article complet - Caroline Duchaine

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Ulaval - Trois questions à Caroline Duchaine
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Le journal de la communauté universitaire
3 questions à
Volume 48, numéro 1
6 septembre 2012
Trois questions à
Caroline Duchaine
Sur le modus operandi de la bactérie causant la
légionellose
Par Pascale Guéricolas
L’éclosion de légionelle survenue à Québec cet été fera l’objet d’une enquête
publique qui permettra peut-être de faire la lumière sur ses causes. Début
septembre, elle avait déjà coûté la vie à une dizaine de personnes. Les cas se sont
multipliés dans la capitale, apparemment liés aux tours de refroidissement des
systèmes de climatisation de grands immeubles. Caroline Duchaine, professeure
au Département de biochimie, de microbiologie et de bio-informatique, connaît
bien cette bactérie capable de provoquer une pneumonie. Elle l’a déjà traquée,
notamment dans les unités de soins dentaires. Voici ses explications.
COMMENT EXPLIQUER QUE L’ÉCLOSION DE LA BACTÉRIE TOUCHE
UNIQUEMENT QUÉBEC ALORS QUE BIEN DES VILLES POSSÈDENT
DES TOURS DOTÉES D’UNE CUVE DE REFROIDISSEMENT?
Des épidémies de légionellose ont aussi eu lieu dans d’autres grandes villes. L’une
des dernières fois où cette maladie a fait parler d’elle, c’était en France. La prise
d’air pour la ventilation d’une résidence de personnes âgées avait été contaminée
par les émissions d’une usine à proximité. Près d’Oslo, en Norvège, il y a aussi eu
des cas récemment. Plus il y a de tours, plus il y a de risques de se trouver
confronté à ce genre de problèmes, même si la bactérie est aussi présente dans les
maisons, par exemple dans les chauffe-eaux. Les cuves sur les toits sont des
milieux propices à la propagation de la maladie, car l’eau y est stagnante, la
température élevée, et il se forme des biofilms, des couches de micro-organismes
protégés par un mucus qui les entourent. Cela peut arriver à peu près n’importe
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où, d’autant qu’il existe un grand nombre d’espèces de légionelles dans
l’environnement. Certaines sont très peu dangereuses par rapport à l’espèce
pneumophila qui nous intéresse. Plusieurs facteurs pourraient expliquer
l’épidémie survenue à Québec. Les températures élevées durant l’été, la direction
des vents, la présence ponctuelle d’une plus grande quantité de bactéries dans le
système de distribution d’eau, un mauvais entretien des tours, la présence de
concentrations élevées de fer, de zinc ou d’aluminium dans l’eau sont autant de
facteurs, et pas les seuls, qui peuvent expliquer cette prolifération.
JUSQU’À PRÉSENT, LES PERSONNES ATTEINTES SEMBLENT
TRAVAILLER OU VIVRE DANS UN PÉRIMÈTRE ASSEZ RESTREINT
AU CENTRE-VILLE. POURQUOI?
Cette bactérie peut voyager loin par le vent. Cependant, plus elle se déplace, plus
elle se dilue dans l’air, ce qui réduit le risque que les passants soient exposés à
une concentration importante. En effet, la seule façon de contracter la
légionellose est de respirer la bactérie présente sur de microscopiques
gouttelettes d’eau. Les données météo livrent des indices sur la source possible de
contamination, qui pourrait être éloignée du centre-ville. Chose sûre, la
concentration d’immeubles et la chaleur favorisent la présence des légionelles
plus longtemps dans l’air. Ces bactéries sont moins affectées que d’autres par les
rayons ultra-violets présents dans la lumière solaire et résistent mieux au
dessèchement. Elles sont aussi capables de parasiter les amibes, des protozoaires
que l’on trouve fréquemment dans l’eau, ce qui les protège. En respirant une
amibe, on peut se retrouver avec plein de légionelles dans les cellules de défense
du poumon.
COMMENT SE PROTÉGER DE CETTE BACTÉRIE SI COMMUNE DANS
L’ENVIRONNEMENT?
Cela passe surtout par l’entretien des systèmes de chauffe-eau et de climatisation.
Il faut les entretenir rigoureusement, comme on le fait avec les humidificateurs à
la maison pour éviter les champignons et les maladies. On recommande donc de
tenir l’eau du chauffe-eau à plus de 60 degrés pour empêcher la bactérie de
proliférer. Dans le cas des tours de refroidissement des systèmes de climatisation,
où l’eau stagne, on doit non seulement les nettoyer avec des biocides, mais aussi
les brosser et les laver au jet d’eau pour s’assurer qu’elles ne cachent plus de
sources massives de bactéries. Il faut effectuer un suivi serré de ces systèmes. Il
existe aussi des normes quant à la quantité de légionelles qu’on peut tolérer dans
l’eau. Je ne sais pas si c’est vérifié. Ce genre de bactéries prolifère assez lentement
pour qu’un suivi régulier puisse le détecter. Il est donc très important de s’assurer
que l’eau reste saine. Les propriétaires des immeubles ont-ils effectué
régulièrement l’entretien de leurs tours de refroidissement? Je ne sais pas. Cette
affaire démontre qu’il est difficile d’avoir une emprise sur les maladies
transmissibles par l’air. Il faut vraiment travailler à la source pour éviter la
contamination et éliminer les conditions favorisant la prolifération de ces
bactéries.
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