Rubrique historique p 10

publicité
Rubrique historique
La IVème République (1ère partie)
En 1946, le gouvernement provisoire (GPRF, né à Alger en juin 1944) céda la place à la IVème République,
instaurée par une nouvelle constitution approuvée par référendum. Mais les tensions internes suite à l'épuration,
aux problèmes sociaux, et les divergences concernant les problèmes coloniaux à Madagascar, en Indochine et en
Algérie conduisirent à des crises successives et à une instabilité politique chronique. Le régime parlementaire de la
IVème République permet toutefois la mise en place de programmes sérieux de reconstruction et de modernisation de
la France. C'est à cette période que les fameuses « Trente Glorieuses » prennent leurs sources.
Le 21 octobre 1945, les Français élisent une nouvelle assemblée nationale pour renouveler celle de 1936. Cette
assemblée a une mission constituante c'est-à-dire qu’elle doit donner à la France une Constitution en remplacement
de la précédente (celle de la IIIème République). L’Assemblée élue autorise la poursuite de l'action du G.P.R.F
jusqu'à l'adoption d'une nouvelle Constitution.
Ces élections marquent le triomphe de trois grands partis politiques : deux d’entre eux reconstitués après la guerre, le
Parti Communiste Français (PCF) et la Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO) et le troisième issu de
la Résistance chrétienne, le Mouvement Républicain Populaire (MRP). Ces trois partis récupèrent à eux seuls 75%
des suffrages. Les anciens partis de droite se sont effondrés et les radicaux qui symbolisaient la IIIème République ont
beaucoup reculé. Charles de Gaulle devient chef du gouvernement. Ce gouvernement comprend des communistes,
parmi lesquels Maurice Thorez, le secrétaire général du PCF qui devient ministre d’Etat, des socialistes et des
membres du MRP qui se considèrent encore à gauche.
Cependant, en Indochine française les forces indépendantistes se sont renforcées. La République démocratique du
Viêt Nam est créée et son indépendance proclamée le 2 septembre 1945 à Hanoi, mais la France tente de rétablir
son autorité sur l'Indochine française pour reconstituer l'ancien empire sous la nouvelle appellation d'Union
française. Les négociations entre le Viêt Minh et la France traînent en longueur. Des incidents de plus en plus
sérieux opposent les forces vietnamiennes aux forces militaires françaises. À la suite du bombardement du port de
Haiphong le 23 novembre 1946 par la Marine française, une insurrection contrôlée par le Viêt Minh éclate le 19
décembre 1946. Celle-ci se transforme en une guérilla menée contre l'armée française, puis en un véritable conflit
opposant deux armées. Alors que cette "sale guerre" est de plus en plus impopulaire en métropole, c'est en 1954 que
la Bataille de Diên Biên Phu scelle la défaite de la France et l'oblige à se retirer de l'Indochine.
En métropole, très vite, les grandes réformes prévues par le CNR sont finalisées ou réalisées qui permettent la mise
en place de l’Etat Providence. Jamais un tel ensemble de réformes n’avait été réalisé simultanément dans le pays.
– Droit de vote pour les femmes.
– La nationalisation des secteurs-clés de l’économie : la totalité des houillères et des mines de charbons (on crée
pour les gérer la société Charbonnages de France en avril 1947) ; les entreprises fournissant de l'électricité ou du gaz
(deux entreprises sont créées le 8 avril 1947 : EDF et GDF) ; les compagnies de transports urbains (on crée des
régies autonomes des transports comme la RATP à Paris) ; le transport aérien (création d’Air France) ; les
entreprises et usines d'armements ; le système bancaire et les compagnies d'assurance (25 avril 1947) ; les usines
Renault et Berliet ; les radios ; etc.
– La création du Commissariat au Plan chargé de mettre en place une planification indicative.
– La mise en place de la Sécurité sociale.
– L'amélioration des rapports au travail (retour de la liberté syndicale, création des comités d'entreprise).
– La création de l’ENA (Ecole Nationale d’Administration) pour la formation des hauts fonctionnaires.
Sur le plan politique les difficultés apparaissent très vite et le conflit éclate entre de Gaulle, le PCF et la SFIO à
propos de la future constitution. De Gaulle est partisan d’un pouvoir exécutif fort, alors que le PCF et la SFIO
préfèrent donner l’essentiel du pouvoir à une assemblée unique. En désaccord avec ce projet constitutionnel qui
privilégie le pouvoir d'une Assemblée et des partis politiques, le général de Gaulle démissionne du gouvernement
provisoire le 20 janvier 1946. Lors du référendum du 21 octobre 1945, 96% des électeurs ayant désiré une nouvelle
Constitution, l'assemblée sortie des urnes proposa au pays une Constitution qui fut rejetée sans équivoque par le
peuple le 5 mai 1946. En juin 1946, une deuxième assemblée constituante fut alors élue, donnant la première place
au MRP avec 28% des suffrages exprimés. Georges Bidault, le président du parti, devint le chef du gouvernement et
10
un deuxième projet de Constitution fut présenté au peuple, le 13 octobre 1946, prévoyant un président de la
République élu par un collège électoral ainsi que deux assemblées législatives: l'Assemblée nationale et un Conseil
de la République aux pouvoirs restreints (en remplacement de l'ancien Sénat).
Le 16 janvier 1947, Vincent Auriol est élu à la présidence de la IVème République. Le 22 janvier Paul Ramadier
(SFIO) devient Chef du Conseil (chef du gouvernement), jusqu’au 19 novembre 1947, et de Gaulle créé le
Rassemblement du peuple français (RPF) le 14 avril 1947. C’est durant le ministère Ramadier qu’éclatera
l’insurrection de Madagascar. Malgré l'obtention du statut de Territoire d'outre-mer, la montée du sentiment
indépendantiste s'exprime fortement à Madagascar, notamment avec la création du Mouvement démocratique de la
révolution malgache (MDRM) qui voit le jour en 1946. Dans la nuit du 29 au 30 mars 1947, des radicaux recourent
à la violence, s'en prenant physiquement à des colons français. Cette action entraîne la mise en place de l'état de
siège qui est suivi par une intervention militaire de la métropole. La répression qui en résulte met un terme à la
rébellion, mais elle est aussi responsable de milliers de morts. Plusieurs leaders du mouvement indépendantiste
seront condamnés à la mort ou à la déportation et le MDRM sera dissous. Cependant, Madagascar deviendra un
pays indépendant en 1960.
Le soutien du gouvernement au camp nord-américain, la politique coloniale, la politique économique et salariale
(blocage des salaires) amènent les députés communistes à s’opposer aux choix du gouvernement. De plus le PCF
apporte son soutient à la CGT qui est engagée dans plusieurs mouvements de grève comme celui de Renault en avril
1947. Le 5 mai 1947, Ramadier, avec l’accord de la SFIO et du MRP, renvoie les ministres communistes du
gouvernement. C’est la fin du tripartisme.
La France entre alors dans une période politique et sociale troublée. Les coalitions gouvernementales dites de
« Troisième Force », composées essentiellement de la SFIO, du MRP et du Parti Radical (PR) se trouvent opposées
aux forces antagonistes du PCF, d’une part, et du RPF de de Gaulle, d’autre part. De plus la coalition
gouvernementale se trouve affaiblie par des dissensions intérieures. Au sujet de la politique économique la SFIO et
le MRP, favorables à une politique dirigiste, s’opposent au PR et à la droite modérée, favorable à une politique
libérale. La laïcité oppose d’un coté la SFIO et le PR au MRP partisan d’apporter une aide à l’enseignement privé.
Le 5 juin 1947 le Président américain Harry Truman signe le plan Marshall. Ce plan avait pour but d'aider
financièrement tous les pays Européens qui le souhaitaient. Cette aide concernait tant les marchandises que les
capitaux. L'aide financière était assortie de conditions d'achat de produits américains et de la mise en place d’une
politique libérale au niveau économique. Le plan Marshall divisa l'Europe en deux, l'Union Soviétique refusant
toute aide américaine et imposant son choix aux pays qu'elle contrôlait. Complétant la mise en place de l’OTAN, il
visait à satelliser l'Europe de l'Ouest aux États-Unis face à l'Europe de l'Est. C’est à partir de cette année 1947 que le
monde entra dans la période dite de la « guerre froide ».
Au sein de la CGT les divergences s’accentuaient entre les partisans de la SFIO au gouvernement et du PCF qui
soutenaient les mouvements de grève. Profitant d’un désaccord au sujet du plan Marshall, un courant minoritaire à
la suite de Léon Jouhaux quitte la CGT le 19 décembre 1947 et constitue Force ouvrière (CGT-FO). Il prouvé que
les services secrets américains ont subventionné le nouveau syndicat, par l’intermédiaire du syndicat américain
AFL, pour affaiblir la CGT jugée trop proche du PCF et de l’Union soviétique.
Dans le gouvernement, les divergences au sein de la coalition entraînent une instabilité chronique : de 1947 à 1952,
9 gouvernements vont se succéder. Malgré cette fragilité ces gouvernements réussiront à porter des projets
importants :
– Reconstruction économique
– Création du Conseil de l’Europe
– Création de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) le 9 mai 1950.
– Signature du Pacte de l’OTAN le 4 avril 1949
Mais cette coalition va bientôt se déchirer et éclater. Le 21 septembre 1951, la loi Barangé-Marie, accordant une
bourse aux élèves des écoles privées, est adoptée par l’Assemblée. Cette loi votée par les députés du MRP et du
RPF s’ajoute aux désaccords sur l’aide que l’Etat doit fournir à la Sécurité sociale et à la SNCF. La rupture est
consommée et la SFIO se retire de la coalition de « Troisième force ». Une nouvelle majorité regroupant MRP,
radicaux et RPF voit le jour. Cette période de la IVème République sera traitée dans un prochain numéro.
11
Téléchargement