Une lecture liée à un parcours personnel
C’est une caractéristique de la lecture du Concile par les catholiques, cinquante ans après: elle est immédiatement reliée
à leur parcours personnel et à leurs engagements.
Thibault, impliqué depuis l’âge de 15 ans dans le service liturgique, témoigne également avoir été impressionné par le
sérieux avec lequel sa paroisse de sensibilité « classique » a cherché collectivement dans les textes conciliaires des
réponses à des questions liturgiques qu’elle se posait, pour conclure que oui,
« le Concile ne fait pas de différence entre
.
hommes et femmes pour le service de l’autel »
La foi d’Agnès, 52 ans, s’est réveillée alors qu’on lui demandait de s’engager en catéchèse dans un établissement privé
catholique à Boulogne-Billancourt. Comme Brigitte, elle se forme et, ayant découvert la déclaration conciliaire
Nostra
sur le dialogue avec les autres religions, elle est à l’aise pour accueillir les élèves de confession juive en formation
aetate
religieuse.
C’est à partir de son activité de blogueur bien connu de la cathosphère depuis dix ans que l’avocat d’affaires Erwan
Le Morhedec , 40 ans, alias Koz, reçoit le Concile. Dans son milieu familial, il a connu
(lire notre rencontre avec lui, p. 6-7)
« une certaine réticence vis-à-vis de Vatican II, liée à des expérimentations hasardeuses faites en son nom, à une époque
.
aujourd’hui révolue »
> Lire : Il y a 50 ans, les catholiques commençaient à célébrer la messe en français
Aujourd’hui, le blogueur engagé retient spontanément de Vatican II l’affirmation de la place des laïcs dans la vie de
l’Église. Et la déclaration selon laquelle
Dignitatis humanae, « la vérité ne s’impose que par la force de la vérité elle-même
plaît à l’avocat, tout comme
qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de puissance » « l’idée de la conscience
( 16), qui fonde le dialogue avec tous et la liberté personnelle.
éclairée » Gaudium et spes,
« Esprit du Concile » et « Concile réel »
Une telle lecture des seize textes produits par les pères conciliaires entre décembre 1963 et décembre 1965, venant du
terrain, n’efface pas pour autant les lectures précédentes, plus théologiques, qui s’opposaient il y a une dizaine d’années
sous le signe de « l’esprit du Concile » ou du « Concile réel ».
Boris, 42 ans, directeur d’une école de formation aux métiers de l’art, a lu les textes lorsqu’il était séminariste et relève
leur fonction critique. Dans les années 2000, il a regretté
« l’attention grandissante portée au rite, à la piété personnelle,
aux “valeurs” plus qu’à la parole du Christ et aux besoins spirituels du peuple. Comme la Bible, le Concile peut être lu
souligne-t-il.
partiellement, en sélectionnant les textes »,
Et de rappeler que Vatican II voit les baptisés formant et non . Pour lui, il faut relire
« le peuple de Dieu » « un troupeau »
,
Gaudium et spes « le texte le plus intéressant pour la vie de tous les jours, spécialement à un moment où un nouveau
tournant semble se dessiner dans la vie de l’Église avec le pape François ».
Comme lui, Jean-François Minonzio, 65 ans, devenu responsable de l’œcuménisme dans le diocèse de Dijon, une fois à
la retraite de la fonction publique, observe que, qu’il a
« malheureusement, une partie de l’Église s’écarte de ces textes »
découverts sur le tard, mais avec enthousiasme.
Entre soi et périphéries
Violaine, 35 ans, médecin à Paris, en couple avec un homme non croyant, est elle aussi sensible à un rapport au monde
pas toujoursà hauteur de Conciledans les cercles catholiques qu’elle a fréquentés. Elle attribue à celui-ci, qu’elle a
découvert lors d’un week-end de formation il y a dix ans, la fin de l’attitude ecclésiale qui
« instruisait le monde d’en haut,
des autres religions, des non-croyants, de la société.
sans réciprocité attendue »