Bases anatomiques de la rétraction du pénis chez le blessé

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UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MAITRISE EN SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
M.S.B.M
MEMOIRE POUR LE CERTIFICAT D’ANATOMIE, D’IMAGERIE ET DE MORPHOGENESE
2003-2004
UNIVERSITE DE NANTES
Bases anatomiques de la rétraction du
pénis chez le blessé médullaire
Par
Marie-Aimée PERROUIN-VERBE
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LEBORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUIVILLAIN
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Pr. A. DE KERSAINT-GILLY
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Pr. Y. HELOURY
Pr. P.A. LEHUR
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. D. RODAT
Dr VALETTE
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Laboratoire :
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
Remerciements.
Aux Professeurs d’Anatomie, Messieurs Leborgne, Rogez, Robert et Armstrong,
qu’ils trouvent dans ce travail l’expression de notre respect et de notre intérêt pour
leurs enseignements.
A Monsieur le Professeur Robert, tout particulièrement, pour nous avoir confié ce
sujet de mémoire, et pour nous avoir toujours enseigné l’Anatomie avec un grand
enthousiasme. Qu’il trouve ici l’expression de notre sincère affection.
A Messieurs Lagier et Blin, pour leur aide précieuse, leurs conseils, leur disponibilité,
et surtout leur bonne humeur.
A Monsieur Pradal, pour sa disponibilité et sa compétence en matière d’Histologie.
A Madame Garçon, pour sa gentillesse et son attention.
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I-Introduction.
II-Rappels Anatomiques
A)Anatomie descriptive
1)Anatomie du pénis.
a)Architecture du pénis
α)les différentes couches du pénis
β)les formations érectiles
b)l’appareil suspenseur
c) l’appareil musculaire
2)Vascularisation et innervation du pénis et de l’appareil
musculaire.
a)Vascularisation du pénis.
α)vascularisation veineuse
β)vascularisation artérielle
b)Innervation du pénis et de l’appareil musculaire
α)système nerveux somatique
β)système nerveux végétatif
B)Anatomie fonctionnelle
1)Rappels sur la physiologie de l’érection et de
l’éjaculation.
a)érection
b) éjaculation
2)Rôles particuliers des muscles périnéaux et du
ligament suspenseur.
III-Matériel et Méthode
A)Population
B)Matériel de dissection
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C)Préparation de la pièce de dissection
1)Matériel et technique de dissection
2)pièces formolées
D)Abord des différentes structures
1)appareil suspenseur
2)muscles striés périnéaux
3)pédicule vasculo-nerveux périnéal et n. dorsal
E)Technique histologique.
IV-Résultats des dissections
A)Résultats des dissections
1) Appareil suspenseur
a)ligament fundiforme
b)ligament suspenseur
2)Appareil musculaire
a)muscle bulbo-spongieux
b)muscle ischio-caverneux
c)situation des muscles et rapports dans le périnée
B)Résultats de l’histologie
V-Discussion
A)Données de la littérature sur l’anatomie fonctionnelle et les
rôles physiologiques du ligament et des muscles périnéaux.
1) ligament suspenseur
2) muscles striés périnéaux
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a)muscle bulbo-spongieux
b)muscle ischio-caverneux
B)Hypothèses biomécaniques de la rétraction du pénis chez le
blessé médullaire.
1)ligament suspenseur
2)muscles périnéaux
C)Hypothèses physiopathologiques de la rétraction pénienne
chez le blessé médullaire.
1)Arguments pour une hyperactivité sympathique
a)l’hyperréflexie autonome du sujet blessé médullaire.
b)Possible innervation sympathique des muscles périnéaux
2)Arguments pour une spasticité des muscles périnéaux.
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I-Introduction.
L’existence d’une rétraction du pénis chez le blessé médullaire est un élément déterminant dans le
choix de leur mode mictionnel, notamment dans les lésions supra-sacrées. En effet, cette rétraction
est à l’origine d’impossibilité de tenue des étuis péniens ou de désadaptation pluriquotidienne,
source d‘humidité, de macérations( risque d’escarres) et d’un handicap social majoré. Le choix de
mictions réflexes (fuites et percussions) ne se fera donc qu’après avoir vérifié la tenue des étuis
péniens. De la même façon, chez les patients à l’autosondage intermittent, l’existence d’un verge
rétractée peut être à l’origine de difficultés majeures de réalisation de cette technique. Si la
littérature est riche en ce qui concerne les thérapeutiques, et notamment la mise en place de
prothèses péniennes, elle reste muette en ce qui concerne l’incidence de ce phénomène invalidant et
surtout sa physiopathologie.
Cliniquement, ce phénomène semble être l’apanage des lésions hautes (paraplégies thoraciques
hautes et moyennes, tétraplégies). C’est un phénomène actif, intermittent, variable selon la position
du sujet (position assise), ses activités (transferts), et déclenchée parfois au moment de la miction.
D’un point de vue physiopathologique, deux hypothèses peuvent être évoquées :
- L’existence d’une hyperactivité sympathique (phénomène d’hyperréflexie
autonome à
minima) à l’origine d’une détumescence exagérée.
-
L’hyperactivité réflexe de certains muscles striés périneaux dont la contraction hypertonique
sur un pénis flaccide pourrait être à l’origine d’une rétraction active.
L’objectif de ce travail est donc :
-
de mettre en évidence les muscles striés périnéaux et les élements anatomiques de
suspension de la verge pouvant être à l’origine d’un phénomène de rétraction .
-
de s’assurer de l’absence de fibres musculaires striées dans les ligaments suspenseurs.
- enfin de vérifier l’absence ou l’existence de fibres musculaires lisses (innervation
sympathique) dans ces muscles striés ( 1).
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II-Rappels anatomiques.
A-Anatomie descriptive.
1) Anatomie du pénis.
Rappel : le terme pénis vient du latin pendere signifiant pendre(position de référence).Et le terme
verge vient du latin virga, signifiant baguette.
a) Architecture.
α) les différentes couches du pénis.
Le pénis est constitué de 4 couches (de la superficie à la profondeur) :
- la peau, recouverte de poils à la base du pénis, avec à sa face
urétrale, le raphé du pénis, vestige de la fusion des tubercules génitaux, lequel se poursuit par le
raphé du scrotum( 2).
- le dartos pénien, très adhérent à la peau et presque
indissociable, parfois appelé fascia superficiel du pénis(Sappey) (3).
- une couche celluleuse ou fascia de Colls.
- un fascia profond dit fascia de Buck (4) lequel engaine les
corps érectiles que sont les corps caverneux et le corps spongieux.
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D’après Matthieu Robert(4).
β) les formations érectiles.
-les corps caverneux. Les corps caverneux sont au nombre de deux et s’étendent des branches
ischio-pubiennes jusqu’au gland. Leur longueur est de 15 cm à l’état flaccide et de 20 cm en
érection. Chacun des corps caverneux commence en arrière par une extrémité conique appelée pilier
du pénis. Les deux corps caverneux montent en convergeant le long des branches ischio-pubiennes,
et les deux organes se réunissent par leur face médiale au dessous de l’arcade pubienne. Ils
parcourent ensuite le corps du pénis dans toute sa longueur. Cette partie après le passage sous
l’arcade pubienne est appelée partie libre des corps caverneux. En raison de leur forme cylindrique,
les corps caverneux fusionnés limitent entre eux, sur les faces supérieure et inférieure du pénis,
deux gouttières longitudinales et médianes. Dans la gouttière supérieure chemine la veine dorsale
superficielle et dans la gouttière inférieure chemine le corps spongieux. Les corps caverneux sont
séparés par le septum du pénis, lequel est perméable(2).Chacun des corps caverneux, dans sa partie
proximale est recouvert d’un muscle ischio-caverneux.
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-le corps spongieux : Le corps spongieux est traversé sur toute sa longueur par l’urètre spongieux.
Il s’étend du centre tendineux du périnée au gland et chemine à la face inférieure des corps
caverneux. Il mesure 13 cm à l’état flaccide et 18 cm en érection. Il est dilaté à ses deux extrémités
pour former le gland (extrémité distale) et le bulbe(extrémité proximale), lequel est fixé sur la face
inférieure du diaphragme uro-génital (2,3).
Le corps spongieux est recouvert du muscle bulbo-spongieux.
b) L’appareil suspenseur du pénis (5).
L’appareil suspenseur du pénis est composé de deux structures ligamentaires distinctes : le ligament
fundiforme et le ligament suspenseur du pénis.
Le ligament fundiforme est le plus superficiel des deux. Il naît de fibres profondes de la ligne
blanche et s’étend latéralement, sans adhérer à l’albuginée des corps caverneux, dans un plan du
fascia du cordon spermatique. Les fibres passent de chaque côté du pénis, toujours sans adhérence
avec l’albuginée, et se rejoignent à la face inférieure du pénis pour former la partie antérieure et
supérieure du septum scrotal.
Le ligament suspenseur, plus profond, est tendu entre le pubis et l’albuginée des corps caverneux. Il
est composé de trois faisceaux : 2 faisceaux latéraux et circonférentiels qui renforcent l’albuginée
des corps caverneux à la base du pénis. Ils prennent alors le nom de fascia profond, ou fascia de
Buck (4). Le troisième faisceau est un faisceau médian qui circonscrit la veine dorsale profonde du
pénis et est très adhérent à l’albuginée.
Entre les faisceaux latéraux et médian, cheminent les artères dorsales et le nerf dorsal.
Le ligament suspenseur est en continuité avec le ligament arqué du pubis, situé derrière lui. Le
ligament arqué est situé à la face inférieure du pubis et s’attache à l’albuginée sur une petite surface.
La veine dorsale passe en dessous de ce ligament.
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A : ligament fundiforme, B :faisceaux latéraux du ligament suspenseur,
C(à gauche) : ligament arqué. C (à droite):faisceau médian du ligament suspenseur.
D’après A.Hoznek (5)
c) L’appareil musculaire.
Il existe deux muscles striés à la base du pénis lesquels ont un rôle essentiel au cours de l’érection et
de l’éjaculation.
Le premier muscle est le muscle ischio-caverneux, muscle pair, satellite du corps caverneux.
Il nait sur la face médiale de la branche ischio-pubienne et recouvre le pilier du pénis.
Le second muscle est le muscle bulbo-spongieux, muscle également pair, satellite du corps
spongieux. Il naît de part et d’autre d’un raphé médian, lequel est fixé au centre tendineux du
périnée. Ses fibres cheminent vers l’avant le long du bulbe et se fixent latéralement sur l’albuginée
des corps caverneux. Les fibres terminales les plus antérieures donnent une expansion dorsale qui
circonscrit les corps caverneux. Cette expansion est appelée muscle compresseur de la veine dorsale
profonde du pénis ou muscle de Houston.
Le rôle de ces deux muscles sera décrit plus loin.
Pour comparer avec le court abducteur des doigts qui pèse environ 2,3g, le muscle bulbo-spongieux
pèse 3,25g et l’ischio-caverneux pèse 2,9g.
Il existe un troisième muscle strié : le muscle transverse superficiel du périnée, muscle également
pair. Il naît sur la face médiale de la branche ischio-pubienne, en arrière du muscle ischio-
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caverneux, et s’attache au centre tendineux du périnée. Ce muscle n’a pas de rôle propre mais il
permet, en stabilisant le centre tendineux, de favoriser l’action des muscles qui s’y insèrent (2,3).
D’après Rouvière (3) (p 673).
2) Vascularisation et innervation du pénis et de l’appareil musculaire.
a) Vascularisation du pénis.
α) vascularisation veineuse.
La veine dorsale superficielle chemine sous la peau et le dartos pénien, dans la couche celluleuse.
Elle se divise et se jette dans les veines pudendales superficielles, dans la saphène interne enfin
dans la veine fémorale. Elle draine les plans cutanés du pénis.
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La veine dorsale profonde chemine au dessus de l’albuginée des corps caverneux, dans la gouttière
supérieure. Elle passe entre les ligament arqué du pubis et tranverse du périnée pour rejoindre le
plexus veineux rétropubien et la veine pudendale interne, les deux se jetant ensuite dans la veine
iliaque interne. La veine dorsale profonde du pénis draine le gland et la partie libre des corps
caverneux. La veine dorsale profonde du pénis draine les veines circonflexes, qui drainent ellesmême les veines émissaires. Les veines bulbaires du corps spongieux se drainent dans la veine
pudendale interne.
β) vascularisation artérielle.
Les artères superficielles sont au nombre de deux et proviennent des artères pudendales externes
superficielles venant elles –même des artères fémorales. Elles cheminent latéralement par rapport à
la veine dorsale superficielle, dans un même plan. Ces artères superficielles sont destinées à la peau.
Les artères dorsales, au nombre de deux, proviennent de l’artère pudendale interne et cheminent de
part et d’autre de la veine dorsale profonde, dans un même plan, parcourant ainsi l’axe d’un corps
caverneux. Chaque artère dorsale donne des artères circonflexes, une artère bulbaire pour le corps
spongieux et une artère caverneuse pour le corps caverneux.
L’artère caverneuse chemine au centre du corps caverneux et donne des artères hélicines qui
s’ouvrent dans les espaces sinusoïdes, elle donne également des capillaires nourriciers pour les
trabécules caverneuses, et des anastomoses artério-veineuses qui rejoignent les veines émissaires(2,
3).
b) Innervation du pénis et de l’appareil musculaire.(6,7)
L’innervation du pénis et de l’appareil musculaire s’organise en 2 grands systèmes, somatique et
végétatif.
α) système nerveux somatique.
L’innervation somatique du pénis et des muscles périnéaux est assurée par le
nerf pudendal, branche terminale du plexus honteux formé par la réunion des branches antérieures
des 3ème, 4ème nerfs sacrés, et d’une partie de la branche antérieure du 2ème. Le nerf pudendal interne
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sort du pelvis par la grande échancrure sciatique, contourne l’épine sciatique et le ligament sacroépineux, et pénètre dans le périnée par la petite échancrure sciatique. Il emprunte le canal d’Alcock,
expansion du ligament sacro-tubéral et pénètre dans la fosse ischio-rectale, cheminant en dedans de
l’ischion. A ce niveau, il donne le nerf rectal inférieur et se divise ensuite en nerfs périnéaux
superficiel et profond et en nerf dorsal du pénis.
Innervation somatique sensitive
L’innervation sensitive des enveloppes péniennes et du gland est assurée en grande
partie par les fibres sensitives afférentes du nerf dorsal du pénis qui rejoignent le nerf pudendal
interne.
La densité des terminaisons sensitives est très importante au niveau du gland.
Innervation somatique motrice
L’innervation motrice ou efférente somatique du pénis repose sur le nerf périnéal profond, branche
terminale du nerf pudendal interne, laquelle chemine sous le muscle transverse superficiel du
périnée(2).
Les motoneurones du nerf pudendal interne sont situés dans le noyau d’Onuf dans la corne ventrale
de la substance grise de la moelle sacrée aux niveaux S2, S3, S4. Ces motoneurones, innervent le
sphincter anal externe, le sphincter strié de l’urètre, et les muscles ischio-caverneux et bulbospongieux.
β) système nerveux végétatif.
Situation anatomique du système nerveux parasympathique
Les neurones préganglionnaires parasympathiques à destinée pénienne sont issus du centre
parasympathique sacré situé dans la zone intermédiolatérale de la substance grise de la moelle
sacrée aux niveaux S2, S3, S4. Les axones parasympathiques empruntent les 2ème, 3ème, 4ème racines
sacrées antérieures puis forment 3 à 6 filets nerveux, les nerfs splanchniques pelviens ou nerf
érecteur d’Eckhardt. Nous préfèreront cette dernière appellation, moins ambiguë que la première,
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splanchnique évoquant plus le système nerveux sympathique. Le nerf d’Eckhardt se termine dans le
plexus hypogastrique inférieur (ou plexus pelvien). Les fibres parasympathiques à destinée
pénienne cheminent ensuite dans les nerfs caverneux lesquels longent le sphincter strié et l’urètre
membraneux, traversent le plancher périnéal pour rejoindre les corps érectiles. (Les synapses entre
neurones pré et postganglionnaires sont situées dans le plexus pelvien ou au sein même des corps
caverneux).
Situation anatomique du système nerveux sympathique
Les fibres sympathiques destinées au pénis naissent des niveaux médullaires Th11, Th12, L1 et L2.
Elles comprennent 4 contingents distincts : hypogastrique, pelvien, honteux moteur et honteux
sensitif, les 2 premiers représentant les 2 principaux.
Le premier contingent de fibres sympathiques rejoint les ganglions sympathiques paravertébraux
lombaires dont sont issus les nerfs splanchniques lombaires. Ces derniers se terminent dans le
plexus intermésentérique aortique qui se prolonge par le plexus hypogastrique supérieur. De ce
plexus naissent les 2 nerfs hypogastriques qui cheminent le long des artères iliaques communes et
se terminent dans le plexus hypogastrique inférieur. Les fibres hypogastriques à destinée pénienne
empruntent ensuite les nerfs caverneux de nature mixte parasympathique et sympathique.
Le deuxième contingent de fibres emprunte la chaîne sympathique paravertébrale lombaire puis
sacrée. Des ganglions paravertébraux sympathiques sacrés naissent de fins filets nerveux, les nerfs
splanchniques sacraux, qui rejoignent le plexus hypogastrique inférieur et le nerf caverneux.
14
D’après Netter.
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B-Anatomie fonctionnelle.
Nous traiterons du rôle de ces structures notamment au cours de l’érection et de l’éjaculation.
1) Rappels sur la physiologie de l’érection et de l’éjaculation.
a) Érection (8).
Le système permettant l’érection est essentiellement formé par trois sacs vasculaires que sont
les corps caverneux et le corps spongieux . Ce dernier assure une rigidité moindre et laisse ainsi
l’urètre béant. Il y a donc deux système, un système à haute pression que sont les corps
caverneux et un système à basse pression qu’est le corps spongieux.
Les artères hélicines possèdent des fibres musculaires lisses dans leurs paroi appelées
bandelettes de Conti. Si ces fibres se contractent, les artères se ferment et la verge est à l’état
flaccide. À l’inverse, si ces fibres sont relâchées, il y a érection.
Les aréoles (espaces sinusoïdes) sont maintenues affaissées au repos par la contraction tonique
des fibres musculaires lisses des espaces intracaverneux (notion de tonus α-constricteur
permanent).
L’érection réflexe est un réflexe médullaire segmentaire, dont les afférences sont des stimuli
tactiles au niveau du gland et des enveloppes péniennes qui remontent dans le nerf pudendal via
le nerf dorsal, vers les centres médullaires parasympathiques sacrés de S2 à S4. De ces centres
part le nerf érecteur d’Eckhardt, responsable de l’érection. En effet, ce nerf permet la dilatation
des artères hélicines , ceci sous contrôle VIPergique. Parallèlement, le débit sanguin est
multiplié par 20. Les aréoles se remplissent donc de sang. C’est la phase de tumescence.
La verge grossit et se redresse, on assiste à un effacement de l’angle sous symphysaire.
Se produit alors une double obturation de la circulation veineuse de retour. En effet, les veines
émissaires sont doublement occluses : par garrotage lors de la traversée de l’albuginée, et par
vasoconstriction de leurs troncs et plexus d’origine.
La veine dorsale profonde est également comprimée entre la peau et l’albuginée.
Ceci contribue à augmenter d’avantage la pression dans les corps caverneux : c’est la phase
d’érection totale.
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Enfin, la rigidité optimale est obtenue par la contraction tonique des muscles ischio-caverneux
et bulbo-spongieux , selon certains auteurs(9) il ne s’agit que du muscle ischio-caverneux, le
bulbo-spongieux ne se contracterait que lors de l’éjaculation. Nous étudierons ce point plus loin.
b) Éjaculation ( 6,7).
L’éjaculation se déroule classiquement en 2 phases successives : émission et expulsion.
L’émission correspond à l’excrétion du liquide séminal et à la mobilisation des spermatozoïdes
contenus dans le canal épididymodéférentiel. Elle est due à la contraction, sous l’action du
sympathique, de l’ensemble de la musculature lisse du tractus génital. Comme le sphincter strié
sousmontanal est en permanence fermé, le sperme s’accumule dans l’urètre. La contraction des
muscles lisses et la fermeture du sphincter lisse de l’urètre dépend principalement du centre
médullaire sympathique Th12, L1, L2..
A la phase d’expulsion, le sphincter strié de l’urètre s’ouvre sous la pression exercée par le
sperme. Le sperme s’écoule par saccades correspondant à 3 à 5 secousses cloniques, survenant
toutes les 0,8 secondes. Ces saccades sont dues à la contraction rythmique des muscles
périnéaux, notamment le bulbo-spongieux(9) du releveur de l’anus et de la musculature de
l’urètre.
L’expulsion de sperme dépend du centre sacré parasympathique et somatique S2, S3 et S4, mis
en jeu 2 à 4 secondes après le précédent.
Immédiatement après l’éjaculation commence la détumescence qui est un phénomène actif
dépendant d’un influx sympathique vasoconstricteur contemporain de l’influx sympathique
éjaculatoire.
2) Rôles particuliers des muscles périnéaux et du ligament
suspenseur.
Le rôle, classiquement décrit, du muscle ischio-caverneux est la compression de la racine du
corps caverneux afin d’exprimer son sang vers le corps du pénis et ainsi favoriser la rigidité de la
verge.
Le rôle, classiquement décrit, du muscle bulbo-spongieux est d’assurer, au moyen de petites
contractions répétées, l’expulsion du sperme lors de l’éjaculation, et de favoriser l’érection en
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comprimant le corps spongieux et la veine dorsale profonde du pénis. Pour certains, (9), le rôle du
bulbo-spongieux est uniquement celui de l’expulsion de sperme et ne se contracte qu’à ce moment.
Il n’existe pas, à notre connaissance, de description du rôle de ces muscles lorsque le pénis est à
l’état flaccide, en dehors de toute excitation.
Le ligament suspenseur a également un rôle important. Il maintient le pénis (flaccide) en avant du
pubis (5), l’empêchant de s’enfouir sous la symphyse pubienne. Ce ligament permet également de
protéger le pédicule vasculo-nerveux d’une éventuelle lésion par frottement contre la symphyse
pubienne, notamment pendant la marche.(5)
Le ligament fundiforme, puisque non adhérent à l’albuginée des corps caverneux, ne maintient pas
l’axe du pénis, mais il a un rôle de suspension du scrotum, puisque participe à la partie antérieure et
supérieure du septum scrotal.(5)
III-Matériel et méthode.
A) Population
Les travaux de dissection ont porté sur 5 sujets masculins :
-sujet de 77 ans, frais,
-sujet de 88 ans et 4 mois, formolé,
-sujet de 81 ans et 3 mois, frais et injecté,
-sujet de 75 ans et 2 mois, frais (prélèvements histologiques uniquement),
-sujet de 84 ans et 2 mois, frais (prélèvement histologique et dissection).
Ces sujets n’ont pas été choisis selon des critères précis, cependant, les sujets dont le
pénis était très enfoui ou endommagé et par conséquent inexploitable, ont été écartés
de notre sélection.
B) Matériel de dissection.
-pinces à disséquer à mors lisses et striés,
-ciseaux de dissection à bouts mousses,
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-bistouri n°4 et lames n°23
-pinces à clamper.
C) Préparation de la pièce anatomique.
Pour faciliter la dissection, nous avons préféré travailler sur un bassin prélevé sur le sujet.
Une incision oblique est pratiquée sur le membre inférieur, à un centimètre environ du ligament
inguinal, d’axe parallèle à ce dernier, jusqu’à apparition de la tête fémorale, laquelle est
désolidarisée de la hanche par incision du ligament rond. Puis les muscles péri-articulaires sont
sectionnés, le membre inférieur est ainsi libéré du reste du corps. La même technique est appliquée
au membre inférieur controlatéral.
L’abdomen est ouvert par une triple incision : une première incision médiane est pratiquée depuis
l’appendice xyphoïde jusqu’à la symphyse pubienne, une seconde incision depuis la symphyse
pubienne jusqu’au relief de l’aile iliaque antéro- supérieure, la troisième est symétrique de la
deuxième. La peau est réclinée. Le colon sigmoïde, dans sa partie terminale, est ligaturé à l’aide de
deux ficelles ; nous incisons entre ces deux garrots : le cadre colique et les anses intestinales sont
alors réclinées. A l’aide d’une scie ordinaire, nous sectionnons le rachis au niveau du disque L3-L4.
Le cadre pelvien et son contenu sont alors isolés.
1) Matériel et technique d’injection.
-matériel :
-latex néoprène 671 + colorants universels(rose=artériel, bleu=veineux),
-catalyseur : acide acétique dilué à 50%,
-cathéters sous forme de tubes en plastique.
-technique : Pour injecter les artères dorsales et caverneuses, nous glissons un cathéter dans l’aorte
abdominale juste au dessus de sa division en L4. Nous ligaturons l’aorte en amont du cathéter, les
artères iliaques externes sont également ligaturées afin de ne pas les injecter. Le latex injecte donc
successivement les artères iliaques internes, les artères pudendales internes, les artères dorsales,
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bulbaires, uréthrales, et enfin les artères caverneuses. Au total, 40 cc de latex sont injectés en
artériel, catalysés avec 6cc d’acide acétique.
Pour l’injection veineuse, nous ligaturons la veine cave inférieure à son origine, c’est à dire à la
confluence des deux veines iliaques communes. Un cathéter est glissé dans chacune des deux veines
fémorales et nous injectons de façon rétrograde : le latex injecte successivement les veines
fémorales, les iliaques externes, et, ne pouvant remonter dans la veine cave inférieure ligaturée, le
latex injecte ensuite les iliaques internes, les pudendales internes et enfin la veine dorsale profonde.
Au total, 30 cc de latex sont injectés en veineux, catalysés avec 4,5cc d’acide acétique.
Lors de la dissection, nous nous apercevons que la veine dorsale profonde n’est pas injectée. En
effet, l’erreur est d’avoir d’abord injecté en artériel, ce qui a créé une tumescence artificielle, le
latex repoussant le sang vers les corps caverneux. La veine dorsale profonde s’est retrouvée
comprimée sous l’arcade pubienne, empêchant le latex de progresser. Nous retrouvons en effet un
amas de latex dans la veine dorsale profonde, avant son passage sous l’arcade pubienne.
Les artères sont en revanche bien injectées et ce jusqu’au artères caverneuses (nous avons pu le
remarquer lors d’une coupe transersale du pénis) ; cependant, l’artère dorsale droite semble moins
injectée que la gauche.
Durant toutes les dissections, nous n’avons injecté qu’une seule pièce car l’injection ne nous
semblait pas essentielle pour notre travail.
2) Pièces formolées.
Les pièces formolées sont conservées dans du formol à 30%.
D) Abord des différentes structures.
1) Appareil suspenseur.
Comme exposé précédemment, l’appareil suspenseur du pénis est constitué de deux ligaments : le
ligament fundiforme, superficiel, dans le plan du cordon spermatique, et le ligament suspenseur,
plus postérieur et plus profond.
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Dans un premier temps, nous avons cherché à isoler le ligament suspenseur, nos données
anatomiques sur le ligament fundiforme étant incomplètes.
Une incision horizontale est réalisée au niveau de la symphyse pubienne ; nous restons dans un plan
très superficiel afin de ne pas léser l’origine du ligament suspenseur. Depuis le milieu de cette
première incision est réalisée une seconde incision, médiane, et dirigée vers le gland. Nous
découvrons sous la peau une fine couche celluleuse transparente. Le dartos est difficilement
repérable car très adhérent à la peau, il est récliné en même temps qu’elle. Il est également difficile
de différencier la couche celluleuse du fascia profond. Sous cette fine couche transparente
apparaissent les artères dorsales, leurs branches circonférentielles que sont les artères circonflexes,
la veine dorsale et les veines circonflexes. Ces vaisseaux reposent sur l’albuginée des corps
caverneux.
Après avoir coupé le frein et détaché la peau du pénis au niveau du sillon balano-préputial, nous
pratiquons une incision médiane à la face ventrale de la verge en suivant le raphé du pénis, vestige
de la fusion des tubercules génitaux, et prolongeons l’incision jusqu’à la base du scrotum en suivant
le raphé du scrotum. La peau est écartée, les cordons spermatiques sont alors apparents. Nous
pouvons alors séparer complètement la peau du corps du pénis et la maintenir écartée à l’aide de
pinces à clamper.
Nous reprenons la dissection de la couche celluleuse avec des ciseaux mousses, afin de ne pas léser
les vaisseaux, et remontons vers la symphyse pubienne : les trois faisceaux du ligament suspenseur
apparaissent, naissant de la partie inférieure de la symphyse pubienne et s’insérant sur l’albuginée
des corps caverneux par un faisceau médian et deux faisceaux latéraux et circonférentiels.
Le ligament fundiforme est repéré à son origine à la face inférieure de la ligne blanche, les
faisceaux latéraux sont ensuite suivis jusqu’à leur réunion à la face inférieure du pénis, où ils
forment la partie antérieure et supérieure du septum scrotal. Cependant, nous n’avons pas pu mettre
en évidence cette réunion au cours de nos dissections, le septum scrotal ayant été disséqué lors de la
préparation de la pièce, afin d’écarter toute la peau du corps du pénis.
2) Muscles striés périnéaux .
Après avoir ouvert le scrotum comme précédemment, le pénis est fixé à la paroi abdominale à l’aide
d’une pince à clamper et la pièce est installée de telle sorte que le périnée nous fasse face. La
dissection se fait plan par plan au niveau de la racine de la verge, juste au dessus du centre
tendineux et de l’anus. Le muscle bulbo-spongieux bifide apparait dans sa partie proximale, fixé sur
21
le centre tendineux du périnée par la portion initiale de son raphé médian. L’insertion distale est
repérée en remontant le long du corps spongieux, le muscle compresseur de la veine dorsale
profonde est alors repéré.
De part et d’autre du centre tendineux du périnée s’accroche le muscle transverse du périnée, qui,
s’il est suivi jusqu’à son insertion proximale, permet de découvrir l’insertion proximale du muscle
ischio-caverneux sur la branche ischio-pubienne, en avant de l’insertion proximale du muscle
transverse du périnée.
Ces deux muscles sont très fins et nécessitent donc une approche très progressive afin de ne pas les
léser.
3) Pédicule vasculo-nerveux périnéal et nerf dorsal.
Les vaisseaux et nerfs sont négligés lors des premières dissections puis seront préservés sans être
individualisés par la suite. Nous savons qu’ils apparaissent dans la fosse ischio-rectale en dedans de
l’ischion, au dessus du ligament sacro-tubéral. Après avoir repéré l’ischion, une incision oblique est
pratiquée en dedans de son relief, la graisse est disséquée progressivement avec des ciseaux à bouts
mousses et l’origine des vaisseaux est repérée.
E) Technique histologique.
Trois prélèvements histologiques sont réalisés. Sur un premier sujet, nous prélevons une partie du
muscle ischio-caverneux droit et une partie du muscle bulbo-spongieux droit. Sur un deuxième
sujet, nous prélevons une partie du ligament suspenseur. Les prélèvements se présentent sous la
forme de carrés de 1 cm2 de surface et de 0,5 mm d’épaisseur. Ces carrés sont étalés sur une pièce
de liège et fixés dans du BOUIN.
Le fixateur BOUIN est une solution d’acide picrique à saturation (75cc), de formol à 10% neutre
(20cc), et d’acide acétique(5cc).
La fixation dure entre 24 et 36 heures.
L’acide picrique est ensuite retiré en plongeant le prélèvement dans une solution de carbonate de
lithium, puis le prélèvement subit une succession de bains :
- Alcool à 70°( une nuit),
22
- 2 alcools à 95°(3 heures)
- 2 alcools absolus (2 heures chacun)
- 2 toluènes(3 heures chacun )
- 3 paraffines fondues à 60°(12 heures chacune).
La pièce est incluse dans la troisième paraffine.
Des coupes transversales de 4,5 à 6 microns sont ensuite réalisées au microtome puis colorées selon
la coloration Van Gieson.
IV-Résultats.
A) Résultats des dissections.
1) Appareil suspenseur.
a) Ligament fundiforme.
Situation et trajet (photo et schéma n°1)
Le ligament est en continuité avec la ligne blanche et naît de la face inférieure de celle-ci. Les deux
faisceaux latéraux , au départ médians et proche du ligament suspenseur plus profondément situé, se
dirigent latéralement, contourne le pénis sans y adhérer. En effet, ces faisceaux peuvent être écartés
sans être disséqués.
Leur réunion à la face inférieure n’a pu être mise en évidence pour les raisons exposées
précédemment.
23
photo n°1
schéma n°1
24
Rapports
Rapport médian
Entre les faisceaux latéraux et dans un plan plus profond apparaît le ligament suspenseur.
Rapports latéraux
Le rapports latéraux sont les cordons spermatiques situés dans un même plan.
Rapports postérieurs
Le ligament suspenseur et la symphyse pubienne.
La section au bistouri des faisceaux latéraux ne change pas la position initiale du pénis ce qui était
attendu du fait de la non adhérence de ces faisceaux avec l’albuginée.
b) Le ligament suspenseur.
Situation et architecture
Le ligament suspenseur s’étend de la symphyse pubienne à l’albuginée des corps caverneux. Ces
fibres d’origine semblent également provenir de fibres terminales de la ligne blanche, au milieu et
plus profondément par rapport aux faisceaux latéraux du ligament fundiforme.( photo n°1)
Le faisceau médian circonscrit la veine dorsale profonde, on remarquera pourtant sur certaines
pièces que ce faisceau médian peut cheminer à gauche de la veine sans la circonscrire (photo et
schéma n°2). Ce faisceau est très adhérent à l’albuginée et si l’on tire sur ce faisceau , comme si
l’on voulait rapprocher son insertion distale( au niveau des corps caverneux) de son insertion
proximale(symphyse pubienne), la base du pénis remonte.
25
photo n°2
schéma n°2
26
Les faisceaux latéraux, au départ proches du faisceau médian, s’éloignent latéralement et
contournent le pénis en adhérent fortement à l’albuginée, prenant ici le nom de fascia profond, et se
rejoignent à la face inférieure du pénis (photo et schéma n° 3).
photo n°3
schéma n° 3
27
Entre les faisceaux latéraux et médian, se dessinent deux espaces où cheminent les artères dorsales
et les nerfs dorsaux.
Rapports
-rapport supérieur .
Son principal rapport supérieur est la symphyse pubienne, où il s’accroche. On peut également citer
le ligament fundiforme mais dans un plan plus superficiel.
-rapports inférieurs .
De la superficie à la profondeur :
-les artères, veine, et nerf dorsal
-les corps caverneux recouverts de l’albuginée.
La veine dorsale est circonscrite par le faisceau médian du ligament ou chemine à droite de ce
dernier.
De chaque côté, l’artère dorsale et le nerf dorsal, cheminent latéralement par rapport à la veine
dorsale et pénètrent dans l’espace compris entre le faisceau médian et latéral du ligament (photo et
schéma n°4).
28
photo n°4
schéma n°4
29
-rapport postérieur.
Le ligament arqué du pubis, en continuité avec le ligament suspenseur, situé à la face inférieure du
pubis.
-rapport latéral.
Les muscles adducteurs qui s’insèrent sur le pubis et la branche ischio-pubienne (photo et schéma
n°5).
photo n°5
schéma n°5
30
Si on coupe les trois faisceaux du ligament au bistouri, le pénis est désolidarisé du pubis et peut-être
mobilisé, par exemple il peut être tiré vers l’avant et allongé et peut également s’enfouir sous le
pubis car n’est plus maintenu en avant par le ligament suspenseur.
2) Appareil musculaire.
a)) Muscle ischio-caverneux
Insertion proximale et trajet
Le muscle ischio-caverneux est un muscle pair et symétrique qui s’insère sur la face médiale de la
branche ischio-pubienne, en avant de l’insertion du muscle transverse du périnée. Il remonte à la
face inférieure des corps caverneux, le long du segment initial ou pilier, jusqu’à la jonction tiers
inférieur, tiers moyen des corps caverneux
(photos et schémas n°6 et 7).
31
photo n°6
schéma n°6
32
photo n°7
schéma n°7
33
Terminaison
Le muscle ischio-caverneux s’épuise en de fins filets musculaires à la face inférieure et latérale des
corps caverneux, à la jonction tiers inférieur, tiers moyen, en dessous de la naissance du muscle
compresseur de la veine dorsale, et est adhérent à l’albuginée (photo et schéma n°8).
photo n°8
schéma n°8
34
b)) Muscle bulbo-spongieux.
Insertion proximale et trajet
Le muscle bulbo-spongieux est le muscle annexé au corps spongieux. Il est pair et symétrique, uni
par un raphé médian. Ce raphé s’accroche au centre tendineux du périnée. Les fibres du muscle
remontent le long du bulbe, à sa face inférieure et le recouvrent, puis elle se dirigent vers la face
latérale des corps caverneux. (photo et schéma n°9).
photo n°9
35
schéma n°9.
Terminaison
Le muscle bulbo-spongieux s’épuise en de fins filets musculaires à la face latérale des corps
caverneux, au dessus de la terminaison du muscle ischio-caverneux. Ces filets sont adhérents à
l’albuginée des corps caverneux. Les fibres les plus antérieures se dirigent vers la face supérieure du
pénis pour former le muscle de Houston (photos n°8 et 9).
36
c) Situation des muscles et rapports dans le périnée. (photo et schéma n°10)
photo n°10
schéma n°10
Si on considère une vue inférieure du périnée, le centre tendineux est l’élément le plus
médial. Il permet l’insertion du muscle bulbo-spongieux à sa face supérieure, lequel remonte le
long du bulbe.
37
De chaque côté de ce centre tendineux s’insère le muscle transverse du périnée qui chemine selon
un axe perpendiculaire au muscle bulbo-spongieux, et constitue un rapport postérieur du muscle
bulbo-spongieux. De plus, le centre tendineux étant situé en avant du sphincter strié de l’anus, ce
sphincter est un rapport postérieur non seulement du muscle transverse, mais aussi du muscle
bulbo-spongieux.
Le muscle ischio-caverneux, quant à lui, est le muscle le plus latéral.
Son insertion proximale sur l’ischion est antérieure à l’insertion du muscle transverse du périnée.
B) Résultats de l’histologie.
L’histologie sur les muscles périnéaux n’a pas été aussi concluante que nous l’espérions. En effet,
les coupes transversales réalisées sur les muscles ischio-caverneux et bulbo- spongieux n’ont
montré, dans aucun de ces deux muscles, la présence de muscle lisse, hormis bien-sûr la
musculature lisse des vaisseaux.
En revanche, l’histologie retrouve la présence de muscle lisse dans le ligament suspenseur, et nous
reviendrons bien-entendu sur ce point.
Nous ne retrouvons pas de muscle strié dans ce ligament.
Coupe histologique transversale de muscle bulbo-spongieux (droit).
38
Coupe histologique transversale de muscle ischio-caverneux (droit).
Coupe histologique transversale du ligament suspenseur du pénis.
39
V-Discussion.
A) Données de la littérature sur l’anatomie fonctionnelle et les
rôles physiologiques du ligament suspenseur et des muscles
périnéaux.
1) Ligament suspenseur.
Le rôle du ligament fundiforme ne sera pas redéveloppé car il semble que son unique rôle soit la
suspension du scrotum.
Le ligament suspenseur maintient le pénis en avant du pubis et se comporte comme un point de
soutien important pour la partie mobile du pénis en érection et protège le pédicule vasculo-nerveux
lors de son passage sous l’arcade pubienne. Lorsque celui-ci est rompu, il y a « scrotalisation » du
pénis par enfoncement, déstabilisation du pénis en érection qui rend la pénétration difficile et le coït
impossible, la verge hypermobile s’échappant du vagin(5,10), et le pédicule vasculo-nerveux se
trouve alors exposé à de multiples traumatismes, notamment pendant la marche(5)
De plus, si le ligament est rompu ou n’existe pas (agénésie), la verge en érection ne s’élève qu’à 90°
par rapport à l’abdomen, alors qu’elle s’élève selon un angle de 30-45° avec l’abdomen quand le
ligament existe(11).
2) Muscles striés périnéaux.
A notre connaissance, le rôle des muscles striés périnéaux n’est décrit que dans un contexte
d’excitation de la verge et nous n’avons pas trouvé de description du rôle de ces mêmes muscles sur
un pénis à l’état flaccide.
a)) Muscle bulbo-spongieux.
Certains auteurs (12,13)ont montré que chez le rat, le muscle bulbo-spongieux permet l’érection du
gland en forme de « coupe évasée », mais aussi joue un rôle majeur dans l’éjaculation. Chez
l’homme, les études électromyographiques (14) montrent que le muscle bulbo-spongieux ne se
40
contracte qu’au moment de l’éjaculation, sous forme de plusieurs contractions rythmiques, une
dizaine environ, permettant l’expulsion du sperme. Après ces contractions rythmiques, une
contraction tonique du muscle bulbo-spongieux peut-être observée laquelle donne l’assurance que
tout le sperme disponible a bien été expulsé.
Pour certains auteurs (13), les influx sensitifs dus à l’intromission du pénis dans le vagin
provoquent des contractions d’amplitude progressive du muscle bulbo-spongieux et de l’ ischiocaverneux mais d’amplitude moindre.
Lors de l’éjaculation, le muscle bulbo-spongieux se contracte de façon rythmique, accompagné du
muscle ischio-caverneux, dont les contractions sont de moindre amplitude.
Du point de vue histologique (15), le muscle bulbo-spongieux contient majoritairement des fibres
musculaires de type 2, fibres « fast fatigable », qui permettent des contractions rapides et phasiques,
ce qui coïncide avec les contractions rythmiques et brèves lors de l’éjaculation.
b) Muscle ischio-caverneux .
Chez le rat (12,13), le muscle ischio-caverneux permet de redresser et déplier le corps caverneux et
provoque des secousses, à type de flexions dorsales .
Du point de vue histologique (15), ce muscle est composé majoritairement de fibres musculaires de
type 1, fibres « slow résistant », qui permettent une contraction prolongée et permettent au muscle
ischio-caverneux de maintenir la pression dans les corps caverneux et le pénis.
Selon certains auteurs (14), chez l’homme, les muscles ischio-caverneux et bulbo-spongieux n’ont
pas d’activité au cours de la tumescence et érection (obtenues à partir d’une stimulation visuelle), ni
au cours de la détumescence. Bien que ces données présentent ces muscles comme non essentiels à
l’initiation et au maintien de l’érection, les expériences montrent que la contraction de ces muscles
augmente la rigidité et l’érection totale.
B) Hypothèses biomécaniques de la rétraction de la verge.
1) Ligament suspenseur.
Ce ligament, lorsqu’il est absent, ne permet plus une angulation de la verge en érection de 30-45°
avec l’abdomen, et celle-ci reste à 90°. Son rôle, sur une verge flaccide, serait purement un rôle de
suspension et de maintien de la verge en avant du pubis. Les coupes histologiques, effectuées sur un
seul sujet, semblent objectiver la présence de fibres musculaires lisses. Etant donné ses insertions,
41
de la symphyse pubienne à la face dorsale de l’albuginée des corps caverneux, un processus actif de
contractions de ces fibres lisses pourrait induire un certain degré de rétraction de la verge. Certaines
techniques d’allongement associent sur le plan chirurgical un geste sur le ligament suspenseur
associé à une plastie en Z de la peau sous-pubienne et à la mise en place de prothèses péniennes
(16). L’existence de fibres lisses dans le ligament suspenseur doit être rapprochée de l’hypothèse
d’une éventuelle hyperactivité sympathique. Cette hyperactivité pourrait, par le biais de cette
musculature lisse, contracter de façon active et intermittente le ligament.
2) Muscles périnéaux.
Biomécaniquement, au vue de ses insertions et de son adhérence à l’albuginée, le muscle bulbospongieux, s’il se contracte sur un pénis flaccide, pourrait, de par son expansion dorsale notamment,
être à l’origine d’un abaissement et d’une rétraction du pénis sous la symphyse pubienne. Shafik
(17) a effectué un travail anatomique`du sphincter anal externe et du muscle bulbo-spongieux, une
étude électromyographique du réflexe bulbo-caverneux chez des sujets sains, ainsi qu’une étude
per-opératoire de la réponse clinique et électromyographique du sphincter anal externe et du muscle
bulbo-spongieux . Ses conclusions sont : d’un point de vue anatomique, le muscle bulbo-spongieux
serait une expansion du sphincter anal externe ; d’un point de vue physiologique, il dissocie
nettement le rôle du faisceau médian dont la contraction entraîne une rétraction de la verge et qu’il
appelle le « retractor penile muscle », du rôle des faisceaux latéraux ou « compressor bulbae
muscle ».
Ce rôle de rétraction semble encore plus évident pour le muscle ischio-caverneux qui, s’il se
contracte, va tracter le pénis vers la face médiale des ischions où il s’insère et ainsi le rétracter sous
la symphyse pubienne. On notera que chez le cochon d’Inde (18), le muscle ischio-caverneux est
également appelé « retractor penis ».
C) Hypothèses physiopathologiques.
1) Arguments pour une hyperactivité sympathique.
a) L’hyperréflexie autonome du sujet blessé médullaire
La déafférentation complète du système sympathique thoraco-lombal dans les lésions supérieures à
Th6 est l’origine de désordres cliniques important chez ces patients blessés médullaires. La
réduction des efférences sympathiques est à l’origine d’une hypoactivité sympathique source
d’hypotension orthostatique. En revanche, la perte du contrôle régulateur supra-spinal entraîne de
42
réflexes médullaires exagérés sympathiques à l’origine de cette hyperréflexie autonome (HRA). Ce
syndrome est classiquement déclenché par toute épine irritative sous lésionnelle et notamment de la
sphère sacrée ( distension vésicale). Dans sa forme majeure, véritable urgence vitale, ce syndrome
d’HRA est à l’origine d’une vasoconstriction de l’ensemble du territoire sous lésionnel et entraîne
une hypertension artérielle paroxystique sévère, une vasodilatation sus lésionnelle à l’origine de
sueurs profuses, de céphalées pulsatiles et à l’extrême de convulsions, d’ hémorragies cérébrales ou
méningées. Dans sa forme mineure, lors de contractions vésicales, ce syndrome peut être à l’origine
d’un équivalent de besoin d’uriner chez ces patients, se manifestant par des phénomènes
d’horripilation sus lésionnelle ou de sueurs à minima (19). Ainsi, la seule survenue d’une
contraction vésicale peut être chez le blessé médullaire à l’origine d’une hyperactivité sympathique.
La constatation clinique de la survenue de phénomènes de rétraction lors de la miction pourrait faire
évoquer une détumescence active par contraction des fibres musculaires lisses aréolaires.
b) Possible innervation sympathique des muscles périnéaux.
Arai et al(1) ont étudié, chez le chien, la réponse des muscles ischio-caverneux et bulbo-spongieux
à la stimulation du nerf hypogastrique et de la chaîne sympathique lombo-sacrée.
La stimulation du nerf hypogastrique ne provoque pas de contraction détectable des muscles
périnéaux chez les 6 chiens examinés.
En revanche, la stimulation de la chaîne lombo-sacrée provoque des contractions dans les deux
muscles chez les 6 chiens. Après section du nerf d’Eckhardt droit puis gauche, les contractions des
muscles à la stimulation de la chaîne sympathique lombo-sacrée restent inchangées.
Ces signaux passent principalement par le nerf pudendal, en effet, le circuit chaîne sympathique
lombo-sacrée, nerfs splanchniques sacraux et plexus hypogastrique inférieur n’envoit pas, ou très
peu, de signaux aux muscles. On notera que la réponse est plus importante dans le muscle bulbospongieux que dans l’ischio-caverneux.
C’est à partir de ces données que nous avons voulu vérifier l’existence ou l’absence de fibres
musculaires lisses dans ces muscles. En effet, la présence de muscle lisse au sein de ces muscles
coïnciderait avec une éventuelle innervation végétative sympathique.
Cependant, nos prélèvements effectués chez un sujet n’ont pas permis de retrouver des fibres
musculaires lisses dans les muscles ischio-caverneux et bulbo-spongieux.
43
2) Arguments pour une spasticité des muscles périnéaux.
La lésion médullaire est à l’origine, lorsque la moelle sous lésionnelle est préservée mais libérée des
influences supra-spinales, d’une hyperréflectivité sous lésionnelle avec hyperactivité des muscles
striés sous lésionnels. Cette hyperactivité réflexe est bien connue au niveau des muscles périnéaux
et notamment au niveau du sphincter strié uréthral à l’origine de désordres mictionnels.
L’hyperactivité des muscles périnéaux et notamment des ischio-caverneux est l’hypothèse la plus
vraisemblable de la rétraction, ces muscles par leur contraction tonique pouvant être à l’origine d’un
véritable enfouissement du pénis.
Chez certains patients ayant une rétraction pénienne, des expériences cliniques non publiées de
toxine botulique injectée de façon élective dans les muscles ischio-caverneux montrent que
l’injection est efficace et restaure une longueur de pénis satisfaisante et suffisante pour l’autosondage et/ou l’adaptation d’étuis péniens.
Conclusion
Au cours de ce travail, nous avons mis en évidence les structures anatomiques pouvant être
impliquées dans la rétraction du pénis chez le patient blessé médullaire. Ce phénomène actif,
intermittent est à l’origine d’un véritable enfouissement du pénis sous la symphyse pubienne.
Biomécaniquement, les muscles bulbo-spongieux et surtout ischio-caverneux peuvent être à
l’origine d’une rétraction du pénis dans le contexte d’une spasticité périnéale. L’hypothèse d’une
hyperactivité sympathique à l’origine d’une détumescence exagérée ne nous semble pas à elle seule
pouvoir être à l’origine d’un tel enfouissement. Une participation sympathique à l’innervation de
ces muscles striés n’a pu être objectivée par l’étude histologique . En revanche, la possible présence
de fibres lisses dans le ligament suspenseur demande à être validée par des études ultérieures.
Il est probable que ces deux phénomènes (spasticité des muscles striés périnéaux et hyperactivité
sympathique) puissent être intriqués dans le contexte d’une néophysiologie spinale complexe. Une
meilleure connaissance physiopathologique de ce phénomène doit permettre le développement de
thérapeutiques adaptées (toxine botulique), la rétraction du pénis constituant chez ces patients un
handicap important, et pour les cliniciens spécialisés un obstacle à certains choix mictionnels.
44
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