Desrotationslongues
et diversifiées
En agriculture biologique, les rota-
tions sont à la base de la réussite
des cultures. Dans les systèmes de
polyculture-élevage biologiques bre-
tons, une grande part des surfaces est
cultivée en fourrage afin d’obtenir une
autonomie fourragère maximale sur
la ferme. La prairie constitue la base
de la rotation. Dans ces rotations,
généralement de 6 à 12 ans, les
cultures de céréales ou de maïs ne
doivent pas se succéder plus de 2
ou 3 années. Les agriculteurs bio privi-
légient des variétés rustiques et adap-
tées au milieu, moins sensibles aux
maladies et aux ravageurs.
La gestion des rotations est égale-
ment une des bases du maraîchage
bio. Les maraîchers bio cultivent en
moyenne 24 espèces de légumes
différents .
Une rotation longue et diversifiée
constitue un des éléments les plus im-
portants en agriculture biologique. Elle
permet :
◊de lutter contre les adventices : plus
la rotation sera longue et diversifiée,
plus la flore adventice sera diversifiée et
moins elle pourra se spécialiser. L’utili-
sation d’herbicides de synthèse est évi-
tée.
◊de lutter contre les ennemis des
cultures en cassant les cycles des mala-
dies et des ravageurs. L’utilisation de
pesticides de synthèse est évitée.
◊d’améliorer la structure du sol (par
exemple grâce à l’alternance de plantes
qui ont des profondeurs d’enracinement
différentes). Ce qui évite le ruissellement.
◊d’entretenir la fertilité du sol : grâce
à la présence de cultures qui enrichissent
le sol (par exemple les légumineuses qui
captent l’azote de l’air). Aussi, chaque
plante a des besoins différents en élé-
ments nutritifs donc en diversifiant les
cultures on diversifie les prélèvements
dans le sol. L’utilisation d’engrais
chimiques est évitée.
Les engrais verts
Ces éléments sont restitués lors de la
décomposition des plantes. Les engrais
verts sont un élément important dans
les rotations des agriculteurs bio. Ils ne
sont pas mis en place dans un souci
réglementaire mais ils font partie inté-
grante de leurs rotations.
Les engrais verts permettent aux agri-
culteurs bio:
◊d’améliorer la structure du sol : leurs
racines créent autant de galeries qui per-
mettent à l’eau et à l’air de s’infiltrer
dans un sol ameubli ; le travail du sol en
sera facilité.
◊de protéger le sol : ils créent un couvre
sol évitant la formation d’une croûte et
l’érosion du sol.
◊d’apporter des éléments organiques
non lessivables : en automne, il peut res-
ter des éléments nutritifs dans le sol qui
peuvent être emportés en profondeur par
l’eau. Les engrais verts les captent et les
stockent en surface (30 à 60 kg d’azote
récupérés lors de l’incorporation du cou-
vert).
◊de stimuler l’activité biologique en
nourrissant les micro-organismes, néces-
saires à la décomposition de la matière
organique en éléments nutritifs.
◊d’empêcher le développement des
herbes indésirables.
Un chargement modéré
Pour rester cohérent et limiter les coûts
de production, la recherche d’autono-
mie sur la ferme est indispensable. La
taille du troupeau doit donc être en
adéquation avec la surface disponible.
La notion de lien au sol est impor-
tante en agriculture biologique.
Les élevages biologiques bretons ont un
chargement modéré. A titre d’exemple,
les élevages laitiers bretons bio sont
à1,13 UGB/ha SFP contre 1,54 UGB/
ha SFP pour les élevage convention-
nels (chiffres Cogedis 2010). Limiter le
nombre d’animaux à l’hectare per-
met d’éviter les excès de fertilisants
à l’échelle de la ferme.
L’apport de matière
organique
L’entretien de la fertilité du sol en bio
passe aussi par l’apport de matière
organique. C’est la base de la ferti-
lisation en agriculture biologique.La
fumure minérale est réservée aux miné-
raux naturels (sédiments marins ou ter-
restres, roches broyées).
Un sol riche en matière organique
a une meilleure stabilité structurale,
une meilleure rétention d’eau et le sol
est plus vivant.
Ledésherbagemécanique
Le désherbage mécanique consiste
à traiter les adventices sans pes-
ticides grâce à des outils adaptées
aux cultures, au sol et au matériel
disponible sur la ferme : herse, houe,
bineuse. Grâce à Opti’mat et Opti’maïs,
le réseau GAB-FRAB accompagne les
agriculteurs et les collectivités dans les
stratégies d’achat et d’utilisation de
matériels de désherbage mécanique et
alterné (désherbage mécanique, com-
plété par un rattrapage chimique en
cas de nécessité pour des agriculteurs
conventionnels).
L’intérêt de la bio pour les zones humides
Un consensus général admet aujourd'hui l'intérêt des zones humides dans
la préservation de la ressource en eau. La majorité des agriculteurs biolo-
giques sont conscients de la nécessité à préserver ces zones et à les laisser
en herbe malgré les difficultés que cela peut engendrer.
Les systèmes bio basés sur l’herbe et le pâturage s’accommodent plus
facilement des particularités qu’engendrent ces zones sensibles.
Témoignag :
"Notre ferme a une superficie de
160 ha dont un tiers est en zones
humides. Nous avons 40 ha de
marais de Vilaine classés Natura
2000 et 10 ha de prairies humides.
La zone de marais permet de
faire un foin très fibreux qui
est parfait pour faire ruminer
les vaches. D'après la méthode
Obsalim ce foin est idéal pour la
stabilité ruminale. Mais sa valeur
alimentaire étant faible, il est donc
distribué surtout aux animaux non
productifs.
Les prairies humides offrent une
flore très diversifiée qui ap-
portent les oligo-élements néces-
saires à la bonne santé du trou-
peau. Tous les 15 jours, on essaie
d’intégrer une zone humide dans le
pâturage ce qui permet aux vaches
de faire une cure d'oligo-éléments.
Lors des 2 années sèches en 2010
et 2011 les zones humides nous
ont permis d'avoir toujours un peu
d'herbe alors que les autres prairies
étaient grillées."
Zoo sur quelque principe clé
d ’agricultur biologiqu e Bretagn
Le cahier des charges de l’agriculture biologique repose sur un pilier majeur :
l’absence d’engrais et de produits phytosanitaires de synthèse. Pour y parvenir
les agriculteurs bio travaillent sur la base d’une approche globale du sys-
tème et non pas culture par culture.
Voici quelques principes clés, notamment pour la polyculture-élevage et le maraî-
chage biologiques, productions bio majoritaires en Bretagne.
L poin sur l qualit d ’ea e Bretagn
Pas de pesticides aux champs pour moins de pesticides dans l’eau
La contamination des eaux par les pesticides et engrais de synthèse est une réalité dans la quasi totalité des rivières
et ressources en eaux bretonnes. Si bien, que sur les 104 usines de production d’eau potable installées sur les rivières et
les captages souterrains de Bretagne, 63 ont été contraintes de s’équiper de dispositifs de traitement des pesticides !
D’autre part, selon l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, 112 captages ont été abandonnés entre 2000 et 2010 en Bretagne
(40% pour cause de qualité de la ressource et 40% pour des problèmes de rationalisation administrative).
Face à ce constat, l’agriculture bio a tous les atouts pour devenir une solution d’avenir pour la reconquête de la qualité
de l’eau. Les agriculteurs bio n’utilisent en effet pas de produits chimiques de synthèse car leur cahier des charges l’interdit.
+ d’herbe, - de maïs
65% de la SAU bio bretonne est
occupée par des herbages . En effet,
l’élevage laitier demeure la produc-
tion bio majoritaire en Bretagne, et
les élevages laitiers bio sont le plus
souvent des systèmes extensifs et
herbagers .
Autre point positif, un passage en bio
s‘accompagne généralement d‘une
réduction du maïs au profit des sur-
faces en herbe.
Les surfaces en herbe constituent
l‘un des couverts végétaux les plus
efficaces pour réduire les risques de
ruissellement et d‘érosion .
De nombreux maraîchers installés
sur de petites surfaces
24% des fermes bio et en conversion
ont pour production principale les
légumes. Ces fermes sont une formi-
dable source d’emploi : la moyenne de
SAU par UTH est de 4 ha. Le maraî-
chage biologique permet de créer des
emplois nombreux grâce à une activité
économique respectueuse de l’envi-
ronnement. Concernant les autres pro-
ductions bio bretonnes, la répartition
des fermes est la suivante : 10% en
bovins viande,9% en volailles,9%
en céréales et polyculture,6% en
fruits,5% en ovins caprins,2% en
porcs,1% en apiculture,1% en poly-
culture élevage.
Les atouts de la bio en
Bretagne
◊Augmentation du nombre de
fermes bio. Entre 2001 et 2011 la Bre-
tagne passe de 960 à 1680 fermes bio
ou en conversion, soit une augmenta-
tion de 75% (selon l’Observatoire ré-
gionale de la production biologique).
Une dynamique d’autant plus intéres-
sante que la Bretagne a perdu un tiers
de ses exploitations entre 2000 et
2010.
◊La bio créatrice d’emplois. A sur-
face égale, une ferme bio nécessite
davantage de main d’oeuvre qu’une
ferme conventionnelle en moyenne
plus 0,6 Unité de Travail Annuel
(UTA) (selon le recensement général
agricole Bretagne 2010.)
◊La bio créatrice de revenus :
l’efficacité économique des éle-
vages laitiers bio bretons est d’un
très bon niveau avec un EBE avant
main d’oeuvre de 358 €/1 000 litres
contre 268 €/1 000 l dans le réseau
conventionnel. (selon les données de
la Chambre d’Agriculture de Bretagne
sur le suivi de son réseau de fermes
bio en 2010-2011)
L’agriculture en
Bretagne
◊Une faible valeur ajoutée.
La Bretagne accueille 20% des vaches
laitières, 56% des porcs, 41% des
poules pondeuses, etc ... Et pourtant,
la valeur ajoutée brute de l’agriculture
bretonne représente seulement 7% de
la valeur ajoutée de l’agriculture fran-
çaise. Ce qui s’explique par un niveau
élevé de consommations intermé-
diaires (aliments du bétail, engrais ...).
◊Des agriculteurs mal rémunérés.
En 2009, le résultat net par actif non
salarié n’est que de 10 600€/an, ce qui
place la Bretagne au 21ème et avant
dernier rang des régions françaises.
Le chiffre d l bi e Bretagn
une part importante de surfaces en herbe et de nombreux maraîchers
"L’agriculture biologique ne cesse de progresser en Bretagne. On y dénombre aujourd’hui 1682 fermes bio,
soit 5% des fermes. Elles couvrent 58 000 hectares, ce qui représente 3,5% de la SAU régionale."
Le préventif moins cher
que le curatif
Jusqu’à présent, la reconquête de la
qualité de l’eau a été essentiellement
envisagée sous l’angle curatif par le
traitement systématique des eaux
polluées. Un système coûteux et peu
durable. D’après une étude du Com-
missariat général au développement
durable, en France, les surcoûts et
pertes financières évalués et attri-
bués aux pollutions agricoles diffuses
se situeraient au minimum dans une
fourchette comprise entre 1100 et
1700 millions d’euros par an, dont
640 à 1140 millions d’euros répercu-
tés sur la facture d’eau des ménages.
Pour les ménages des localités les
plus polluées, ces dépenses supplé-
mentaires pourraient atteindre 494€
par ménage et par an.
Pour les parcelles situées sur des aires
d’alimentation de captages d’eau
potable, les coûts de potabilisation
dus à l’agriculture conventionnelle se
situent dans une fourchette de 800 à
2400€ par hectare et par an. Le coût
du curatif peut repésenter jusqu’à 87
fois celui du préventif (AESN).
En Bretagne :
l’exemple de Saint-yvi
Au début des années 90, le captage de
Stang Linguennec, situé dans la com-
mune de Saint-Yvi, dans le Finistère,
dépassait régulièrement le taux régle-
mentaire de nitrates de 50 mg/L.
Devant ce constat et soucieuse de
préserver la ressource, la commune a
entamé des démarches pour réha-
biliter ce captage et en explorer un
nouveau à Trévinec, tout en mettant
en place des périmètres de protection
des captages (environ 35 hectares
pour chaque captage).
En 1995, Saint-Yvi met en œuvre le
captage de Trevinec, et achète du fon-
cier dans son périmètre immédiat. La
commune en boise une partie, laisse
une partie des surfaces en herbe et
permet à un agriculteur bio de culti-
ver une partie des terres acquises. A
Stang Linguennec, la commune ac-
quiert également du foncier, qu’elle
boise également et laisse en herbe.
Elle met en place des restrictions des
pratiques agricoles conventionnelles
et, depuis 2010, un suivi agronomique
des cultures situées sur le périmètre
de protection du captage. Parallèle-
ment, un contrôle sera effectué chez
tous les particuliers en assainissement
non collectifs.
Entre 1993 et 2008, la commune a
constaté une baisse rapide des te-
neurs en nitrates, déjà faibles, à
Trévinec (de 18 mg/L à environs
10mg/L), ainsi qu’une baisse initiale
puis une stabilité à Stang Linguennec
(de 58 mg/L à environs 40mg/L).
Au final, Saint-Yvi distribue une eau
qualitativement très satisfaisante et
à un prix durable, moins cher que la
moyenne départementale.
élevage
Laitier
20%
élevage
Poules pondeuses
41%
Valeur ajoutée
agriculture française
7%
élevage
porçin
56%
Source : AGRESTE | DRAAF bretagne | chiffres 2010
Sources :
(1) http://www.aria.developpement-durable.gouv.fr
(2) Cellule d’orientation régionale pour la protection
des eaux contre les pesticides | 2010
(3) Eaux et rivières de Bretagne
principales
pollutions constatées
en Bretagne
(2)86 pesticides
dont 6 interdits en France,
ont été trouvés en Bretagne
par le réseau CORDEP, sur
202 recherchés.
(3)115 sites touchés
par les algues vertes
en Bretagne
(1)95% des
75 000 t de nitrates
qui se retrouvent annuel-
lement dans les cours
d'eau et sur les côtes
bretonnes proviennent de
l'agriculture.
Des cas concrets :
Lons-le-Saulnier et Eau de Paris
De nombreux exemples montrent les gains obtenus grâce à un travail sur
un traitement préventif plutôt que curatif des pollutions diffuses issues du
milieu agricole. A Lons-le-Saulnier (Jura), grâce à un système d’aides finan-
cières pour les agriculteurs situés sur le bassin d’alimentation de captage,
ce sont 220 hectares de terres agricoles qui ont été convertis en bio,
sur les 920 hectares de périmètre éloigné et rapproché. Depuis 2002, la
ville de 20 000 habitants développe des débouchés pour les produits bio
à travers la restauration collective (15 % des approvisionnements). Cette
volonté politique en faveur de l’agriculture biologique a permis à la com-
mune de stabiliser les teneurs en nitrates aux alentours de 20 mg/l pour
un coût de soutien à l’agriculture biologique de 0,01€/m3 d’eau distribué.
A titre de comparaison, la seule dénitrification de l’eau coûte 0,27€/m3
d’eau distribué en France.
Autre exemple, depuis 2008, Eau de Paris soutient le développement de
l’AB dans la vallée de la Vanne, à cheval sur l’Yonne et l’Aube, qui regroupe
un cinquième des captages d’Eau de Paris. L’objectif affiché est de pré-
server à long terme la qualité de la ressource. Cette aire d’alimentation de
captage occupée à 60% par des terres agricoles, est ainsi passée en 5 ans
de 290 à 1500 ha convertis en agriculture biologique (de 7 à 22 agriculteurs
impliqués) grâce à une MAE-T en faveur de la conversion et de la limitation
de la fertilisation azotée. Une pratique qui, avec l’aval de l’ État, a permis
de sensiblement bonifier le niveau des MAE classique et qui prouve qu’on
peut rapidement réorienter les pratiques agricoles d’un territoire.
Les clés de leur réussite
–Un accompagnement technique par les associations locales de déve-
loppement de l’agriculture biologique
– Un accompagnement financier
– Un accompagnement commercial à travers la création de débouchés
en restauration collective.
–Déclaration d’utilité publique sur les périmètres de protection des
captages de la ville à Lons-le-Saulnier.
Sébastien Baron
éleveur laitier biologique
Allaire (56)
65 vaches laitières
4 UTH
160 ha.
Définitio
La rotation des cultures consiste
à alterner sur une même parcelle
(ou sur une même planche), des
cultures de familles botaniques
différentes et n’ayant pas les
mêmes besoins.
Définitio
Les engrais verts sont des plantes
que l’on met en interculture pour
fixer les éléments nutritifs du sol
et éviter leur lessivage.
▲L’agriculture biologique: une approche
globale, à l’échelle du système de production
▲Rotations longues et diversifiées, chargement
modéré et intégration d’importantes surfaces
en herbe constituent des éléments clés pour la
protection de l’eau.
54 milliards €
Le coût c omplet
du traitement a nnuel
des excédents
d’ ag ri cu lt ur e
et d’élevage
dissouts dans l ’eau
en France
budget
européen
annuel de la PAC.