Management stratégique opérationnel du sponsoring sportif 1

Université Lyon 1 – UFR STAPS –M1MOS
Alain FERRAND ©
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Management stratégique opérationnel du
sponsoring sportif
1er chapitre
L’évolution du sponsoring : conception, principes
stratégiques et opérationnels.
Au cours des 30 dernières années le sponsoring a profondément évolué, tant au niveau
stratégique qu’au niveau opérationnel. L’analyse de l’évolution de cette pratique nous a
permis d’identifier trois périodes. Le sponsoring a été dans un premier temps conçu
comme une technique de communication qu’il s’agissait d’intégrer au mieux dans la
stratégie de communication des entreprises. Dans un second temps les entreprises ont
cherché à exploiter les synergies entre leur stratégie de sponsoring et les autres variables
du marketing mix et d’assurer le meilleur retour sur investissement possible. Actuellement
il s’agit de conjuguer cette stratégie d’intégration du sponsoring dans les différentes
stratégies de l’entreprise et d’autre part d’exploiter au mieux les synergies. Nous sommes
entré dans l’ère de l’activation de la marque du sponsor auprès des différentes cibles de
l’entreprise. L’analyse de cette évolution nous permettant de comprendre les fondements
du sponsoring ainsi que sa dynamique. Cela nous permettra de mieux maîtriser les enjeux
stratégiques et opérationnels.
1. Les années 80: le sponsoring apparaît comme une technique de
communication par l’action originale qu’il convient d’intégrer à la
stratégie de communication de l’entreprise.
Les années 80 sont marquées par le développement rapide des événement sportifs
soutenu par une exposition croissante dans les médias. De nombreuses entreprises se
sont impliquées dans des opérations de sponsoring afin de se démarquer des modes de
communication traditionnels, pour développer une relation de proximité avec leurs cibles,
valoriser leur image de marque et leur notoriété (UDA, 1986). Le marché du sponsoring
connaît une croissance très importante. Toutes les organisations sportives : fédérations,
clubs, organisateurs d’événement recherchent des sponsors. Ceux qui n’ont pas encore
découvert le sponsoring comme mode de financement de leur activités vont le découvrir
rapidement. Ces dernières sont surtout préoccupées de vendre leurs produits et ne sont
pas encore entré dans une démarche marketing. N’ayant pas analysé les attentes des
sponsors et conçu une stratégie permettant de les satisfaire, ces organisations ont déçu
beaucoup de leur clients. Certaines organisations n’ont pas la moindre idée de la façon
dont elles doivent approcher et négocier avec les sponsors. De même qu’elles ne savent
pas quelle type de service leur délivrer. Elle procèdent souvent par imitation.
Ainsi après une phase d’enthousiasme, les décideurs se sont posés la question de
l’efficacité, de la sélection et de l’efficacité de ces opérations.
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Le sponsoring est perçu comme une technique de communication et les responsables se
posent des questions relatives à la gestion et a l’exploitation du sponsoring. Il s’agit d’une
période « pédagogique » au cours de laquelle les acteurs cherchent à légitimer ce moyen
de communication et a rationaliser leur stratégie.
1.1. Les fondements stratégiques du sponsoring
Saporta (1985) souligne la difficulté que l'on rencontre pour définir le sponsoring en raison
de l'extrême variété des situations qui caractérisent ce type d'opération. Néanmoins, la
plupart des auteurs qui l'ont défini en témoignant de leur propre expérience dans ce
domaine, ont privilégié un des aspects de cette technique de communication. Dans ce
contexte très éclaté, nous allons aborder le sponsoring à partir de ses trois principaux
fondements : un moyen de communication, une association d'une entreprise avec un
événement sportif ou culturel et une relation économique entre le sponsorisé et le
sponsor. Nous dépasserons ensuite le point de vue strictement opérationnel, qui est
souvent celui de l'entreprise, pour chercher à comprendre ses mécanismes d'action.
1.1.1 : Une association d'une entreprise avec un événement sportif ou un sportif ou une
équipe portée par les événements sportifs.
Le sponsoring est fondé sur la notion d'association ou de liaison. Celle-ci est présente
dans la plupart des définitions et notamment dans les trois que nous avons choisies. Ainsi,
Sahnoun (1986, p. 30) le considère comme "un outil de communication permettant de lier
directement une marque ou une société avec un événement attractif pour un public
donné". Selon Piquet (1985, p. 14), il "désigne une technique de communication
particulière, mise en oeuvre par un annonceur1 et qui vise à associer sa marque dans
l'esprit des consommateurs à un événement sportif ou culturel". Le rapport anglais Howell
(1983, p. 2) considère, quant à lui, que le sponsoring constitue un "support par une
personne ou organisation étrangère à cette action d'un sport, d'un événement sportif,
d'une organisation sportive ou d'un participant à une compétition, pour le bénéfice mutuel
des deux parties".
1.1.1.1. L’événement en tant que fait social fournit l’énergie à ce système
Ces définitions mettent en évidence la grande diversité des combinaisons possibles dans
le sponsoring. Cependant c’est l’événement qui fournit l’énergie à ce système. Il est
susceptible d’avoir un impact fort sur des groupes sociaux comme en témoigne son
étymologie. En effet, le terme d'événement est issu du latin "eventus" qui signifie ce qui
est venu, ce dont l'arrivée affecte plus ou moins une personne ou une communauté
humaine. Se situant dans cette perspective Piquet (1985) considère qu'un "événement est
avant tout un fait social fort, un lieu des hommes et des femmes se rassemblent dans
une sorte de célébration collective pour assister à un spectacle sportif ou culturel. Celui-ci
est subjectivement perçu comme la possibilité de réaliser un exploit". Quel serait l’impact
des sportifs, des équipes et d’un sport sans événement ?
1 Le terme d'annonceur est en usage dans le monde publicitaire français. Dans le champ
du sponsoring celui-ci peut être assimilé à celui de sponsor.
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Figure 1 : L’événement en tant de point de focalisation de l’attraction du public
L’événement sportif a un ancrage socio-culturel possédant une identité qui lui est propre.
Ces faits sociaux particuliers que constituent les spectacles sportifs ont été étudiés
notamment par Bourdieu (1977), Pociello (1983), Bromberger, Hayot et Mariottini (1987).
Ces derniers ont analysé le spectacle sportif comme un objet de consensus relatif, mais
surtout comme un support de différenciation et un véhicule de valeurs et de
représentations sociales. Bourdieu (1977, p. 246) considère que "le système des pratiques
et des spectacles sportifs qui s'offrent à un moment donné du temps au choix des
consommateurs potentiels est comme prédisposé à exprimer toutes les différences
sociologiquement pertinentes à ce moment : opposition des sexes, opposition entre les
classes. Il suffit aux agents de s'abandonner aux penchants de leur habitus pour
reprendre à leur compte, sans même le savoir, l'intention immanente aux pratiques
correspondantes, de s'y retrouver eux mêmes tout entiers, tout en y retrouvant aussi tous
ceux qui s'y retrouvent, leurs pareils". Cet habitus est commun aux membres d'un groupe
qui ont généralement le même type d'expérience. Selon Bromberger, Hayot et Mariottini
(1987), les propriétés différenciées mises en scène par le spectacle sportif
prédisposeraient à l'investissement spécifique de chaque groupe de spectateurs. En effet,
à l'intérieur d'un stade, les individus se répartissent en fonction d'une combinaison
complexe de critères, des univers sociologiques contrastés émergent, des identités
sociales particulières s'affirment.
1.1.1.2. Le partage social des émotions et l’intérêt porté à l'événement
L'émotion est au cœur de l'événement. Selon Maffesoli (1988), « la sensibilité commune
(...) provient du fait de l'on participe, ou correspond, dans le sens fort et peut être mystique
de ces termes, à un ethos commun ». Ainsi, ce qui est privilégié est moins ce à quoi
chacun volontairement va adhérer (perspective contractuelle et mécanique), que ce qui
est émotionnellement commun à tous (perspective sensible et organique). Il s'agit donc
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d'un mécanisme fondamental par lequel l'événement sportif produit une expérience
identitaire au sein de ce que l'on peut appeler des « communautés affectuelles »
(Maffesoli, 1988). Rimé (1993) souligne le rôle essentiel de l'intervention d'un mode
d'expression socialement partagé. L’événement sportif offre les conditions optimales pour
u’il se produise une contagion émotionnelle. Ce mécanisme fonctionne directement pour
les spectateurs, mais aussi par l'intermédiaire des médias, et notamment le plus puissant
de tous : la télévision. L'utilisation du direct et d'importants moyens techniques permettent
au réalisateur de renforcer le côté spectaculaire d'une compétition sportive. La télévision,
ainsi que les médias au sens large, permettent donc de créer des communautés virtuelles.
Dans une société de plus en plus dominée par la communication, ils offrent un support
nouveau de participation des individus à la vie relationnelle et sociale.
Derbaix (1987) a proposé une typologie systématique et conceptuelle de l'affectif
présentée dans le tableau ci-dessous. Celle-ci va dans le même sens que Holbrook,
puisqu'elle présente toutes les dimensions sous-jacentes des réactions affectives :
l'émotion choc (la plus "affective" des réactions), le sentiment, l'humeur, le tempérament,
la présence, l'attitude et l'appréciation (la plus "cognitive" de ces réactions).
Tableau 1: Typologie de l'affectif (D'après Derbaix, 1987).
1
Intérêt*
Attrait
Implication
Passion
2
Attirance
Préférence
Amitié
Amour
3
Satisfaction
Plaisir
Joie
Bonheur
4
Jalousie
Envie
Convoitise
Désir
5
Surprise
Stupeur
Stupéfaction
Ebahissement
6
Aversion
Répulsion
Dégoût
Rejet
7
Antipathie
Hostilité
Détestation
Haine
8
Appréhension
Peur
Anxiété
Angoisse
9
Insatisfaction
Tristesse
Peine
Désespoir
10
Fierté
Honneur
Orgueil
Vanité
11
Honte
Déshonneur
Abjection
Bassesse
12
Regret
Repentir
Contrition
Remords
13
Irritation
Mécontentement
Colère
Rage
* pour certains dont Thinès et Lempereur il existe trois types d'affectifs : la joie, la tristesse
et l'intérêt indifférence.
L’intérêt appartient à cette typologie. En effet l’impact socio-émotionnel d’un événement
sportif se traduit également par la stimulation de l’intérêt du public direct ou distant. Ainsi,
l’audience au sens large d’un événement constitue un indicateur quantitatif important.
L’intérêt constitue l’une des dimensions de l’implication et il s’agit d’un indicateur pertinent
permettant d’apprécier l’impact social d’un événement. Cet intérêt peut se décliner du
général au particulier : pour le sport, pour un sport en particulier, pour un évènement, pour
une équipe, un sportif…. De ce point de vue les jeux olympiques d’été constituent
l’événement ayant le plus fort impact au monde (cf figure ci-dessous).
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Figure 2 : Intérêt concernant la vision des JO à la TV en 1999 (source CIO)
3,8
3,1
3
2,6
2,4
2
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5
Jeux Olympiques
Coupe du Monde de
Football
Championats du Monde
d'Athlétisme
Tournoi de Wimbledon
Championat du Monde de
F1
Coupe du Monde de
Cricket
L’analyse des données dans uns certains nombre de pays clef (figure ) montre que les JO
d’été ont un impact mondial. Entre 45% (France) et 75% (Chine) des téléspectateurs se
sont déclarés passionnés2 par les JO.
2 Les passionnés sont les personnes qui planifient leur activité afin de regarder le JO ou ceux-qui les
regardent dès qu’ils le peuvent.
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