au Canada en 1902 (5). La démonstration de la
nature infectieuse de la maladie est apportée par
Vallée et Carré en 1904 (1, 19). La maladie est
ensuite couramment reconnue dans tous les pays
d’Europe, sur le continent africain, sur le continent
américain et en Asie. De nombreuses observations
cliniques relevées en pratique sur le terrain sont
consignées par Vallée (20) puis dans des travaux
de thèse d’exercice pendant la première partie du
siècle dernier (4, 6, 7, 13, 14, 15, 16). Leur analyse
est intéressante pour prendre conscience de la
diversité symptomatique, de l’importance de la
prévalence (à cette époque, près de 25 % des
chevaux militaires pouvaient être infectés),
l’importance de la mortalité et surtout la possibilité
de développer une forme totalement asymptoma-
tique après des épisodes aigus. Plus encore, sont
également décrites des tentatives de vaccination
pour lutter plus efficacement contre cette maladie
(6). Les travaux de Steck sont relatés avec
précision par Ishii en 1963, notamment la descrip-
tion de possibles pétéchies sur la muqueuse
buccale, témoignant de l’importance à accorder à
la thrombopénie au cours des accès cliniques
aigus, ce qui est systématiquement retrouvé au
cours des infections expérimentales.
Malgré le développement majeur au cours de l’ère
pastorienne des techniques diagnostiques en viro-
logie, l’agent responsable de l’anémie infectieuse
s’avère difficile à cultiver. Jusqu’à la mise au point
par Coggins au début des années soixante dix d’un
test d’immunodiffusion en gélose (2), aucun
moyen fiable de dépistage n’est à la disposition du
vétérinaire. Ce test, depuis complété par des tests
ELISA et le recours à des techniques d’immunodé-
tection, demeure aujourd’hui le test officiel retenu
dans la majorité des pays ; sa mise en œuvre
systématisé dans de nombreux pays, en particulier
aux États-Unis, a permis, par l’élimination des
chevaux infectés, symptomatiques ou non, une
diminution considérable, depuis 1970, de la
prévalence et incidence de l’infection sur les
équidés domestiques testés.
2 - Les actualités
Les principales données exposées ont fait le sujet
de revues récentes (9, 10, 18).
a. L’agent pathogène
L’EIAV est un virus à ARN, de la famille des
rétrovirus et du genre lentivirus. Comme tous les
lentivirus, il infecte, in vivo, les phagocytes
mononucléés mais pas les lymphocytes (tableau I).
Un récepteur cellulaire, appartenant à la famille
des protéines récepteur du TNF (Tumor Necrosis
Factor) a été récemment décrit (21). Il infecte les
monocytes sanguins mais ne se répliquent que lors
de leur maturation en macrophages. Il se réplique
dans les macrophages spléniques, hépatiques, pul-
monaires ainsi que dans les nœuds lymphatiques
et la moelle osseuse. Il infecte également les
cellules endothéliales. In vitro, plusieurs types
cellulaires (macrophages dérivés de monocytes,
macrophages tissulaires, cellules endothéliales et
fibroblastes) peuvent propager l’infection selon
une intensité variable en fonction des souches ; les
souches virulentes nécessitent des cultures
primaires de macrophages équins.
Comportant seulement 6 gènes (gag, pol, env, tat,
rev et s2), le génome d’EIAV est le plus petit
(8,2 kb) et le plus simple des lentivirus. Aux gènes
gag, pol et env codant les protéines structurales et
les activités enzymatiques, s’ajoutent 3 petits
cadres de lecture tat, rev et S2, codant des pro-
téines régulatrices (cf. figure 1). L’ADN proviral est
intégré au génome cellulaire, encadré en 5’ et 3’
par les régions LTR (Long Terminal Repeat), sites
spécifiques d’initiation de la transcription com-
prenant les segments U3 (région unique 3’), R
(Repeat) et U5 (région unique 5’).
Le gène env code les glycoprotéines de surface
(gp90) et transmembranaire (gp45) qui sont incor-
porées dans l’enveloppe virale. La gp90 pourrait
interagir avec un récepteur cellulaire d’EIAV. Elle
est fortement glycosylée et comporte 17 sites
potentiels de N-glycosylation. Pendant l’évolution
de la maladie, elle est soumise à une importante et
rapide variation antigénique.
Parmi les petites protéines accessoires, la protéine
Tat (TransActivator of Transcription), codée par la
région intergénique pol et env, est nécessaire pour
la production de protéines précoces.
Le gène S2, spécifique d’EIAV, chevauche la partie
terminale du gène env. La protéine S2, n’ayant pas
d’homologue de séquence ou de fonction chez les
autres lentivirus, est cytoplasmique et pourrait
interagir avec Gag. Elle n’est pas incorporée dans
la particule mais est exprimée pendant l’infection
comme le montre la présence d’anticorps anti-S2
chez les animaux séropositifs pour EIAV. Des
analyses mutationnelles dans le contexte du clone
moléculaire pathogène EIAVUK montrent que S2
n’est pas indispensable pour la réplication
in vitro
d’EIAV dans les fibroblastes ou les macrophages
dérivés de monocytes sanguins mais est un
déterminant essentiel de la réplication in vivo et de
la pathogénicité.
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