Des effets délétères dans Papineau

publicité
LeDroit
ACTUALITÉS 17
ÉDITION WEEK-END DU SAMEDI 25 JUILLET 2015
L’avenir est à ceux qui luttent
Fondé le 27 mars 1913
forum
COMPRESSIONS AU CISSSO
Des effets délétères dans Papineau
Dans notre région, le couperet est
tombé le 29 juin dernier. La direction du Centre intégré de santé
et de services sociaux (CISSS) de
l’Outaouais a alors fait connaître
l’ampleur des compressions budgétaires qu’elle va devoir appliquer
et exposer les mesures retenues
pour y parvenir.
Trente-trois postes seront abolis, uniquement pour l’installation
autrefois identifiée comme le CSSS
de Papineau, dont dix concernent
des membres de l’Alliance du personnel professionnel et technique
de la santé et des services sociaux
(APTS) : cinq dans le domaine psychosocial, deux en organisation
communautaire et trois technologistes médicaux (en raison de la
fermeture du laboratoire au CLSC
de la Petite-Nation). Malgré la promesse de maintenir l’ensemble des
services, ces mesures suscitent leur
lot d’inquiétudes.
Avec la fermeture du laboratoire
du CLSC de la Petite-Nation, certaines analyses indispensables à
l’établissement d’un diagnostic
d’infection bactérienne ou virale ou encore d’une leucémie ne
seront plus disponibles sur place.
Les médecins accepteront-ils de
travailler sans avoir accès à ces
outils ? Si certains médecins préfèrent aller exercer là où ils disposent
de tous les services requis par leur
pratique médicale, la survie même
de l’urgence est menacée.
Les effets de l’abolition de deux
des quatre postes en organisation
— ERICK LABBE, ARCHIVES LE SOLEIL
communautaire ne seront peutêtre pas mesurables à court terme
mais comme cette équipe relie les
établissements de santé et les organismes communautaires qui assurent la promotion de la santé et la
prévention, l’amputer de la moitié
de ses ressources ne sera pas sans
conséquence pour les projets mis
en place afin de contrer l’insécurité
alimentaire, améliorer la qualité de
vie des aînés, offrir du transport à la
population vulnérable ou du répit
aux proches aidants. Des choix difficiles devront être faits, des projets
délaissés. Et ce sera le retour à la
case départ pour certains groupes
de personnes démunies…
LES CONSÉQUENCES
À la suite de l’abolition de pas
moins de cinq postes en santé
mentale et services psychosociaux, on peut se demander où
se retrouveront les personnes qui
étaient suivies par ce personnel
professionnel ? Toute coupure de
personnel dans ce secteur induit
une augmentation du délai pour
les personnes en attente de services. On sait pourtant que les problèmes psychosociaux, lorsqu’ils
ne sont pas pris en charge, s’amplifient, dégénèrent et en entraînent
d’autres : baisse d’estime de soi,
consommation, perte de revenus
ou d’emplois, conflits conjugaux
et familiaux, suicides, meurtres.
Il faut maintenir accessibles ces
services afin de prévenir des drames irréversibles qui pourraient
être évités avec le soutien adéquat.
Le gouvernement, dans son
entêtement à vouloir à tout prix
retrouver rapidement l’équilibre
budgétaire, ferme les yeux sur les
besoins de ses citoyens. Ensemble,
nous pouvons contribuer à les lui
rouvrir en dénonçant le saccage de
nos services.
Sylvie Godin, Répondante politique
APTS
«
Les besoins des patients devraient primer
À VOUS LA PAROLE
Ces jours-ci, on fait beaucoup de
cas du nombre de médecins qui ont
franchi le Rubicon en délaissant le
public pour aller pratiquer leur art
dans le privé. Beaucoup d’encre pour
51 médecins sur 19 000 qui, en six
mois, ont fait le saut.
Au global, depuis les 10 dernières années, on en compte 348. Ce
nombre représente 1,8 % des médecins du Québec pour cette même
période.
On est loin ici d’un exode massif. Les raisons de ces défections
sont multiples et ne peuvent être
attribuées au seul fait que notre
ministre de la Santé ait décidé
d’ébranler les colonnes du temple
de la culture médicale québécoise.
On ne peut nier que certains
médecins ont réagi avec émotion,
préférant ne pas laisser la poussière retomber avant de prendre leur
décision.
D’autres vivent difficilement avec
le fait que notre système de santé ne
soit pas à la hauteur – listes d’attente
qui ne s’amenuisent pas, manque de
ressources de tout acabit, fermeture
de lits et de plateaux techniques,
[email protected]
difficulté d’obtenir un rendez-vous
avec un médecin, etc. – et décident
dès lors de flirter avec la médecine
privée. Puis, il y a ceux dont une
partie de leur pratique se fait dans
le privé.
On y retrouve, entre autres, des
chirurgiens plasticiens, des dermatologues, des ophtalmologistes, des
orthopédistes, des psychiatres, etc.
SENTIMENT DE TRAHISON
Là où le bât blesse cependant,
quand nous entendons et que nous
lisons des commentaires du public,
c’est que la très grande majorité des
patients se sentent délaissés, voire
trahis, par leur médecin.
Et on peut les comprendre. On met
toute notre confiance en notre docteur parce que notre santé est notre
bien le plus précieux.
Aucun patient ne devrait devenir un orphelin de la profession
médicale parce que son docteur est
contraint de subir les propos et les
actions d’un ministre, qui a décidé a
tort ou à raison de les mettre au pas.
Les médecins doivent savoir
que leur décision de migrer vers le
privé vient avec l’obligation pour
eux, comme le prévoit leur code de
déontologie, de s’assurer que chaque patient sur leur liste soit pris en
charge par un collègue avant de tenter l’aventure.
Les besoins de la population doivent primer.
Le patient doit être au cœur du système. Mais l’est-il vraiment ? Faisons
le nécessaire pour qu’il le soit.
Annie Trépanier (président) et
Jean Gouin (directeur général),
Fédération des médecins résidents
du Québec
Téléchargement