L’Économie Sociale et Solidaire (ESS) constitue un secteur économique
dynamique de l’agglomération nancéienne, avec 18 000 emplois dont 3 200
créés depuis 2008.
Inscrites dans le quotidien des habitants, les 1 220 structures de l’ESS sont
cependant peu et mal connues. Positionnées à la croisée des secteurs écono-
miques classiques et de la sphère publique, elles forment une galaxie où coha-
bitent des poids lourds historiques (comme les coopératives et les mutuelles)
et des petites structures de bénévoles. Au-delà de cette diversité, les structures
de l’ESS se retrouvent autour d’une ambition commune : conjuguer efficacité
économique et impact social.
Aujourd’hui, décideurs politiques, acteurs économiques et citoyens portent un
regard renouvelé sur l’ESS dans un contexte de requestionnement des modes
de développement et de prise en compte du développement durable. Forte
d’emplois non délocalisables, l’ESS a montré au cours de son histoire sa capa-
cité d’adaptation et d’accompagnement des mutations de l’économie.
L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE
DANS LE GRAND NANCY
SOMMAIRE
EN RÉSUMÉ
ÉCONOMIE
#10
NOV. 2013
DE LADUAN
Dans un contexte de mutation des
modèles de développement,
les repères et les stratégies des
acteurs économiques évoluent. Parmi
eux, certains acteurs de l’Economie
Sociale et Solidaire explorent des
voies originales : associer les salariés
à l’entreprise, investir les champs de
l’insertion sociale, ou encore
s’engager dans des domaines non
couverts par l’économie classique.
LAduan propose d’apporter un
éclairage sur l’Economie Sociale et
Solidaire, un secteur à l’origine
d’importantes innovations sociales et
qui offre des perspectives de dévelop-
pement économique intéressantes
pour le territoire du Grand Nancy.
aduan
Agence de développement et d’urbAnisme
de l’Aire urbAine nAncéienne
L’ESS, 200 ans d’histoire ......................................................................................................................2
Une économie foisonnante ................................................................................................................ 4
Des formes juridiques spéciques ..................................................................................................... 6
Une économie au cœur du quotidien des Grands-Nancéiens .......................................................... 8
Un moteur de l’emploi local ............................................................................................................. 10
Une économie qui se renouvelle........................................................................................................11
Quelles perspectives pour les territoires ? ....................................................................................... 12
RAMOS IBANEZ Jésus architecte
2 LES CAHIERS DE LADUAN #10 | NOVEMBRE 2013
L’Économie sociale et solidaire,
200 ans d’Histoire
Source : UES 2012
L’ESS s’appuie sur une histoire ancienne. C’est au XIXe siècle qu’elle se développe véritablement,
en réponse aux recongurations de l’économie classique et de la sphère publique, ainsi qu’à
l’émergence de nouvelles questions sociales.
Les 1ères sociétés de secours mutuel sont nées au Moyen-Âge avec les guildes,
les confréries, les fruitières du Jura, les corporations et compagnonnages, etc.
C’est au XIXe siècle, avec la révolution industrielle, que l’ESS se développe vérita-
blement, notamment avec la création des mutuelles de prévoyance et de santé.
Ces sociétés sont alors l’expression d’efforts collectifs d’ouvriers en réponse à
l’absence de systèmes de prévoyance collective et à l’augmentation des risques
d’accidents du travail et de maladie.
Début XXe siècle, l’ESS connaît une accélération de son développement avec l’es-
sor de l’économie coopérative. Cette dernière se développe plus particulièrement
dans la distribution, l’agriculture et les services bancaires.
Avec les Trente Glorieuses, le terme même d’économie sociale disparaît.
L’ESS réapparaît dans les années 1970, avec le net développement d’associations
de services à la personne, notamment dans le secteur de l’insertion profession-
nelle. La transformation du rôle de l’État-providence et la fin du plein emploi ont
fait émerger de nouvelles demandes sociales, traduisant des besoins qui ne sem-
blaient plus être satisfaits de manière suffisante par le marché ou par l’interven-
tion publique.
Décideurs politiques, acteurs économiques et citoyens portent aujourd’hui un
regard renouvelé sur l’ESS dans un contexte de requestionnement des modes
de développement et de prise en compte du développement durable. La créa-
tion en 2012 d’un ministère délégué, la préparation d’une loi pour 2014, l’éclosion
de chaires dédiées à cette thématique dans les écoles de commerce, la multi-
plication des incubateurs d’entreprises sociales, l’organisation de conférences et
séminaires portant sur l’ESS soulignent cet intérêt.
Moyen-Âge
L’ESS AVANT L’ESS
Aujourd’hui
UN REGARD RENOUVELÉ
XIXe siècle
L’ÉMERGENCE DE L’ESS
Début du XXe siècle
L’ESSOR DU MOUVEMENT
COOPÉRATIF
Années 1950
LA TRAVERSÉE DU DÉSERT
Années 1970-80
LE RENOUVEAU
3
1827
1re MUTUELLE DE PRÉVOYANCE
À Lyon, dans les années 1830 les
ouvriers tisserands de la soie dans le
quartier de la Croix Rousse décident
de s’organiser pour s’épauler en cas
de maladie ou d’accident. Ils créent
des sociétés mutualistes. La Société de
défense des intérêts des Canuts est la
première mutuelle créée.
1835
1re ÉPICERIE COOPÉRATIVE
C’est également à Lyon que va naître
« Le commerce véridique et social »,
la première coopérative de consom-
mation. C’est un magasin géré par les
clients qui peuvent ainsi bénéficier des
meilleurs prix. Dès lors, les coopératives
de consommation se structurent, au
point de devenir le plus puissant réseau
de distribution alimentaire jusque dans
les années 1960 (avant l’apparition des
supermarchés).
1880
1re USINE QUI APPARTIENT
AUX OUVRIERS
En pleine révolution industrielle, Jean-
Baptiste André Godin imagine une
manière totalement nouvelle de tra-
vailler. Il créé à Guise (Aisne) une usine
de poêles qui appartient aux ouvriers.
Ceux-ci élisent leurs dirigeants, vivent
ensemble dans un grand immeuble
moderne (le familistère) et bénéficient
de nombreux services. Les femmes y
ont également le droit de vote, soit
soixante cinq ans avant que celui-ci ne
soit accordé au niveau national.
1934
CRÉATION DE LA MAIF,
LA 1re MUTUELLE D’ASSURANCE
AUTOMOBILE
Dans un contexte de développement
de l’automobile, naît la MAAIF à Niort :
la Mutuelle d’assurance automobile
des instituteurs de France (aujourd’hui
MAIF). C’est alors une caisse d’entraide
instaurée par des instituteurs (qui
commençaient à acheter des voitures)
leur permettant d’assurer leur véhicule
pour un coût réduit, par rapport à ceux
pratiqués par des sociétés en situation
de quasi monopole.
1936
LES AUBERGES DE JEUNESSE
L’instauration des congés payés en 1936
marquent la création et le développe-
ment de nombreuses associations vi-
sant à organiser les vacances et à aider
les personnes aux moyens limités à
pouvoir en profiter. Parmi elles, on peut
citer les auberges de jeunesse.
1882
NAISSANCE DU CRÉDIT MUTUEL
S’inspirant de l’exemple des banques
mutualistes en Allemagne et en Italie,
de petites communautés villageoises
se regroupent pour avoir accès à un
crédit bon marché. La première caisse
de Crédit Mutuel est fondée en 1882 à
Wantzenau, une commune rurale près
de Strasbourg. Trois ans plus tard, c’est
dans le Jura qu’est créée la Société de
Crédit Agricole de l’arrondissement de
Poligny, actuel Crédit Agricole.
L’Économie Sociale et Solidaire a donné lieu par le passé
à d’importantes innovations sociales : mutuelles, banques, entreprises...
L’ESS et l’économie classique sont deux modèles qui ne s’opposent pas.
Zoom sur 6 dates qui ont marqué l’Économie sociale et Solidaire
4 LES CAHIERS DE LADUAN #10 | NOVEMBRE 2013
L’ESS, une économie foisonnante
L’Économie Sociale et Solidaire (ESS) est souvent présentée comme com-
plexe et difcile à dénir. Si les structures de l’ESS sont extrêmement variées
(taille, secteur d’activité, statut, modèle économique, etc.), toutes respectent
plusieurs grands principes de base.
Une diversité de structures et de secteurs
Protection sociale, offre de soins, activités sportives et culturelles, filières agri-
coles, distribution avec les coopératives de consommateurs ou les groupe-
ments de commerçants ou encore activités de production, dans l’industrie,
l’artisanat ou dans le logement social… l’ensemble de l’ESS forme une galaxie
d’activités foisonnante.
Le terme d’ESS est en effet utilisé pour désigner des pratiques et des entités
très différentes comme les mutuelles d’assurance, les banques coopératives, le
commerce équitable, les associations de quartier, les services de proximité, le
microcrédit, le tourisme solidaire, l’agriculture durable, ou encore les réseaux
d’échange de savoirs.
L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE
EN CHIFFRES :
38 millions de Français protégés
par une mutuelle de l’ESS
1 automobile sur 2 et
2 habitations sur 3 assurées
par une mutuelle de l’ESS
60 % des dépôts bancaires
40 % de l’agroalimentaire français
50 % de la production HLM en
accession sociale à la propriété
10 % des artisans en coopérative
30 % des hôpitaux
9 personnes handicapées sur 10
prises en charge par l’ESS
68 % des services d’aide au domi-
cile des personnes dépendantes
(Source : Ministère de l’Économie
et des Finances, projet de loi Économie
Sociale et Solidaire, juin 2013 )
Six idées reçues sur l’Économie Sociale et Solidaire
Il n’y a que des bénévoles
dans l’ESS
14 % des salariés du Grand Nancy tra-
vaillent dans une structure de l’ESS.
On estime à près de 100 000 le
nombre d’emplois privés créés chaque
année en France pour l’ESS.
FAuX
FAuX
Les salariés sont tous
d’anciens militants
sans formation spécique
Comme dans le secteur classique,
l’ESS a besoin pour fonctionner de
profils variés : des travailleurs sociaux,
mais également des commerciaux,
des dirigeants expérimentés, des char-
gés de communication… Une étude
nationale récente de l’APEC témoigne
de l’attirance des cadres pour les em-
plois de l’ESS, notamment auprès des
jeunes diplômés.
Les structures
de l’ESS ne font pas
de bénéces
Parmi les valeurs de l’ESS, figure la
non-lucrativité. Cependant, cette der-
nière notion nest pas synonyme d’ab-
sence de bénéfices. Comme toutes
structures économiques, les entre-
prises et associations de l’ESS doivent
être rentables pour être viables et
assurer leur autonomie financière.
C’est par l’usage réservé aux bénéfices
que les établissements de l’ESS se dis-
tinguent : les bénéfices sont systéma-
tiquement réinvestis dans la structure
et/ou partagés entre les salariés.
FAuX
5
Quatre principes clés
Au-delà de cette diversité, les structures de l’ESS se retrouvent autour de pra-
tiques et de valeurs partagées. La démocratie est à la base de leur fonctionne-
ment. Elle se traduit au travers de quatre principes structurants, formalisés en
1980 dans le cadre d’une charte nationale.
• La nalité sociale : l’intérêt collectif prime sur l’intérêt individuel. Cette fina-
lité est au cœur de chaque projet d’ESS et peut se traduire de plusieurs fa-
çons : développement d’activités respectueuses de l’environnement, réponse
à des besoins peu ou mal satisfaits, réduction des inégalités…
• Une gouvernance participative : respectant le principe « une personne = une
voix », les structures de l’ESS associent les parties prenantes à l’exercice du
pouvoir. Une des caractéristiques de l’ESS est en effet d’intégrer les bénéfi-
ciaires (clients, usagers, consommateurs ou travailleurs) à la gestion de la
structure, ces derniers étant ses adhérents, associés ou sociétaires.
• Une lucrativité limitée : la satisfaction des besoins collectifs prime sur la
recherche du profit. Ce dernier cependant n’est pas exclu. Il est considéré
comme un instrument pour réaliser des objectifs humains et sociaux. Si la
structure est lucrative, les bénéfices sont prioritairement investis dans l’acti-
vité et répartis de manière limitée entre les membres.
Un ancrage territorial : le territoire et ses habitants sont la composante es-
sentielle de l’activité des associations et entreprises de l’ESS. Ces dernières
développent en effet leur offre à partir des besoins identifiés sur le territoire,
venant compléter l’offre des secteurs privé et public. Lautre conséquence est
l’utilisation des ressources locales.
FAuX
FAuX
FAuX
L’ESS, ça ne marche pas
Les structures de l’ESS ne font pas
l’impasse sur la performance écono-
mique : nombre d’entre elles sont lea-
ders sur leur marché, à l’instar de Sys-
tème U (coopérative de commerçants)
ou de Chèque Déjeuner (coopérative
de production), qui font partie du top
100 des entreprises françaises. Les
coopératives agricoles, par exemple,
représentent 40 % de l’agroalimen-
taire français avec des marques recon-
nues (Yoplait, Banette, Delpeyrat, etc.).
L’ESS est une
économie locale
Sociétés de personnes se distinguant
des sociétés de capitaux, les entre-
prises et structures de l’ESS parti-
cipent à l’ancrage des activités et des
emplois sur le territoire, tout en étant,
pour un certain nombre, dans des stra-
tégies de développement national et
international.
Les salariés sont
tous patrons
Comme toutes les entreprises, les
structures de l’ESS ont une organi-
sation et une direction. Seules les
grandes décisions stratégiques sont
prises avec l’ensemble des salariés as-
sociés lors des assemblées générales.
Au quotidien, la direction assume plei-
nement son rôle.
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