Régularité et interpolation - IMJ-PRG

publicité
Régularité et interpolation
Marc CHARDIN & Patrice PHILIPPON
Abstract. In this article we introduce a weak notion of regularity for a graded module M
over a standard graded algebra. Instead of the usual condition of m-regularity we ask that, for all i,
i
(M )]>m−i = 0 where b is an homogeneous ideal, and then say that M is (m, b)-regular. This
[bHm
notion is especially interesting when b contains a non zero divisor in M , such a module is called
(m, b)-perfect.
Three important facts concerning an (m, b)-regular module M are :
(1) if x does’nt divide zero in M , M/xM is (m + deg x − 1, b)-regular,
(2) if M 0 ⊂ M , then M/M 0 is (m, Ann(M 0 )b)-regular,
(3) if M is Cohen-Macaulay and (m, b)-perfect, then M is m-regular.
These properties lead to interesting estimates on the regularity of Cohen-Macaulay modules.
Our main result in this direction is,
Theorem A. If X ⊆ Pn is a scheme of dimension 0 and H1 , . . . , Hn are hypersurfaces containing X that forms a complete intersection locally at each point of X, then
reg(X) 6 deg H1 + · · · + deg Hn − n.
The interesting point here is that we do not impose a global complete intersection condition.
This result may be compared with the one of Bertram-Ein-Lazarsfeld in [1], where a bound of
the same type is obtained for a smooth scheme X of arbitrary dimension cutout scheme-theoretically
by hypersurfaces Hi .
We use this result to solve a conjecture of the first author, namely
Theorem B. Let X ⊆ Pn (k) be an irreducible variety of codimension r (with k perfect), then
for all s 6 r there exists Y irreducible of codimension s, containing X, with
[deg Y ]1/s 6 4n−1 n[deg X]1/r .
The key point in the proof is to obtain, in every degree > d1 + · · · + di , non trivial lower
bounds for the Hilbert function of isolated components of an intersection of hypersurfaces of degrees
d1 , . . . , di . This estimate is derived from theorem A, by reducing to the zero dimensional case.
Introduction
Dans cet article nous introduisons une notion affaiblie de régularité pour un module gradué
M sur une algèbre graduée standard. Au lieu d’imposer la condition usuelle de m-régularité, nous
1
i
demandons que, pour tout i, [bHm
(M )]>m−i = 0, où b est un idéal homogène. On parle alors de
(m, b)-régularité. Cette condition n’est facilement utilisable que lorsque b contient un non diviseur
de zéro dans M , un tel module est dit (m, b)-parfait.
Trois faits importants concernant un module (m, b)-régulier M sont :
(1) si x ne divise pas zéro dans M , M/xM est (m + deg x − 1, b)-régulier,
(2) si M 0 ⊂ M , alors M/M 0 est (m, Ann(M 0 )b)-régulier,
(3) si M est de Cohen-Macaulay et (m, b)-parfait, il est m-régulier.
Ces propriétés montrent la voie pour des estimations intéressantes de la régularité des modules
de Cohen-Macaulay. Nous montrons notamment,
Théorème A. Si X ⊆ Pn est un schéma de dimension 0 et H1 , . . . , Hn sont des hypersurfaces
contenant X et formant une intersection complète localement en chaque point de X, alors
rég(X) 6 deg H1 + · · · + deg Hn − n.
Le point intéressant est le fait que la condition d’intersection complète n’est pas globale.
On pourra comparer ce résultat à celui de Bertram-Ein-Lazarsfeld dans [1], ou une borne du
même type est obtenue pour un schéma lisse X de dimension arbitraire, schématiquement défini
par des hypersurfaces Hi .
Nous utilisons cet énoncé pour résoudre une conjecture faite dans la thèse du premier auteur,
à savoir
Théorème B. Soit X ⊆ Pn (k) une variété irréductible de codimension r (avec k parfait),
pour tout s 6 r on peut trouver Y irréductible de codimension s contenant X et telle que
[deg Y ]1/s 6 4n−1 n[deg X]1/r .
Le point clef est d’obtenir une minoration non triviale, en tout degré > d1 + · · · + di , de
la fonction de Hilbert de chaque composante isolée d’une intersection d’hypersurfaces de degrés
d1 , . . . , di , ce que permet le théorème A par réduction au cas de dimension zéro.
§1. Régularité relative à un idéal.
Soit A une algèbre graduée standard, c’est-à-dire telle que A0 = k soit un corps et A = k[A1 ],
m = A+ et M un A-module gradué de type fini. Si a = (a1 , . . . , as ) est un s-uplet d’éléments
homogènes de A+ , de degrés di := deg ai , les modules d’homologie Hs−i (a, M ) du complexe de
Koszul K• (a, M ) sont annulés par AnnM + a, où a est l’idéal engendré par les ai .
Ainsi, par exemple, Hs−i (a, M )ν = 0 pour tout ν À 0 et tout i si dim(M/aM ) = 0.
Munissons le complexe K• (a, M ) de sa graduation naturelle (telle que les différentielles soient
homogènes de degré 0), décalée de telle sorte que
Ks (a, M )ν := Mν
on a alors, par exemple, Hs (a, M ) = (0 :M a) et H0 (a, M ) = M/aM [d1 + · · · + ds ].
2
Afin de contrôler notamment le défaut de caractère Cohen-Macaulay (voir ci-après), on introduit la définition suivante.
Définition 1. Si m ∈ N et b ⊆ A est un idéal homogène; M est dit (m, b)-régulier si l’une
des quatre conditions équivalentes suivantes est vérifiée,
(∗) pour tout s-uplet a = (a1 , . . . , as ) de A+ tel que dim M/aM = 0, on a
[bHs−i (a, M )]ν = 0,
∀ prof M 6 i 6 dim M, ∀ ν > m − i.
(∗)0 pour tout s-uplet a = (a1 , . . . , as ) de A+ tel que dim M/aM = 0, on a
[bHs−i (a, M )]ν = 0,
∀ i, ∀ ν > m − i.
i
(∗∗) [bHm
(M )]ν = 0,
(∗∗)
0
i
[bHm
(M )]ν
= 0,
∀ prof M 6 i 6 dim M,
∀ ν > m − i.
∀ i,
∀ ν > m − i.
√
Et M sera dit (m, b)-parfait si de plus b possède un élément non diviseur de zéro dans M .
Lorsque M = A/I, I sera dit (m, b)-régulier (resp. parfait) si A/I l’est.
Montrons l’équivalence annoncée. On rappelle que rég(M ) est le plus petit entier m tel que
(∗∗) soit vérifiée pour b = A.
i
Preuve. Les propriétés (∗∗) et (∗∗)0 sont clairement équivalents puisque Hm
(M ) = 0 pour
0
i < prof M et i > dim M . D’autre part l’implication (∗) ⇒ (∗) est triviale.
L
Soit m =: (x1 , . . . , xn ). Notant C 0 (M ) = M et C q (M ) = i1 <···<iq Mxi1 ···xiq , le bi-complexe
Z-gradué C • (K• (a, M )), donne lieu à deux suites spectrales de même aboutissement, on a:
(0 1) 0 E1pq = C q (Hp (a, M )), donc 0 E1p0 = Hp (a, M ) et 0 E1pq = 0 si q > 0.
q
q
(M ).
(M )), en particulier 00 E1sq = Hm
(00 1) 00 E1pq = Kp (a, Hm
q
00
00 pq
( 2) E2 = Hp (a, Hm (M )).
pq
pour tous p et q.
On a ainsi 0 E1pq =0 E∞
Soit b ∈ b et d := deg b. Choisissons tout d’abord N tel que N > rég(M ) + d, et posons
q
(np) = 0 si ν > −d et p 6= n.
N
00 pq
a := (xN
1 , . . . , xn ) de telle sorte que [ E1 ]ν = Hm (M )[N (n − p) + ν]
On a ainsi dans ce cas un isomorphisme gradué (de degré 0) de A-modules Hn−q (a, M )>−d '
q
Hm (M )>−d . Ce qui montre que (∗) ⇒ (∗∗).
q
D’autre part, si b annule tous les modules Hm
(M ) en degrés > ν − deg b − q, alors b annule
L
q
[00 E1pq ]>ν−deg b−i pour p − q = s − i, car 00 E1pq = i1 <···<is−p Hm
(M )[di1 + · · · + dis−p ] et di1 + · · · +
dis−p > s − p = i − q. Ainsi b annule également l’aboutissement (sur la ligne p − q = s − i), qui est
isomorphe à Hs−i (a; M )ν−deg b−i , ce qui montre que (∗∗)0 ⇒ (∗)0 , et termine ainsi la preuve.
¤
Observation 1. La preuve ci-dessus montre en fait que pour être (m, b)-régulier il suffit de
N
vérifier la propriété (∗) pour tout a tel que a est m-primaire, et même pour a = (xN
1 , . . . , xn ) avec
N ∈ N.
§2. Quelques propriétés de la (m, b)-régularité.
Proposition 1. Soit M un A-module gradué de type fini et b un idéal homogène. Si M est
(m, b)-régulier et x est une forme de degré d > 0 ne divisant pas zéro dans M , alors M/xM est
(m + d − 1, b)-régulier.
3
Preuve. Soit a = (a1 , . . . , as ) et posons a0 = (x, a1 , . . . , as ). Notons que dim M/xM =
dim M − 1. Comme x ne divise pas zéro dans M, on a, pour tout 0 6 i 6 s + 1, un isomorphisme
gradué de A-modules (de degré 0):
Hs−(i−1) (a, M/xM ) ' Hs+1−i (a0 , M )[−d].
Tenant compte du décalage d’indice, la proposition en découle.
¤
Proposition 2. Soit 0 → M 0 → M → M 00 → 0 une suite exacte de A-modules gradués. Si
b0 ⊆ Ann(M 0 ) et M est (m, b)-régulier, alors M 00 est (m, bb0 )-régulier.
Preuve. D’après l’observation 1, on peut supposer que a est m-primaire, de telle sorte que
dim M 00 /aM 00 = dim M/aM = 0, on considère alors le diagramme commutatif à ligne centrale
exacte suivant, pour b ∈ b et b0 ∈ b0 , de degrés respectifs d et d0 ,
Hp (a, M )[−d]
×b ↓
Hp (a, M )
→
φ
→
Hp (a, M 00 )[−d − d0 ]
×b0 ↓
Hp (a, M 00 )[−d]
×b ↓
Hp (a, M 00 )
→
→
Hp−1 (a, M 0 )[−d − d0 ]
0↓
Hp−1 (a, M 0 )[−d]
d’où l’on déduit que si x ∈ Hp (a, M 00 )ν−d−d0 , alors bb0 x ∈ φ([bHp (a, M )]ν ). D’où le résultat.
¤
Si c est un idéal homogène, nous poserons aic (M ) := Ann(Hci (M )).
Corollaire 1. Soit M un A-module gradué de type fini (m, b)-régulier et c un idéal homogène.
Alors, le module M 00 := M/Hc0 (M ) est (m, ba0c (M ))-régulier, il est de plus (m, ba0c (M ))-parfait si
√
b contient un non diviseur de zéro dans M 00 .
Preuve. La proposition 2 appliquée à la suite exacte
0 → Hc0 (M ) → M → M 00 → 0
p
donne le premier énoncé. De plus Ass(M 00 ) ∩ Ass(A/c) = ∅, il existe donc c ∈ c ⊆ a0c (M ) qui
ne divise pas zéro dans M 00 (on peut choisir c tel que deg c 6 d, si c est engendré en degrés 6 d).
Ainsi bc ne divise pas zéro dans M 00 s’il en est de même pour b, ce qui conclut la preuve.
¤
Remarque 1. On a l’inclusion cN ⊆ a0c (M ) pour tout N tel que Hc0 (M ) = 0 :M cN .
§3. Régularité de Castelnuovo-Mumford et (m, b)-régularité.
Proposition 3. Si M est de Cohen-Macaulay et (m, b)-parfait, alors M est m-régulier.
Preuve. Soit b ∈ b non diviseur de zéro dans M et x1 , . . . , xd (d := dim M ) des formes
linéaires telles que (bx1 , x2 , . . . , xd ) soit une suite régulière dans M .
Alors notant M 0 = M/(x2 , . . . , xd )M , on a rég(M 0 ) = rég(M ).
D’autre part, M 0 est (m, (b))-parfait d’après la proposition 1 et on a dim M 0 /bx1 M 0 = 0. Donc
[bH0 (bx1 , M 0 )]>m−1 = b[M 0 /bx1 M 0 ]>m = 0, et ainsi [M 0 /M 0 x1 ]>m = 0 car b ne divise pas zéro
dans M 0 . D’où la m-régularité de M 0 et partant celle de M .
¤
4
Théorème 1. Soient H1 , . . . , Hn des hypersurfaces de Pn et Ω ⊆ Pn un ouvert. Si X :=
H1 ∩ · · · ∩ Hn ∩ Ω est de dimension zéro, alors régX 6 deg H1 + · · · + deg Hn − n.
Preuve. Soit A := k[X0 , . . . , Xn ] et a1 , . . . , an les équations respectives de H1 , . . . , Hn , di :=
deg ai et Y := Pn − Ω. Le cas où Ω = Pn est connu, on supposera donc Y 6= ∅ et on notera K
l’idéal de définition de Y .
Posons Ii := (a1 , . . . , ai ) et Ji := Ii : K ∞ de sorte que Xi := Proj(A/Ji ) = H1 ∩ · · · ∩ Hi ∩ Ω.
On note que A/Ji est pur (car Ω est de Cohen-Macaulay), ce qui entraı̂ne que Ass(A/Ji ) ∩
Ass(A/K) = ∅ pour tout i. Il existe donc b ∈ K homogène tel que b 6∈ ∪ni=1 Ass(A/Ji ), et on
a Ji = Ii : b∞ = (Ji−1 + ai A) : b∞ pour tout i.
Montrons, par récurrence sur 0 6 i 6 n, qu’il existe Ni tel que
(Ri )
A/Ji
est
(d1 + · · · + di − i, bNi )-parfait.
Tout d’abord A est (0, A)-parfait, on choisit donc N0 = 0.
D’autre part, si i > 0, ai+1 ne divise pas zéro dans A/Ji , qui est pur, donc la proposition 1 et
(Ri ) montrent que A/(Ji + ai+1 A) est (d1 + · · · + di+1 − i − 1, bNi )-régulier. D’après le corollaire
1, Ji+1 = (Ji + ai+1 A) : b∞ est (d1 + · · · + di+1 − i − 1, bNi+1 )-parfait pour Ni+1 > Ni tel que
Ji+1 = (Ji + ai+1 A) : bNi+1 −Ni . D’où (Ri+1 ).
Comme A/Jn est de dimension 1, (Rn ), joint à la proposition 3, entraı̂ne la conclusion.
¤
Notation. Si I est un idéal et r un entier, nous noterons I <r> l’intersection des idéaux
primaires correspondant aux premiers isolés de codimension r de I. Ainsi,
I = ∩r>0 I <r> ∩ K
où tous les premiers associés à K contiennent un premier associé à un I <r> .
Le a-invariant d’un module gradué M de dimension D + 1 (D > 0), noté a(M ), est le plus
D+1
D+1
petit entier ν tel que Hm
(M )>ν = 0, ou encore tel que Hm
(M )ν+1 = 0.
Du théorème 1 on déduit, soit directement soit par un résultat dû à Nagel et Schenzel (cf. [5]
théorème 6.4 et proposition 6.7),
Corollaire 2. Soit J un idéal homogène de codimension r 6 n dans k[X0 , . . . , Xn ].
S’il existe un idéal homogène I, engendré par des polynômes de degrés d1 > d2 > · · · > dm , tel
que J ⊇ I <r> , alors
(i) a(A/J) 6 d1 + · · · + dr − n − 1, donc si A/J est de Cohen-Macaulay on a
rég(A/J) 6 d1 + · · · + dr − r,
0
(ii) si A/J est k-Buchsbaum, Hm
(A/J) = 0 et ds > 2k,
(
rég(A/J) 6
d1 + · · · + dn − n,
si s > n
d1 + · · · + ds + 2k(n − s) − n, sinon.
5
Preuve. Le (i) vient immédiatement par récurrence sur n − r, le cas n − r = 0 correspondant
au théorème 1. En effet si r < n on choisit une forme linéaire x non diviseur de zéro dans
0
(A/J)/Hm
(A/J). Alors les suites exactes
×x
n−r
n−r+1
n−r+1
Hm
(A/(J + xA))ν −→ Hm
(A/J)ν−1 −→ Hm
(A/J)ν → 0
n−r
n−r+1
montrent que si Hm
(A/(J + xA))ν = 0 pour ν > µ, alors Hm
(A/J)ν = 0 pour ν > µ − 1,
n−r+1
car Hm
(A/J)ν = 0 pour ν À 0. L’hypothèse de récurrence appliquée à A/(J + xA), entraı̂ne
donc la conclusion.
Pour (ii), on procède comme dans la preuve de ([5], proposition 6.7), qui nous ramène au cas
où dim A/J = 0.
¤
§4. Minorations de fonctions de Hilbert.
On notera H(M, ν) := dimk [M ]ν la fonction de Hilbert du A-module gradué M .
Si I est un idéal homogène de A, nous noterons Z(I) le sous-schéma Proj(A/I) ⊆ Pn et
dim Z(I) := dim A/I − 1 sa dimension.
La proposition 3 a comme corollaire le résultat suivant.
Proposition 4. Soient I ⊆ I 0 deux idéaux homogènes de A, si I est (m, b)-parfait et D :=
dim Z(I) = dim Z(I 0 ) > 0, alors, pour tout ν > m, on a
µ
¶
0
0 ν −m+D
H(A/I , ν) > deg I
.
D
Preuve. Remarquons tout d’abord qu’il suffit de traiter le cas où I 0 est pur ; en effet si I 00
est la composante pure de dimension maximale de I 0 on a deg I 0 = deg I 00 et I 0 ⊆ I 00 entraı̂ne que
I ⊆ I 00 et H(A/I 0 , ν) > H(A/I 00 , ν).
On procède par récurrence sur D, la proposition 3 donnant le cas où D = 0.
Soit b ∈ b non diviseur de zéro sur A/I, donc sur A/I 0 (I 0 est supposé pur par la remarque cidessus) et x une forme linéaire non diviseur de zéro dans A/I telle que dim A/(I +bA+xA) = D−1.
On considère la suite exacte
×x
0 → [A/I 0 ]ν−1 −→ [A/I 0 ]ν → [A/(I 0 + xA)]ν → 0
qui montre que H(A/I 0 , ν) − H(A/I 0 , ν) = H(A/(I 0 + xA), ν).
Maintenant si J := (I + xA) : b∞ = (I + xA) : bN et J 0 := (I 0 + xA) : b∞ = (I 0 + xA) : bN , on
a deg J = deg I et deg J 0 = deg I 0 car b n’appartient à aucun premier de dimension D − 1 associé
à A/(I + xA).
D’autre part, la proposition 1, conjuguée au corollaire 1, montre que J est (m, bN b)-régulier,
et bN +1 ∈ bN b ne divise pas zéro dans A/J.
¡
¢
Ainsi J est (m, bN b)-parfait, d’où, par hypothèse de récurrence, H(A/J 0 , ν) > deg I 0 ν−m+D−1
D−1
pour ν > m. Mais H(A/(I 0 + xA), ν) > H(A/J 0 , ν), donc
µ
¶
0
0
0 ν −m+D−1
H(A/I , ν) − H(A/I , ν − 1) > deg I
,
D−1
6
pour tout ν > m. Une récurrence sur ν > m fournit alors le résultat annoncé.
¤
De la preuve du théorème 1 et de la proposition 4, on déduit aisément,
Corollaire 3. Soit I un idéal homogène, engendré par des polynômes de degrés d1 > d2 >
· · · > dm . Si J ⊇ I <r> est un idéal de codimension r, on a, pour tout ν > d1 + · · · + dr − r,
µ
¶
ν + n − (d1 + · · · + dr )
H(A/J, ν) > deg J
.
n−r
§5. Interpolation algébrique.
Si X = Z(p) est une variété irréductible nous poserons H(X, ν) := H(A/p, ν).
Théorème 2. Soit X une sous-variété irréductible de Pn (k), k corps parfait, de codimension
r. Il existe des hypersurfaces Hi ⊇ X, telles que, notant Vi := H1 ∩ · · · ∩ Hi , di := deg Hi et Xi
l’union des composantes (isolées) de Vi contenant X (X0 := Pn (k)), on ait, pour 1 6 i 6 r,
(1)i Xi est pur de codimension i,
¡ +n−i¢
¡ +n−i¢
(2)i c(n, i)H(X, di − 1) > din−i
di deg Xi−1 > din−i
deg Xi ,
i/r
(3)i deg Xi 6 c0 (n, i) [deg X]
où c(n, i) :=
n!
(i−1)(2n−i)
(n−i)! 2
,
et c0 (n, i) = 4(i−1)(n−1) ni .
Preuve. On procède par récurrence sur i de 1 à r.
Nous avons tout d’abord, pour tout ν > 0 et Y ⊇ X irréductible de codimension i, les
majorations
µ
¶
ν+n−i
(∗)Y
deg Y > H(Y, ν) > H(X, ν)
n−i
la première étant montrée dans [3] et la seconde triviale.
¡
¢
Si i = 1, on choisit d1 minimal tel que H(X, d1 ) < d1n+n et H1 de degré d1 contenant X. La
propriété (1)1 est claire, d’autre part H1 = V1 = X1 et on a
µ
¶
µ
¶
d1 − 1 + n
d1 − 1 + n
nH(X, d1 − 1) = n
= d1
n
n−1
d’où (2)1 . De là et de (∗)X on tire
µ
¶ µ
¶
d1 − 1 + n
d1 − 1 + n − r
6
deg X
n
n−r
d’où dr1 6
n!
(n−r)!
deg X 6 c0 (n, 1)r deg X et (3)1 .
Supposons donc 1 6 i < r et (1)i , (2)i et (3)i vérifiées, notons Y1 , . . . , Ys les composantes
irréductibles de Xi et mi := d1 + · · · + di − i.
Soit ej le plus petit entier tel que H(X, ej ) < H(Yj , ej ). On peut supposer e1 > · · · > es .
On choisit di+1 := max{e1 , 2(mi + 1)} > 2di . Puisque di+1 > ej pour tout j, il existe Hi+1 de
degré di+1 n’appartenant à aucun premier associé à Xi .
7
Toutes les composantes de Vi ∩ Hi+1 contenant X sont nécessairement des composantes de
Xi ∩ Hi+1 , dont les composantes isolées sont purement de codimension i + 1. D’où (1)i+1 .
Le théorème de Bézout, (1)i et les hypothèses mises sur Hi+1 entraı̂nent que deg Xi+1 6
di+1 deg Xi . Ce qui montre la seconde des deux inégalités de (2)i+1 . Pour l’autre inégalité, on
considère deux cas.
• Si di+1 = 2(mi + 1), on a,
c(n, i)H(X, di+1 − 1) > c(n, i)H(X, di − 1)
µ
¶
di + n − i
>
deg Xi
n−i
µ
¶
di + n − i − 1
di
>
deg Xi ,
n−i−1
n−i
µ
¶
di + n − i − 1
di+1
>
deg Xi ,
n−i−1
4(n − i)
µ
¶
di+1 + n − i − 1
di+1
>
deg Xi ,
n−i
n−i−1
4 (n − i)
car di+1 6 2(di + di−1 + · · · + d1 ) 6 2(di + 21 di + · · ·) 6 4di , ce qui prouve (2)i+1 dans ce cas, car
c(n, i + 1) = 4n−i (n − i)c(n, i).
• Si di+1 = e1 > 2(mi + 1), d’après le corollaire 3, on a l’estimation suivante,
H(X, e1 − 1) = H(Y1 , e1 − 1)
µ
¶
di+1 − 1 − mi + n − i
>
deg Y1
n−i
µ
¶
(di+1 /2) + n − i
>
deg Y1
n−i
µ
¶
di+1 + n − i − 1
di+1
>
deg Y1 .
n−i
n−i−1
2 (n − i)
D’autre part, d’après (∗)Y1 et (2)i ,
µ
¶
µ
¶
di + n − i − 1
di + n − i
c(n, i)
deg Y1 > c(n, i)H(X, di − 1) >
deg Xi ,
n−i
n−i
d’où c(n, i) deg Y1 > deg Xi . Ce qui montre (2)i+1 dans ce second cas.
Il nous reste à montrer (3)i+1 (avec 1 6 i 6 r − 1). D’après (2)i+1 et (∗)X on a
µ
¶
µ
¶
di+1 + n − i − 1
n!
di+1 + n − r − 1
i(2n−i−1)
deg X,
di+1 deg Xi 6 2
(n − i − 1)!
n−r
n−i−1
deg X
i(2n−i−1) n!
(r−1)(n−1) r deg X
n deg Xi .
donc dr−i
i+1 6 2
(n−r)! deg Xi 6 4
Ainsi,
deg Xi+1 6 di+1 deg Xi
·
¸1/(r−i)
(r−1)(n−1) r deg X
6 4
n
deg Xi
deg Xi
r
6 n r−i 4
(r−1)(n−1)
r−i
8
1
1
(deg X) r−i (deg Xi )1− r−i
reportant la majoration de deg Xi fournie par (3)i on trouve (3)i+1 , car
r
c0 (n, i + 1) = n r−i 4
(r−1)(n−1)
r−i
1
c0 (n, i)1− r−i .
¤
Le théorème B de l’introduction se déduit immédiatement de (3)s en choisissant pour Y une
composante irréductible de Xs .
Remarque 2. Notons I(s, X) le degré minimal d’une variété irréductible de codimension s
contenant X. D’après ([3], corollaire 5), on a les estimations plus précises suivantes : I(1, X) 6
n[deg X]1/r et I(2, X) 6 n2 [deg X]2/r , où r = codim(X).
Utilisant le corollaire 3 et un argument très proche de la construction faite dans [3] pour faire
un pas de plus — on montre l’existence d’une hypersurface H3 coupant la (une des) composante(s)
de H1 ∩ H2 contenant X, dont on estime la fonction de Hilbert par le corollaire 3 — on obtient
facilement que I(3, X) 6 4(n − 2)n3 [deg X]3/r .
Néanmoins, la variété ainsi construite n’est pas obligatoirement une composante isolée de
H1 ∩ H2 ∩ H3 , lorsque H1 ∩ H2 possède plusieurs composantes irréductibles contenant X. D’où la
nécessité d’un argument du type de celui du théorème 2, et une estimation générale sensiblement
moins bonne.
Remerciements. Nous remerçions l’arbitre pour ses remarques pertinentes qui nous ont
permis d’améliorer ce texte.
Bibliographie.
[1] A. Bertram, L. Ein, R. Lazarsfeld. Vanishing theorems, a theorem of Severi, and the
equations defining projective varieties, J. Amer. Math. Soc., 4 (3), 587–602 (1991).
[2] W. Bruns, J. Herzog. Cohen-Macaulay rings. Cambridge Stud. Adv. Math. 39, 1993.
[3] M. Chardin. Une majoration de la fonction de Hilbert et ses conséquences pour l’interpolation algébrique, Bull. Soc. Math. France, 117, 305–318 (1989).
[4] D. Eisenbud. Commutative Algebra with a View Toward Algebraic Geometry, Graduate
Texts in Math. 150, Springer-Verlag, 1994.
[5] U. Nagel, P. Schenzel. Cohomological annihilators and Castelnuovo-Mumford regularity, Contemp. Math., 159, 307–328 (1994).
[email protected]
[email protected]
Problèmes diophantiens
UMR 9994 du CNRS
Université Pierre et Marie Curie
Case 247
4, place Jussieu
F–75252 Paris CEDEX 05
9
Téléchargement