DEJEPS Perfectionnement sportif Mention Escalade ENERGETIQUE MUSCULAIRE 1° Partie G.MOYNE CREPS Rhône-Alpes L’ENERGETIQUE MUSCULAIRE Introduction : LA PRATIQUE SPORTIVE : Une question d’ENERGIE Dans la pratique sportive, la dimension physique de la performance nécessite une dépense d'énergie variable en fonction de plusieurs paramètres : l'intensité de l'activité physique, sa durée, son environnement (altitude, température ambiante…)… Pour être efficace, l'entraîneur, comme l’éducateur sportif devront prendre en compte cette dimension énergétique tout au long de leur action : - lors du diagnostic initial (évaluation des ressources des sportifs) lors de la conception des séances et de la quantification des charges de travail lors de la planification des différentes étapes du processus d'apprentissage d'entraînement lors la mise en œuvre (les séances proprement dites). Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 1 À titre indicatif, voici quelques repères concernant la dépense énergétique globale dans différentes activités sportives : Cyclisme Natation Aviron Judo 4500 à 6500 kcal/j 3800 kcal/j 3500 kcal/j 2800 kcal/j Triathlon Sports collectifs Course à pied 4800 kcal/j 3700 kcal/j 3100 kcal/j NB : Bien évidemment, ces chiffres peuvent varier considérablement fonction de la durée d'activité sportive et de l'intensité à laquelle est pratiquée. 1- L’ENERGIE HUMAINE L’organisme humain ne crée pas d'énergie. Il la transforme. C’est à partir de l’énergie chimique contenue dans les aliments que les cellules musculaires peuvent produire de l’énergie mécanique (travail musculaire) et de l’énergie thermique (production de chaleur). Alimentation ENERGIE MECANIQUE ENERGIE CHIMIQUE + ATP ENERGIE THERMIQUE Chaleur On peut donc dire, que le muscle fonctionne comme un transformateur d'énergie qui utilise le carburant : l’ATP (l'adénosine triphosphate) qui est une molécule riche en énergie. L’A.T.P. peut être comparée à une pile rechargeable dans le sens où elle se charge d'énergie et qu'elle libère cette énergie en fonction des besoins. ATP ADP (adénosine di-phosphate) + P + 75 % chaleur + 25 % travail mécanique. NB : • La dégradation de l’ATP s’accompagne d’une libération de chaleur. Ce qui explique que lors d’un effort physique, on constate une augmentation de la température interne de l’organisme (40° en moyenne à la fin d’un marathon). • On peut considérer que la température favorable aux métabolismes énergétiques est de 38-38,5°. D'où l'intérêt d'un é chauffement avant de pratiquer une activité sportive. Mais lorsque la température interne augmente trop, la chaleur devient un facteur limitant de la performance. La transpiration est le principal mécanisme d’évacuation de la chaleur. Il conviendra de boire régulièrement pendant les efforts de longue durée Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 2 Mais, il n'y a que très peu d’A.T.P. dans l'organisme. Ce stock limité ne permettrait de réaliser un effort que de quelques secondes et ne permettrait de faire que 1 mètre à intensité maximale ou 5 mètres à une allure de footing. Autrement dit l’A.T.P. est une sorte de pile qui se décharge très vite Nous verrons dans le chapitre suivant comment l'organisme va resynthétiser cet A.T.P. autrement dit, comment il va recharger cette pile. Nous nous intéresserons donc à la réaction inverse. ADP + P + Energie chimique (d’origine alimentaire) ATP 2- LA RESYNTHESE DE L’ATP : Ainsi, pour que l’effort puisse se prolonger, l’organisme doit en permanence resynthétiser ce stock d’ATP qui a été dépensée. Cette resynthèse met en jeu l'ensemble des grandes fonctions (respiration, digestion, circulation…) permettant d'alimenter le muscle en substrats énergétiques provenant de l'alimentation et de réserves stockées dans l'organisme (Lipides, glucides, autres..). Au niveau musculaire, 3 types de réactions chimiques permettant la resynthèse de l’ATP que l'on peut classer en 2 catégories : a) Les filières anaérobies qui se présentent comme des processus d'urgence permettant de faire face à une demande immédiate d'énergie. Elles permettent de fournir l'énergie nécessaire en début d'effort ou lorsque l'intensité du travail demandé est très élevée. Elles permettent de reconstituer l’ATP sans utiliser l'oxygène. On distingue deux processus anaérobie mettant en jeu des réactions chimiques différentes : - La filière anaérobie alactique: elle se met en jeu essentiellement dans des efforts d'une intensité très élevée et de courte durée jusqu'à 20’’ (7 à 8’’ à puissance maximale). Au-delà de cette durée, cette filière n'est plus capable de fournir suffisamment d'énergie. La resynthèse de l’ATP sollicite, ici, un composé riche en phosphore: la phosphocréatine. - La filière anaérobie lactique: qui se met en jeu sur des efforts d'intensité élevée sur des durées plus longues (de 20’’jusqu’à 2mn). On peut dire qu'elle prend le relais de la filière alactique. Cette source d'énergie utilise la dégradation du glucose et du glycogène sans intervention de l'oxygène. Mais ce processus s'accompagne de la production de déchets (L’acide lactique) qui vont s'accumuler, puis bloquer ce processus. b) la filière aérobie qui est le processus mis en jeu d’une manière permanente pour resynthètiser l’ATP. Ce processus utilise l'oxygène pour extraire de l'énergie des molécules de glucose, de glycogène (glucides), d'acides gras (lipides), et accessoirement d'acides aminés (protides). De par la complexité des mécanismes mis en jeu, ce processus est long à intervenir (délai d'intervention de 2 à 4 mn), d'où la nécessité de l'intervention des filières anaérobies en début d'effort. Par ailleurs, le débit d'énergie de cette filière est faible, ce qui ne permet pas de réaliser des efforts d'intensité très élevée. Par contre cette filière permet de produire de l'énergie sur de très longue durée. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 3 CO2 + H2O ATP Glucides Lipides Acide lactique Glucose, Glycogène VOIE AEROBIE VOIE ANAÉROBIE LACTIQUE Créatine +P ADP + Pi + Energie (Chaleur + Travail ) Phosphocréatine (PC) VOIE ANAÉROBIE ALACTIQUE 3- LE FONCTIONNEMENT DES FILIERES ENERGETIQUES : Dans ce chapitre, nous allons aborder d’une manière simple le fonctionnement des filières sur le plan physiologique. Nous allons également voir les réactions mises en jeu dans le processus de récupération. A- La filière anaérobie alactique: Elle est mise en jeu dans des efforts intenses voir violents d'une durée inférieure à 20 secondes: - sprint sur 30 mètres, …. - Sauts et lancers en athlétisme, - Haltérophilie - tir en handball, frappe en sports de combats….. Elle est également mise en jeu dans d'autres activités telles que le football, le tennis, le volley-ball, le handball ou d'autres activités intermittentes. En effet, ces activités se caractérisent par une succession d'efforts brefs et intenses (actions de frappe, de but, duels, actions de défense, jetés en escalade, impulsions, sprints courts à intensité maximale), qui sont toujours déterminants sur le déroulement du jeu et sur le score. - Fonctionnement : Le processus anaérobie alactique recouvre des réactions qui permettent la resynthèse de l’ATP en l'absence d'oxygène et sans production de déchets (acide lactique). Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 4 C'est la créatine phosphate (ou phosphocréatine) qui permet cette resynthèse. La créatine phosphate libère son énergie en se dissociant permettant ainsi la resynthèse de l’ATP. On peut dire qu'il y a transfert d'énergie. ATP Créatine + P Créatine phosphate ADP + P Ce système alactique est la source la plus rapide de production d'énergie car : - il ne dépend pas d'une longue série de réactions chimiques. - Il ne dépend pas du transport d'oxygène. - ATP et la créatine phosphate sont stockés très près des éléments contractiles du muscle. - Facteur limitant : Le facteur essentiel qui limite la production d'énergie par voie alactique est la quantité de créatine phosphate disponible. Suite à une sollicitation importante, le stock de créatine phosphate se trouve fortement diminué. - Mise en jeu à l'effort : Dès que l'effort commence, le stock d’ATP disponible au niveau musculaire baisse rapidement. C’est la filière alactique qui va fournir l'énergie nécessaire à la resynthèse de l’ATP pendant les 20 premières secondes d’effort. Toutefois, il faut noter qu’entre 7 et 20 secondes, le travail à intensité maximale devient de plus en plus difficile à supporter pour le sportif. Ceci s’explique par le fait que la capacité de production d'énergie par voie alactique s’épuise progressivement. Même si elle reste toutefois prépondérante jusqu'à 20 sec. la filière lactique devient de plus en plus importante au fur et à mesure que l’effort se prolonge. On peut visualiser sur ces courbes, la diminution rapide des réserves de créatine phosphate au cours d’un 100mètres. Parallèlement, on note une augmentation rapide de la quantité d'acide lactique produit, ce qui témoigne de la mise en jeu de la filière anaérobie lactique même dans un effort aussi court qu’un 100 m en athlétisme. On peut donc considérer que l'effort est strictement alactique seulement sur une durée inférieure à 7 secondes. Au-delà, les deux métabolismes alactique et lactique seront tous les deux sollicités. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 5 Intervention de la glycolyse anaérobie dans un 100 m (d'après Lacour J.R . 1992) 9 20 8 7 6 5 10 4 La cta te ATP e t CP 15 3 5 Créatine phos phate A TP Lac tate 2 1 0 10 80 60 40 20 0 0 Ec ha uf fe m en t 0 Dista nce de course - La resynthèse de la créatine phosphate : A la fin de l'effort sollicitant pour le système alactique, le taux de créatine phosphate se situe à niveau très bas. Récupérer de ce type d’effort consiste à restaurer les stocks de créatine phosphate qui ont été épuisé au cours de l’effort Habituellement on considère que : 75 % des stocks sont resynthétisé 1 minute Presque 100% en 4 minutes. Ces valeurs sont importantes à prendre en compte dans une séance d'entraînement ayant pour objectif le développement des qualités de vitesse. En effet, des temps de récupération trop courts ne permettront pas une restauration optimale des stocks de créatine phosphate. Si cette restauration n'est pas complète, l'intensité et la qualité du travail diminueront rapidement. Le muscle devra faire appel à d'autres processus pour produire l’ATP et notamment à la filière anaérobie lactique. B- La filière anaérobie lactique : La filière anaérobie lactique est mise en jeu dans de nombreux sports qui nécessitent des efforts intenses voire épuisant de 20 secondes à 2 minutes. On peut dire qu’elle vient relayer la filière anaérobie alactique qui arrive à épuisement. Elle intervient ainsi dans des activités telles que le patinage artistique, le cyclisme sur piste, le bicross, le ski alpin, la natation, l’aviron, l'athlétisme ou l’escalade. Elle peut également être mise à contribution dans des activités rythmées par des alternances d'efforts et de pauses, à condition que l'activité soit d'une intensité élevée et suffisamment longue. Par exemple: le judo, le hockey sur glace. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 6 - Fonctionnement : La filière anaérobie lactique permet de fournir de l'énergie à partir du glucose ou du glycogène stocké au niveau du muscle. La dégradation de ces substrats en l'absence d'oxygène est appelée glycolyse anaérobie. Cette production d'énergie s'accompagne de la production d'acide lactique. GLUCOSE / GLYCOGENE 2 ATP ACIDE LACTIQUE - Facteurs limitants : Les efforts lactiques sont particulièrement éprouvants pour l'organisme. Un certain nombre de sensations souvent désagréables accompagnent ce type d'effort : • Epuisement important • Lourdeurs brûlures dans les bras, les jambes... • Sensations d'engorgement musculaire. • Nausées. Ces manifestations sont le témoin d'une accumulation importante d'acide lactique qui perturber profondément : - Le fonctionnement de la glycolyse, autrement dit la dégradation du glucose va se ralentir et la production d'énergie également. - Le fonctionnement de la contraction musculaire, ce qui se traduit par l'incapacité du muscle à produire un travail musculaire. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 7 GLUCOSE / GLYCOGENE Production d’ATP Contraction musculaire ACIDE LACTIQUE Ainsi, au fur et à mesure que l'effort se prolonge, l'acide lactique va s'accumuler puis progressivement saturer le système musculaire jusqu'à contraindre le sportif à l'arrêt de l'exercice. Il est possible de mesurer la quantité d'acide lactique produit comprenant une goutte de sang soit au bout du doigt, soit dans le lobe de l'oreille. Ces indications peuvent être utiles pour l’entraîneur dans certaines activités sportives. Toutefois, on ne peut pas limiter la fatigue aux seuls effets de l'acide lactique. L'activité physique provoque, en effet, de nombreux autres désordres biologiques et psycho- sensoriel qui permettent d'expliquer la fatigue du sportif après l'entraînement ou la compétition - L’élimination de l’acide lactique : Une récupération active (footing léger) permet d'accélérer considérablement l'élimination de l'acide lactique. Dans ce cas, l'acide lactique est utilisé comme source d’énergie. Il est brûlé (oxydé) par voie aérobie. Sur ce tableau nous pouvons voir la vitesse d’élimination après un effort épuisant de 1 à 2 mn. Récupération passive Récupération active Baisse de 50% En 25 mn En 6 mn Baisse de 100% En 1h30 En 20 mn Remarque : L'élimination de l'acide lactique pose de gros problèmes enfants. Ce ne sera qu’à la puberté (maturité hormonale) qu’ils seront capables de récupérer de ce type de d'efforts. Un travail lactique peut également se veulent s'avérer épuisant et usant au niveau mental notamment sur le plan de la motivation des pratiquants. Il doit donc être réservé à des pratiquants suffisamment agés, motivés, engagée dans une pratique compétitive, et ayant suivi au préalable un travail préparatoire en aérobie. L'élimination de l’acide peut se faire non seulement à la fin de l'effort, mais aussi en cours d'effort. C'est le cas lors activités qui alternent des séquences de travail intense et des séquences à intensité faible. Ces séquences à intensité faible peuvent être considérées comme des phases de récupération active. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 8 C- La filière aérobie : La filière aérobie est mise en jeu tout particulièrement dans les activités de longue durée (au-delà de 3 à 4 minutes) : Cyclisme, course de demi-fond et de fond en athlétisme, ski de fond, natation, course en montagne… Mais aussi dans des activités sportives intermittentes (alternance de période de travail intense et de période de récupération plus ou moins actives) : tennis, football, handball, sports de combat… La filière aérobie a pour caractéristique de produire de l'énergie à partir des substrats énergétiques (glucides et lipides) qui sont dégradés en présence d'oxygène. On parle de la glycolyse aérobie et de la lipolyse. L'oxydation des glucides : Nous avons pu voir que la filière lactique fonctionnait à partir du glucose et du glycogène musculaire stocké au niveau du muscle lui-même. La filière aérobie utilise également ces substrats mais elle fonctionne aussi en utilisant le glucose sanguin, ainsi que les réserves stockées au niveau du foie en présence d'oxygène. GLUCIDES / LIPIDES O2 CO2 H2O 36 ATP La filière aérobie a un fonctionnement que l’on peut qualifier « d’écologique » dans le sens où, à l’inverse de la filière lactique, les produits terminaux des réactions sont facilement éliminés par la respiration et la transpiration (CO2 + H2O). L’utilisation des lipides : Les substrats énergétiques utilisés ici sont les graisses qui constituent une réserve énergétique quasiment inépuisable. Au repos, l'organisme utilise principalement les lipides. A l’effort, l'importance de leur contribution dépend de 2 paramètres : Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 9 - l’intensité de l’effort : En aérobie, si l’intensité du travail à réaliser est élevée , ce sera surtout les glucides qui seront sollicités. En effet ceux-ci sont beaucoup plus faciles à mobiliser. - La durée de l’effort : plus l'effort se prolonge plus le pourcentage d’énergie apportée par les lipides sera important. Toutefois, la vitesse de dégradation des lipides est beaucoup plus lente que celle des glucides. Ce qui se traduit par une puissance de travail ou un débit d’énergie relativement limité. % énergie Représentation de l'utilisation des glucides et des lipides dans un effort de longue durée à intensité modérée 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Lipides Glucides 10mn 20mn 30mn 40mn 50mn 60mn Toutefois, l'utilisation des lipides par voie aérobie est dépendante de la glycolyse. Sans entrer dans des détails de biochimie complexe, on peut dire que les lipides "brûlent au feu des glucides". Autrement dit, les lipides ont besoin de la présence des glucides pour être dégradés en présence d'O2. Ce qui peut expliquer qu'un pratiquant ayant des réserves de lipides (graisses) importantes puisse "tomber en hypoglycémie" c'est à dire de se trouver dans l'incapacité de poursuivre son effort malgré des réserves énergétiques lipidiques en quantité importante car il aurait épuisé ses réserves en glucides. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 10 EN CONCLUSION : Ce cours avait pour objectif d'éclairer les mécanismes qui permettent à l'organisme de faire face à la dépense d'énergie nécessaire à sa survie et à ses activités. Le fonctionnement de l'organisme au repos (métabolisme de base), ainsi que les activités physiques pratiquées nécessitent une certaine dépense d'énergie. Pour faire face à cette dépense, l'organisme doit produire de l'énergie d'une manière permanente. . Pour cela nous avons vu différents aspects : - La dégradation de l’ATP qui permet de produire un travail (biologique, mécanique, ou chaleur) - Les mécanismes de resynthèse de l’ATP. - Le fonctionnement des filières énergétiques qui permettent cette resynthèse. A la fin de ce cours vous devriez être capable de : - Connaître les mécanismes permettant la libération d’énergie. - Décrire sommairement le fonctionnement des filières énergétiques permettant la resynthèse de l’ATP. - Connaître les facteurs qui limitent ces mécanismes de resynthèse. - D’illustrer chaque système de production d’énergie par des exemples de situations sportives. Doc. G. Moyne / Physiologie-10/10/14-11:10 11