Concernant l’utilisation clinique du fluorure d´ami-
nes, un effet antibactérien est souvent rapporté. Ce
dernier est également mentionné par certaines études
sur l’usage du méridol®, de la chlorhexidine ou du flu-
orure d’amines
(Schulz et al. 1991)
. Après 21 jours sans
hygiène bucco-dentaire, un dépôt de plaque sur 40%
de la surface a été observé sur la face labiale de l’inci-
sive supérieure droite. Cette plaque a pu être réduite
à 13% grâce à un rinçage au fluorure d´amines deux
fois par jour (250 ppm F) (fig. 3). Une telle réduction de
la plaque dentaire n’a pas été obtenue avec le NaF
(250 ppm)
(Perdok et al. 1989)
.
Les fluorures d’amines présentent des propriétés anti-
bactériennes différentes de l’action du fluorure car ils:
■se répartissent particulièrement vite sur toutes les
surfaces dans la cavité buccale en raison de leurs
propriétés tensioactives,
■montrent une clairance plus longue dans la cavité
buccale ou la plaque dentaire,
■présentent une certaine plaquophilie,
■exercent une forte action antiglycolytique et donc
■un puissant effet bactériostatique et bactéricide.
Pour résumer, on peut dire que des preuves étayant
de manière convaincante l’efficacité antibactérienne et
l’effet cariopréventif des fluorures ont été collectées.
L’influence de l’ion fluorure peut être renforcée par des
anions spécifiques, comme cela a été prouvé pour le
fluorure d´amines. Ces effets soutenant l’action du
fluorure sont très importants pour la forte action cario-
préventive (cliniquement prouvée) des préparations
à base de fluorure d´amines.
Adresse de correspondance:
Prof. Dr. Dr. Lutz Stößer
Klinikum der Friedrich-Schiller-Universität Jena
Poliklinik für Präventive Zahnheilkunde
Bachstraße 18 - D-07743 Jena
Tél.: +49 (0) 3641-934800
Fax: +49 (0) 3641-934802
PROPHYLAXIEInfos 1/2006 55
Thème principal
Spécificité de l’action du fluorure
d’amines
Dans les fluorures d’amines, le cation est une
monoamine (Olafluor) ou une diamine (Dectafluor)
polaire possédant en plus une chaîne aliphatique apo-
laire. Ces composants opposés confèrent à ces molé-
cules des propriétés tensioactives. Il en résulte un
mouillage optimal de la surface dentaire par les fluoru-
res d’amines, ce qui conduit à une interaction avec les
tissus durs et une infiltration dans la plaque dentaire
particulièrement fortes.
La composante organique des fluorures d’amines
présente des propriétés antibactériennes intrinsèques
en interagissant avec la membrane bactérienne. Ces
propriétés peuvent être distinguées dans les modèles
de diffusion du fluorure inorganique qui, en raison de
sa taille réduite, est capable de sortir bien plus rapide-
ment d’un «slow releasing device»
(Shani et al. 1998)
.
Avec le fluorure d´amines, la concentration minimale
inhibitrice chez
S. sobrinus
est 100 fois plus faible
qu’avec le NaF
(Shani et al. 1996).
Les bactéries gram-
négatives sont également tuées par le fluorure d´ami-
nes et même
A. actinomycetemcomitans
, un micro-
organisme difficile à influencer, est touché par un
dixième de la concentration présente dans elmex®
(Olafluor)
(Oosterwaal et al. 1989, 1990).
A la suite d’études portant sur l’émail dentaire
traité par la salive, une longue durée d’action compa-
rable à celle de la chlorhexidine a été rapportée pour
le fluorure d´amines
(Decker at al. 2003)
. Les concen-
trations bactériostatiques ou bactéricides, se situent
entre 65 à 260 µg/ml pour une durée d’action de 3
à 46 minutes, comme l’a montrée une étude menée
chez 40 souches
(Kay, Wilson 1988)
. Cette action n’est
pas uniquement due à l’ion F.
Les études
in vitro
sur l’influence du NaF et du flu-
orure d´amines sur l’énolase et l’ATPase transmembra-
naire
(van Loveren)
suggèrent différents mécanismes
métaboliques car l’énolase est inhibée par le fluorure
de sodium alors que la partie amine exerce une action
protectrice et même stimulante sur l’enzyme. Par cont-
re, l’ATPase est nettement plus sensible au fluorure
d´amines qu’au NaF. C’est donc l’addition des effets
inhibiteurs des fluorures d’amines qui enraye la glyco-
lyse bactérienne.
Dans la plaque dentaire, le fluorure d´amines pré-
sente une action particulièrement durable (comparable
à une action à libération prolongée)
(Dolan et al. 1974)
:
90 minutes après un rinçage au NaF, aucune limitation
dans la courbe de Stephan n’est observée après ad-
jonction de glucose dans la plaque, alors qu’après un
traitement par le fluorure d´amines, une réduction de
l’activité est notée
(Schneider, Mühlemann 1974)
.
L’effet
antiglycolytique du fluorure d´amines dure 3 à 6
heures.