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Gmira S. et al.
et des faciès d’altération (karsts, paléosols) et de
remaniement. Pour les cordons les plus anciens,
les carrières et les affleurements sont éloignés
les uns des autres et bien souvent il n’y a qu’un
lieu d’observation par cordon ce qui rend les
corrélations stratigraphiques difficiles à établir.
Cependant, la cartographie du contact calca-
rénites/substrat a permis de mettre en évidence
plusieurs unités morpho-sédimentaires (UMS),
souvent complexes, formées de un ou plusieurs
cordons coalescents et associées à de grandes
plateformes étagées développées aux dépens du
substrat quartzitique (Lefèvre 2000 ; Lefèvre &
Raynal 2002).
Dans la partie la plus ancienne de ce système,
dans l’état actuel des données, on distingue quatre
unités morpho-sédimentaires :
– l’UMS de Médiouna/Bouskoura, la plus an-
cienne. Elle correspond au grand cordon de Mar-
chich qui culmine à 244 m et domine la plaine
de Médiouna. Il s’agit d’une unité complexe qui
regroupe plusieurs cordons vraisemblablement
associés à plusieurs plateformes étagées entre
190 m et 150 m d’altitude. Dans le remplissage
d’une poche karstique développée au sommet
d’une des formations les plus récentes de l’UMS
de Médiouna/Bouskoura, a été découvert en 1995
le gisement paléontologique de Lissasfa (Raynal
et al. 1999), dont les éléments fauniques com-
portent quelques restes de grands mammifères
avec une riche microfaune (Geraads 1998), et
un reste de tortue décrit ici. Les caractères de
l’association de micromammifères la situent vers
la limite Mio-Pliocène, aux environs de 5,5 Ma,
et fixent donc un âge minimum Miocène final
pour la formation de Médiouna ;
– l’UMS de Dehar Mouak est associée à une
plateforme située entre 130/135 m d’altitude,
emboitée dans l’ensemble précédent. Sa partie
supérieure est formée par une biocalcarénite à litage
planaire fortement incliné (34°N100), altérée en
surface, qui constitue l’essentiel du cordon. C’est
de la partie supérieure altérée de cette éolianite
que provient une carapace de tortue décrite ici ;
– l’UMS d’Oulad Malik est un complexe de cor-
dons associés à une plateforme située à 115/110 m
d’altitude, emboîté dans l’ensemble précédent ;
– l’UMS de Sidi Messaoud est un complexe de
cordons associés à une ou plusieurs plateformes
rencontrées entre 90 et 100 m d’altitude. Appar-
tiennent à ce complexe les formations rencontrées
à Ahl al Oughlam, ainsi que dans la carrière d’Ar
Rehamna, entaillée dans le cordon d’Al Hrawiyine,
localités qui ont livré des tortues décrites ici. Les
données biostratigraphiques déduites de l’étude
des faunes du gisement d’Ahl al Oughlam, associé
à un paléorivage de cette formation, le situent
autour de 2,5 Ma (Raynal et al. 1990 ; Geraads
2006, 2010a, b), mais le site d’Ar Rehamna, par
sa position dans le dispositif morphologique,
pourrait être un peu plus récent.
Les UMS de Oulad Malik et Dehar Mouak
appartiennent donc au Pliocène, Dehar Mouak
pouvant être du Pliocène inférieur. Les forma-
tions de l’UMS de Sidi Messaoud peuvent être
rattachées au Pliocène supérieur.
Les sites mio-pliocènes des cordons dunaires
Carrière d’Ahl al Oughlam. Situé en bordure
sud-est de la ville de Casablanca (Fig. 1), le site
est daté d’environ 2,5 millions d’années, vers le
sommet du Pliocène. Il est constitué par le rem-
plissage d’un ensemble de fissures de même âge,
d’après l’étude des micromammifères, entre des
blocs d’éolianites (Geraads 1995).
La faune de tortues est presque exclusivement
constituée par les formes terrestres et principale-
ment par une petite espèce de Testudo Linnaeus,
1758, genre bien représenté au Maroc actuelle-
ment. Le premier travail sur les tortues du Maroc
(Gmira 1995) ne comportait pas de description
de matériel de Testudinidae Batsch, 1788 anté
-
rieur au Pléistocène moyen. À Ahl al Oughlam se
trouve une petite espèce de Testudo très proche de
T. kenitrensis Gmira, 1993a, du Pléistocène moyen
de Kenitra (Tableau 1). Elle est bien représen-
tée, par un nombre suffisant de spécimens pour
pouvoir à la fois distinguer les deux espèces entre
elles et par rapport à T. graeca Linnaeus, 1758,
présente actuellement au Maroc, et pour pouvoir
associer ces deux formes fossiles marocaines dans
un groupe kenitrensis où elles constituent un clade
bien différencié dans le genre Testudo. A côté de
la petite Testudo, se trouvent à Ahl al Oughlam