Religion et société : les nouvelles conflictualités L’auteur Zoom Après des études supérieures d’histoire et de sciences politiques, Dominique Schnapper obtint le doctorat en sociologie (1967) avec une enquête consacrée à l’Italie (L’Italie rouge et noire, Gallimard, 1971) et le doctorat-es-lettres (1979). Elle a fait toute sa carrière à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, où elle a été successivement chef de travaux, maître assistante et directrice d’études (1980). Ses travaux, depuis la fin des années 1970 portent sur les transformations du lien national et politique dans les sociétés démocratiques qui recherchent avant tout l’égalité de tous et le bien-être de chacun de leurs membres. Les « démocraties providentielles » n’évoluent-elles pas vers des formes diverses de «communautarisation» ? Elle est depuis 2001 membre du Conseil constitutionnel. Elle a reçu le Prix de la Fondation Balzan 2002 pour l’ensemble de son œuvre en sociologie. Elle est Docteur honoris causa de l’université McGill de Montréal (2006). Une sociologue au Conseil Constitutionnel (Gallimard, 2010) L’œuvre © C. Hélie - Gallimard Dominique Schnapper France Une sociologue au Conseil Constitutionnel (Gallimard, 2010) La Condition juive en France, avec Chantal Bordes-Benayoun et Freddy Raphaël (PUF, 2009) Qu’est-ce que l’intégration ? (Gallimard, 2007) Diasporas et nations, avec Chantal Bordes-Benayoun (Odile Jacob, 2006) La Compréhension sociologique (PUF, 2005) Au fur et à mesure. Chroniques 2001-2002 (Odile Jacob, 2003) La démocratie providentielle. Essai sur l’égalité contemporaine (Gallimard, 2002 ; Folio 2010) Qu’est-ce que la citoyenneté ? (Gallimard, 2000) La Relation à l’Autre. Au cœur de la pensée sociologique (Gallimard, 1998) La Communauté des citoyens. Sur l’idée moderne de nation (Gallimard, 1994 ; Folio, 2003) L’Europe des immigrés. Essai sur les politiques d’immigration (François Bourin, 1992) (ÉPUISÉ) La France de l’intégration. Sociologie de la nation en 1990 (Gallimard, 1991) Juifs et Israélites (Gallimard, 1980) L’Italie rouge et noire (Gallimard, 1971) (ÉPUISÉ) 2001 : Dominique Schnapper, pour l’importance et la qualité de ses travaux sur la République et la démocratie, est nommée au Conseil constitutionnel. Étrangère au sérail politique dont sont traditionnellement issus tous ses membres, elle est la première sociologue dans l’histoire de l’institution. Neuf ans durant, elle tient le journal de cette expérience unique : nulle révélation sur les hommes du Conseil, ni sur le secret des délibérations, mais une réflexion sans pareille sur le fonctionnement de notre démocratie. On pourrait croire, en effet, que le Conseil est l’institution suprême. Créé en 1958, il rompt avec la tradition française puisqu’il doit contrôler l’activité parlementaire au nom du respect de la Constitution alors que les Assemblées avaient toujours été souveraines. Toutefois, la place protocolaire médiocre des conseillers rappelle la réticence de De Gaulle à créer cette instance de validation ultime de la constitutionnalité du pouvoir dans son exercice. C’est petit à petit, sans éclats et avec ténacité, que le Conseil s’est imposé, notamment par la continuité de son action assurée par le secrétariat général et fondée sur la référence à la jurisprudence, ce corpus des décisions antérieures constitué et rappelé par le service des juristes, qui préparent les dossiers pour les conseillers. Ainsi le Conseil peut fonctionner malgré l’extrême diversité de la culture juridique et constitutionnaliste de ses membres. Des sociologues se sont faits boxeur, vagabond ou joueur de poker, afin d’observer de l’intérieur un milieu particulier : c’est la sociologie participante. Dominique Schnapper, au cours de sa mandature, a été l’une des neuf voix qui décidèrent de la constitutionnalité de nos lois. Elle a en cela inventé une sorte de participation sociologique. Villa Gillet - 25 rue Chazière - 69004 Lyon - France - Tel : 00 33 (0)4 78 27 02 48 - Fax : 00 33 (0)4 72 00 93 00 - www.villagillet.net /1 La Condition juive en France, avec Chantal Bordes-Benayoun et Freddy Raphaël (PUF, 2009) Qu’est-ce que l’intégration ? (Gallimard, 2007) Diasporas et nations, avec Chantal BordesBenayoun (Odile Jacob, 2006) La Compréhension sociologique (PUF, 2005) Les juifs furent longtemps des patriotes ardents. Ceux qui, dans le passé, se désignaient eux-mêmes comme des « israélites » s’étaient toujours comportés comme des citoyens modèles, affirmant haut et fort leur patriotisme et réinterprétant le judaïsme sur un mode essentiellement spirituel. Aujourd’hui, la République s’affaiblit, l’antisémitisme de l’extrême-gauche rejoint l’antisémitisme traditionnel de l’extrêmedroite, l’insécurité grandit. Comment les juifs réagissent-ils ? Assiste-t-on à l’émergence d’une nouvelle condition juive en France ? C’est à ces questions qu’une enquête par questionnaires réalisée auprès d’un échantillon de la population juive à Strasbourg, Toulouse et dans la région parisienne, apporte des réponses objectives. Mais l’analyse de la situation actuelle ne peut négliger la réflexion plus large, à la fois historique et sociologique, sur les transformations actuelles des rapports entre les identités ethnico-religieuses et la citoyenneté. L’exemple des juifs peut aussi être un révélateur. Doit-on voir dans les inquiétudes de tous et dans la tentation du repli sur soi d’une partie des juifs le signe d’une « ethnicisation » ou d’une « communautarisation » croissante de la société démocratique ? Cette enquête montre pourtant qu’entre la tentation de vivre entre soi et celle d’intervenir en tant que juifs dans l’espace public, la majorité des juifs français tente d’élaborer ce qu’on peut appeler un « nouvel israélitisme ». Né de l’inquiétude sur les nouvelles formes de vie sociale que suscitait la modernité, le concept d’intégration recouvre les modalités spécifiques de la vie collective dans les sociétés contemporaines. Pourquoi les diasporas, tenues en suspicion par les Etats nations contemporains, sont-elles devenues l’objet d’un véritable culte ? Pourquoi le modèle de la diaspora s’étend-il à tous les peuples dispersés ? Comment en est-il venu à désigner toutes les revendications identitaires, des cultures régionales aux pratiques religieuses, des modes de vie aux mobilités sociales ? Ce livre prend la mesure du phénomène dans toutes ses dimensions sociales et politiques. « La compréhension sociologique se donne pour ambition de substituer à l’incohérence du monde humain des images intellectuelles des relations intelligibles ou, en d’autres termes, de remplacer la diversité et la confusion du réel par un ensemble intelligible, cohérent et rationnel. Ce projet implique de prendre en compte le sens que les individus donnent à leur conduite, ce par quoi ils sont véritablement humains. » A l’origine, Durkheim le réserve au problème de la société dans son ensemble. Puis les sociologues s’interrogent sur la formation et le maintien des entités collectives, sur les relations entre l’individu et le groupe. Les recherches montrent alors que l’assimilation des immigrés n’est pas un processus unique ou rectiligne, mais comporte des dimensions et des modalités différentes, voire discordantes. Désormais, les sociologues distinguent entre l’adoption des traits culturels de la société - selon les auteurs, on parlera d’« acculturation », d’« assimilation », voire d’« intégration culturelle » - et la participation aux diverses instances de la vie sociale - l’« assimilation sociale » ou l’« intégration structurelle ». Toute la richesse comme l’ambiguïté particulière de l’intégration - puisque le mot appartient en même temps aux registres du politique et de la sociologie - se tiennent là, dans le fait que le concept porte à la fois sur l’intégration des individus à la société et sur l’intégration de la société dans son ensemble. Publié précédemment dans la collection « Le lien social » dirigé par Serge Paugram, cet ouvrage, considérablement remanié et actualisé, a été conçu par son auteur comme un manuel. C’est également une initiation, une introduction généreuse, intelligente et critique à une discipline dont l’enjeu est de « montrer qu’il ne s’agit pas de comprendre les conduites des hommes de manière intuitive et sympathique, mais de les rendre intelligibles dans un projet de connaissance intellectuelle et rationnelle. » Fondé sur un travail de chercheurs et d’enseignante, une confrontation avec les auteurs du passé et du présent, une conception de la pratique de l’analyse typologique, instrument privilégié de le démarche sociologique, cet ouvrage veut contribuer à expliciter les malentendus, encourager la rigueur et maintenir « la voie étroite entre le scientisme et l’essayisme » dans une discipline dont le projet intellectuel est de rendre lisibles les relations entre les hommes. Villa Gillet - 25 rue Chazière - 69004 Lyon - France - Tel : 00 33 (0)4 78 27 02 48 - Fax : 00 33 (0)4 72 00 93 00 - www.villagillet.net /2 Au fur et à mesure. Chroniques 2001-2002 (Odile Jacob, 2003) La démocratie providentielle. Essai sur l’égalité contemporaine (Gallimard, 2002 ; Folio 2010) Qu’est-ce que la citoyenneté ? (Gallimard, 2000) La Relation à l’Autre. Au cœur de la pensée sociologique (Gallimard, 1998) Du rendez-vous mythique de l’an 2000 au séisme des présidentielles de 2002, voici la première grande chronique de notre entrée dans un siècle nouveau. La démocratie a posé l’universalité du principe d’égalité formelle des individus, quelles que soient par ailleurs les inégalités sociales, culturelles et autres. Le terme de citoyenneté est galvaudé. Une chronique qui embrasse le 11 septembre comme les jeux Olympiques, les hécatombes routières comme les 35 heures, les guerres lointaines comme les simples bonheurs. Une chronique qui, racontant les médias et la politique, la misère et les fêtes, les femmes et les hommes, nous raconte à nous-mêmes. En éclairant le temps qui passe d’une lucidité sans faille, en réveillant la proche mémoire d’une plume aiguë ou savoureuse, en liant l’émotion et l’analyse, c’est notre monde présent que dessine Dominique Schnapper. La démocratisation est animée par l’ambition d’assurer l’égalité réelle des citoyens. Elle s’est traduite par le développement de l’Etat-providence qui intervient toujours plus pour satisfaire les besoins économiques et sociaux des individus. Or son action est désormais paradoxale fruit du louable souci d’assurer l’universalité des droits, elle vise, par les « discriminations positives » et autres politiques de promotion spécifique, à défendre les droits particuliers de certaines catégories. La relation à l’Autre - assurément un ouvrage des plus ambitieux et des plus neufs restitue de manière originale l’histoire de la sociologie ; montre que celle-ci se structure autour de styles nationaux qui n’ont ni la même origine ni les mêmes objets premiers (par exemple, Durkheim et le défi de l’intégration républicaine ; Max Weber et l’interaction des hommes en société ou en communauté ; la sociologie anglaise et l’héritage de l’Empire ; ou bien encore l’école de Chicago et l’obsession de la ségrégation des Noirs) ; définit enfin la nature de la sociologie - cet effort de connaissance rationnelle de l’ordre social qui universalise par principe des données objectives toujours particulières. Un document unique de sociologie vivante, qui décrypte aujourd’hui pour mieux dire demain. L’équité se substitue à l’égalité, le multiculturalisme à l’universalité. Telle est l’épreuve particulière que traversent les démocraties occidentales, confrontées au caractère toujours plus « providentiel » de leurs sociétés : si l’égalité contemporaine tend à épuiser les formes de transcendance collective, comment peut-on continuer à « faire société »? Jugé passéiste il y a vingt ans, il est aujourd’hui comme un nouveau talisman que l’on brandit pour appuyer toute revendication. Le terme a pourtant un sens historiquement précis : l’appartenance à une communauté politique autonome, définissant des droits et des devoirs. Il n’en reste pas moins que les grandes traditions politiques l’ont interprété différemment, lorsqu’il s’est agi d’articuler la citoyenneté à l’individu, à la nationalité, aux croyances religieuses, aux inégalités sociales, aux traditions historiques et communautaires. C’est donc l’histoire, les idéologies, la sociologie de la « citoyenneté » que retrace cet ouvrage qui est en soi un véritable manuel contemporain d’instruction civique. « Dominique Schnapper propose, dans cet essai iconoclaste, bien plus qu’une étude des dérives de la démocratie: loin des prises de position souverainistes, elle procède à la plus fine et à la plus radicale des critiques de la mondialisation. Puisse ce livre être lu plus qu’il ne sera cité. » François Busnel, L’Express Villa Gillet - 25 rue Chazière - 69004 Lyon - France - Tel : 00 33 (0)4 78 27 02 48 - Fax : 00 33 (0)4 72 00 93 00 - www.villagillet.net /3 La Communauté des citoyens. Sur l’idée moderne de nation (Gallimard, 1994 ; Folio, 2003) La France de l’intégration. Sociologie de la nation en 1990 (Gallimard, 1991) L’Italie rouge et noire (Gallimard, 1971) (ÉPUISÉ) Nous vivons le temps des paradoxes. Partout se propage la contamination du nationalisme, partout s’observe l’affaiblissement de la nation. On parle aujourd’hui de l’intégration des immigrés comme s’il s’agissait d’une nouveauté menaçante pour l’intégrité nationale. Ce n’en est une que dans la mesure où la France, vieille terre d’immigration qui s’ignore, a entretenu sa cécité sur les apports étrangers de sa population jusque dans ses observatoires scientifiques. La diversité politique et économique de l’Italie ne peut masquer l’unité culturelle de la péninsule. L’uniformité de la vie quotidienne à l’intérieur d’un même milieu social est aussi frappante pour le sociologue contemporain qu’elle l’était autrefois pour les voyageurs étrangers. Dominique Schnapper qui a vécu pendant deux ans à Bologne avec sa famille s’est servie de la société bolonaise comme d’un microcosme pour étudier, à travers le style de la vie quotidienne, les modèles culturels de la péninsule. La nation est aujourd’hui doublement atteinte : à l’extérieur, par les limitations de sa souveraineté que tracent l’internationalisation des échanges et l’interdépendance des économies ; à l’intérieur, par l’idéologie productiviste qui exalte l’individu et ses intérêts mais ignore le citoyen et ses idéaux. La sociologie, tout attachée à mettre en lumière la réalité contrastée des liens sociaux n’a, depuis longtemps, plus prêté attention à la nation, communauté politique idéelle. De la redécouverte de la nation comme cadre de vie premier, à laquelle nous convie courageusement Dominique Schnapper, nos lendemains diront s’il s’agit d’un chant du cygne. Quel avenir, en effet, pour une communauté de citoyens, quand les uns se réclament de leurs particularismes ethniques ou de leur identité religieuse, quand les autres confondent leurs devoirs de citoyens avec leurs droits de consommateurs ? La spécificité de l’immigration récente et des problèmes qu’elle pose appelle une double réflexion sociologique : sur le procès de la modernisation depuis les Trente Glorieuses d’une part, sur la formation et l’évolution de l’idéologie nationale depuis le XIXe siècle d’autre part. Tant que la France se donnait pour ambition explicite d’« assimiler » tout immigré, ni la réalité sociale ni la politique des gouvernements n’étaient différentes. Aujourd’hui encore comme il y a un siècle, du temps de Renan, la nation à la française ne se définit que comme une machine à intégrer des populations diverses autour d’un projet politique commun. L’intégration reste à la fois un fait, une valeur et une nécessité. C’est la modernité qui, en privilégiant l’activité économique et le modèle marchand des relations sociales, est venue menacer la réalité et la tradition nationales, tout particulièrement en France. Si les démocraties modernes perdent tout principe religieux, dynastique et même national, n’est-ce pas le lien social qui risque de s’affaiblir jusqu’à se dissoudre ? Villa Gillet - 25 rue Chazière - 69004 Lyon - France - Tel : 00 33 (0)4 78 27 02 48 - Fax : 00 33 (0)4 72 00 93 00 - www.villagillet.net /4