Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences 01/04/2008-Par JöelSavarino,Chimisteatmosphère-cryosphère L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique L'ozoneestunemoléculeremarquable.Toutàlafoispoisonetprotecteurdeladeviecontinentale,cette moléculecaractériseàelleseuletoutelachimieatmosphérique.Fortementoxydante,elledégradedans les basses couches de l’atmosphère la matière organique et nuit au bon fonctionnement du vivant. Absorbeurdurayonnementultravioletdanslahauteatmosphère,elleprotègelesorganismesterrestres decerayonnementaupouvoirdestructeur.Cetteambivalenceenfaitunemoléculefascinante. Page1/8-L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique L'ozoneestunemoléculeremarquable.Toutàlafoispoisonetprotecteurdeladeviecontinentale,cette moléculecaractériseàelleseuletoutelachimieatmosphérique.Fortementoxydante,elledégradedans les basses couches de l’atmosphère la matière organique et nuit au bon fonctionnement du vivant. Absorbeurdurayonnementultravioletdanslahauteatmosphère,elleprotègelesorganismesterrestres decerayonnementaupouvoirdestructeur.Cetteambivalenceenfaitunemoléculefascinante. Dès sa découverte, l’ozone a fasciné aussi bien les chercheurs que les industriels.Cette molécule occupe la deuxièmeplacedanslaclassificationdesmoléculesoxydantes,justederrièreledangereuxfluorgazeux. Sasimplicitédefabrication,sespropriétésbactéricidesetl’absencedesousproduitsdedégradationontfaittout desuiteunemoléculeattrayantepourdesapplicationsindustriellesavantqu’ellenesoitdétrônéeparlechlore. LefrançaisMariusPaulOtto,premièrepersonneàavoirindustrialisélaproductiond'ozoneavecsasociété 'CompagniedesEauxetdel’Ozone'pourladésinfectiondel'eau. L’ozone est présente dans l’atmosphère terrestre à relativement haute concentration pour un oxydant (0.000004%toutdemêmeauniveaudelasurface).Ellesymboliseàelleseulelepouvoiroxydantde notreatmosphère. Car si l’atmosphère terrestre contient plus de 20% d’oxygène moléculaire, c’est avant tout l’ozone et ses sous produits radicalaires qui la rendent réactive. Appréciant particulièrement la matière organique qu’elle dégrade rapidement, elle constitue un poison pour les organismes à forte concentration.Placée dans la hauteatmosphère,ellefiltrelerayonnementultravioletetprotègel’ADNdesespècesvivantsurlaterre Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page1/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences fermed’unedestructioncertaine.Cetteambiguïtéestparfoissourcedeconfusionpournosconcitoyens. Aucoursdecedossier,àtraversunparcourshistorique,nousaborderonslespropriétésfascinantesde cette molécule, l'ozone stratosphérique, l'ozone troposphérique... et tenterons de clarifier cette ambivalence. Page2/8-Découverte,structure,propriétéetusage L’ozone(O3)estunallotropedel’oxygènetoutcommelediamantetlegraphitesontdesallotropesdu carbone. Elle est formée par l’association de trois atomes d’oxygène et se présente sous la forme d’un triangle isocèled’angleausommetde116°45’etdedeux liaisons interatomiques de 1,27810-10 m. Sa structure chimique peut être représentée par un hydride de résonance de deux états métastables (en faite 4 par effet de symétrie) où chaque liaison chimique est une alternance entre une simple et double liaison covalente, justifiée par une distanceinteratomiquescompriseentrecesdeuxextrêmes.Cettestructureconfèreàcettemoléculeuncaractère métastabledans les conditions ambiantes. L’ozone a une tendance naturelle à se décomposer en dioxygène (O 2) et oxygène atomique (O) ou à réagir avec d’autres composés. Cette capacité à céder facilement un atome d’oxygèneluiconfèreuntrèsfortpouvoiroxydant,justeaprèslefluor(F 2).Atempératureambiante,c’estungaz quiprendunecolorationbleuepâleàforteconcentration.Ilseliquéfieenunliquidebleufoncéà-111,9°Cetse solidifieà-192,5°C. Figure1:Structuremoléculairedel’ozonemontrantlesdeuxformesrésonantes Les premières découvertes de l’ozone se sont produites au moyen des plus simples méthodes d’observation:lessensationsdirectes. Une forte odeur caractéristique a été associée rapidement, dès 1775, au fonctionnement des machines électriques sans l’associer à la présence d’une substance chimique.Il faut attendre 1839 et les expériences de Christian Schönbein sur l’électrolyse de l’eau pour que celui-ci, remarquantuneodeursimilaireproposel’existenced’ungazqu’ilnommeraozoneduGrecqueozien«qui sent».Aprèscettedécouvertel’intérêtpourl’ozonegranditrapidement. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page2/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Figure2:LechimisteAllemandChristianSchönbein,découvreurdel’ozoneen1839. On découvre rapidement ses propriétés oxydantes et de décoloration de la matière organique, d’élimination des odeurs nauséabondes, de dégradation du caoutchouc. Les effets sur la santé humaine sont aussi très vite répertoriés ; l’ozone causant des chocs respiratoires, l’inflammation des muqueuses et dans le cas d’expérimentations animales à forte concentration, la mort. Des méthodes par réaction chimique spécifique sont développéespourledétecterdansl’air. Figure3:Formationd’ozonepardéchargeélectriqueetcondensationdugazsousformed’unliquidebleupar refroidissementàl’azoteliquide©J.Savarino Durantledemi-sièclesuivant,l’ozoneestétudiéesoustoutessescoutures. On cherche à comprendre sa composition chimique, déterminée comme l’association de trois atomes d’oxygène dès 1865, ses relations potentiellesavecdesmaladiescommelecholéraoulagrippe,sesapplicationspossiblescommedésinfectantetsa Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page3/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences présence dans l’atmosphère. La découverte de ses propriétés bactéricides propulse la production d’ozone à l’échelleindustrielle. L’ozone est massivement produite non plus par électrolyse, trop peu efficace mais par décharge électrique d’oxygène moléculaire. Les premières usines d’ozonation de l’eau apparaissent.On compta jusqu’à 49 installationsdetraitementdel’eauparl’ozonedont26enFranceausoirdelapremièreguerremondiale ! Les travaux sur les gaz toxiques et notamment sur le chlore freineront leur développement. Bien que possédant un pouvoir désinfectant et oxydant plus faible (ce qui explique pourquoi le chlore est oxydé par l’ozone et non le contraire,voirl’ozonestratosphérique),lastabilitéetlesbascoûtsdeproductionduchloreenontfaitjusqu’ànos joursleproduitdésinfectantleplusutilisé. Notons tout de même un retour en force de l’ozone sur le marché de la désinfection de l’eau (plus de 2000 installations vers la fin des années 80), principalement parce qu’il ne laisse aucune trace dans l’environnement et ne produit pas de sous-produits toxiques contrairement à la désinfection par le chlore.L’utilisation de l’ozone estpousséejusqu’àêtreintroduitdanscertainssystèmesd’airconditionnépourletraitementdesodeurs etladésinfectiondesconduitsd'aération. Dans l’industrie pétrochimique, très tôt les propriétés de craquage delamatièreorganiqueparrupturedesdoublesliaisonsC=Cparozonolyseontétémisesàcontribution.Audébut duvingtièmesiècle,lesgénérateursd’ozoneetl’ozonolysesontcourammentutilisésdansleslaboratoiresdechimie organique, permettant aux chimistes de casser les grandes molécules organiques et d’en comprendre leur structure. La similitude entre le craquage du caoutchouc induite par l’ozone et l’ozonolyse des molécules organiques, sera un élément déterminant dans la reconnaissance et l’identification de l’ozone comme polluant atmosphérique.L’ozone est aussi utilisé pour le blanchiment du linge ou de la pâte à papier, pour l’éliminationdestracesdematièreorganiquedanslamicroélectroniqueoulelavagedesalimentsàl’eau ozoniséedansl’industriealimentaire. Schönbein fut le premier à proposer une méthode quantitative de mesure de la concentration d’ozone basée sur desbandelttesdeKIexposéesàuneatmosphèreozonisée.Dèssadécouvertedansl'atmosphère,cestechniques chimiques pour mesurer l’ozone se développent et s'affinent. Autour des années 1850, on estime qu’elle est mesurée dans l’atmosphère de plus de 300 villes, totalisant plus d’un million de mesures individuelles qui malheureusement seront pour la plus part inexploitables par absence de calibration, de présence d’interférences chimiquesoudebiaismétéorologiques. Figure4:Générateurd’ozonedeSiemens-1858 Toutefois, le travail remarquable et méticuleux d’Albert Lévy au parc Montsouris de 1876 à 1910 permettra aux chimistes de l’atmosphère de disposer du plus ancien enregistrement d’ozone atmosphérique à une époque où l’industrialisationetlaconsommationd’énergiefossilen’étaientqu’àsesbalbutiements,permettantainsidefixerle Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page4/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences niveau de bruit de fond urbain. Au début du vingtième siècle, l’intérêt de la mesure de l’ozone atmosphérique se perdrapidement,résultantprobablementdel’échecàétablirunequelconquerelationentrel’ozoneetlesmaladies. Il faudra la persévérance d’un petit groupe de scientifique plus intéressé par la météorologie et la structuredel’atmosphèrequeleseffetssurlasantépourrévélerl’importancedel’ozonepour l’équilibre physico-chimique de l’atmosphère et son influence sur le développement de la vie à la surface de la Terre. Page3/8-L'atmosphère:unréacteurphotochimique ContrairementauxatmosphèresinternesdesplanètesgéantesgazeusescommeJupiter,l’atmosphère de la Terre n’est pas en équilibre thermodynamique. L’essentiel de l’énergie de la Terre provenant du rayonnement solaire, celui-ci est à l’origine d’un déséquilibre que les forces de la Nature tentent de corriger en permanence, soit en stockant cette énergie comme par exemple la photosynthèse et le stockage du carbone (l’ensembledel’énergiestockéesurTerreparlesénergiesfossilesnereprésenteque~25joursd’ensoleillement!), soit en l’évacuant par rayonnement infrarouge après l’avoir redistribuée par les phénomènes météorologiques (courant marins, vents, pluies, neige, etc) et la circulation océanique.C’estcetéquilibreentreénergiereçue, redistribuéeetévacuéequimaintientlasurfacedelaTerreàunetempératuremoyennede15°Cmais quigénèreaussiunétatchimiquedel’atmosphèrefortementdynamique. D’un point de vue chimique, l’atmosphère peut être considérée comme un réacteur chimique oxydant. Bien sûr la présence de 21 % en volume d’oxygène moléculaire n’y est pas pour rien mais O2 est loin de constituer l’espèce chimiquelaplusoxydantedel’atmosphère.Sitelétaitlecas,notreatmosphèrenecontiendraitcertainementpas autant d’oxygène moléculaire. En effet, réactivité et concentration dans l’atmosphère sont généralement étroitement liées, ce qui se comprend facilement : plus une molécule est stable, plus elle a de chance de s’accumulerdansl’atmosphèreetviceversa.Ledioxygènebienquefacilitantlacombustionn'engendreque trèsrarementdescombustionsspontanées. C’est à travers la loupe des espèces à très faible concentration qu’il faut regarder l’atmosphère pour comprendre sa réactivité chimique. La figure 5 schématise grossièrement ce fonctionnement.Essentiellementauniveaudusolsetrouventdessourcesémettricesdecomposésprimaires. Figure5:Fonctionnementschématiqueduréacteurchimiqueatmosphérique©J.Savarino Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page5/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Elles sont aujourd’hui aussi bien naturelles que d’origine humaine. Leur particularité est d’émettre majoritairement des composés peu ou faiblement oxydées pour des raisons thermodynamiques (effet de température, milieu anaérobique, combustion non contrôlée, etc). Ces composés chimiques vont alors subir des attaques oxydantes carellessontensituationd’instabilitéparrapportaupotentield’oxydationdel’atmosphère,maisnondirectement par O2 mais par des radicaux libres (OH, HO2, Cl) et des molécules oxydantes comme l’ozone qui se trouvent en concentration d’ultra trace (de l’ordre d’une espèce oxydante pour un milliard de molécule, voire beaucoup moins pourlesradicauxlesplusréactifs). Figure6:Unefinepellicule,quiparaîtbienfragilefaceàl’immensitéduvide,voilààquoiressemble l’atmosphèreterrestrevuedepuisl’espace©NASA Cesdernièressontdirectementissuesdelabrisuredemoléculessimplesparlepuissantrayonnement solaire.Parsuited’unesuccessionderéactionenchaîneimpliquantlesoxydesd’azote,lesperoxydesetd’autres intermédiaires, l’atmosphère se trouve chargée d’espèces au fort pouvoir oxydant dont l’ozone est le plus abondant. Sa propre destruction par le rayonnement ultra violet (UV) du soleil conduit à la formation du « détergent » de l’atmosphère, le radical libre OH. Ce radical extrêmement réactif attaque la majorité des espèces primaires et les oxyde en espèces secondaires, généralement des composés comme les aérosols d’acides sulfuriques (H2SO4) ou nitriques (HNO3) qui sont rapidement éliminés de l’atmosphère par les pluies ou la sédimentation. Ils seront par la suite réutilisés par la matière vivante comme source d’énergie, bouclant ainsi le cycle biogéochimique. Avant d’être transformés ou éliminés, les espèces primaires et secondaires interagissent avec le bilan énergétique de l’atmosphère en réfléchissant (aérosols) ou emprisonnant (gaz à effet de serre) l’énergie solaire incidente et ont donc une action importante sur le climat.On voit donc se construire un système hautement couplé où climat, chimie atmosphérique et cycles biogéochimiques sont en interactionpermanenteautourd’unéquilibreprécaire,entretenuparlaphotochimie. Dans ce schéma de fonctionnement, l’ozone occupe une place centrale et privilégiée puisqu’elle joue à la fois le rôle d’un oxydant puissant,desourcederadicauxlibresOHmaisaussidegazàeffetdeserre.Elleestlaclefdevoûteduréacteur chimique atmosphérique et conditionne son état.Pasétonnantqu’ellesoitundesobjetslesplusétudiésde l’atmosphère. Page4/8-L'ozonestratosphérique:sourcedevie C’est très tôt après sa découverte vers la fin du dix-neuvième siècle, grâce à l’amélioration des outils d’observation, qu’on découvre l’aptitude de l’ozone à fortement absorber le rayonnement UV (Hartley, Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page6/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences 1881). Sous l’impulsion de Fabry et Buisson (1913), puis de Dobson (1920), on établit clairement par une observation minutieuse du rayonnement UV solaire reçu au sol, la présence d’une couche d’ozone dans la stratosphère(10–50kmd’altitude),variablesuivantlessaisonsetlalatitude. Figure7:Production,destructionetconcentrationdel’ozoneenfonctiondel’altitudeselonlemodèlede Chapman(©J.Savarino) Ilfautpourtantattendre1934etlesmesuresdeGötzeffectuantdesmesuresdesUVlorsducoucheret duleverdusoleilpourdécouvrirquelepicd’ozonesesituevers25kmd’altitude.Cetteobservationviendra confirmer expérimentalement les travaux de Chapman (1930) prédisant ce pic sur la seule base de calculs théoriques. Le modèle de Chapman, premier modèle de distribution de l’ozone en fonction de l’altitude, repose sur l’idée centrale que l’ozone est formée par l’association d’une molécule de O2 et d’un atome O, O2 + O = O3 et détruitparlaréactionO+O3=2O2.Orsilaconcentrationd’O2décroîtavecl’altitude,toutcommelapression,la concentrationdeO,quantàelle,aucontrairecroîtaveccettemêmealtitude,Oétantunproduitdephotolysepar le rayonnement UV dont l’intensité croît avec l’altitude. Le maximum d’ozone est donc atteint lorsque le taux de production d’O3 égale son taux de destruction, ce qui place le maximum d’ozone autour de 30 km dans la théorie deChapman(Figure7).Ilfaudraattendre1970etlestravauxduPrixNobeldechimiePaulCrutzenpourarriverà un accord quantitatif entre le modèle de Chapman et les observations.Crutzenseralepremieràreconnaître l’importance de la chimie des oxydes d’azote dans la destruction catalytique de l’ozone, avec pour conséquence une diminution de moitié du pic de concentration et un repositionnement de ce maximum autour de 22kmetnon30kmcommepréditparlemodèledeChapman. Par la suite l’effet des composés chlorés, les fameux CFC et leur compagnon d’infortune le chlore atomique (c’est cechlorequidétruitl’ozoneparlaréactionCl+O3->ClO+O2,etcommeonlevoitcechloreatomiqueestoxydé par la molécule ozone !) et la découverte du « trou d’ozone » complèteront notre compréhension du fonctionnementdelachimiestratosphérique(Aliresurnotresite:"Leclimatetlacouched'ozone"undossierde Marie-LiseChanin) Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page7/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Figure8:Spectresolaireincidentetabsorptiondecelui-cienfonctiondel’altitude.Auniveaudusol,le rayonnementultravioletaquasimentdisparu.SeulsrestentlesUVaetunpeud’UVbpourlebronzage(©J. Savarino). Ainsi formée, la couche d’ozone filtre le rayonnement UV dans la gamme 200-310 nm tandis que l’oxygène moléculairesecharged’éliminerdanslahauteatmosphèreleresteduspectreUV(Figure8).Defait,laprésence d’O2 et d’O3 dans la haute atmosphère protège le sol du rayonnement destructeur des UV. Ici,l’ozonejouele rôledebouclier.Sonexistenceconditionneledéveloppementdelaviesurlescontinents,c’estl’ozonesourcede vie. Page5/8-L'ozonetroposphérique:sourcededestruction L’ozone troposphérique (couche de l'atmosphère entre la surface et une dizaine de km d'altitude) représente tout au plus 10 % du bilan total atmosphérique, les 90 % restant se trouvant dans la stratosphère(située juste au dessus de la troposphère).Il n’est donc pas étonnant que l’ozone troposphérique, hormis la frénésie de mesures durant l’âge d’or de sa découverte, n’ait que peu attiré l’attention des scientifiques. Il faut attendre le début des années cinquante pour voir émerger l’étude systématique de sa concentration troposphérique dans un contexte bien particulier. C’est avec l’explosion de l’utilisation de la voiture à Los Angeles que l’on va découvrir les effets néfastes de cet ozone là. Et ce ne sont pas les chimistes de l’atmosphère qui vont être à l’œuvre mais des spécialistes des pathologies des plantes, des industriels,despurschimistes! Acetteépoquelapollutiondel’airdanslebassindeLosAngelescommenceàprovoquerdesdommages visibles sur les cultures, les récoltes mais aussi sur les matières caoutchoutés. Ces dégâts d’une nature nouvelle attirent l’intérêt des biologistes et chimistes. Ils cherchent à comprendre les causes et les raisons de ce phénomène.Auneépoqueoùlamajeurepartiedespollutionsurbainesétaittoujourslesfuméesdecombustiondu charbon et des usines comme dans le cas du smog londonien du dix neuvième siècle (smog : contraction des termesanglaissmokeetfogquel’onpourraittraduireenfrançaisparbrouméepourbrouillardetfumée),pratique peu courante en Californie, la pollution de Los Angeles paraissait bien mystérieuse. Les premières tentatives d’explicationfurentinfructueusesmaisdonnèrentlespremièrespistes,notammentsurlapossibilitéquefinalement les espèces chimiques présentes dans l’atmosphère fussent probablement différentes de celles émises par les Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page8/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences sources.Comprendrel’origineetlemécanismedeformationdusmogdeLosAngeles,decebrouillardqui irritait fortement les muqueuses, était bien plus qu’une simple curiosité scientifique comme l’ozone stratosphérique le fût à l'origine ; c’était un problème de santé publique et la pression citoyenne était fortepourtrouverdessolutions. Figure8:Chambrederéactionnelleatmosphériqueoùsontsimuléeslesréactionschimiquesatmosphériques ©J.Savarino En1952,Häagen-Smithetsescollèguesallaientfaireuneexpériencecruciale.Enmélangeantdesgazorganiques, des oxydes d’azote en les exposant à la lumière, ils recréent le smog en laboratoire dans des chambres de simulation atmosphérique(Figure 8). Dans ces conditions, la production d’ozone décuplait et l’atmosphère devenait fortement oxydante et agressive pour les organismes vivants. On venait de redécouvrir l’agressivité de l’ozonevis-à-visdeschaînescarbonées,maiscettefoisl'hommeétaitàl’intérieurdutubeàessai.Ilfaudraencore attendre la fin des années soixante-dix et la découverte du rôle des radicaux OH, produit par la photolyse de l’ozoneetdescomposésorganiquesvolatiles,pourquenousayonsuneimagecomplètedel’ozonetroposphérique. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page9/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Figure9:Pollutionausmogaunorddel’Inde.L’absencederégulationetunecirculationautomobile frénétiquesontàl’originedecettepollutionàgrandeéchelle©NASA Le processus peut se décrire de la façon suivante : La combustion et les rejets des gaz d’échappement émettentàlafoisdesoxydesd’azoteetdesgazorganiques.Sousl’effetdusoleil,cesdeuxfamillesdecomposés interagissentetformentduNO2,lequelestrapidementphotolysé,produisantdesatomesd’oxygènequiconduisent inexorablement à la formation d’ozone. L’ozone, à son tour, produit des radicaux OH, lesquels acidifient l’atmosphère en formant des acides sulfurique, nitrique et organique. Par temps clair, calme et ensoleillé, ce mélangeconduitàlaformationd’uneatmosphèrehautementagressiveetcorrosive,c'estl'ozonedestructeur. Page6/8-Lesévénements"zéroozone" L’observation de l’atmosphère nous le rappelle constamment : notre connaissance du fonctionnement du milieu naturel est loin d’être parfaite. Alors qu’une partie des chimistes de l’atmosphère s’attelaient à la compréhension de l’ozone stratosphérique ou du smog photochimique, d’autres se penchaient sur un phénomène nouveau:l’Arctichaze(brumeArctique). Ce phénomène de pollution se caractérise par l’apparition dans le bassin Arctique d’une atmosphère fortement chargéeenaérosolsacidesetautrespolluantsincluantsdesmétauxlourds,dansunerégiondumondedépourvue de sources de pollution et très faiblement habitée.De plus, contrairement au smog photochimique des grandes agglomérations qui se développe en été sous un puissant rayonnement, la pollution ici se produitenhiver,sousfaibleensoleillement. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page10/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Figure10:DépigmentationdelavégétationArctiquecauséeparl’agressiond’uneatmosphèrefortement chargéeencomposésacides©:DanAamlid Une fois encore, c’est d’abord l’observation des dégâts infligés aux écosystèmes qui a attiré l’attention des scientifiquesetdesdécideurs(Figure10).L’attaqueincessantedesforêtsboréalesetdesécosystèmesArctique pardespluiesacidesconduisaitàdesdépérissementsàgrandeéchelle(Figure11). Figure11:Forêtboréaleendommagéeparlespluiesacides©:USForestService Pour comprendre ce phénomène, des stations d’observation de l’atmosphère furent installées sur le pourtourArctiquedurantlesannées70et80.Danslesannéesquisuivirent,lesprocessusàl’originedel’Arctic haze furent identifiés. Les polluants émis par les régions industrialisées de l’hémisphère Nord (Europe, Russie, Etats-Unis et aujourd’hui Asie), plus importants en hiver (industrie métallurgique, chauffage domestique, Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page11/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences transport), sont transportés sur de grandes distances par la circulation atmosphérique et injectés dans l’atmosphèreArctique.Encheminilssontconvertisenacidesulfurique,nitriqueetautresproduitscorrosifs. Figure12:Evénementsdedestructiontotaldel’ozoneauniveaudelameràlastationcanadienned’Alert (Arctiquecanadien)©J.Bottenheim Maisaudétourdecesétudes,uneobservationattiraplusparticulièrementlesscientifiquescanadiens. Au levé du soleil Arctique, vers Mars – Avril, subitement les concentrations d’ozone atteignaient des valeurs plancher, plus basse que la limite de détection des instruments, et ce pour une durée pouvant aller de quelques heures à une semaine(Figure 12). Cette observation fût étonnante car on pensait que l’atmosphère, même naturelle, contenait en permanence les éléments nécessaires au maintien d’une concentration d’ozone mesurable (mélange d’oxydes d’azote et de composés organique volatils).Une avancée majeure se produisit lorsque que l’on observa une corrélation entre les chutes de concentration d’O3 et la teneur élevée en brome (Br) dans l’atmosphère.Or les études sur la destruction de l’ozone stratosphérique, le fameux « trou » d’ozone, montraient le rôle prépondérant joué par l’activation du chlore (Cl) dans la destruction catalytique de l’ozone. Le chlore et le brome appartiennent à la même famille d’élément, appelée les halogènes, et partagent de fait des propriétés similaires. Sous forme atomique, les deux éléments se révèlent être de puissants destructeurs d’ozone maispasdanslesmêmescompartimentsdel’atmosphère.Alorsquelechloreesttrèsactifdansladestructionde l’ozonestratosphérique,ill’estbeaucoupmoinsdanslatroposphèrecarilréagitplusrapidementaveclesespèces organiques,trèsprésentesdanslesbassescouchesdel’atmosphère,qu’avecl’ozone.Enrevanchelebromeest moins réactif avec les organiques et son potentiel de destruction de l’ozone troposphérique est de fait décuplé,environ40foissupérieuràceluiduchlore. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page12/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Figure13:Photosatellitemontrantl’explosiondesoxydesdebromeresponsabledeladestructiondel’ozone auniveaudusoldansl’arctique:l’explosiondebrome©A.Richter Ilestapparudèslorsévidentquelesévènementsdedestructiond’ozoneauniveaudusoldansl’Arctiqueavaient pour origine l’activation de quantités importantes de brome au printemps, aujourd’hui connue sous le terme d’explosion de brome(Figure13) et que ce brome ne pouvait venir que de l’eau de mer, seul réservoir important decetélémentsetrouvantàproximité.Resteàexpliquercommentlebromuredel’eaudemerquiestunselinactif vis-à-vis de l’ozone s’active en brome gazeux.Or, force est de constater qu’aujourd’hui encore cette question est débattue dans la communauté et qu’aucune réponse satisfaisante, respectant toutes les contraintesobservationnellesn’aétéapportée. Figure14:GlacedemerenformationsurlesrivagesduSpitzberg(78°N).Ceprocessusestprobablementà l’origined’émissionsimportantesdebrome,lequeldétruitentièrementl’ozonedesbassescouchede l’atmosphèreArctique)©:J.Savarino Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page13/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Néanmoins,unfaisceaud’indicepointeendirectiondelaglacedemer(Figure14)qui,lorsqu’elleseformerejette les impuretés vers les poches de liquides restantes produisant une augmentation très importante de la teneur en sel de mer. Ce phénomène de concentration associé à d’autres processus serait à l’origine d’une réaction catalytiquedelibérationdebromegazeux. Page7/8-Uneexceptionisotopique Commenousl’avonsvuendébutdedossier,l’ozoneestconstituéde3atomesd’oxygène. Or, l’oxygène possèdetroisisotopesstables,leplusabondantétantl’isotope16,noté 16O(99.8%),composéde8protonset8 neutrons, puis l’isotope 18O (0.2 %), 8 protons et 10 neutrons et enfin l’isotope 17O (0.03 %), 8 protons et 9 neutrons.L’ajoutdeneutronnemodifiepaslanaturedel’élémentcarilinfluencetrèspeulespropriétés intrinsèquesdel’atome.Touslesisotopesstablesdel’oxygènesecomportentdoncdelamêmefaçon.Compte tenu des abondances naturelles des isotopes de l’oxygène, dans la nature seules trois formes d’ozone dominent : 16O16O16O, 16O16O17O, 16O16O18O. Depuislamiseenplacedesloisfondamentalesquigouvernentlarépartitiondesisotopesdanslamatièredansles années cinquante, nous savions que les proportions relatives des 3 isotopes stables de l’oxygène se devaient de suivre des lois dépendant de la masse. C’est ainsi que toute variation du rapport 18O/16O dans un matériau entraînait une variation de moitié du rapport 17O/16O. Ce facteur ½ s’explique assez facilement. Puisque que la grande majorité des processus physiques, chimiques et biologiques dépend de la masse (vitesse de réaction, transport, assimilation biologique, diffusion, etc) et que les différences de masse entre les rapports isotopiques sont de 18O - 16O=2unitésdemasseatomiqueet 17O - 16O = 1 unité de masse atomique, leur rapport conduit naturellement au facteur ½.End’autrestermes, si la composition isotopique d’un matériau oxygéné varie de x pour le rapport 18O/16O alors il variera de x/2 pour 17O/16O. Cette loi est vérifiée pour tous les réservoirs d’oxygènedelaTerrequesontl’oxygènedel’airO 2,lessilicatesetautresminéraux,leCO2etc.Maisunefoisde plus,l’ozonejouelestroublesfêtes. Figure15:L’ozonepossèdeunecompositionisotopiqueuniqueetbiendifférentedurestedesmatériaux terrestres. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page14/15 Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique Futura-Sciences Pour des raisons encore mystérieuses, alors que ce rapport vaut ½ pour tous les matériaux terrestres à quelques exceptions près, il vaut 1 pour l’ozone(Figure 15). Les exceptions sont des espèces atmosphériques produites par attaque oxydante de l’ozone qui leur transfère son anomalie isotopique. Ils héritent donc de cette spécificitévial’ozone.Cetteparticularitédel’ozoneestaujourd’huimiseàprofitpoursonderl’activitéoxydantede l’ozone atmosphérique.Lacompositionisotopiquedel’oxygènesurdesespècesatmosphériquesporteles cicatricesdesagressionsoxydantesdel’ozone. Page8/8-Conclusion Pourlechimistedel’atmosphère,l’ozoneestunemoléculefascinante.Sourcedevieterrestrequandellese trouve dans la haute atmosphère, elle devient néfaste pour les organismes vivants dans les basses couches de l’atmosphère et son accroissement contribue à l'augmentation de l'effet de serre.Et pourtant … Sans ozone, notreatmosphèreneseraitpasnettoyéeaussiefficacementqu’ellenel'estparleradicalOH. C’est cette ambivalence qui donne à cette molécule tout son attrait. Comprendre sa composition isotopique, sa formation, sa destruction, c’est comprendre le fonctionnement du réacteur chimique atmosphérique. Elle est le cœurdecesystèmeetaucœurdespréoccupationsdeschimistesdel’atmosphère. Ellerésumeàelleseulel'originalitédel’atmosphèreterrestreetsamiseenévidencedansl'atmosphère d'uneautreplanètepourraitbienconstituerunepreuvedel’existencedevieextraterrestre,outoutdu moinsunenvironnementpropiceàsonéclosion. Source:http://www.futura-sciences.com/magazines/matiere/infos/dossiers/d/chimie-ozone-coeurchimie-atmospherique-771/ Page15/15