Record management ou archivage

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dossier :Sécurité
Record management ou archivage ?
Catherine Leloup,
Administrateur de l’AFAI
Le terme « Record management » traduit un concept
anglo-saxon qui a souvent
bien du mal à trouver son
équivalent dans les cultures
latines. Pourtant il y en a un
qui convient bien : gestion
des archives. Encore faut-il
s’entendre sur la notion
d’archives et bien en analyser les enjeux, notamment
au plan de la maîtrise des
risques.
• La revue n° 85 - Février 2007
1. Que signifie
« Record management » ?
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Le terme « record », qu’on traduit
littéralement par enregistrement,
recouvre toute information (donnée
ou document) qui trace l’activité de
l’entreprise. C’est donc aussi bien
une commande qu’une facture, un
rapport d’étude du côté document,
qu’un planning ou un budget ou
une écriture comptable au niveau
données.
Le « record management » a, comme
son nom l’indique, pour but de gérer
ces enregistrements tout au long de
leur cycle de vie, depuis la création
jusque et y compris la destruction.
La réglementation américaine permet en effet aux « attorneys », dès
lors qu’un procès est lancé, de se
livrer à une « discovery », autrement
dit de rechercher parmi l’ensemble
des enregistrements de l’entreprise,
ceux qui serviraient la cause de la
partie adverse et apporteraient des
preuves de ses dires. C’est donc à la
fois une obligation légale de mettre
à disposition l’ensemble des enregistrements disponibles, mais aussi
une question de sécurité, dans la
mesure où il convient de s’assurer
que les enregistrements reflètent
bien les activités de l’entreprise (ce
qu’elle a fait) et non pas d’éventuelles discussions internes. C’est
donc aussi une politique du strict
nécessaire qui allie la protection des
informations essentielles et la suppression impitoyable des informations sans valeur pour l’entreprise
ou l’organisation, le tout dans le
respect des obligations réglementaires et légales.
Les piliers d’un « record management » sont donc :
• une typologie des enregistrements, qui définit pour chacun,
leur criticité pour l’entreprise, la
durée de conservation, le lieu de
stockage au cours de sa vie, le
responsable (ou propriétaire),
• des processus organisés de gestion de ces enregistrements :
stockage, diffusion, suppression,
etc.,
• un ou des outils automatisés qui
vont en particulier assurer :
– l’unicité de stockage de chaque
enregistrement : afin d’éviter
toutes duplications et être ainsi
certain, lors de la suppression,
qu’aucune copie ne subsiste,
– le stockage des enregistrements
dans les réservoirs appropriés,
avec au besoin le déplacement
d’un réservoir vers un autre, au
cours du cycle de vie de l’enregistrement,
– le respect des règles de confidentialité.
Quelque part, il s’agit de piloter la
gestion des informations, en prenant en compte l’ensemble des supports – papier, électronique, etc. – des
modalités de production – base de
données, outils bureautiques, messages électroniques, etc. – pour
garantir qu’à tout moment l’information de référence pour l’entreprise ou l’organisation est correctement stockée.
2. Et une vraie gestion
des archives ?
2.1. Archives
Le terme « archives » est souvent
entendu au sens commun comme le
stock de papiers inutilisés qui dort
dans les armoires et objet d’une
grand messe – en général au
moment des périodes de sous-activité de l’entreprise, au mois d’août –
de nettoyage ou de déménagement
auprès d’un tiers archiveur.
Pourtant en France, la définition des
archives est très clairement exposée
dans la loi 79-18 du 03/01/1979,
abrogée depuis, mais dont l’essentiel a été repris dans le code du patrimoine1, livre II au chapitre 1er, articles
L. 211-1 à L. 214-7, et que, malheureusement beaucoup ignorent :
Article L. 211-1 : « Les archives sont
l'ensemble des documents, quels
que soient leur date, leur forme et
leur support matériel, produits ou
reçus par toute personne physique
ou morale et par tout service ou
organisme public ou privé dans
l'exercice de leur activité ».
Article L. 211-4 : « Les archives
publiques sont :
a) les documents qui procèdent de
l'activité de l'État, des collectivités
territoriales, des établissements et
entreprises publics ;
b) les documents qui procèdent de
l'activité des organismes de droit
1. Voir : www.legifrance.gouv.fr
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Sécurité :dossier
c) les minutes et répertoires des officiers publics ou ministériels ».
Les archives privées étant celles ne
rentrant pas dans le cadre de l’article
L. 211-4.
Article L. 212-15 : « Les archives
privées qui présentent pour des
raisons historiques un intérêt public
peuvent être classées comme
archives historiques, sur proposition
de l'administration des archives, par
décision de l'autorité administrative ».
Le texte explique également les
règles de conservation et le caractère imprescriptible des archives
publiques ou historiques.
Autrement dit, une archive existe
dès sa création, doit être gérée tout
au long de son cycle de vie et reflète
l’activité de l’entreprise ou organisation. Ce concept est donc quasiment
identique à celui de « record ». La
seule différence est dans la notion
de document, qui a en France, une
connotation implicite de l’ensemble
constitué d’un contenu et d’un
contenant.
2.2. La gestion des archives
Le code du patrimoine évoque classement, durée de conservation,
confidentialité (en particulier via la
gestion des archives contenant des
données personnelles). Une vraie
gestion d’archives, au sein d’une
entreprise ou d’une organisation,
doit gérer l’ensemble du cycle de vie
des archives en distinguant les
quatre étapes classiques :
• archives vivantes, d’utilisation
courante,
• archives semi-vivantes, d’utilisation plus rare,
• archives mortes,
exceptionnelle,
d’utilisation
• archives historiques, pour lesquelles l’archive revêt un intérêt
historique, au-delà de la preuve
d’activité de l’entreprise ou de
l’organisation.
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Avec une logique de tri entre
chaque étape, de conditions et de
durée de conservation, de règles de
confidentialité et donc d’accessibilité, sans oublier la notion de propriétaire, responsable de la bonne
tenue des archives au cours de leur
vie.
Les piliers d’une politique d’archivage sont donc :
• les chartes d’archivage :
– charte de conservation, qui précise comment sont stockées et
conservées les archives en
matière de lieu, durée, conditionnement, ainsi que leur propriétaire,
– charte de consultation, qui précise les conditions d’accès aux
archives, et notamment les questions d’accessibilité ;
• les règles de confidentialité, et
notamment les niveaux de confidentialité en vigueur et leur signification, par exemple vis-à-vis de la
reproduction ou de la diffusion
des contenus,
• les processus de gestion, qui décrivent les modalités de versement
des archives, de tri préalable, de
conditionnement, etc.,
• un ou des outils automatisés qui
vont supporter ces processus.
3. Des notions proches
Les finalités du « record management » et de la gestion d’archives
sont finalement assez proches,
même si le « record management »
va quelque part plus loin, en se
comportant comme un chef d’orchestre des systèmes – notamment
automatisés – en place :
« Record management »
Gestion d’archives
Informations gérées
Tout type : données, documents
Documents seulement
Unicité de stockage
Oui
Non. La gestion d’archives
n’implique pas nécessairement
la destruction des copies
Règles de gestion
de la confidentialité
Oui
Oui
Gestion du cycle de vie
de l’information
Oui, y compris unicité
Oui, pour l’archive de référence
Gestion des durées
de conservation
Oui
Oui
Gestion des « réservoirs »
de stockage
Oui et quelle qu’en soit la
nature : papier ou outils informatiques, y compris bases de
données ou outils de messagerie électronique, systèmes
documentaires ou collaboratifs,
etc.
Oui pour les supports papier et
de plus en plus les documents
électroniques, dans des systèmes ad hoc
Contrôle des accès
à l’information
Oui
Oui
Nécessité de la définition d’un
propriétaire
Oui, via la typologie des enregistrements
Oui, via la charte de conservation
En effet, le « record management »
s’attache à l’unicité de stockage de
l’information et à sa prise en compte
globale, quel qu’en soit le support et
la nature.
cas de procès ou de contrôle externe
de ses activités, « record management » et gestion d’archives sont
aussi et surtout des aides à la maîtrise des risques :
4. …Aux enjeux vitaux
pour l’entreprise
• Au plan financier, ou plus exactement vis-à-vis de la rationalisation
des coûts de gestion dans l’entreprise : quand on sait qu’un document est en moyenne dupliqué 6 à
Au-delà de la capacité pour l’entreprise ou l’organisation à justifier en
• La revue n° 85 - Février 2007
privé chargés de la gestion des services publics ou d'une mission de
service public ;
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dossier :Sécurité
10 fois dans l’organisation, tant en
matière de stockage que de temps
passé à classer ces copies, les
enjeux peuvent être considérables.
• Au plan de la gestion de la confidentialité : des règles précises qui
non seulement définissent les
niveaux de confidentialité, mais
aussi et surtout les conditions
d’utilisation – en matière de diffusion ou de réutilisation des contenus par exemple – sont autant
d’outils pour minimiser les risques
de fuite ou de fraude.
• Au plan de l’intégrité de l’information : le stockage unique garanti
par le « record management » est
indéniablement une aide à l’obtention de l’intégrité, grâce à la
suppression des copies et à la
typologie précise des informations. Par exemple, si une gestion
d’archives définit un dossier
donné, elle peut ou pas en préciser
le contenu ; en « record management », c’est indispensable.
• Au plan de l’accès à l’information :
si en effectuant une recherche
dans un système de « record
management », on ne trouve pas
l’information, c’est qu’elle n’existe
pas ou plus, car elle a été volontairement détruite. La gestion des
archives est aussi conçue pour
permettre des recherches efficaces largement après la période
d’utilisation courante des archives.
En outre, les projets en la matière
induisent des effets largement
bénéfiques comme :
• La sensibilisation des utilisateurs à :
– la notion de copyright,
– la protection des données personnelles,
– la réutilisation d’information, et
les bonnes pratiques correspondantes,
– la notion de propriétaire de l’information dans l’entreprise ou
l’organisation, et donc de responsabilité.
• La définition de bonnes pratiques
en matière d’utilisation des systèmes automatisés comme la messagerie, la bureautique, les espaces
partagés, etc.
• La réflexion de fond sur les
méthodes de gestion de l’information et les responsabilités.
Comme tout outil d’aide à la maîtrise
des risques, « record management »
et gestion d’archives relèvent d’un
cocktail de management, d’organisation et d’outils informatiques,
dont la combinaison harmonieuse
sera le garant du succès.
• La revue n° 85 - Février 2007
L’irruption du client dans des Directions des
Systèmes d’Information, parfois un peu isolées dans leur tour d’ivoire, peut se révéler
assez décapante. C’est pourtant le seul
moyen d’aligner les attentes des Métiers aux
services offerts par la DSI. Cet ouvrage
décrit de façon très opérationnelle la mise
en place et le pilotage des centres de
services internes ou externalisés. En s’appuyant sur ITIL et sur la norme ISO 20000,
on y trouve une explication éclairante des
avancées majeures de ces standards pour
la qualité des services offerts.
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Par ailleurs, le lien est fait entre la gouvernance des systèmes d’information et la
régulation de la demande des utilisateurs,
que ce soit en TMA ou en niveau de service. Un exemple de balanced scorecard
(BSC) illustre une voie pour piloter l’activité de la DSI.
Enfin, un guide d’audit permet de mener
des évaluations de situations concrètes
pour s’améliorer.
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