Troubles envahissants du développement et rapports à l’espace
un objet déplacé, un changement de couleur… ne sont pas perçus comme liés à un évènement
n’affectant pas la globalité de la scène perçue (utilisation momentanée de l’objet, réfection d’un
local) du fait de l’impossibilité de lier percepts actuels et contextualisation (objet emporté par le
soignant le matin-même… travaux du peintre, la veille).
De ce fait, « les personnes autistes perçoivent l’ensemble des détails d’une situation sans les
hiérarchiser quant à leur pertinence explicative du contexte. Ne filtrant pas leurs perceptions,
les autistes sont submergés par les stimuli, sauf à s’en abstraire en focalisant leur concentration
sur un centre d’intérêt ou une source prévisible de stimuli » (Renoux, 2006). La personne
autiste est donc caractérisée par une hypersensibilité perceptive, avec pour conséquence, des
conduites de sélection face à l’environnement, pour fuir « une cacophonie qui rapidement la
saturerait et l’agresserait » (ibid), avec pour conséquence fâcheuse de rendre indispensables
ces détails, objets d’une fixation sensorielle sécurisante.
d. De la dimension neurobiologique à l’approche clinique
L’appareil psychique se construit dans et par la relation à l’Autre, dans le cadre d’interactions
entre des facteurs endogènes et l’environnement. Le concept de pulsion, définie par Freud
dans Trois essais sur la théorie sexuelle, se situe à l’articulation entre le substrat somatique et
le psychisme ; la mise en place des circuits pulsionnels est fondamentale dans la construction
de l’appareil psychique. Les sensations intéroceptives (sensations internes) ou extéroceptives
(stimuli externes) constituent la source des pulsions ; ancrées dans le corporel, elles génèrent
une poussée (d’où le terme de pulsion), un état de tension qui demande à être abaissé voire
supprimé. Et c’est dans le cadre des relations intersubjectives, que ce but pourra être atteint :
grâce à l’objet investi par le sujet, (objet, entendu ici au sens psychanalytique, c'est-à-dire la
personne ou l’aspect de la personne investie) pour satisfaire sa pulsion.
Dans les tout premiers mois de sa vie, pour peu que ces expériences s’accompagnent d’une
sensation de plaisir, elles permettent peu à peu au bébé de tolérer et "traiter" ces éprouvés
initialement désagréables, en même temps qu’il prend conscience de l’existence d’une réalité
extérieure, indépendante de lui, mais suffisamment bienveillante à son égard. C’est le cas par
exemple lorsque le sein donné par la mère au bébé apaise sa faim, en même temps qu’il se
rassure progressivement, par la répétition de cette expérience, sur la possibilité d’être de
nouveau rassasié quand réapparaîtra cette sensation déplaisante, grâce à un Autre (la mère)
dont il dépend, et en qui il peut avoir confiance.
Qu’en a-t-il été de cette expérience chez les personnes atteintes de troubles envahissants du
développement, considérant les déficits sensoriels massifs que l’on vient de décrire ? Meltzer,
cité par H. Ray Flaud, parle du psychisme des personnes autistes comme le résultat d’un «
démantèlement du Moi en ses capacités perceptuelles séparées ; le voir, le toucher, l’entendre,
le sentir… qui, au bout du compte réduisent ce Moi en une multiplicité d’évènements
unisensoriels dans lesquels, animé et inanimé deviennent indistinguables », de même
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