Conjoncture économique et rentrée sociale : synthèse et prévisions à l’automne 2009 La pire récession depuis l’après-guerre L’aide sociale des départements face à la crise L’explosion de la bulle spéculative immobilière américaine a affecté l’ensemble des marchés financiers de la planète, entraînant par là même l’économie mondiale dans la plus grave récession connue depuis la seconde guerre mondiale. Les politiques monétaires et budgétaires de relance des banques centrales et gouvernements ont permis d’éviter l’effondrement complet du système financier et économique. L’économie française n’a pas été épargnée, même si la situation est moins sévère que dans d’autres pays européens comparables (Espagne, RoyaumeUni, Allemagne). Le produit intérieur brut 2009 pourrait diminuer de 3 % sur un an. La reprise de la croissance envisagée pour 2010 serait de faible ampleur tant l’impact de la crise a été fort. Dans ce contexte de réduction de la demande, les entreprises ont réduit massivement leurs investissements et supprimé des capacités de production. Elles ont, de ce fait, détruit de nombreux emplois (-600 000 environ en 2009) Le chômage a donc augmenté très rapidement, effaçant plusieurs années d’amélioration, la crise sociale succédant à la crise économique. De part leur compétence forte en matière d’action sociale, les départements sont eux aussi directement impactés par la crise économique. Les recettes pâtissent de la baisse de l’activité et les dépenses poursuivent leur tendance haussière. Avec un décalage de plusieurs mois, la hausse du chômage devrait entraîner dans les prochains mois une remontée du nombre d’allocataires des minima sociaux, RSA en tête. Les autres dépenses d’action sociale conservent leur dynamisme. Celles en faveur des personnes âgées nécessitent une croissance forte pour faire face aux besoins, tout comme celles en faveur des personnes handicapées. Le déploiement de l’Allocation Personnalisée pour l’Autonomie (APA) et la montée en charge de la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) en témoignent. La situation financière du régime général et de l’assurance chômage se dégrade fortement Le système de Protection sociale est pleinement sollicité pour faire face aux effets de la récession. Les dépenses d’assurance chômage augmentent fortement, de même que les dépenses d’aide au logement versées par la branche Famille. Les dépenses de maladies, de retraites, de maternité continuent de croître à des rythmes dynamiques. Afin de ne pas compromettre les chances d’une reprise économique dès 2010, les recettes des principales composantes du système (régime général, assurance chômage) ne devraient pas être augmentées. En conséquence, la situation financière se dégrade. Le déficit du régime général pourrait atteindre 20 milliards d’euros en 2009, plus 2 milliards d’euros avec le déficit du Fonds de solidarité vieillesse. L’assurance chômage serait en déficit de plus d’un milliard d’euros en 2009 et la situation empirerait l’année suivante. L’intervention sociale de l’État : évolution contrastée Les comptes de l’État se sont fortement dégradés en 2008 et 2009 en grande partie sous l’effet de la crise économique qui l’aura privé de certaines recettes et amené à décider de mesures de relance. En 2007, le déficit budgétaire de l’État s’était établi à 38,4 milliards d’euros. Pour 2008, il se creuse pour s’établir à 56,3 milliards d’euros, soit une dégradation de 17,9 milliards d’euros par rapport à l’année précédente. Pour 2009, le déficit budgétaire de l’État est, à ce stade, estimé entre 125 et 130 milliards d’euros, selon le ministre du Budget. Pour ce qui est de l’intervention sociale de l’État, comme en 2008, on constate à la fois des dépenses qui progressent (ex : AAH, RSA, financement des CHRS et des autres types d’hébergement d’urgence, etc.) et d’autres qui diminuent fortement (ex : tutelle, curatelle, actions de soutien à la parentalité, dépenses d’hébergement et d’action éducative des mineurs et jeunes majeurs en danger, etc.). Prix : des baisses de prix dans de nombreux secteurs Après avoir redouté une spirale d’inflation débordante, l’économie française (comme celle de ses partenaires européens) craint désormais le spectre de la stagnation des prix. Sur l’année Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2009-2010 VII 2009, l’évolution moyenne de l’indice des prix serait stable. Les prix des produits alimentaires augmenteraient très modérément (+0.7 %) et les prix des produits manufacturés seraient identiques à ceux de 2008. Le contraste est encore plus frappant pour les prix des produits pétroliers. Après une hausse de 14 % en 2008, ils devraient baisser de 20 % en 2009. Les prix des services, dans leur ensemble, bien qu’en légère décélération, continuent de croître sur une tendance proche des années précédentes (+2.3 %). En termes de prévisions pour 2010, compte tenu d’une perspective de reprise modeste de l’économie, les prix devraient progresser faiblement. Le gouvernement, dans son scénario de juin 2009, anticipe une inflation à 1.2 %, très proche des prévisions effectuées par différents conjoncturistes. Pour schématiser, une prévision de hausse des prix de 1 % en 2010 semblerait réaliste. Baisse des salaires dans le secteur marchand Le ralentissement marqué de l’activité économique s’est répercuté dans le secteur marchand : le salaire moyen par personne devrait afficher une baisse de 0.4 % en 2009. La rupture de tendance est forte. Sur les quatre années précédentes, la hausse annuelle oscillait entre 2.7 % et 3.3 %. La dégradation brutale de la conjoncture (-3 % PIB), du marché du travail et du chômage de masse qui va avec, met la plupart des salariés dans l’incapacité de négocier des hausses, voire de refuser des baisses de salaires. À cela s’ajoute la diminution des primes versées, des heures supplémentaires mais aussi la moindre revalorisation du Smic. D’autre part, la fin de l’épisode inflationniste connu avant l’été 2008 enlève un argument en faveur d’une politique de revalorisation salariale. Avec une inflation nulle, le pouvoir d’achat des salariés du secteur marchand devrait diminuer de 0.3 % en 2009, alignant ainsi deux années de baisses successives. La hausse s’explique par les mesures décidées en 2008 visant à compenser les pertes de pouvoir d’achat accumulées au cours des années précédentes. Cela se traduit notamment par une augmentation de l’indice de traitement de la fonction publique de 0.8 % en 2009 (+0.5 % en juillet et +0.3 % en octobre), puis de 0.5 % en juillet 2010 et en juillet 2011. En terme de pouvoir d’achat, l’inflation zéro permet, fait exceptionnel, une progression significative de 1.5 %, soit un taux largement supérieur à celui connu les années précédentes et supérieur également à celui du secteur marchand. Les rémunérations dans le secteur sanitaire et social : ne pas décrocher de la fonction publique Cette année, le contexte a changé. La crise économique met le financement de la protection sociale sous pression, rendant difficiles des demandes de revalorisations salariales importantes. Le problème inflationniste et des pertes de pouvoir d’achat récurrentes est lui aussi mis entre parenthèses pour le moment. De fait, afin d’éviter un décalage trop important avec la fonction publique, les syndicats employeurs du secteur continuent d’anticiper des hausses de salaires1. Les employeurs de la convention collective de 1966 prévoient une hausse moyenne relativement proche de la fonction publique, soit une augmentation de la valeur de point de 1.24 % en 2009 et 1 % en 2010. Pour la convention collective de 1951, la Fehap préconise une évolution moindre, à savoir une hausse moyenne de 0.7 % en 2009 et 0.4 % en 2010. Uniopss, le 10 septembre 2009 Pour 2010, la modestie de la reprise économique ne devrait pas permettre une augmentation soutenue des salaires dans le secteur marchand. Les salaires de la fonction publique sont eux aussi marqués par le ralentissement économique mais dans une moindre mesure. Ils continuent d’augmenter (1.5 %), même si cela se fait à un rythme deux fois moins important qu’en 2008. 1 VIII En fonction des informations dont nous disposons au 9 septembre 2009. Uniopss/Uriopss Rentrée sociale 2009-2010