Vœux 2012 MDD L’année qui vient de s’écouler a été jalonnée de faits divers et d’évènements dont certains, plus tragiques que d’autres, ont vivement frappé nos esprits, que nous soyons croyants ou non. Je songe en premier à la tragédie de Fukushima au Japon dont les conséquences écologiques, économiques, humaines sont incalculables. Il faudra certainement plusieurs dizaines d’années pour panser les blessures de ces populations durent frappées par ce drame. Je pense aussi à la famine qui continue de sévir dans la corne de l’Afrique et qui ne peut pas ne pas interpeller nos consciences d’occidentaux massivement habitués au gaspillage et à la surconsommation. Je pense encore aux révolutions sociales qui ont secoué – et qui secouent encore – les pays du Maghreb et du Moyen-Orient et les persécutions dont sont victimes en particulier les communautés chrétiennes, tout spécialement en Égypte et en Irak, mais aussi au Nigeria, tout récemment. L’accueil que nous avons réservé le 18 janvier dernier à Pontmain à des rescapés de l’attentat de la cathédrale syro-catholique de Bagdad nous a rendus plus proches des souffrances que ces hommes et ces femmes enduraient au quotidien. Mes deux incursions consécutives peu après, en terre libanaise d’abord, en Terre Sainte ensuite avec des chrétiens de la Mayenne, ont été l’occasion de manifester de manière effective et affective notre communion avec ces chrétiens d’Orient qui n’ont parfois plus d’autre alternative, dans certains pays en tout cas, que le martyre ou l’exil. Ne les oublions pas dans notre prière. Notre pays verra au printemps prochain la double échéance des élections présidentielle et législatives. Les enjeux de ces deux évènements sont d’autant plus importants qu’ils s’inscrivent dans le contexte d’une crise sociale et économique durable et profonde dont les causes en réalité, nous le percevons bien, sont d’ordre anthropologique et éthique. C’est la raison pour laquelle, tout en se gardant, bien sûr, de donner des consignes de vote, la conférence des Évêques de France a jugé nécessaire de rappeler que le choix de nouveaux parlementaires et d’un futur Président ne pouvait pas se faire sans la prise en compte de critères aussi décisifs que le soutien inconditionnel de la famille, la défense des plus vulnérables, à commencer par l’embryon, une régulation des flux migratoires qui se fasse dans le respect de la dignité de la personne, une application ouverte et apaisée du principe constitutionnel de la laïcité qui, loin de stigmatiser les religions, garantisse le libre exercice de leurs cultes et leur réserve un espace d’expression publique au cœur de nos villes et de nos villages. C’est ce qui fonde l’importance de cet acte citoyen que constituent les élections, un acte auquel aucun catholique digne de ce nom ne saurait se dérober pour quelque raison que ce soit. Comme l’a rappelé le cardinal Vingt-Trois dans un message du Conseil permanent daté du 3 octobre dernier : « Un vote ne peut être simplement dicté par l’habitude, par l’appartenance à une classe sociale ou par la poursuite d’intérêts particuliers. Il doit prendre en compte les défis qui se présentent et viser ce qui pourra rendre notre pays plus agréable à vivre et plus humain pour tous ». On aura avantage à relire sur le site de la Conférence des Évêques de France les 13 éléments de discernement destinés à éclairer la conscience des catholiques sur ce point. En communion avec les Églises du monde entier, notre diocèse s’apprête à célébrer le 50° anniversaire du Concile Vatican II. Pour nous aider à tirer le meilleur parti de cet évènement, un rassemblement national se tiendra à Lourdes les 24 et 25 mars prochain auquel se sont inscrits déjà plusieurs catholiques de la Mayenne. Pourquoi donner une telle importance à cet anniversaire ? Parce que Vatican II est un évènement essentiel de l’histoire de l’Église au XX° siècle. Il a été et reste pour elle un temps d’action de l’Esprit Saint pour la guider, l’orienter, la renouveler, la réformer dans chacune de ses communautés disséminées de par le monde. Or il s’en faut de beaucoup que les catholiques, dans leur grande majorité, se soient donnés les moyens d’en recueillir tous les fruits. Pour le dire autrement, cinquante après, le concile Vatican II est encore à recevoir. Avec le service de la Formation permanente, nous avons donc jugé nécessaire d’accueillir à nouveau frais les grandes intuitions du Concile en prenant le temps d’approfondir ses textes majeurs, les décrets et constitutions sur une durée de trois ans. Des temps forts, des conférences, des groupes de lectures du concile à la maison ou en paroisse viendront ainsi soutenir notre cheminement chrétien tout au long de ces trois étapes successives que seront l’Année de la Foi (2012-2013), l’Année de la Conversion (2013-2014) et l’Année de la Mission (2014-2015). Voilà donc le cap fixé, voilà la feuille de route pour les trois années qui viennent dans notre diocèse. En attendant le 11 octobre, qui marquera le lancement officiel de l’Année de la Foi dans l’Église universelle, nos communautés sont invitées à poursuivre leur exploration priante de la Parole de Dieu (après saint Luc et les Actes, c’est l’évangile de saint Jean qui est cette année médité), tandis que sur le terrain des paroisses s’organise la mise en place d’une diaconie diocésaine lancée le 4 novembre dernier pour une attention renouvelée aux besoins des plus pauvres. Comme je l’ai redit à plusieurs reprises, la crédibilité de notre Église aujourd’hui se joue sur la prise en compte effective de ces deux priorités pastorales que sont le retour aux sources de la révélation, d’une part, et l’ouverture aux nécessités du monde contemporain, d’autre part. Ces deux objectifs doivent être poursuivis l’un et l’autre inséparablement. Notre Église en effet ne peut espérer se revitaliser dans son témoignage que par un souci constant de revenir aux fondamentaux de la foi, cette foi au Dieu Créateur et Sauveur qu’elle désire transmettre aux générations actuelles. Mais elle se doit dans le même temps de répondre prophétiquement aux interrogations des hommes et des femmes d’aujourd’hui tout autant qu’aux situations dramatiques de marginalisation et de pauvreté qui, malheureusement, s’aggravent chaque jour un peu plus dans le contexte de crise mondiale que nous connaissons. Nous n’oublierons pas que 2012 verra aussi le 10° anniversaire du rappel à Dieu de Mgr Louis-Marie BILLÉ qui fut évêque de ce diocèse de Laval de 1984 à 1995 avant de devenir Archevêque d’Aix-en-Provence et Arles de 1995 à 1998, puis Archevêque de Lyon de 1998 à 2002. Sa personnalité tout autant que son intelligence ont durablement marqué l’Église de France dont il fut le chef de file en tant que Cardinal Président de la Conférence épiscopale durant deux mandats consécutifs. Nous lui rendrons hommage les 3 et 4 mars prochain à travers une conférence publique donnée par Mgr Stanislas Lalanne le 3 mars à 15 h au Parc des Loges de Saint Berthevin et d’une messe solennelle que je présiderai moi-même en la cathédrale de Laval de lendemain, dimanche après-midi. A l’heure où j’écrivais ces quelques lignes, l’actualité alimentait le paradoxe en relayant à un jour d’intervalle la mort du tyran nord-coréen Kim Jong-il, l’un des derniers dictateurs du pays le plus fermé au monde, et celle d’un homme de paix, Vaclav Havel, apôtre enthousiaste des droits de l’homme et de la liberté, qui fit sortir en douceur son pays de plus de quarante années de totalitarisme communiste. Par leur contraste saisissant, ces deux visages soulignent l’ambivalence et la fragilité d’un monde qui ne cesse en réalité d’aspirer aux plus grands idéaux de paix, de justice et de vérité, mais qui, dans le même temps, est enclin, presque malgré lui, à retourner à ses vieux démons. Les conflits sanglants, les attentats meurtriers, les atteintes innombrables à la dignité de l’homme en sont aujourd’hui encore la cruelle illustration. Les chrétiens, pas moins que les autres, vivent parfois douloureusement cette antinomie, portés qu’ils sont par les valeurs toujours neuves de l’évangile et l’appel à la sainteté qu’elles sous-tendent, mais entraînés aussi, malgré eux, dans le tourbillon hédoniste et consumériste de nos sociétés européennes. De là ce scepticisme qui semble gagner du terrain au sein même de nos communautés chrétiennes, selon le constat que Benoît XVI faisait récemment devant les membres de la Curie romaine. Il y a comme une « lassitude d’être chrétien perceptible chez nous », disait le Pape, lassitude qui se traduit en particulier par un essoufflement des communautés qui augmentent en âge et diminuent en nombre, par une stagnation aussi des vocations au sacerdoce et à la vie religieuse. « Il y a des discussions sans fin sur ce qu’il faut faire pour inverser la tendance », fait remarquer le Saint-Père. « Et certainement il faut faire beaucoup de choses. Mais uniquement le faire ne résout pas le problème. Le centre de la crise de l’Église en Europe est la crise de la foi ». Et le Pape d’ajouter alors : « Si nous ne trouvons pas une réponse à celle-ci, si la foi ne retrouve pas une nouvelle vitalité, en devenant une conviction profonde et une force réelle grâce à la rencontre avec Jésus-Christ, toutes les autres réformes resteront inefficaces ». Dans cet esprit, je forme le vœu que, tout au long de cette année nouvelle, loin de nous rendre complices de ce désenchantement général et de la morosité ambiante, nous apprenions à regarder le monde avec les yeux de Dieu. Je souhaite que nous retrouvions la joie de croire et l’enthousiasme de communiquer la foi. J’invite tous les catholiques de la Mayenne à reprendre le chemin de la prière et de l’Eucharistie pour que se renouvelle et s’intensifie cette relation vivifiante avec le Christ sans laquelle nous ne pourrons pas être sel et lumière au cœur du monde d’aujourd’hui. Puisse l’Année de la Foi qui débutera bientôt nous aider à redécouvrir avec émerveillement la beauté de la vie baptismale et explorer sans peur les chemins nouveaux qu’elle ouvre sans cesse devant nous. « Quand la prudence est partout, le courage n'est nulle part », disait le Cardinal Mercier. Oui, risquons l’aventure de la foi joyeuse et missionnaire dans la géniale inventivité de l’Esprit qui fait sans cesse toutes choses nouvelles. À vous tous ici présents ce matin et, plus largement, à tous les catholiques de la Mayenne, j’adresse au seuil de cette nouvelle année 2012 mes vœux les plus fervents de paix et de joie.