des relations d’objet où la personne tend à idéaliser la figure maternelle et soutenir une image de soi toute mauvaise. Comme les sentiments négatifs envers la mère sont inconcevables, les pulsions agressives sont retournées vers soi et assouvies par les comportements alimentaires autodestructeurs, comme la restriction alimentaire ou les crises de boulimie. Cette position, où la personne se trouve devant la possibilité de choisir sa destinée, c’est-à-dire de vivre ou de mourir, procurerait une gratification intense en permettant à la personne d’expérimenter un sentiment de toute-puissance (Lerner, 1991). Bref, cela suggère la possibilité de regrouper ces fonctions en trois catégories plus larges représentant des enjeux liés à l’évitement (sécurité et évitement), au besoin d’affiliation (confiance, prise en charge et communication) et au narcissisme (mortpuissance-identité). Malgré l’intérêt clinique suscité par ces regroupements de fonctions représentant des enjeux psychologiques plus larges de la maladie, la faible valeur du KMO issue de l’analyse factorielle ne permet pas de valider ces nouveaux regroupements. Toutefois, les résultats de l’analyse factorielle confirmatoire permette de penser qu’une étude plus poussée sur ces variables, qui impliquerait un plus grand nombre de participants, pourrait permettre de valider l’utilisation d’une telle catégorisation. À cet effet, il est suggéré de recourir à un échantillon d’un minimum de 100 participants et d'avoir un ratio de 10 sujets par variable insérée dans l'analyse (Hair & al., 1998). Également, l’ANOVA en lien avec l’analyse factorielle n’a pas permis de trouver de différence significative entre les groupes. Il arrive que ces catégories de fonction nouvellement regroupées montrent des profils 53 symptomatologiques opposés. Par exemple, la fonction mort suggère la présence de symptômes dépressifs et anxieux les plus sévères de l’échantillon (M = 45.60 et 33.60) comparativement à la fonction puissance qui est l’une des fonctions montrant les symptômes cliniques les moins sévères (M = 24.70 et 15.10). C’est ainsi que, bien que les nouvelles catégories formées par cette analyse soient représentées par davantage de participantes que pour les huit fonctions de départ, aucune différence significative n’a été répertoriée entre les groupes quant à la sévérité des symptômes et la motivation au traitement. Il serait intéressant d’étudier ce lien plus en profondeur. 5.2 Lien entre la classification et le type de diagnostic En lien avec le diagnostic, comme il était attendu dans notre étude, certaines fonctions sont plus fortement rattachées à une pathologie alimentaire particulière. En effet, comme la littérature le suggère, il semble que l’utilisation des comportements alimentaires pour apaiser ou éviter les états internes aversifs (comme pour la fonction évitement) rejoint davantage la population boulimique (Abraham & Beumont, 1982; Costorphine & al., 2006; Deaver & al., 2003; Heatherton & Baumeister, 1991; Kaye, Gwirtsman, George, Weiss & Jimerson, 1986; McManus & Waller,1995; Milligan & Waller, 2000; Lee & Miltenberger, 1997; Steinberg, Tobin & Johnson, 1989; Stickney & Miltenberger, 1998; Waller, Quinton & Watson, 1994). Plusieurs études font état de cette fonction de régulation émotionnelle où chaque étape du cycle suralimentation-purgation aurait en soi une fonction particulière. Les comportements de compulsion alimentaire serviraient à satisfaire la sensation de faim (Arnow, Kenardy & Agras, 1992; McManus & Waller, 1995), mais aussi à éviter ou à réduire temporairement les états affectifs négatifs, tels que l’anxiété, la colère, l’irritabilité, l’humeur dépressive et l’ennui (Deaver & al., 2003; Heatherton & Baumeister, 1991; Kaye, 54 Gwirtsman, George, Weiss & Jimerson, 1986; McManus & Waller,1995; Milligan & Waller, 2000; Steinberg, Tobin & Johnson, 1989; Stickney & Miltenberger, 1998; Waller, Quinton & Watson, 1994). Le fait de manger procurerait un sentiment de bien-être et de détente (Deaver & al., 2003) et permettrait en plus de changer le focus attentionnel des affects négatifs vers un stimulus externe, la nourriture (Heatherton & Baumeister, 1991). Plus spécifiquement, Lee et Miltenberger (1997) proposent, suite à un relevé de littérature, que la compulsion alimentaire servirait généralement à réguler les tensions, soulager la dysphorie et fuir une conscience de soi aversive. Quant à la purgation, celle-ci permettrait au sujet de réduire l’anxiété et la colère, d’augmenter le bien-être et le soulagement suite à l’inquiétude éprouvée face au fait d’avoir trop mangé (Costorphine & al., 2006; Milligan & Waller, 2000; Kaye, Gwirtsman & al., 1986). Bref, il n’est pas étonnant de constater dans notre étude également le lien entre les comportements boulimiques et l’évitement des émotions aversives. Bien qu’aucune autre différence significative n’ait été relevée entre les groupes pour les autres fonctions, les enjeux davantage liés à la puissance, au contrôle et à la maîtrise de soi (comme le suggèrent les fonctions sécurité et puissance) sont davantage représentés par les participantes souffrant d’anorexie, tel que rapporté aussi dans la littérature (Serpell & al., 1999; Nordbø & al., 2006; Vitousek & Ewald, 1993). Il n’est pas étonnant de constater de tels résultats lorsqu’on tient compte des perspectives étiologiques d’approche davantage psychodynamique. En effet, celles-ci suggèrent que l’adoption de comportements restrictifs permettrait de pallier une faible estime de soi, le contrôle de l’alimentation et du corps permettant la construction d’un soi fort et puissant et d’acquérir 55 un sentiment d’accomplissement (Chassler, 1994; Gabbard, 2000; Vitousek & Ewald, 1993). 5.3 Liens entre la classification, la sévérité des symptômes, la motivation au traitement et leur évolution pendant le traitement Pour ce qui est des différences entre les catégories de fonctions et la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, il est possible de constater que les participants du groupe mort tendent à se distinguer des autres groupes. Bien que les résultats montrent des différences significatives pour les symptômes dépressifs seulement, il est possible de constater que les participantes caractérisées par cette fonction tendent à montrer également des symptômes alimentaires et anxieux plus sévères que les autres groupes de fonction. D’autres auteurs confirment également l’importance du lien entre les symptômes dépressifs et anxieux et la pratique de comportements autodestructeurs issus des TCA (Lehoux, Steiger & Jabalpurlawa, 1999). Comme cette fonction suggère la présence d’aspects plutôt agressifs et autodestructeurs, sous-tendus par un besoin de contrôle omnipotent (Lerner, 1991), il n’est pas étonnant de constater un profil pathologique plus sévère. D’un autre côté, il est possible de croire que, pour une partie de ces patientes adoptant ces comportements dans le but de mourir, celles-ci ressentent moins d’attachement ou d’intérêt envers la vie et sont alors davantage susceptibles de se laisser sombrer dans la maladie. Quant à la motivation au traitement, les résultats démontrent que les fonctions sécurité et puissance sont associées à une motivation moins élevée en début de traitement. À cet effet, des auteurs confirment que ce sont généralement les personnes présentant ce genre de profil, c’est-à-dire davantage en lien avec le contrôle, la maîtrise de soi et 56 conséquemment la restriction alimentaire, qui se montrent également moins volontaires au traitement (Vitousek, Watson & Wilson, 1998). Les symptômes alimentaires étant alors de nature plus égosyntones (en quoi ils leur permettent d’atteindre un idéal, d’obtenir le sentiment d’être meilleure et d’assurer un équilibre), ces personnes seraient plus susceptibles de nier leurs symptômes et seraient moins intéressées à abandonner ces comportements alimentaires et leur routine de vie qui leur permettent d’atteindre une vision idéalisée de soi. Elles montreraient conséquemment davantage de résistance aux traitements (Vitousek, Watson & Wilson, 1998). 5.4 Limites de l’étude Bien que les données qualitatives s’avèrent une source riche d’information, les analyses de celles-ci restent sujettes à la subjectivité des chercheurs. Dans le présent projet, le fait que les juges avaient à classer les fonctions selon une grille pré-établie sur la base d’un seul énoncé impliquait le jugement clinique et se trouvait donc sujet à l’interprétation. En effet, comme l’information recueillie dans la présente étude provient d’une seule question répondue sur papier, les données ne permettent pas toujours d’avoir accès à l’information nécessaire pour bien classer chaque participante. Les énoncés sont parfois peu élaborés et il pouvait s’avérer difficile de cibler une seule fonction ou de départager entre deux. Toutefois, plusieurs précautions ont été utilisées dans l’étude afin d’assurer un maximum d’objectivité, de validité et de fidélité. En effet, les différentes fonctions ont été définit de façon détaillée avant de procéder à la classification. Plusieurs juges indépendants et ayant une expérience clinique significative avec les TCA (entre deux et cinq ans) ont 57 aussi participé à la classification des fonctions. Enfin, une attention particulière a été accordée à l’obtention d’un accord inter-juges acceptable. Également, bien que notre échantillon s’avérait plus grand que dans les autres études de ce genre, certaines catégories de fonction ont été endossées par très peu de participantes (ex : identité), parfois même aucune (ex : communication). Par conséquent, certains groupes ont dû être exclus des analyses. Le fait que certains groupes soient représentés par un petit nombre de participantes nuit à la puissance en empêchant de mettre en évidence certaines différences significatives qui auraient pu ressortir des analyses. Notamment, le tableau 4 montre de grandes différences entre les groupes de fonctions au niveau des symptômes alimentaires, de l’ordre de 20 points entre les fonctions Prise en charge et Mort. Cet écart suggère une différence importante d’un point de vue clinique même si le seuil de signification statistique n’est pas atteint. Il en est de même pour les symptômes anxieux, où les fonctions Mort et Puissance montrent un écart de 18.5 points, et pour l’évolution de la motivation au fil du traitement, où l’on observe un écart de 13.67 points entre les fonctions Mort et Confiance. Il est donc possible de penser que les résultats de notre étude ne reflètent pas tout à fait la réalité clinique et que plus de différences statistiquement significatives auraient été mises en évidence si les catégories avaient été représentées par davantage de participantes. Certaines informations manquantes concernant les caractéristiques de l’échantillon auraient pu être intéressantes à considérer pour notre étude. Certaines caractéristiques, notamment l’âge, le milieu socio-économique et le niveau d’éducation, auraient puent influencer les réponses des participantes. Par exemple, il est possible de penser qu’une personne en début d’âge adulte vive des enjeux de vie différents qu’une personne plus âgée 58 et utilise ses comportements alimentaires pour des raisons autres. Prenons l’exemple d’une jeune femme quittant la maison familiale pour les études, qui vivrait beaucoup d’insécurité face à cette nouvelle situation et qui se donnerait une structure alimentaire rigide pour obtenir une impression de contrôle sur son environnement. Dans le même sens, des niveaux d’éducation largement différents pourraient influencer les réponses à la question sur les fonctions. Une personne plus éduquée pourrait, par exemple, répondre de façon plus élaborée et mieux transmettre ses états internes sur papier. Bref, il aurait pu être intéressant de comparer les fonctions de notre échantillon sur ces variables. Enfin, il importe d’ajouter comme limite à l’étude l’effet possible de l’intervention. Comme le traitement est propice à une meilleure compréhension de leurs mécanismes psychologiques, il est possible que les réponses des participantes tout au long de l’étude aient été teintées par les interventions reçues. Toutefois, bien que les interventions soient susceptibles d’influencer le discours manifeste des clientes, il est à noter qu’aucune intervention ne ciblait spécifiquement le travail sur les fonctions du trouble alimentaire. 5.5 Implications théoriques et pratiques de l’étude Malgré les limites, la présente étude comporte de nombreuses implications théoriques et pratiques. Tout d’abord, d’un point de vue théorique, la présente étude s’inscrit dans la continuité de ce qui a été fait à ce jour et apporte de nouveaux éléments susceptibles d’ajouter aux connaissances déjà recensées. Plus précisément, notre étude s’est intéressée au lien entre les catégories de fonction et plusieurs variables n’ayant jamais été étudiées jusqu’à maintenant (sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, motivation 59 au traitement, évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement), permettant de mettre en évidence certaines fonctions plus susceptibles d’être associées à des difficultés dans le traitement des TCA. L’étude se veut également signifiante de par les caractéristiques de son échantillon. D’une part, l’échantillonnage s’est fait à plus grande échelle que dans les études précédentes, avec un échantillon de 81 participantes. Pour obtenir une telle taille d’échantillon, la collecte de données s’est effectuée sur une période de quatre ans. D’autre part, l’échantillon est composé de patientes anorexiques et boulimiques, lesquelles sont généralement étudiées séparément. L’étude simultanée de ces deux populations a permis de comparer les profils psychologiques respectifs en lien avec les différentes fonctions à l’étude. Enfin, le présent projet entre dans un champ novateur où la perspective des patientes est prise en compte et mise en avant-plan. En effet, l’intérêt envers le rapport subjectif des patientes face à leur maladie, semble être une perspective en recrudescence ces dernière années (Fox, Larkin & Leung, 2010; Higbed & Fox, 2010). D’un côté pratique, cette étude a permis de valider la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) et de renforcer les appuis empiriques qui justifient l’application d’une classification aux TCA (McManus & Waller, 1995; Nordbø & al.,2006; Serpell & al.1999; Serpell & Treasure, 2002; Vitousek & Ewald, 1993). Elle met en lumière la possibilité de considérer ce trouble au-delà des comportements alimentaires pathologiques. Comme énoncé précédemment dans l’étude, les TCA sont davantage considérés en fonction des critères du DSM-IV, c’est-à-dire diagnostiqués de façon déductive selon des comportements observables et mesurables, sans tenir compte du contexte et de la dynamique de l’individu. Conséquemment, les traitements en vigueur visent principalement la diminution des symptômes alimentaires. Plusieurs auteurs jugent cette vision des 60 troubles en santé mentale comme étant trop restreinte, investissant les symptômes au détriment de la trajectoire développementale (Andersson et Ghaderi, 2006). Selon eux, les troubles proposés dans le DSM pourraient être vus comme des symptômes plutôt que comme des syndromes. En ce sens, d’autres auteurs suggèrent la possibilité de considérer les TCA comme la manifestation d’une carence sous-jacente (Chassler, 1994; Gabbard, 2000; Johnson, 1991). Selon eux, les TCA trouveraient leur origine au niveau de certains conflits développementaux, qui troubleraient le processus du développement identitaire et de l’autonomie. Ils soulignent entre autres le développement d’un style d’attachement insécure résultant d’une relation mère-fille inadéquate (par exemple une mère centrée sur ses propres besoins plutôt que sur ceux de son enfant ou encore une relation fusionnelle où l’enfant n’apprend pas à développer son autonomie). Le sentiment d’inefficacité et le besoin de contrôle occasionnés seraient palliés ultérieurement au travers les comportements alimentaires (Chassler, 1994; Gabbard, 2000; Johnson, 1991). C’est ainsi que certains auteurs croient que des alternatives au DSM-IV devraient être étudiées afin d’axer davantage l’évaluation sur l’exploration des facteurs psychologiques de développement et de maintien afin de permettre une vision plus éclairée de la psychopathologie et de guider les stratégies d’intervention en ce sens (Andersson & Ghaderi, 2006; Fairburn, 2008). Jusqu’à maintenant, seulement une partie de la clientèle souffrant de TCA bénéficie des traitements en cours et plusieurs personnes ne connaissent qu’une rémission partielle des symptômes (Keel & Hersog, 2004; Keel & Mitchell, 1997). Le travail auprès des fonctions proposées dans cette étude semble être une perspective intéressante à envisager dans l’approche thérapeutique avec cette clientèle. Nordbø et ses collaborateurs (2006) soulignent que les patientes décrivent elles-mêmes les fonctions de leur maladie comme 61 facteurs précipitants, de développement et de maintien de leur trouble. Il semble donc possible de croire que l’ajout d’interventions en lien avec ces fonctions aux traitements déjà existants s’avère une piste d’évaluation et de traitement intéressante. D’ailleurs, plusieurs auteurs soulignent l’importance d’adopter une approche plus intégrative avec cette clientèle (Thompson-Brenner, Weigerof & Westen, 2009 ; Vitousek, Watson & Wilson, 1998), comme par l’ajout de composantes motivationnelles ou psychodynamiques aux traitements cognitivo-comportementaux existants. En effet, comme les fonctions décrites semblent parfois trouver leur origine au niveau du lien d’attachement et des relations d’objet perturbées (Gabbard, 2000; Johnson, 1991), un travail plus près de ces composantes par l’entremise de l’interprétation du transfert et du contre-transfert semble une perspective intéressante (Kathryn & Zerbe, 2001). En fait, Kathryn et Zerbe (2001) soulignent l’importance d’explorer les avenues développementales de la maladie et d’aider les patientes à mieux comprendre l’origine de leurs difficultés, les conflits intrapsychiques et les patrons dysfonctionnels associés. Les enjeux psychiques étant rejoués dans la relation thérapeutique, le thérapeute est à même de les soulever avec la patiente et de l’assister dans l’interprétation et l’expérimentation de ses affects. De plus, comme cette clientèle se montre généralement réticente face à la thérapie et présente des résistances importantes au changement (Campbell, 2009; Zerbe, 2007), plusieurs auteurs affirment qu’un travail plus près des fonctions de la maladie avec les patientes permettrait d’augmenter la motivation et l’adhérence au traitement (Nordbø & al., 2006, Thompson-Brenner, Weigerof & Westen, 2009 ; Vitousek, Watson & Wilson, 1998). L’exploration des fonctions auprès de la cliente permet, d’une part, une meilleure compréhension du thérapeute quant à la signification des symptômes actuels, et d’autre 62 part, d’augmenter la prise de conscience pour la patiente des processus sous-tendant la présence du trouble et du contexte dans lequel il s’inscrit. Faire verbaliser la patiente sur l’importance qu’elle accorde à sa maladie, sur ce qu’elle retire des symptômes, permet à celle-ci de se sentir comprise et, conséquemment, de développer le climat de confiance nécessaire à l’investissement en thérapie (Thompson-Brenner, Weigerof & Westen, 2009; Vitousek, Watson & Wilson, 1998). Kathryn et Zerbe (2001) soulignent l’importance de créer un environnement sécurisant pour permettre à ces patientes de partager leur expérience personnelle et d’exprimer les affects reliés. Orienter le traitement sur des aspects autres que la diminution des comportements alimentaires et la reprise de poids se veut aussi moins menaçant et permet de diminuer les résistances envers le traitement. Bref, l’intégration de diverses stratégies thérapeutiques (notamment motivationnelle et psychodynamique) en lien avec les fonctions proposées semble une perspective de traitement intéressante lorsque des patientes se montrent résistante au traitement ou lorsque les symptômes alimentaires persistent. L’importance accordée au contexte dans lequel le trouble s’inscrit contribue au développement de l’alliance thérapeutique et permet de diminuer les résistances et d’augmenter les motivations face au processus de traitement. Dans ce contexte, la classification de fonctions proposées par Nordbø et ses collaborateurs (2006) se veut un outil clinique intéressant pour guider les thérapeutes dans l’investigation des valeurs attribuées par la patiente à ses symptômes. Les résultats de l’étude permettent de constater des différences quant au profil clinique des patientes selon la fonction qu’elles attribuent à leur trouble, permettant de soulever des pistes de réflexion quant à l’évaluation de cette clientèle et à la possibilité d’ajuster nos interventions cliniques en ce sens. L’évitement des émotions ou situations 63 aversives est ressorti dans l’étude comme une des fonctions les plus importantes dans ces troubles, particulièrement pour les personnes souffrant de boulimie. Ainsi, il semble opportun auprès de cette clientèle d’adopter des stratégies de traitement visant la gestion émotionnelle. Dans ce contexte, les traitements d’orientation cognitivo-comportementale, dont l’efficacité est déjà démontrée auprès de la population souffrant de boulimie (Agras, Walsh, Fairburn, Wilson, & Kraemer, 2000; Fairburn & Harrison, 2003; NCCMH, 2004; Roth & Fonagy, 2005; Wilson, Fairburn, Agras, Walsh & Kraemer, 2002; Wilson, Grilo & Vitousek, 2007), semblent indiqués. Une partie de ces traitements est effectivement destinée à l’apprentissage de stratégies permettant à ces patientes d’arriver à mieux gérer leurs états émotionnels et tolérer la détresse. D’un autre côté, certains auteurs proposent également l’utilisation de stratégies psychodynamiques pour travailler cet aspect (Kathryn & Zerbe, 2001), ce qui pourrait s’avérer une avenue intéressante avec les patientes ne répondant pas à la TCC. Selon Kathryn et Zerbe (2001), comme l’expérience de la douleur émotionnelle ressentie est difficile à porter pour ces patientes, des mécanismes de défense, comme le déni, le clivage, la dissociation, l’identification projective et le refoulement, sont utilisés pour éviter de vivre la souffrance interne. Par conséquent, il importe de créer un environnement contenant et validant permettant aux patientes d’être à l’aise de partager leurs expériences personnelles et d’explorer ce qu’elles expriment par leur trouble. Par le biais de la relation thérapeutique, les souvenirs reliés à ces émotions, les affects troublants, les patrons de relations dysfonctionnelles et les conflits intrapsychiques sous-jacents pourront être explorés, expérimentés et interprétés avec elles (Kathryn & Zerbe, 2001). Également, la fonction de puissance étant plutôt reliée aux personnes souffrant d’anorexie, il convient alors de trouver des stratégies plus adaptées en ce sens pour ce type 64 de clientèle. Une approche axée davantage sur l’exploration de ce besoin de pouvoir et de maitrise de soi, pour mieux en comprendre l’origine et ces conséquences, pourrait être envisagée. En effet, comme la littérature le suggère, ce besoin semble trouver ses racines tôt durant l’enfance au niveau du lien avec les figures d’attachement qui troublerait les représentations de soi et des autres (Chassler, 1994, Gabbard, 2000; Johnson, 1991). Comme les relations d’objet et les patrons relationnels sont touchés, ces personnes pourraient bénéficier de stratégies de traitement autres que celles visant l’amélioration des symptômes alimentaires seulement. Entre autres, certains types de psychothérapie psychodynamique, telle que la thérapie focalisée sur le transfert (TFP), ou des stratégies thérapeutiques inspirées des schémas affectifs de Young permettraient de travailler directement en thérapie les conflits dans la représentation de soi et des autres, les mécanismes de défense utilisés et les patrons de relations dysfonctionnels. Ainsi, la cliente pourrait prendre conscience, explorer et mieux comprendre ses conflits internes liés aux enjeux de puissance, ses conséquences, les mécanismes de défense qu’elle utilise et les patrons dysfonctionnels qu’elle tend à répéter dans sa vie relationnelle (Young, Klosko & Weishaar, 2003). Comme Nordbø et ses collaborateurs (2006) le mentionnent dans leur article, le construit mort montre l’ampleur de la sévérité que peut prendre le trouble. La présente étude démontre effectivement une symptomatologie alimentaire et clinique plus sévère pour ces patientes. Être sensibilisé à l’importance de cette fonction et être en mesure de la cibler efficacement, permettrait de pouvoir prévenir précocement des conséquences importantes pour ces personnes. En effet, cette fonction sous-tend des fantaisies punitives et d’autodestruction importantes, où les comportements alimentaires pratiqués dans un but 65 automutilatoire peuvent aller jusqu’à la mort. Il apparaît alors particulièrement important que le thérapeute soit sensibilisé à ce genre de raisons favorisant l’adoption de ces comportements alimentaires pour ainsi procéder à une évaluation et un traitement judicieux de la dangerosité. Enfin, bien que les résultats ne soient pas significatifs, l’idée de regrouper ces fonctions en plus grands groupes pourrait s’avérer une avenue intéressante à étudier pour les prochaines études. En effet, certaines fonctions sont fortement liées entre elles, semblant représenter des enjeux plus larges. De plus, il est rare que les participantes n’identifient qu’une seule fonction à leur comportement. Regrouper celles-ci en catégories plus vastes représentant l’enjeu principal sous-jacent permettrait de considérer non seulement une fonction spécifique aux comportements pathologiques, mais d’apprécier l’ensemble de la dynamique de l’individu. Au terme de ce projet, il semble évident que ces fonctions peuvent contribuer au travail clinique auprès de cette clientèle. Ainsi, il pourrait s’avérer pertinent d’élaborer un outil permettant aux cliniciens d’explorer plus facilement les fonctions sous-jacentes au trouble dans l’évaluation des patientes. Personne à ce jour ne semble s’être penché spécifiquement sur un questionnaire permettant de mieux connaître les fonctions psychologiques des comportements alimentaires. C’est ainsi qu’un questionnaire autorapporté inspiré de la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) et des données recueillies dans cette étude a été élaboré et est proposé dans le présent mémoire doctoral (annexe F). Toutefois, celui-ci ne se veut qu’une ébauche et ne s’appuie sur aucune 66 méthodologie scientifique. Il serait intéressant que de futures études s’attardent à la validation d’un tel instrument. Conclusion Les TCA touchent une proportion considérable de la population occidentale actuelle et sont associés à de nombreuses conséquences physiques et psychologiques (Agence de la santé publique du Canada, 2002; APA, 2000; Bulik & al., 2005; Hudson & al., 2007; Klein & Walsh, 2003; Simon, Schmidt & Pilling, 2005). Bien qu’il soit reconnu que de multiples facteurs sont en cause dans le développement des TCA (Aimé & Bégin, 2007; Garner, 1993; Garner & Gerborg, 2004), ils sont la plupart du temps évalués et traités principalement selon les symptômes alimentaires apparents (NCCMH, 2004). Toutefois, cette clientèle se montre particulièrement réticente au traitement (Campbell 2009) et une part importante des patientes (autour de 50 %) ne vivent qu’une rémission partielle des symptômes ou connaissent un parcours chronique de la pathologie (Keel & Hersog, 2004; Keel & Mitchell, 1997). Dernièrement, des auteurs se sont penchés vers une vision davantage subjective et individualisée de ces troubles, cherchant à mieux comprendre les raisons pour lesquelles ces personnes adoptaient ces comportements alimentaires pathologiques (Nordbø, Espeset, Gulliksen, Skårderud & Holte, 2006; Serpell & al., 1999; Serpell & Treasure, 2002). Selon eux, une meilleure compréhension de la signification du trouble pour la personne et du contexte développemental dans lequel il survient permettrait de mieux adapter les traitements pour cette clientèle. C’est dans ce contexte que certains 67 auteurs se sont intéressés aux fonctions psychologiques auto-rapportées associées au trouble. À ce jour, quelques classifications en lien avec ces fonctions ont été développées, dont celle de Nordbø et ses collaborateurs (2006) qui s’avère, de par ses qualités méthodologiques, particulièrement intéressante. Le présent mémoire doctoral avait donc pour objectif de valider la possibilité d’utiliser cette classification auprès de notre échantillon. Un deuxième objectif visait à étudier les liens entre ces catégories de fonctions et le type de diagnostic, les symptômes alimentaires et cliniques (dépressifs et anxieux), la motivation au traitement et l’évolution des symptômes et de la motivation à travers le traitement. Pour ce faire, un feuillet de questionnaires auto-rapportés a été administré de façon hebdomadaire à 81 femmes participant à un programme de jour pour le traitement des TCA. Celui-ci comprenait des questionnaires sur les symptômes alimentaires (EAT-26), cliniques (BDI-II, BAI) et sur la motivation au traitement (Questionnaire sur la motivation au traitement). De plus, les fonctions étaient évaluées grâce à une question ouverte : « Quelles sont les fonctions de mon trouble des conduites alimentaires que j’ai identifiées cette semaine (à quoi me sert-il)? ». La présente étude a permis de répliquer la classification de Nordbø et ses collaborateurs (2006) auprès d’un large échantillon composé de 81 patientes présentant un diagnostic d’anorexie ou de boulimie. L’application de celle-ci a été validée à l’aide de brefs énoncés, une méthode qui se veut plus rapide et moins couteuses que celles habituellement utilisées. Suite aux analyses qualitatives, il était possible d’observer un taux de fonctions classifiables de 79,68% ainsi qu’un excellent accord inter-juge de 0.91. De plus, les résultats démontrent que certaines fonctions sont reliées au diagnostic, à la sévérité des symptômes et à la motivation au traitement. Les patientes présentant un diagnostic de 68 boulimie s’identifient davantage à la fonction évitement que celles souffrant d’anorexie, F (1,79) = 9,137, p = .003, suggérant que cette clientèle utilise plus souvent leurs comportements alimentaires dans le but de gérer les émotions aversives. De plus, le groupe mort tend à montrer un profil clinique plus sévère que les autres catégories de fonction, particulièrement pour ce qui est des symptômes dépressifs, F (9,72) = 3.375, p = .005. Enfin, certains groupes de fonctions tendent à montrer moins de motivation que les autres groupes en début de traitement, F (6,72) = 2.242, p = .049, tel que le groupe de fonctions sécurité. Ces résultats montrent que les groupes de fonctions présentent des profils cliniques différents, suggérant la possibilité d’ajuster nos stratégies de traitement en conséquence. Le présent projet a permis d’apprécier une autre perspective concernant les TCA, où ceux-ci sont non seulement considérés comme une maladie avec ses symptômes physiques et médicaux, mais comme possédant une signification psychologique pour les personnes en souffrant. Considérant l’importance des fonctions psychologiques reliées à ces comportements alimentaires problématiques et les différents profils cliniques soulevés dans l’étude, il pourrait s’avérer intéressant d’utiliser ces fonctions comme pistes d’évaluation et d’intervention auprès de cette clientèle. À cet effet, le questionnaire proposé pourrait s’avérer un outil clinique intéressant pour les thérapeutes afin de faciliter l’investigation de ces fonctions auprès des patientes. Références Abraham, S., & Beumont, P. J. V. (1982). 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Évitement Les comportements alimentaires permettent l’évitement des émotions et des expériences négatives ainsi que l’évitement de la complexité des relations sociales, la maladie lui permettant de se centrer uniquement sur des aspects comme le corps, le poids et la nourriture. La personne n’aurait à ce moment plus le temps et l’énergie pour se concentrer sur les autres sphères plus complexes et interactionnelles de leur vie. « Gérer mes malaises, mes émotions » « À combler l’ennui » « À ne pas prendre mes responsabilités » 3. Sentiment de pouvoir et de puissance En contrôlant l’absorption de nourriture et en perdant du poids, elle développerait un sentiment de pouvoir et de puissance, de maîtrise, de contrôle de soi et d’invulnérabilité. « Me donne le sentiment d’être forte » « À me sentir plus confiante » 4. Confiance Le fait de perdre du poids lui procurerait de la confiance en lui permettant de se sentir belle et admirée, ce qui est renforcé par l’environnement. « À ce que les autres aient une image positive de moi » « Me sentir davantage désirable » 83 « Pour être différente » « Pour devenir quelqu’un d’autre » « Devenir la petite fille parfaite que mes parents attendent de moi » 5. Identité Le trouble permet de se créer une identité. Les changements physiques qu’apporte la maladie changent la perception que la personne a d’elle-même et lui donnent l’impression d’avoir une personnalité différente, qui serait meilleure et plus attirante. 6. Prise en charge Le fait de recevoir l’attention des proches ou de sentir leur inquiétude quant à la perte de poids permettrait à ces filles de se sentir aimées et de combler un besoin de prise en charge. « À être plus proche de ma mère, il y a plus de soutien et de complicité entre nous deux » « Me sert à avoir de l’attention, de l’affection » 7-Communication La présence de la maladie a pour fonction de communiquer leurs difficultés aux autres, étant donné qu’elles en sont incapables autrement ou se sentent incomprises. « me sert à exprimer ma colère » « à exprimer ma détresse et mon malêtre » 8-Mort Ces comportements alimentaires expriment leur désir de disparaître en se privant de manger jusqu’à la mort. « à disparaître » « me punir » « me détruire » 84 Tableau 2 Moyennes et écarts-types du nombre de semaines où la fonction est endossée dans l’échantillon total et selon leur diagnostic Échantillon total Anorexie Boulimie Fonctions M(ET) M(ET) M(ET) F ________________________________________________________________________ Sécurité 1.11 (1.440) 1.13 (1.544) 1,00 (1.188) 0.172 Évitement 3.12 (2.192) 2,59 (1.733) 4,00 (2.473) 9.137** Puissance 1.49 (1.929) 1,78 (2.170) 1,14 (1.556) 2.185 Confiance 0.52 (1.146) 0,52 (1.090) 0,57 (1.267) 0.036 Identité 0.46 (0.898) 0,59 (1.024) 0,31 (0.718) 1.805 Prise en charge 0.43 (1.245) 0,48 (1.378) 0,40 (1.117) 0.075 Communication 0.33 (0.986) 0,28 (0.911) 0,43 (1.119) 0.419 Mort 0.62 (0.986) 0,65 (1.402) 0,63 (1.003) 0.007 Non-classifiable 1.69 (1.742) 1,87 (1.984) 1,57 (1.399) 0.573 Autre 0.43 (0.896) 0,50 (0.960) 0,34 (0.838) 0.593 ________________________________________________________________________ Notes. *р < .05, ** р < .01 85 Tableau 3 Fréquences en pourcentage du nombre de participantes endossant chaque groupe de fonction de l’échantillon total et selon le diagnostic Fonctions Échantillon total Anorexie Boulimie (N=81) (n=46) (n=35) ____________________________________________________________ Sécurité 9,5 10,9 5,7 Évitement 42,9 30,4 62,9 Puissance 13,1 15,2 11,4 Confiance 2,4 2,2 2,9 Identité 2,4 4,3 0 Prise en charge 3,6 4,3 2,9 Communication 0 0 0 Mort 6,0 8,7 2,9 Non-classifiable 19,0 21,7 11,4 Autre 1,2 2,2 0 ____________________________________________________________ 86 Tableau 4 Moyennes des symptômes alimentaires et cliniques, de la motivation au traitement et de leur évolution pour chaque groupe de fonction pour l’échantillon total Sécurité (n=8) Évitement (n=36) Puissance (n=11) Confiance (n=2) Identité (n=1) Prise en charge (n=3) Mort (n=5) Nonclassifiable (n=16) Autre (n=1) F EAT-26 43.17 35.89 40.30 39 - 34 54.60 36.14 - 1.686 BDI 35.67 30.33 24.70 24.5 - 19.33 45.60 23.93 - 3.375** BAI 32.17 22.50 15.10 20.50 - 18.33 33.60 21.57 - 1.524 Motivation 19.33 23.83 23.60 25 - 26.67 19.8 25.86 - 2.242* ΔEAT-26 -9.33 -19.13 -20.78 2 - -20 -12 -19.72 - 0.456 ΔBDI -9.67 -8.84 -11.33 -8 - -11 -7 -9.91 - 0.379 ΔBAI -12 -8.87 -7 3 - -17.5 -7 -14.18 -1.33 1.39 1.11 -7 - -0.5 6.67 0.81 ΔMotivation Notes. *р < .05, ** р < .01 1.103 - 1.875 87 Tableau 5 Coefficients de corrélation de Pearson entre les fonctions identifiées par les participantes et la sévérité des symptômes alimentaires et cliniques, la motivation au traitement et leur évolution Sécurité Évitement Puissance Confiance Identité Prise en charge Communication Mort NonClassifia ble Autre EAT-26 .095 -.052 .153 .088 .061 .041 .006 .198 .094 .065 BDI .073 .034 -.099 -.163 -.014 -.070 -.119 .315** .044 -.073 BAI .139 .041 -.175 .002 .031 .011 .046 .328** .100 -.056 -.249* .115 -.241* .073 -.006 .123 .129 -.028 -.077 .090 ΔEAT-26 .147 .039 .077 .048 .241 .008 .063 .181 .024 .238 ΔBDI -.060 .157 -.003 .027 .109 .066 .038 .238 .126 .225 ΔBAI -.001 .114 .246 -.022 .091 -.127 -.142 .050 -.059 .253* ΔMotivation -.034 -.013 .077 -.169 -.218 -.140 -.121 .069 .082 -.076 Motivation Notes. *р < .05, ** р < .01 88 Tableau 6 Coefficients de corrélation de Pearson entre les fonctions Fonctions 1. Sécurité 2.Évitement 1 - 2 3 4 5 6 7 8 9 10 -.028 .175 -.010 .150 -.040 .080 -.129 .202 -.026 - -.071 -.062 -.072 .144 .151 .059 -.140 .026 - .275* .317** .040 .127 -.142 .094 .172 - .276* .437** .599** -.158 .076 .012 - .164 .204 -.193 -.080 .236* - .775** .015 .002 -.028 - -.010 .052 .040 - .158 -.184 - -.007 3. Puissance 4. Confiance 5. Identité 6. Prise en charge 7. Communication 8. Mort 9. Non-classifiable 10. Autre Notes. *р < .05, ** р < .01 - 89 Tableau 7 Les catégories de fonctions et leur score de saturation Fonctions Évitement Relationnel Narcissisme _________________________________________________________________________ Sécurité ,55 -,16 ,57 Évitement ,81 ,16 -,22 Puissance ,02 ,12 ,69 Confiance -,22 ,74 ,31 Identité -,04 ,24 ,66 Prise en charge ,12 ,88 -,06 Communication ,16 ,91 -,08 Mort ,15 ,04 -,54 _________________________________________________________________________ 90 70 60 50 40 30 20 10 0 Anorexie Boulimie Sé cu Év rité ite Pu m e i s nt sa n C on c e fi a nc Pr e I de is e e nt C n c ité om h m arg un e ic at io N n on -c M la ss ort ifi ab le Au t re Fréquence (%) Figure 1 Fonctions Figure 1 : Fréquences en pourcentage des catégories de fonction selon le diagnostic 91 Annexe A EAT26 Code : ________ Numéro du sujet :_____________________________ Date d’observation :___________________________ Veuillez, s’il vous plaît, cocher une réponse pour chacune des questions suivantes : 1. Je suis terrifié-e à l’idée d’être trop gros-se. 2. J’évite de manger quand j’ai faim. 3. Je suis trop soucieux-se de la nourriture. 4. J’ai eu des épisodes de gloutonnerie durant lesquels je me sentais incapable d’arrêter de manger. 5. Je découpe mes aliments en petits morceaux. 6. J’ai conscience de la valeur calorique des aliments que je mange. 7. J’évite spécialement les aliments riches en hydrates de carbone (pain, pommes de terre, riz). 8. Je sens que les autres aimeraient mieux que je mange davantage. 9. Je vomis après avoir mangé. 10. Je me sens très coupable après avoir mangé. 11. Le désir d’être plus mince me préoccupe. 12. Quand je me dépense physiquement, il me vient à l’idée que je brûle des calories. 13. Les autres pensent que je suis trop mince. 14. Je suis préoccupé-e d’avoir de la graisse sur le corps. 15. Je prends plus de temps que les autres à prendre mes repas. 16. J’évite de manger des aliments sucrés. 17. Je mange des aliments diététiques. 18. J’ai l’impression que la nourriture domine ma vie. 19. Je parle volontiers de mes capacités à contrôler mon alimentation. 20. Je sens que les autres me poussent à manger. Toujours Très souvent Souvent Parfois Rareme nt Jamais 92 Veuillez, s’il vous plaît, cocher une réponse pour chacune des questions suivantes : 21. J’accorde trop de temps et je pense trop à la nourriture. 22. Je me sens mal à l’aise après avoir mangé des sucreries. 23. Je m’oblige à me mettre à la diète. 24. J’aime avoir l’estomac vide. 25. J’aime essayer des aliments nouveaux et riches. 26. Je ressens le besoin de vomir après les repas. Toujours Très souvent Souvent Parfois Rareme nt Jamais 93 Annexe B BDI-II Date d’observation : ___________________ année / mois / jour No du sujet ___________________________ Âge __ Sexe M F Situation de famille marié(e) divorcé(e) séparé(e) vivant maritalement veuf(ve) célibataire Profession____________________________ Niveau d’études ___________ Consigne : Ce questionnaire comporte 21 groupes d’énoncés. Veuillez lire avec soin chacun de ces groupes puis, dans chaque groupe, choisissez l’énoncé qui décrit le mieux comment vous vous êtes senti(e) au cours des deux dernières semaines, incluant aujourd’hui. Encerclez alors le chiffre placé devant l’énoncé que vous avez choisi. Si, dans un groupe d’énoncés, vous en trouvez plusieurs qui semblent décrire également bien ce que vous ressentez, choisissez celui qui a le chiffre le plus élevé et encerclez ce chiffre. Assurez-vous bien de ne choisir qu’un seul énoncé dans chaque groupe, y compris le groupe n o 16 (modifications dans les habitudes de sommeil) et le groupe n o 18 (modifications de l’appétit). 1 Tristesse 0 1 2 3 2 Pessimisme 0 Je ne suis pas découragé(e) face à mon avenir. 1 Je me sens plus découragé(e) qu’avant face à mon avenir. 2 Je ne m’attends pas à ce que les choses s’arrangent pour moi. 3 J’ai le sentiment que mon avenir est sans espoir et qu’il ne peut qu’empirer. 3 Perte de plaisir 0 J’éprouve toujours autant de plaisir qu’avant Sentiments de culpabilité 0 Je ne me sens pas particulièrement coupable. 1 Je me sens coupable pour bien des choses que j’ai faites ou que j’aurais dû faire. 2 Je me sens coupable la plupart du temps. 3 Je me sens tout le temps coupable. 6 Sentiment d’être puni(e) 0 1 2 3 7 Je n’ai pas le sentiment d’être puni(e). Je sens que je pourrais être puni(e). Je m’attends à être puni(e). J’ai le sentiment d’être puni(e). Sentiments négatifs envers soi-même 0 Mes sentiments envers moi-même n’ont pas changé. 1 J’ai perdu confiance en moi. 2 Je suis déçu(e) par moi-même. 3 Je ne m’aime pas du tout. Échecs dans le passé 0 Je n’ai pas le sentiment d’avoir échoué dans la vie, d’être un(e) raté(e). 1 J’ai échoué plus souvent que je n’aurais dû. 2 Quand je pense à mon passé, je constate un grand nombre d’échecs. 3 J’ai le sentiment d’avoir complètement raté ma vie. 4 5 Je ne me sens pas triste. Je me sens très souvent triste. Je suis tout le temps triste. Je suis si triste ou si malheureux(se), que ce n’est pas supportable. 8 Attitude critique envers soi 0 Je ne me blâme pas ou ne me critique pas plus que d’habitude. 1 Je suis plus critique envers moi-même que je ne l’étais. 2 Je me reproche tous mes défauts. 3 Je me reproche tous les malheurs qui arrivent. 94 aux choses qui me plaisent. 1 Je n’éprouve pas autant de plaisir aux choses qu’avant. 2 J’éprouve très peu de plaisir aux choses qui me plaisaient habituellement. 3 Je n’éprouve aucun plaisir aux choses qui me plaisaient habituellement. 9 Pensées ou désirs de suicide 0 Je ne pense pas du tout à me suicider. 1 Il m’arrive de penser à me suicider, mais je ne le ferais pas. 2 J’aimerais me suicider. 3 Je me suiciderais si l’occasion se présentait. Sous-total, page 1 10 Pleurs 0 1 2 3 Je ne pleure pas plus qu’avant. Je pleure plus qu’avant. Je pleure pour la moindre petite chose. Je voudrais pleurer mais je n’en suis pas capable. 11 Agitation 0 Je ne suis pas plus agité(e) ou plus tendu(e) que d’habitude. 1 Je me sens plus agité(e) ou plus tendu(e) que d’habitude. 2 Je suis si agité(e) ou tendu(e) que j’ai du mal à rester tranquille. 3 Je suis si agité(e) ou tendu(e) que je dois continuellement bouger ou faire quelque chose. 12 Perte d’intérêt 0 Je n’ai pas perdu d’intérêt pour les gens ou pour les activités. 1 Je m’intéresse moins qu’avant aux gens et aux choses. 2 Je ne m’intéresse presque plus aux gens et aux choses. 3 J’ai du mal à m’intéresser à quoi que ce soit. 13 Indécision 0 Je prends des décisions toujours aussi bien qu’avant. 1 Il m’est plus difficile que d’habitude de prendre des décisions. 2 J’ai beaucoup plus de mal qu’avant à prendre des décisions. 3 J’ai du mal à prendre n’importe quelle décision. 14 Dévalorisation 0 Je pense être quelqu’un de valable. 1 Je ne crois pas avoir autant de valeur ni être aussi utile qu’avant. 2 Je me sens moins valable que les autres. 3 Je sens que je ne vaux absolument rien. Verso 16 Modifications dans les habitudes de sommeil 0 Mes habitudes de sommeil n’ont pas changé. _______________________________________ 1a Je dors un peu plus que d’habitude. 1b Je dors un peu moins que d’habitude. _______________________________________ 2a Je dors beaucoup plus que d’habitude 2b Je dors beaucoup moins que d’habitude. _______________________________________ 3a Je dors presque toute la journée. 3b Je me réveille une ou deux heures plus tôt et je suis incapable de me rendormir. 17 Irritabilité 0 1 2 3 Je ne suis pas plus irritable que d’habitude. Je suis plus irritable que d’habitude. Je suis beaucoup plus irritable que d’habitude. Je suis constamment irritable. 18 Modifications de l’appétit 0 Mon appétit n’a pas changé _______________________________________ 1a J’ai un peu moins d’appétit que d’habitude. 1b J’ai un peu plus d’appétit que d’habitude. _______________________________________ 2a J’ai beaucoup moins d’appétit que d’habitude. 2b J’ai beaucoup plus d’appétit que d’habitude. _______________________________________ 3a Je n’ai pas d’appétit du tout. 3b J’ai constamment envie de manger. 19 Difficulté à se concentrer 0 Je parviens à me concentrer toujours aussi bien qu’avant. 1 Je ne parviens pas à me concentrer aussi bien que d’habitude. 2 J’ai du mal à me concentrer longtemps sur quoi que ce soit. 3 Je me trouve incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. 20 Fatigue 0 Je ne suis pas plus fatigué(e) que d’habitude. 1 Je me fatigue plus facilement que d’habitude. 95 15 Perte d’énergie 0 J’ai toujours autant d’énergie qu’avant. 1 J’ai moins d’énergie qu’avant. 2 Je n’ai pas assez d’énergie pour pouvoir faire grand-chose. 3 J’ai trop peu d’énergie pour faire quoi que ce soit. 2 Je suis trop fatigué(e) pour faire un grand nombre de choses que je faisais avant. 3 Je suis trop fatigué(e) pour faire la plupart des choses que je faisais avant. 21 Perte d’intérêt pour le sexe 0 Je n’ai pas noté de changement récent dans mon intérêt pour le sexe. 1 Le sexe m’intéresse moins qu’avant. 2 Le sexe m’intéresse beaucoup moins maintenant. 3 J’ai perdu tout intérêt pour le sexe. Sous-total, page 2 Sous-total, page 1 Score total 96 Annexe C BAI No du sujet : ___________ Date d’observation : ___________________________________ Voici une liste des symptômes couramment associés à l’anxiété. Veuillez lire attentivement chaque item de la liste. Indiquez, en inscrivant un X dans la case appropriée, à quel point vous avez été incommodé(e) par chacun de ces symptômes au cours DE LA DERNIÈRE SEMAINE, Y COMPRIS AUJOURD’HUI. Pas du tout 1. Sensations d’engourdissement ou de picotement. 2. Bouffées de chaleur. 3. Tremblements dans les jambes (jambes molles). 4. Incapable de se détendre. 5. Craindre que le pire ne survienne. 6. Étourdissements ou faiblesses. 7. Palpitations ou cœur qui bat fort. 8. Chancelant(e) ou manque d’assurance. 9. Terrifié(e). 10. Nerveux(se). 11. Sensations d’étouffement. 12. Mains qui tremblent. 13. Avoir des tremblements. 14. Crainte de perdre le contrôle. 15. Difficulté à respirer. 16. Peur de mourir. 17. Être effrayé(e). Légèrement Modérément Fortement Cela ne m’a pas beaucoup dérangé(e) C’était très déplaisant mais supportable Je pouvais à peine le supporter. 97 18. Indigestions ou malaises abdominaux. 19. S’évanouir. 20. Avoir la face qui rougie. 21. Transpiration (qui n’est pas due à la chaleur). 98 Annexe D Questionnaire sur le traitement : Thérapie pour les troubles des conduites alimentaires Numéro du sujet : __________________________________ Date d’observation : ________________________________ Il y a une variété de raisons pour lesquelles les personnes participent à un traitement pour leur trouble alimentaire. S’il vous plaît, veuillez lire les énoncés suivants et indiquez à quel point vous êtes en accord ou en désaccord avec chacune des raisons en utilisant l’échelle fournie. S’il vous plaît, veuillez inscrire vos réponses directement sur la feuille réponse. JE PARTICIPE À CETTE THÉRAPIE PARCE QUE 1 Très en désaccord 2 3 Modérément Légèrement en désaccord en désaccord 4 Neutre 5 Légèrement en accord 6 Modérément en accord 7 Très en accord 1. Les autres personnes seraient fâchées après moi si je ne le faisais pas. 1 2 3 4 5 6 7 2. Je crois personnellement que c’est l’aspect le plus important de mon rétablissement. 1 2 3 4 5 6 7 3. Gérer mon trouble alimentaire me permet de participer à d’autres aspects importants de ma vie. 1 2 3 4 5 6 7 4. Je veux que les autres voient que je peux suivre mon traitement. 1 2 3 4 5 6 7 5. J’ai choisi de faire du traitement pour les troubles alimentaires une partie importante de ma vie hebdomadaire. 1 2 3 4 5 6 7 6. J’aurais honte de moi-même si je ne le faisais pas. 1 2 3 4 5 6 7 7. Je désire surtout que mon thérapeute pense que je suis une bonne patiente. 1 2 3 4 5 6 7 8. Je me sens personnellement satisfaite lorsque je suis mon traitement pour mon trouble alimentaire. 1 2 3 4 5 6 7 9. Je me sentirais coupable si je ne faisais pas ce que mon thérapeute me dit. 1 2 3 4 5 6 7 10. J’ai bien réfléchi à propos du traitement pour mon trouble alimentaire et je crois que c’est la chose la plus importante que je peux faire pour me sentir mieux. 1 2 3 4 5 6 7 11. Recevoir un traitement pour les troubles alimentaires est un choix important que veux vraiment faire pour devenir bien. 1 2 3 4 5 6 7 12. Je ne veux pas que les autres personnes soient déçues de moi. 1 2 3 4 5 6 7 © D. C. Zuroff, R. Koestner, & D. S. Moskowitz, 2003. Adapté de Williams, Freedman, & Deci (1998). Traduction et adaptation par M. Aubut et M. Grassia, 2005, Programme des troubles alimentaires, Hôpital Douglas. 99 Annexe E Classification décrite par Nordbø, Espeset, Gulliksen, Skårderud et Holte (2006) (traduction libre) 1-Sécurité Le construit sécurité inclut les énoncés décrivant les comportements alimentaires comme une façon d’obtenir un sentiment de stabilité et de sécurité. Les comportements anorexiques aident les personnes à structurer leur vie de tous les jours en s’imposant plusieurs règles et en planifiant leurs journées. En organisant leurs journées par le moyen de règles et d’horaires rigides, elles peuvent parvenir à un sentiment que leur vie est structurée, ce qu’elles n’auraient jamais connu avant. Sans ce sentiment de structure, elles se sentent confuses et désorganisées et deviennent effrayées de gagner du poids. Souvent, les participantes décrivent ce construit en termes de ce qu’elles pourraient perdre si elles guérissaient de leur anorexie. Les comportements alimentaires représentent une sorte de sécurité en quoi ils permettent un sentiment de prédictibilité. Elles sont toujours à l’affût de ce qui pourrait arriver et recherchent donc un sentiment de stabilité et de certitude dans leur vie. Le construit sécurité se distingue de celui d’évitement de par son orientation davantage cognitive et proactive. L’évitement est plutôt vu comme une fonction plus émotionnelle et de nature défensive. 2-Évitement Le trouble est un moyen d’éviter les émotions et les expériences négatives. Les patientes rapportent l’évitement des sentiments désagréables, des problèmes relationnels et des attentes élevées quant à leur performance. Plusieurs participantes lient cet évitement au fait de se sentir en sécurité, d’autres comme une façon de résoudre leurs problèmes. Certaines parlent de la pression qu’elles ressentent quant à la façon dont elles doivent vivre leur vie. Les participantes peuvent avoir le sentiment qu’elles doivent prendre « la bonne décision » dans plusieurs sphères de leur vie (incluant l’éducation et l’apparence). Bien performer dans leur vie devient une pression énorme. Ces participantes ont beaucoup d’attentes envers elles-mêmes, mais elles ressentent également la pression venant de leurs famille et amis. Elles se sentent conséquemment tristes, seules et en colère. Quand toute leur attention est 100 portée sur le corps, le poids et la nourriture, il leur reste peu d’énergie pour se concentrer sur les autres difficultés et problèmes. 3- Sentiment de pouvoir et de puissance Le trouble est vu comme une façon d’obtenir un sentiment interne de pouvoir et de puissance. Comme les participantes sont capables de perdre du poids, elles font l’expérience d’une sensation interne de force. Celle-ci peut être sentie comme un fort sentiment de pouvoir. Les personnes sentent qu’elles atteignent un sens de la maîtrise et de contrôle de soi. Garder une diète stricte est décrite comme un combat. Toutefois, lorsqu’elles réussissent, elles ressentent un sentiment interne de force et d’invulnérabilité. Comparativement au construit confiance où les personnes cherchent à valider leur valeur personnelle à travers le regard de l’autre, cette fonction met l’emphase sur le sentiment interne de puissance. 4-Confiance Le trouble est une façon de se sentir digne de compliments et de reconnaissance. Perdre du poids permet aux personnes de se sentir mieux envers elles-mêmes. Elle se sent élégante, belle et accomplie, ce qui est confirmé par l’environnement. Recevoir des compliments par rapport à leur apparence de la part des autres augmente leur sentiment de confiance en elle. Comparativement à la fonction Sentiment de pouvoir et de puissance, ce construit inclut les énoncés exprimant l’augmentation de la confiance en soi basée sur le regard positif de la part de l’environnement. Les participantes rapportent généralement que la rétroaction positive de l’entourage quant à leur apparence et à leur performance est davantage importante lors de la perte de poids initiale. Plusieurs d’entre elles affirment ne plus recevoir ces compliments par la suite et ressentent toujours une faible confiance en soi. 5-Identité Le trouble les aide à se créer une identité ou une personnalité différente. L’identité réfère ici au concept de soi inné, continu et subjectif qui différencie un individu des autres. Le trouble permet aux participantes de changer la perception qu’elles ont d’elles-mêmes. Avant le trouble, elles peuvent se caractériser comme sévères, déplaisantes ou 101 invulnérables. Comme elles perdent du poids, elles sentent qu’elles deviennent une personne différente. Maintenant, elles peuvent se sentir davantage féminines, ascétiques, vulnérables ou fragiles. Elles estiment que ces changements sont positifs. En comparaison aux fonctions sentiment de pouvoir et de puissance et confiance, ce construit met l’emphase sur le sentiment de changement et de devenir différent. Il inclut le fait d’avoir l’impression de se débarrasser d’une ancienne identité. Elles se trouvent loin de la personne qu’elles étaient. Elles sont devenues meilleures et plus aimables. 6-Prise en charge Le trouble permet de recevoir les soins et l’attention de l’entourage. Comme elles perdent beaucoup de poids, les gens autour d’elles expriment leurs préoccupations. Plusieurs participantes exprimaient le manque qu’elles ressentaient quant à ce besoin, et de comment leur maladie leur ont permis de l’obtenir. Comparativement à la rétroaction reçue de l’entourage décrite dans la fonction confiance, ce construit inclut l’expérience de l’attention interprétée comme un signe de préoccupation. Quand les gens autour se montrent inquiets par rapport à la perte de poids, cela devient un signe qu’ils sont attentionnés. Les participantes ne l’interprètent pas seulement comme leur permettant d’être au centre de l’attention, mais comme le fait que l’entourage est attentif à leurs besoins, prévenant, faisant preuve de considération et de bonté. Le trouble leur permet de se sentir aimées et de sentir qu’on prend soin d’elles, ce qu’elles n’avaient pas connu avant. 7-Communication Le trouble permet de communiquer leurs difficultés aux autres personnes. La plupart des participantes n’essaient pas de recevoir quelque chose de spécifique de leur entourage, comme l’attente de soins décrit dans la fonction prise en charge ou des compliments dans la fonction confiance. Ce construit est limité à celles décrivant leur trouble comme un moyen de communiquer qu’elles sont en difficulté. Ces patientes affirment qu’elles ont des problèmes qu’elles ne savent pas comment exprimer à leur famille et à leurs amis. Plusieurs avaient ce sentiment depuis longtemps. Le trouble leur permet de sentir que les autres sont devenus conscients qu’elles ont actuellement un problème. Elles se sentent incomprises par 102 les gens autour d’elles. Le trouble les aide à communiquer, et leur entourage réalise qu’elles avaient des difficultés. 8-Mort La restriction alimentaire est pratiquée dans le but de se priver de manger jusqu’à la mort (un tiers de ces participantes rapporteraient avoir fait des tentatives de suicide. Certaines décrivent des épisodes dépressifs antérieurs et affirment que le souhait de mourir était là avant de développer ces symptômes alimentaires. D’autres affirment avoir développé des signes de dépression après l’adoption de comportements anorexiques. Elles décrivent le trouble comme l’expression concrète de leur désir de disparaître. Elles ne veulent pas vivre plus longtemps. Elles peuvent ressentir qu’elles n’ont pas le droit de vivre ou que leur vie est insupportable. Il arrive qu’elles considèrent la restriction comme une façon moins brutale de mourir qui suscite moins l’attention de l’entourage. 103 Annexe F QUESTIONNAIRE AUTO-RAPPORTÉ Fonctions du trouble des conduites alimentaires À quoi me sert mon trouble alimentaire? Veuillez cocher la case correspondant le mieux à ce que vous vivez. Mon trouble alimentaire me sert à : Jamais Fonctions Sécurité Assurer une routine dans mon quotidien en prévoyant ce que je mange. Suivre certaines habitudes, règles ou horaires. Y déroger me créer de l’anxiété. Établir une stabilité dans ma vie et assurer l’absence de prise de poids. Évitement Éviter de ressentir certaines émotions que je trouve difficiles. Éviter d’avoir à vivre certaines situations que je trouve difficiles. Éviter de devenir un(e) adulte. Puissance Me sentir puissant(e) et invulnérable. Développer une maîtrise et un contrôle de moi. Me distinguer des autres, à me sentir meilleur(e) qu’eux. Confiance Être beau/belle aux yeux des autres. Être admiré(e) par les autres. Attirer l’attention des autres. Identité Me créer une nouvelle identité. Me sentir unique ou spéciale. Avoir une personnalité différente, meilleure. Prise en Sentir l’inquiétude de mes proches. charge Que l’on s’occupe de moi. Me sentir aimé(e) par mes proches. Communi- Pour que les autres voient que je souffre. cation À exprimer ce que je ressens. À communiquer que j’ai besoin d’aide. Mort Me faire toute petite, disparaître aux yeux des autres. Me punir. Mourir. Rébellion Me rebeller. M’opposer ou m’affirmer. Me venger. Répondre Satisfaire aux attentes des autres. aux Sentir que l’on est fier de moi. attentes À ne pas décevoir les autres. Parfois La plupart du temps Constamment