Soins libéraux 38 23/02/04 15:57 Page 38 Soins Libéraux Maladies rares Cherche traitement désespérément En Europe, 25 millions de personnes, dont 4 millions de Français, souffrent de maladies rares. Ces maladies, parfois appelées orphelines, sont d’origine génétique pour 80 % d’entre elles et, accessoirement, de nature infectieuse ou auto-immune. U ne prévalence à 1/2 000, mais souvent inférieure à ce chiffre, fait d’une affection une maladie “rare”, terme que l’on préfère à l’adjectif orpheline. Ces maladies sont souvent associées à des médicaments dits “orphelins” parce qu’ils ne peuvent être développés par l’industrie du médicament en raison de leur peu d’ouverture sur le marché. Les personnes concernées par une maladie rare sont très isolées, d’autant que le corps médical est souvent impuissant, tout simplement parce qu’il ne les connaît pas, en raison de leur prévalence et surtout de leur grand nombre : elles sont quelque 5 000. Cependant, ces maladies se caractérisent pour la plupart par leur gravité, leur chronicité, leur évolutivité, leur pronostic vital souvent sévère. Pour l’instant, seule une prise en charge adaptée aux symptômes peut améliorer la qualité de vie du patient et prolonger son existence. Du fait du sentiment d’isolement et de non-reconnaissance de la société, l’écoute du soignant est essentielle pour le malade et sa famille. L’apport Internet Depuis 1997, une base de données, Orphanet*, sur les maladies rares, créée dans le cadre de la mission des médicaments orphelins du ministère de la Santé, est disponible sur Internet. Le centre Allo-Gènes est plus spécifique aux maladies d’origine génétique. La plateforme Maladies rares**, créée en 2001, regroupe plusieurs associations, et structures. Le problème de l’informaProfessions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 tion est une préoccupation ancienne pour les associations qui constituent aujourd’hui un tissu très riche pour faire connaître ces maladies et orienter les soignants et les patients… Une association : la FMO L’Association Française de Recherche Génétique, créée en 1995 par quelques parents d’enfants malades, a été rebaptisée Fédération des Maladies Orphelines (FMO) en juin 2000 afin de mieux représenter la diversité des actions engagées. La FMO regroupe aujourd’hui 74 associations de malades. Elle intervient pour accompagner et écouter les malades, informer les professionnels de santé et soutenir la recherche, fédérer les associations de malades et sensibiliser les pouvoirs publics. « Notre volonté est de traiter les maladies orphelines dans toutes les dimensions qu’elles recouvrent, à la fois sociales, scientifiques et politiques », explique le président, M. Di Sciullo. La FMO organise chaque année (depuis 1996) les “Jours du nez rouge” afin de sensibiliser l’opinion publique et de collecter des dons. La Fédération dispose, en outre, d’un service d’écoute et d’accueil, la Maison des Maladies Orphelines, qui assure, selon M. Di Sciullo, « une véritable mission de service public auprès des malades ». Cette mission est complétée par la publication d’un guide pratique : “Maladies orphelines : vivre au quotidien”, outil d’accompagnement des familles dans leurs démarches administratives et médicales. Au niveau scientifique, la FMO a d’ores et déjà soutenu 30 projets de recherche et participe aux travaux de la Commission européenne sur les médicaments orphelins à travers l’EAGS (groupement d’associations de patients). « Un traitement de l’ostéogenèse imparfaite (maladie des os de verre) a pu être mis en œuvre en France grâce à notre concours », précise M. Di Sciullo. Par ailleurs, la Fédération collabore avec les députés et le groupe d’études “maladies orphelines”, récemment créé à l’Assemblée nationale. Au rayon des revendications de la Fédération : « une meilleure organisation du système de soins pour éviter l’errance diagnostique, la constitution de réseaux de soins pour améliorer la prise en charge médicale des patients, une harmonisation et une amélioration des prises en charge existantes (adoption d’une loi de solidarité nationale pour une prise en charge décente des malades), le renforcement des associations comme acteurs des projets scientifiques, et une réelle écoute des pouvoirs publics ». Et de conclure : « nos attentes vis-àvis des pouvoirs publics sont simples : qu’ils entendent nos revendications et s’appuient sur l’expertise des malades et de leurs associations pour penser la politique de santé publique ». La lymphangioléïomyomatose (LAM) : une parmi d’autres Avec une incidence de 0,9 cas par million de personnes, la LAM touche environ une centaine de femmes françaises. Cette maladie génétique, mais non héréditaire, est due à une mutation chromosomique qui cause une prolifération de cellules musculaires lisses, principalement au niveau des poumons. Ces cellules forment de véritables kystes pouvant obstruer les voies respiratoires, mais aussi les vaisseaux sanguins et lymphatiques. Soins libéraux 23/02/04 15:57 Page 39 Soins Libéraux La LAM atteint essentiellement le poumon et peut entraîner une insuffisance respiratoire grave, exclusivement chez les femmes, âgées surtout de 20 à 69 ans. Elle est présente soit sous forme isolée (0,9 cas pour 1 million de personnes), soit associée à une autre maladie génétique : la sclérose tubéreuse de Bourneville (40 % des femmes sont porteuses, en ce cas, des deux affections). Une toux associée à des douleurs thoraciques diffuses nécessite une radiographie pulmonaire, qui confirme la présence d’un pneumothorax spontané. Suspectée devant l’absence d’agent causal à ce pneumothorax, la LAM est confirmée par le scanner et la biopsie pulmonaire, qui retrouve des cellules musculaires lisses en grand nombre. Il est parfois possible de retrouver également un chylothorax, lui aussi hautement significatif. L’apparition de tumeurs rénales bénignes (angiomyolipomes), d’une atteinte utérine (sous forme de léiomyomes), d’une ascite ou des adénopathies abdominales prouvent que d’autres localisations de la maladie sont possibles. L’évolution de l’affection est variable, allant parfois jusqu’à une véritable insuffisance respiratoire irréversible, résistante aux traitements usuels et nécessitant quelquefois une greffe de poumon. Dans les formes évolutives, aucune thérapeutique n’est réellement efficace. Seul un traitement hormonal substitutif de type progestatif semble donner quelques espoirs, les estrogènes étant, eux, contre-indiqués. Les études en cours sur cette maladie n’ont pas encore permis de retrouver sa cause initiale. Maladie identifiée rare ou insuffisamment diagnostiquée ? C’est souvent le dilemme. L’apparition d’un pneumothorax spontané chez une femme devrait faire évoquer la pathologie et pratiquer des examens complémentaires (scanner, biopsie de poumon). Quelques exemples de maladies rares ✓ Les neurofibromatoses se caractérisent par des problèmes dermatologiques, osseux, neurologiques, de vision et d’audition. Elles peuvent entraîner la mort (prédisposition à certains cancers, risque de dégénérescence des tumeurs, compression des organes vitaux du fait du volume des tumeurs). Elles touchent plus de 18 000 personnes en France. ✓ L’ostéogenèse imparfaite est une anomalie de la production du collagène et de la matrice de l’os. Elle aboutit à une fragilité osseuse extrême dès l’enfance, et conduit à des déformations possibles du thorax et des membres. On compte 2 000 personnes atteintes en France. ✓ Les maladies héréditaires du métabolisme proviennent de l’absence d’une ou plusieurs réactions chimiques qui permettent la synthèse et la dégradation d’éléments essentiels à la vie de notre organisme. L’absence spécifique de l’une de ces réactions provoque l’accumulation de produits toxiques habituellement détruits. Pour beaucoup de ces affections, le traitement repose sur un régime spécifique basé sur une restriction sévère des protéines. Le nombre de malades est inférieur à 1 500. ✓ Le syndrome de Marfan s’identifie par des symptômes au niveau des os, de la vue et par des problèmes cardiovasculaires. Cette maladie peut aboutir à une rupture d’un anévrisme de l’aorte, qui provoque une mort subite dans 10 % des cas. Il touche officiellement 5 000 personnes en France. ✓ Le syndrome Gilles de la Tourette est un trouble neurologique caractérisé par des mouvements involontaires, rapides et soudains qui se produisent de façon répétée et stéréotypée. La maladie se transmet par un gène dominant qui peut produire différents symptômes chez plusieurs membres d’une même famille. L’incidence est de 5 cas pour 10 000 naissances. Jacques Bidart et François Cohen Quelques adresses : * Orphanet : www.orpha.net ** Maladies Rares Info Services. N° Azur 0 810 63 19 20 ; www.plateforme.maladiesrares.org Alliance maladies rares : www.alliance-maladies-rares.org UNAPEI - Handicaps et maladies rares www.unapei.org. *** FMO : 5, rue Casimir-Delavigne, 75006 Paris. Tél. : 0 820 800 008 http://www.maladies-orphelines.fr En 2003, en France, quatre nouveaux médicaments sont mis à disposition pour soigner des maladies rares. Ces maladies sont : l’hyperammoniémie secondaire au déficit en N-acétylglutamate ; la maladie du Gaucher ; la greffe de moelle osseuse ; l’acromégalie. Focus ... Annonce du diagnostic La première prise en charge à mettre en place est une prise en charge psychologique du stress qui suit l’annonce du diagnostic. C’est le fait des professionnels mais elle fait appel à tous : famille, entourage... Par ailleurs, elle ne se limite pas seulement à ce moment charnière dans la vie de la personne atteinte mais sera poursuivie, si le besoin se fait sentir, ou reprise à chaque étape de l’évolution, si cela s’avère nécessaire. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 39