II, et maintenant Benoît XVI. Chaque fois,
les catholiques, déçus, angoissés, révoltés,
par le “pontificat” précédent, ont pensé,
cru, écrit (voulu penser, croire, écrire…)
que finalement tout allait changer. Petit à
petit l’illusion s’évanouissait, mais entre-
temps, nombreux sont parmi nous ceux qui
avaient changé de camp, irréversiblement.
Celui qui a de la mémoire, celui qui a
vécu ces époques, se souviendra que nom-
breux sont ceux qui pensèrent que Paul VI
aurait mis fin – peu à peu – à la Révolution
conciliaire. La Nota Prævia (au cours du
Concile), Humanæ vitæ (il y a juste quaran-
te ans), le Credo du Peuple de Dieu, Myste-
rium Fidei… nombreuses, très nombreuses
sont les interventions de Paul VI qui à
l’époque – il y a de nombreuses années –
tranquillisèrent les bons catholiques ; le
Père Guérard des Lauriers, dans le premier
numéro des Cahiers de Cassiciacum (p. 69),
rappelait sa propre expérience quand, reli-
gieux dominicain, il en appela à Mgr
Philippe o.p. de la S. C. des Religieux,
puisque, contre les dispositions de Paul VI,
les Dominicains récitaient l’office choral en
français et non plus en latin. Mgr Philippe
répondit au Père Guérard que précisément,
quelques jours avant, Paul VI avait concé-
dé cette pratique qu’il avait lui-même inter-
dite : “nous n’avons plus qu’à obéir”.
C’était en 1967 ! Après cela, ce fut la Nou-
velle Messe, la réaction du Bref Examen
Critique, les discours rassurants de Paul
VI : “nous n’avons plus qu’à obéir”… et la
révolution continua. Les premiers collabo-
rateurs de Mgr Lefebvre, les premiers sé-
minaristes, le quittèrent en 1969, d’autres
en 1976, d’autres encore en 1977… parce
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que Paul VI promettait à tous le retour à la
Tradition. Tout juste élu, Jean-Paul Ier fut
reconnu comme Pape légitime, y compris
par des prêtres qui ne reconnaissaient pas
la légitimité de Paul VI (ils s’aperçurent
bien vite de l’erreur). Peu après, ce fut
Jean-Paul II qui charma Jean Madiran et
Mgr Lefebvre avec “le Concile à la lumière
de la Tradition”. S’ensuivirent les expul-
sions des prêtres et des séminaristes d’Écô-
ne qui ne reconnaissaient pas la légitimité
de Wojtyla ni l’intensification des tracta-
tions. S’ensuivirent aussi, néanmoins, la vi-
site à la Synagogue de Rome, le baiser au
Coran, la prière au mur des lamentations,
le scandale d’Assise… La désillusion prit la
place de l’illusion, mais entre-temps com-
bien quittèrent leur poste de combat ?
Nous nous souvenons de leurs noms, en
France comme en Italie. En dépit de tout
cela, les tractations continuèrent, le cardi-
nal Gagnon fut accueilli triomphalement
dans toutes les maisons de la Fraternité
Saint-Pie X, et ce fut aussi la signature par
Mgr Lefebvre d’un protocole d’entente. La
signature fut retirée, les consécrations
épiscopales furent punies par l’“excommu-
nication”… mais pendant ce temps com-
bien d’autres quittèrent leur poste séduits
par les promesses de la Commission nou-
vellement née Ecclesia Dei ?
Le scénario est toujours le même, et
l’on s’étonne que chaque fois il se répète
avec les mêmes résultats. Le Jubilé de l’an
2000 vit la Fraternité Saint-Pie X bien ac-
cueillie par le cardinal Castrillon Hoyos ;
l’écot à payer fut l’abandon de nombreux
autres prêtres, parmi lesquels les héritiers
de Mgr De Castro Mayer. L’élection de
Joseph Ratzinger a relancé le même scéna-
rio ; les visites dans les synagogues ou dans
les mosquées, les rencontres œcuméniques,
les déclarations de fidélité intransigeante
au Concile, le rappel continuel à la doctrine
de la liberté religieuse (même du droit à
l’apostasie), passent désormais inaperçus,
comme du déjà vu, tellement on en a pris
l’habitude depuis quarante ans ; et
nombreux disent que non, qu’avec Benoît
XVI tout a changé, qu’il est absurde de
continuer de critiquer, et ne sont pas peu
ceux qui, à nouveau, ont trouvé un accord
ou le préparent. Combien sont désormais
les prêtres (et même les évêques), les fidè-
les, les maisons, les séminaires, les couvents
Mgr M.-L.
Guérard
des
Lauriers