L`ozone au coeur de la chimie atmosphérique - Futura

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Dossier>L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique
Futura-Sciences
01/04/2008-Par
JöelSavarino,Chimisteatmosphère-cryosphère
L’ozoneaucoeurdelachimieatmosphérique
L'ozoneestunemoléculeremarquable.Toutàlafoispoisonetprotecteurdeladeviecontinentale,cette
moléculecaractériseàelleseuletoutelachimieatmosphérique.Fortementoxydante,elledégradedans
les basses couches de l’atmosphère la matière organique et nuit au bon fonctionnement du vivant.
Absorbeurdurayonnementultravioletdanslahauteatmosphère,elleprotègelesorganismesterrestres
decerayonnementaupouvoirdestructeur.Cetteambivalenceenfaitunemoléculefascinante.
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L'ozoneestunemoléculeremarquable.Toutàlafoispoisonetprotecteurdeladeviecontinentale,cette
moléculecaractériseàelleseuletoutelachimieatmosphérique.Fortementoxydante,elledégradedans
les basses couches de l’atmosphère la matière organique et nuit au bon fonctionnement du vivant.
Absorbeurdurayonnementultravioletdanslahauteatmosphère,elleprotègelesorganismesterrestres
decerayonnementaupouvoirdestructeur.Cetteambivalenceenfaitunemoléculefascinante.
Dès sa découverte, l’ozone a fasciné aussi bien les chercheurs que les industriels.Cette molécule occupe la
deuxièmeplacedanslaclassificationdesmoléculesoxydantes,justederrièreledangereuxfluorgazeux.
Sasimplicitédefabrication,sespropriétésbactéricidesetl’absencedesousproduitsdedégradationontfaittout
desuiteunemoléculeattrayantepourdesapplicationsindustriellesavantqu’ellenesoitdétrônéeparlechlore.
LefrançaisMariusPaulOtto,premièrepersonneàavoirindustrialisélaproductiond'ozoneavecsasociété
'CompagniedesEauxetdel’Ozone'pourladésinfectiondel'eau.
L’ozone est présente dans l’atmosphère terrestre à relativement haute concentration pour un oxydant
(0.000004%toutdemêmeauniveaudelasurface).Ellesymboliseàelleseulelepouvoiroxydantde
notreatmosphère. Car si l’atmosphère terrestre contient plus de 20% d’oxygène moléculaire, c’est avant tout
l’ozone et ses sous produits radicalaires qui la rendent réactive. Appréciant particulièrement la matière organique
qu’elle dégrade rapidement, elle constitue un poison pour les organismes à forte concentration.Placée dans la
hauteatmosphère,ellefiltrelerayonnementultravioletetprotègel’ADNdesespècesvivantsurlaterre
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fermed’unedestructioncertaine.Cetteambiguïtéestparfoissourcedeconfusionpournosconcitoyens.
Aucoursdecedossier,àtraversunparcourshistorique,nousaborderonslespropriétésfascinantesde
cette molécule, l'ozone stratosphérique, l'ozone troposphérique... et tenterons de clarifier cette
ambivalence.
Page2/8-Découverte,structure,propriétéetusage
L’ozone(O3)estunallotropedel’oxygènetoutcommelediamantetlegraphitesontdesallotropesdu
carbone. Elle est formée par l’association de trois atomes d’oxygène et se présente sous la forme d’un triangle
isocèled’angleausommetde116°45’etdedeux liaisons interatomiques de 1,27810-10 m. Sa structure chimique
peut être représentée par un hydride de résonance de deux états métastables (en faite 4 par effet de symétrie)
où chaque liaison chimique est une alternance entre une simple et double liaison covalente, justifiée par une
distanceinteratomiquescompriseentrecesdeuxextrêmes.Cettestructureconfèreàcettemoléculeuncaractère
métastabledans les conditions ambiantes. L’ozone a une tendance naturelle à se décomposer en dioxygène (O 2)
et oxygène atomique (O) ou à réagir avec d’autres composés. Cette capacité à céder facilement un atome
d’oxygèneluiconfèreuntrèsfortpouvoiroxydant,justeaprèslefluor(F 2).Atempératureambiante,c’estungaz
quiprendunecolorationbleuepâleàforteconcentration.Ilseliquéfieenunliquidebleufoncéà-111,9°Cetse
solidifieà-192,5°C.
Figure1:Structuremoléculairedel’ozonemontrantlesdeuxformesrésonantes
Les premières découvertes de l’ozone se sont produites au moyen des plus simples méthodes
d’observation:lessensationsdirectes. Une forte odeur caractéristique a été associée rapidement, dès 1775,
au fonctionnement des machines électriques sans l’associer à la présence d’une substance chimique.Il faut
attendre 1839 et les expériences de Christian Schönbein sur l’électrolyse de l’eau pour que celui-ci,
remarquantuneodeursimilaireproposel’existenced’ungazqu’ilnommeraozoneduGrecqueozien«qui
sent».Aprèscettedécouvertel’intérêtpourl’ozonegranditrapidement.
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Figure2:LechimisteAllemandChristianSchönbein,découvreurdel’ozoneen1839.
On découvre rapidement ses propriétés oxydantes et de décoloration de la matière organique, d’élimination des
odeurs nauséabondes, de dégradation du caoutchouc. Les effets sur la santé humaine sont aussi très vite
répertoriés ; l’ozone causant des chocs respiratoires, l’inflammation des muqueuses et dans le cas
d’expérimentations animales à forte concentration, la mort. Des méthodes par réaction chimique spécifique sont
développéespourledétecterdansl’air.
Figure3:Formationd’ozonepardéchargeélectriqueetcondensationdugazsousformed’unliquidebleupar
refroidissementàl’azoteliquide©J.Savarino
Durantledemi-sièclesuivant,l’ozoneestétudiéesoustoutessescoutures. On cherche à comprendre sa
composition chimique, déterminée comme l’association de trois atomes d’oxygène dès 1865, ses relations
potentiellesavecdesmaladiescommelecholéraoulagrippe,sesapplicationspossiblescommedésinfectantetsa
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présence dans l’atmosphère. La découverte de ses propriétés bactéricides propulse la production d’ozone à
l’échelleindustrielle.
L’ozone est massivement produite non plus par électrolyse, trop peu efficace mais par décharge électrique
d’oxygène moléculaire. Les premières usines d’ozonation de l’eau apparaissent.On compta jusqu’à 49
installationsdetraitementdel’eauparl’ozonedont26enFranceausoirdelapremièreguerremondiale
! Les travaux sur les gaz toxiques et notamment sur le chlore freineront leur développement. Bien que possédant
un pouvoir désinfectant et oxydant plus faible (ce qui explique pourquoi le chlore est oxydé par l’ozone et non le
contraire,voirl’ozonestratosphérique),lastabilitéetlesbascoûtsdeproductionduchloreenontfaitjusqu’ànos
joursleproduitdésinfectantleplusutilisé.
Notons tout de même un retour en force de l’ozone sur le marché de la désinfection de l’eau (plus de 2000
installations vers la fin des années 80), principalement parce qu’il ne laisse aucune trace dans l’environnement et
ne produit pas de sous-produits toxiques contrairement à la désinfection par le chlore.L’utilisation de l’ozone
estpousséejusqu’àêtreintroduitdanscertainssystèmesd’airconditionnépourletraitementdesodeurs
etladésinfectiondesconduitsd'aération. Dans l’industrie pétrochimique, très tôt les propriétés de craquage
delamatièreorganiqueparrupturedesdoublesliaisonsC=Cparozonolyseontétémisesàcontribution.Audébut
duvingtièmesiècle,lesgénérateursd’ozoneetl’ozonolysesontcourammentutilisésdansleslaboratoiresdechimie
organique, permettant aux chimistes de casser les grandes molécules organiques et d’en comprendre leur
structure. La similitude entre le craquage du caoutchouc induite par l’ozone et l’ozonolyse des molécules
organiques, sera un élément déterminant dans la reconnaissance et l’identification de l’ozone comme polluant
atmosphérique.L’ozone est aussi utilisé pour le blanchiment du linge ou de la pâte à papier, pour
l’éliminationdestracesdematièreorganiquedanslamicroélectroniqueoulelavagedesalimentsàl’eau
ozoniséedansl’industriealimentaire.
Schönbein fut le premier à proposer une méthode quantitative de mesure de la concentration d’ozone basée sur
desbandelttesdeKIexposéesàuneatmosphèreozonisée.Dèssadécouvertedansl'atmosphère,cestechniques
chimiques pour mesurer l’ozone se développent et s'affinent. Autour des années 1850, on estime qu’elle est
mesurée dans l’atmosphère de plus de 300 villes, totalisant plus d’un million de mesures individuelles qui
malheureusement seront pour la plus part inexploitables par absence de calibration, de présence d’interférences
chimiquesoudebiaismétéorologiques.
Figure4:Générateurd’ozonedeSiemens-1858
Toutefois, le travail remarquable et méticuleux d’Albert Lévy au parc Montsouris de 1876 à 1910 permettra aux
chimistes de l’atmosphère de disposer du plus ancien enregistrement d’ozone atmosphérique à une époque où
l’industrialisationetlaconsommationd’énergiefossilen’étaientqu’àsesbalbutiements,permettantainsidefixerle
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niveau de bruit de fond urbain. Au début du vingtième siècle, l’intérêt de la mesure de l’ozone atmosphérique se
perdrapidement,résultantprobablementdel’échecàétablirunequelconquerelationentrel’ozoneetlesmaladies.
Il faudra la persévérance d’un petit groupe de scientifique plus intéressé par la météorologie et la
structuredel’atmosphèrequeleseffetssurlasantépourrévélerl’importancedel’ozonepour l’équilibre
physico-chimique de l’atmosphère et son influence sur le développement de la vie à la surface de la
Terre.
Page3/8-L'atmosphère:unréacteurphotochimique
ContrairementauxatmosphèresinternesdesplanètesgéantesgazeusescommeJupiter,l’atmosphère
de la Terre n’est pas en équilibre thermodynamique. L’essentiel de l’énergie de la Terre provenant du
rayonnement solaire, celui-ci est à l’origine d’un déséquilibre que les forces de la Nature tentent de corriger en
permanence, soit en stockant cette énergie comme par exemple la photosynthèse et le stockage du carbone
(l’ensembledel’énergiestockéesurTerreparlesénergiesfossilesnereprésenteque~25joursd’ensoleillement!),
soit en l’évacuant par rayonnement infrarouge après l’avoir redistribuée par les phénomènes météorologiques
(courant marins, vents, pluies, neige, etc) et la circulation océanique.C’estcetéquilibreentreénergiereçue,
redistribuéeetévacuéequimaintientlasurfacedelaTerreàunetempératuremoyennede15°Cmais
quigénèreaussiunétatchimiquedel’atmosphèrefortementdynamique.
D’un point de vue chimique, l’atmosphère peut être considérée comme un réacteur chimique oxydant. Bien sûr la
présence de 21 % en volume d’oxygène moléculaire n’y est pas pour rien mais O2 est loin de constituer l’espèce
chimiquelaplusoxydantedel’atmosphère.Sitelétaitlecas,notreatmosphèrenecontiendraitcertainementpas
autant d’oxygène moléculaire. En effet, réactivité et concentration dans l’atmosphère sont généralement
étroitement liées, ce qui se comprend facilement : plus une molécule est stable, plus elle a de chance de
s’accumulerdansl’atmosphèreetviceversa.Ledioxygènebienquefacilitantlacombustionn'engendreque
trèsrarementdescombustionsspontanées. C’est à travers la loupe des espèces à très faible concentration
qu’il faut regarder l’atmosphère pour comprendre sa réactivité chimique. La figure 5 schématise grossièrement ce
fonctionnement.Essentiellementauniveaudusolsetrouventdessourcesémettricesdecomposésprimaires.
Figure5:Fonctionnementschématiqueduréacteurchimiqueatmosphérique©J.Savarino
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Elles sont aujourd’hui aussi bien naturelles que d’origine humaine. Leur particularité est d’émettre majoritairement
des composés peu ou faiblement oxydées pour des raisons thermodynamiques (effet de température, milieu
anaérobique, combustion non contrôlée, etc). Ces composés chimiques vont alors subir des attaques oxydantes
carellessontensituationd’instabilitéparrapportaupotentield’oxydationdel’atmosphère,maisnondirectement
par O2 mais par des radicaux libres (OH, HO2, Cl) et des molécules oxydantes comme l’ozone qui se trouvent en
concentration d’ultra trace (de l’ordre d’une espèce oxydante pour un milliard de molécule, voire beaucoup moins
pourlesradicauxlesplusréactifs).
Figure6:Unefinepellicule,quiparaîtbienfragilefaceàl’immensitéduvide,voilààquoiressemble
l’atmosphèreterrestrevuedepuisl’espace©NASA
Cesdernièressontdirectementissuesdelabrisuredemoléculessimplesparlepuissantrayonnement
solaire.Parsuited’unesuccessionderéactionenchaîneimpliquantlesoxydesd’azote,lesperoxydesetd’autres
intermédiaires, l’atmosphère se trouve chargée d’espèces au fort pouvoir oxydant dont l’ozone est le plus
abondant. Sa propre destruction par le rayonnement ultra violet (UV) du soleil conduit à la formation du «
détergent » de l’atmosphère, le radical libre OH. Ce radical extrêmement réactif attaque la majorité des espèces
primaires et les oxyde en espèces secondaires, généralement des composés comme les aérosols d’acides
sulfuriques (H2SO4) ou nitriques (HNO3) qui sont rapidement éliminés de l’atmosphère par les pluies ou la
sédimentation. Ils seront par la suite réutilisés par la matière vivante comme source d’énergie, bouclant ainsi le
cycle biogéochimique. Avant d’être transformés ou éliminés, les espèces primaires et secondaires interagissent
avec le bilan énergétique de l’atmosphère en réfléchissant (aérosols) ou emprisonnant (gaz à effet de serre)
l’énergie solaire incidente et ont donc une action importante sur le climat.On voit donc se construire un
système hautement couplé où climat, chimie atmosphérique et cycles biogéochimiques sont en
interactionpermanenteautourd’unéquilibreprécaire,entretenuparlaphotochimie. Dans ce schéma de
fonctionnement, l’ozone occupe une place centrale et privilégiée puisqu’elle joue à la fois le rôle d’un oxydant
puissant,desourcederadicauxlibresOHmaisaussidegazàeffetdeserre.Elleestlaclefdevoûteduréacteur
chimique atmosphérique et conditionne son état.Pasétonnantqu’ellesoitundesobjetslesplusétudiésde
l’atmosphère.
Page4/8-L'ozonestratosphérique:sourcedevie
C’est très tôt après sa découverte vers la fin du dix-neuvième siècle, grâce à l’amélioration des outils
d’observation, qu’on découvre l’aptitude de l’ozone à fortement absorber le rayonnement UV (Hartley,
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1881). Sous l’impulsion de Fabry et Buisson (1913), puis de Dobson (1920), on établit clairement par une
observation minutieuse du rayonnement UV solaire reçu au sol, la présence d’une couche d’ozone dans la
stratosphère(10–50kmd’altitude),variablesuivantlessaisonsetlalatitude.
Figure7:Production,destructionetconcentrationdel’ozoneenfonctiondel’altitudeselonlemodèlede
Chapman(©J.Savarino)
Ilfautpourtantattendre1934etlesmesuresdeGötzeffectuantdesmesuresdesUVlorsducoucheret
duleverdusoleilpourdécouvrirquelepicd’ozonesesituevers25kmd’altitude.Cetteobservationviendra
confirmer expérimentalement les travaux de Chapman (1930) prédisant ce pic sur la seule base de calculs
théoriques. Le modèle de Chapman, premier modèle de distribution de l’ozone en fonction de l’altitude, repose sur
l’idée centrale que l’ozone est formée par l’association d’une molécule de O2 et d’un atome O, O2 + O = O3 et
détruitparlaréactionO+O3=2O2.Orsilaconcentrationd’O2décroîtavecl’altitude,toutcommelapression,la
concentrationdeO,quantàelle,aucontrairecroîtaveccettemêmealtitude,Oétantunproduitdephotolysepar
le rayonnement UV dont l’intensité croît avec l’altitude. Le maximum d’ozone est donc atteint lorsque le taux de
production d’O3 égale son taux de destruction, ce qui place le maximum d’ozone autour de 30 km dans la théorie
deChapman(Figure7).Ilfaudraattendre1970etlestravauxduPrixNobeldechimiePaulCrutzenpourarriverà
un accord quantitatif entre le modèle de Chapman et les observations.Crutzenseralepremieràreconnaître
l’importance de la chimie des oxydes d’azote dans la destruction catalytique de l’ozone, avec pour
conséquence une diminution de moitié du pic de concentration et un repositionnement de ce maximum autour de
22kmetnon30kmcommepréditparlemodèledeChapman.
Par la suite l’effet des composés chlorés, les fameux CFC et leur compagnon d’infortune le chlore atomique (c’est
cechlorequidétruitl’ozoneparlaréactionCl+O3->ClO+O2,etcommeonlevoitcechloreatomiqueestoxydé
par la molécule ozone !) et la découverte du « trou d’ozone » complèteront notre compréhension du
fonctionnementdelachimiestratosphérique(Aliresurnotresite:"Leclimatetlacouched'ozone"undossierde
Marie-LiseChanin)
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Figure8:Spectresolaireincidentetabsorptiondecelui-cienfonctiondel’altitude.Auniveaudusol,le
rayonnementultravioletaquasimentdisparu.SeulsrestentlesUVaetunpeud’UVbpourlebronzage(©J.
Savarino).
Ainsi formée, la couche d’ozone filtre le rayonnement UV dans la gamme 200-310 nm tandis que l’oxygène
moléculairesecharged’éliminerdanslahauteatmosphèreleresteduspectreUV(Figure8).Defait,laprésence
d’O2 et d’O3 dans la haute atmosphère protège le sol du rayonnement destructeur des UV. Ici,l’ozonejouele
rôledebouclier.Sonexistenceconditionneledéveloppementdelaviesurlescontinents,c’estl’ozonesourcede
vie.
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L’ozone troposphérique (couche de l'atmosphère entre la surface et une dizaine de km d'altitude)
représente tout au plus 10 % du bilan total atmosphérique, les 90 % restant se trouvant dans la
stratosphère(située juste au dessus de la troposphère).Il n’est donc pas étonnant que l’ozone
troposphérique, hormis la frénésie de mesures durant l’âge d’or de sa découverte, n’ait que peu attiré l’attention
des scientifiques. Il faut attendre le début des années cinquante pour voir émerger l’étude systématique de sa
concentration troposphérique dans un contexte bien particulier. C’est avec l’explosion de l’utilisation de la
voiture à Los Angeles que l’on va découvrir les effets néfastes de cet ozone là. Et ce ne sont pas les
chimistes de l’atmosphère qui vont être à l’œuvre mais des spécialistes des pathologies des plantes, des
industriels,despurschimistes!
Acetteépoquelapollutiondel’airdanslebassindeLosAngelescommenceàprovoquerdesdommages
visibles sur les cultures, les récoltes mais aussi sur les matières caoutchoutés. Ces dégâts d’une nature
nouvelle attirent l’intérêt des biologistes et chimistes. Ils cherchent à comprendre les causes et les raisons de ce
phénomène.Auneépoqueoùlamajeurepartiedespollutionsurbainesétaittoujourslesfuméesdecombustiondu
charbon et des usines comme dans le cas du smog londonien du dix neuvième siècle (smog : contraction des
termesanglaissmokeetfogquel’onpourraittraduireenfrançaisparbrouméepourbrouillardetfumée),pratique
peu courante en Californie, la pollution de Los Angeles paraissait bien mystérieuse. Les premières tentatives
d’explicationfurentinfructueusesmaisdonnèrentlespremièrespistes,notammentsurlapossibilitéquefinalement
les espèces chimiques présentes dans l’atmosphère fussent probablement différentes de celles émises par les
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sources.Comprendrel’origineetlemécanismedeformationdusmogdeLosAngeles,decebrouillardqui
irritait fortement les muqueuses, était bien plus qu’une simple curiosité scientifique comme l’ozone
stratosphérique le fût à l'origine ; c’était un problème de santé publique et la pression citoyenne était
fortepourtrouverdessolutions.
Figure8:Chambrederéactionnelleatmosphériqueoùsontsimuléeslesréactionschimiquesatmosphériques
©J.Savarino
En1952,Häagen-Smithetsescollèguesallaientfaireuneexpériencecruciale.Enmélangeantdesgazorganiques,
des oxydes d’azote en les exposant à la lumière, ils recréent le smog en laboratoire dans des chambres de
simulation atmosphérique(Figure 8). Dans ces conditions, la production d’ozone décuplait et l’atmosphère
devenait fortement oxydante et agressive pour les organismes vivants. On venait de redécouvrir l’agressivité de
l’ozonevis-à-visdeschaînescarbonées,maiscettefoisl'hommeétaitàl’intérieurdutubeàessai.Ilfaudraencore
attendre la fin des années soixante-dix et la découverte du rôle des radicaux OH, produit par la photolyse de
l’ozoneetdescomposésorganiquesvolatiles,pourquenousayonsuneimagecomplètedel’ozonetroposphérique.
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Figure9:Pollutionausmogaunorddel’Inde.L’absencederégulationetunecirculationautomobile
frénétiquesontàl’originedecettepollutionàgrandeéchelle©NASA
Le processus peut se décrire de la façon suivante : La combustion et les rejets des gaz d’échappement
émettentàlafoisdesoxydesd’azoteetdesgazorganiques.Sousl’effetdusoleil,cesdeuxfamillesdecomposés
interagissentetformentduNO2,lequelestrapidementphotolysé,produisantdesatomesd’oxygènequiconduisent
inexorablement à la formation d’ozone. L’ozone, à son tour, produit des radicaux OH, lesquels acidifient
l’atmosphère en formant des acides sulfurique, nitrique et organique. Par temps clair, calme et ensoleillé, ce
mélangeconduitàlaformationd’uneatmosphèrehautementagressiveetcorrosive,c'estl'ozonedestructeur.
Page6/8-Lesévénements"zéroozone"
L’observation de l’atmosphère nous le rappelle constamment : notre connaissance du fonctionnement du
milieu naturel est loin d’être parfaite. Alors qu’une partie des chimistes de l’atmosphère s’attelaient à la
compréhension de l’ozone stratosphérique ou du smog photochimique, d’autres se penchaient sur un phénomène
nouveau:l’Arctichaze(brumeArctique).
Ce phénomène de pollution se caractérise par l’apparition dans le bassin Arctique d’une atmosphère fortement
chargéeenaérosolsacidesetautrespolluantsincluantsdesmétauxlourds,dansunerégiondumondedépourvue
de sources de pollution et très faiblement habitée.De plus, contrairement au smog photochimique des
grandes agglomérations qui se développe en été sous un puissant rayonnement, la pollution ici se
produitenhiver,sousfaibleensoleillement.
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Figure10:DépigmentationdelavégétationArctiquecauséeparl’agressiond’uneatmosphèrefortement
chargéeencomposésacides©:DanAamlid
Une fois encore, c’est d’abord l’observation des dégâts infligés aux écosystèmes qui a attiré l’attention des
scientifiquesetdesdécideurs(Figure10).L’attaqueincessantedesforêtsboréalesetdesécosystèmesArctique
pardespluiesacidesconduisaitàdesdépérissementsàgrandeéchelle(Figure11).
Figure11:Forêtboréaleendommagéeparlespluiesacides©:USForestService
Pour comprendre ce phénomène, des stations d’observation de l’atmosphère furent installées sur le
pourtourArctiquedurantlesannées70et80.Danslesannéesquisuivirent,lesprocessusàl’originedel’Arctic
haze furent identifiés. Les polluants émis par les régions industrialisées de l’hémisphère Nord (Europe, Russie,
Etats-Unis et aujourd’hui Asie), plus importants en hiver (industrie métallurgique, chauffage domestique,
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transport), sont transportés sur de grandes distances par la circulation atmosphérique et injectés dans
l’atmosphèreArctique.Encheminilssontconvertisenacidesulfurique,nitriqueetautresproduitscorrosifs.
Figure12:Evénementsdedestructiontotaldel’ozoneauniveaudelameràlastationcanadienned’Alert
(Arctiquecanadien)©J.Bottenheim
Maisaudétourdecesétudes,uneobservationattiraplusparticulièrementlesscientifiquescanadiens.
Au levé du soleil Arctique, vers Mars – Avril, subitement les concentrations d’ozone atteignaient des valeurs
plancher, plus basse que la limite de détection des instruments, et ce pour une durée pouvant aller de quelques
heures à une semaine(Figure 12). Cette observation fût étonnante car on pensait que l’atmosphère, même
naturelle, contenait en permanence les éléments nécessaires au maintien d’une concentration d’ozone mesurable
(mélange d’oxydes d’azote et de composés organique volatils).Une avancée majeure se produisit lorsque que l’on
observa une corrélation entre les chutes de concentration d’O3 et la teneur élevée en brome (Br) dans
l’atmosphère.Or les études sur la destruction de l’ozone stratosphérique, le fameux « trou » d’ozone,
montraient le rôle prépondérant joué par l’activation du chlore (Cl) dans la destruction catalytique de
l’ozone.
Le chlore et le brome appartiennent à la même famille d’élément, appelée les halogènes, et partagent de fait des
propriétés similaires. Sous forme atomique, les deux éléments se révèlent être de puissants destructeurs d’ozone
maispasdanslesmêmescompartimentsdel’atmosphère.Alorsquelechloreesttrèsactifdansladestructionde
l’ozonestratosphérique,ill’estbeaucoupmoinsdanslatroposphèrecarilréagitplusrapidementaveclesespèces
organiques,trèsprésentesdanslesbassescouchesdel’atmosphère,qu’avecl’ozone.Enrevanchelebromeest
moins réactif avec les organiques et son potentiel de destruction de l’ozone troposphérique est de fait
décuplé,environ40foissupérieuràceluiduchlore.
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Figure13:Photosatellitemontrantl’explosiondesoxydesdebromeresponsabledeladestructiondel’ozone
auniveaudusoldansl’arctique:l’explosiondebrome©A.Richter
Ilestapparudèslorsévidentquelesévènementsdedestructiond’ozoneauniveaudusoldansl’Arctiqueavaient
pour origine l’activation de quantités importantes de brome au printemps, aujourd’hui connue sous le terme
d’explosion de brome(Figure13) et que ce brome ne pouvait venir que de l’eau de mer, seul réservoir important
decetélémentsetrouvantàproximité.Resteàexpliquercommentlebromuredel’eaudemerquiestunselinactif
vis-à-vis de l’ozone s’active en brome gazeux.Or, force est de constater qu’aujourd’hui encore cette
question est débattue dans la communauté et qu’aucune réponse satisfaisante, respectant toutes les
contraintesobservationnellesn’aétéapportée.
Figure14:GlacedemerenformationsurlesrivagesduSpitzberg(78°N).Ceprocessusestprobablementà
l’origined’émissionsimportantesdebrome,lequeldétruitentièrementl’ozonedesbassescouchede
l’atmosphèreArctique)©:J.Savarino
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Néanmoins,unfaisceaud’indicepointeendirectiondelaglacedemer(Figure14)qui,lorsqu’elleseformerejette
les impuretés vers les poches de liquides restantes produisant une augmentation très importante de la teneur en
sel de mer. Ce phénomène de concentration associé à d’autres processus serait à l’origine d’une réaction
catalytiquedelibérationdebromegazeux.
Page7/8-Uneexceptionisotopique
Commenousl’avonsvuendébutdedossier,l’ozoneestconstituéde3atomesd’oxygène. Or, l’oxygène
possèdetroisisotopesstables,leplusabondantétantl’isotope16,noté 16O(99.8%),composéde8protonset8
neutrons, puis l’isotope 18O (0.2 %), 8 protons et 10 neutrons et enfin l’isotope 17O (0.03 %), 8 protons et 9
neutrons.L’ajoutdeneutronnemodifiepaslanaturedel’élémentcarilinfluencetrèspeulespropriétés
intrinsèquesdel’atome.Touslesisotopesstablesdel’oxygènesecomportentdoncdelamêmefaçon.Compte
tenu des abondances naturelles des isotopes de l’oxygène, dans la nature seules trois formes d’ozone dominent :
16O16O16O, 16O16O17O, 16O16O18O.
Depuislamiseenplacedesloisfondamentalesquigouvernentlarépartitiondesisotopesdanslamatièredansles
années cinquante, nous savions que les proportions relatives des 3 isotopes stables de l’oxygène se devaient de
suivre des lois dépendant de la masse. C’est ainsi que toute variation du rapport 18O/16O dans un matériau
entraînait une variation de moitié du rapport 17O/16O. Ce facteur ½ s’explique assez facilement. Puisque que la
grande majorité des processus physiques, chimiques et biologiques dépend de la masse (vitesse de réaction,
transport, assimilation biologique, diffusion, etc) et que les différences de masse entre les rapports isotopiques
sont de 18O - 16O=2unitésdemasseatomiqueet 17O - 16O = 1 unité de masse atomique, leur rapport conduit
naturellement au facteur ½.End’autrestermes, si la composition isotopique d’un matériau oxygéné varie de x
pour le rapport 18O/16O alors il variera de x/2 pour 17O/16O. Cette loi est vérifiée pour tous les réservoirs
d’oxygènedelaTerrequesontl’oxygènedel’airO 2,lessilicatesetautresminéraux,leCO2etc.Maisunefoisde
plus,l’ozonejouelestroublesfêtes.
Figure15:L’ozonepossèdeunecompositionisotopiqueuniqueetbiendifférentedurestedesmatériaux
terrestres.
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Pour des raisons encore mystérieuses, alors que ce rapport vaut ½ pour tous les matériaux terrestres à
quelques exceptions près, il vaut 1 pour l’ozone(Figure 15). Les exceptions sont des espèces atmosphériques
produites par attaque oxydante de l’ozone qui leur transfère son anomalie isotopique. Ils héritent donc de cette
spécificitévial’ozone.Cetteparticularitédel’ozoneestaujourd’huimiseàprofitpoursonderl’activitéoxydantede
l’ozone atmosphérique.Lacompositionisotopiquedel’oxygènesurdesespècesatmosphériquesporteles
cicatricesdesagressionsoxydantesdel’ozone.
Page8/8-Conclusion
Pourlechimistedel’atmosphère,l’ozoneestunemoléculefascinante.Sourcedevieterrestrequandellese
trouve dans la haute atmosphère, elle devient néfaste pour les organismes vivants dans les basses couches de
l’atmosphère et son accroissement contribue à l'augmentation de l'effet de serre.Et pourtant … Sans ozone,
notreatmosphèreneseraitpasnettoyéeaussiefficacementqu’ellenel'estparleradicalOH.
C’est cette ambivalence qui donne à cette molécule tout son attrait. Comprendre sa composition isotopique, sa
formation, sa destruction, c’est comprendre le fonctionnement du réacteur chimique atmosphérique. Elle est le
cœurdecesystèmeetaucœurdespréoccupationsdeschimistesdel’atmosphère.
Ellerésumeàelleseulel'originalitédel’atmosphèreterrestreetsamiseenévidencedansl'atmosphère
d'uneautreplanètepourraitbienconstituerunepreuvedel’existencedevieextraterrestre,outoutdu
moinsunenvironnementpropiceàsonéclosion.
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