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FICHE PÉDAGOGIQUE ÉTABLIE DANS LE CADRE DE L’EXPOSITION
« LA NUIT TOMBE SUR L’EUROPE », CANOPÉE DES HALLES, LE 20 AVRIL 2017
En 1517, Sélim Ier, sultan ottoman, s’empare durablement de
la Syrie. Mais l’éloignement de Constantinople exposa la
province, à plusieurs reprises, à des séditions sanglantes,
notamment d’origine druze. Bonaparte en tenta en vain la
conquête et un vice-roi d’Égypte ne l’enleva à la Porte que
durant quelque temps. Au e siècle, les Druzes et les
Maronites, qui sont les descendants de l’ancienne popula-
tion indigène, s’y livrèrent à des hostilités terribles face aux-
quelles le gouvernement turc joua un rôle ambigu. D’autant
que l’antagonisme de la France et de l’Angleterre avait trouvé
dans la région un nouveau territoire pour s’exprimer.
Les intrusions européennes et le mandat français en Syrie
Depuis leur établissement en Inde, les Anglais ont jalousé
l’influence privilégiée de la France en Syrie. Le pays les atti-
rait en raison de sa situation en Méditerranée qui en faisait
l’entrepôt des marchandises du Levant et l’aboutissement
des routes du désert. Bonaparte avait d’ailleurs tenté de le
libérer et en 1832 Louis-Philippe avait soutenu l’Égypte qui
réussit à s’en emparer mais, sous la pression internationale,
le vice-roi d’Égypte dut évacuer le sol syrien.
Les Maronites, catholiques latins, ont toujours aussi reven-
diqué la protection de la France. Et les Druzes, voulant
défendre leur indépendance, sont souvent entrés en rivali-
tés avec eux pour des raisons autant religieuses qu’écono-
miques. Les Druzes massacrèrent ainsi les Maronites en
1843 et surtout en 1860. On dénombra près de 8 000 victimes
à Damas. Ils étaient soutenus par la Turquie et escomp-
taient l’appui de l’Angleterre. L’émir algérien Abd-el-Kader
exilé à Damas intervint lui-même pour mettre fin aux mas-
sacres. La France, selon le mot de Napoléon III, mena une
« opération à but humanitaire » en envoyant un corps expé-
ditionnaire, sous les ordres du général d’Hautpoul. Le sul-
tan fit lui-même punir les coupables mais permit aux
Druzes de se réfugier dans le djebel. Sans avenir dans l’Em-
pire ottoman, nombre de Syriens émigrèrent en masse en
Égypte, en Amérique et en Australie. Plus de 500 000 Syriens
débarquèrent ainsi en Amérique du Sud, surtout au Brésil.
Cependant, l’influence française s’implanta dans le pays
grâce à une multitude de structures religieuses et laïques
éduquant la jeunesse syrienne de toutes confessions. En
1914, on comptait, en Syrie plusieurs dizaines d’établisse-
ments français que fréquentaient 50 000 élèves. L’université
de Beyrouth, créée en 1875 par les Jésuites, comprenait une
faculté de médecine, une école de droit et une école d’ingé-
nieurs rivalisant avec l’université américaine.
Le nationalisme syrien
La révolution turque de 1908, d’abord saluée avec joie en
Syrie parce qu’elle proclamait l’égalité politique des natio-
nalités, tourna vite à la répression. Un congrès arabo-syrien
se tint alors à Paris en 1913 où s’affirma le nationalisme syrien.
Pendant la Première Guerre mondiale, le gouvernement turc
soumit la Syrie à un régime draconien. En plus de la famine,
de nombreux patriotes syriens, suspects de sympathie pour
la France furent massacrés. Après la rupture du front, la
Syrie et le Liban furent occupés par les Britanniques et les
Français. Georges Picot devint haut-commissaire. Le plébis-
cite de 1919, tourna à l’avantage de la France : une majorité
de chrétiens, de juifs et même de musulmans, se prononça
en faveur du mandat français. Mais 180 000 personnes étaient
mortes de faim pendant la guerre et les autorités françaises
se trouvèrent vite aux prises avec une double menace : au
nord, les nationalistes turcs qui harcelaient leurs garnisons ;
à l’est, le chérif Fayçal. Fort du soutien d’un parti extrémiste
arabe, Fayçal, voulait à tout prix chasser les Français. En
mars 1920, un congrès réuni à Damas le proclama roi de
Syrie mais la victoire de Khan-Mayssaloun, remportée par le
général Goybet, mit en déroute l’armée chérifienne, et
Fayçal, déposé, fut recueilli par les Anglais qui lui confièrent
le trône d’Irak. Toutefois, contre le mandat français, propa-
gande et révoltes exacerbées se multiplièrent. La Société des
Nations avait missionné la France pour qu’elle procure à la
Syrie une organisation politique et administrative propre à
préparer son indépendance future. C’était pour la France un
véritable défi car elle fit d’emblée face à une grande instabi-
lité : incursions des bandes venues de Turquie ou de
Transjordanie, insurrections alaouite et druze, opposition
systématique du parti révolutionnaire syrien, manœuvres
du comité syro-palestinien installé au Caire. Cela étant, la
Syrie s’achemina peu à peu vers l’unité malgré les diver-
gences de religion et de clans. Faisant face à toutes ces vel-
léités nationalistes ou tribales les autorités françaises firent
alterner organisation fédérale et centralisme autoritaire. La
justice fut réorganisée par la création de juridictions admi-
nistratives. L’essor économique fut encouragé par le déve-
loppement de la culture du coton, le reboisement, la
sécurisation des routes, l’ouverture des communications
nouvelles avec l’Irak et la Perse, la signature de conventions
de transit et d’accords douaniers avec la Palestine et avec
l’Irak. Durant la Seconde Guerre mondiale, des combats
opposèrent en Syrie les forces de Vichy aux Britanniques et
aux combattants de la France Libre. La proclamation de l’in-
dépendance a lieu en 1941, mais ce n’est finalement qu’en
1946 que cette dernière devint vraiment effective avec le
départ des dernières troupes françaises.
LA SYRIE DEPUIS 1946
Le nouveau pays manque de stabilité politique et connaît
une série de coups d’État militaires au cours de ses pre-
mières décennies. Il entre peu à peu dans l’aire d’influence
de l’Union soviétique car le pouvoir est passé entre les
mains d’un parti socialiste et panarabe, le Baas ou Baath.
Sous sa houlette, la Syrie s’est unie à l’Égypte de Nasser en
1958, pour former la République arabe unie. En 1961, après
un nouveau coup d’État, ces deux entités se sont séparées,
et la République arabe syrienne a été rétablie. Lors de la
guerre israélo-arabe de 1967, la Syrie a perdu le plateau du
Golan au profit d’Israël. En novembre 1970, Hafez el-Assad,
un général membre du parti Baas et issu de la minorité
alaouite, a pris le pouvoir par un coup d’État sans effusion
de sang. Un régime ultra-autoritaire, verrouillé par des
Alaouites, est alors mis en place. Présente au Liban depuis
1976, l’armée syrienne a fortement été impliquée dans la
guerre civile qui s’y est déroulée jusqu’en 1989. De même, la
Syrie continue le combat contre d’Israël, ce qui ne l’em-
pêche pas, au cours des années 1990, d’entamer des
pourparlers de paix ponctuels sur la restitution du Golan.
Après la mort du président Hafez el-Assad, son fils, Bachar
el-Assad, a pris sa succession. Un passage de relais approuvé
pour la forme par un référendum populaire en juillet 2000.
Les troupes syriennes encore stationnées au Liban ont été