NOTE D’INTENTION
Les coulisses d’Antigone montrent avant tout l’envers, l’envers du théâtre, l’envers du
décor, l’envers d’Antigone. Il faudra donc interpréter cette histoire des acteurs répé-
tant Antigone avec un jeu très léger, peu théâtral, quasi cinématographique, sans du
tout franchir la barrière du quatrième mur afin que les spectateurs se sentent voyeur
des situations comiques ou dramatiques que les héros de cette compagnie en créa-
tion vont traverser. On peut penser au jeu des acteurs dans le cinéma de Woody Allen
ou Kenneth Branagh par exemple. Il importe que la vérité du jeu, que la sincérité des
acteurs jouant ces comédiens en répétition soit parfaite pour que la mise en abime
opère parfaitement. La pièce alternant les extraits d’Antigone et la vie des acteurs au
travail, il faut que tout se mélange, que le spectateur ne distingue plus le vrai du faux,
que le trouble de l’immersion dans ces répétitions soit total, qu’il devienne plaisir. Il y a
deux partitions, deux histoires dans la même pièce, il faut défendre ces deux axes avec
la même force, que le public s’attache à l’histoire des acteurs mais aussi qu’il soit frus-
tré à chaque fois que l’on quitte un extrait d’Antigone.
Pour accentuer ce trouble de la convention du non franchissement du quatrième mur,
une scène située au beau milieu de la représentation viole justement cette règle, un
des metteurs en scène s’adresse au public qui joue alors le rôle des «spectateurs» assis-
tant à une répétition publique. Le spectateur un court instant devient lui aussi acteur
avant qu’on referme le quatrième mur jusqu’au tomber du rideau.
L’histoire des répétitions est traitée avec humour, décalage, dérision. Il est absolument
nécessaire que toutes ces scènes d’acteurs au travail fassent rire, donnent du plaisir,
de la détente. Certains moments comme dans notre spectacle précédent
«Aujourd’hui c’est fourberies» doivent devenir de vrais petits instants de délire. Comme
il est tout aussi indispensable que le jeu se tende dramatiquement dès que les acteurs
jouent un peu plus sérieusement un morceau de la pièce d’Anouilh. Plus on avance
dans la pièce plus les extraits d’Antigone deviennent prégnants, plus l’interprétation se
tend jusqu’à la scène finale où les acteurs plongent dans Antigone pour ne plus en sor-
tir.
Du point de vue scénographique, le décor représente clairement un théâtre avec ses
loges sa scène son rideau. Il peut jouer à l’endroit et à l’envers. Le spectateur est donc
parfois face au théâtre ou derrière les acteurs...
Ce décor de 7 mètres de large et de trois mètres de haut est transportable, adaptable
autonome. Il peut être installé dans une cantine, un préau, un gymnase, une salle poly-
valente. C’est le premier effet de surprise que nous souhaitons exercer sur les specta-
teurs du collège: dans un lieu qu’ils identifient à leur quotidien, il y a à présent un vrai
théâtre...