dont les valeurs sont démocratiques. Il peut aussi s’agir
de mettre en scène des dilemmes auxquels la cité est
confrontée. Dans l’Antigone de Sophocle, par exemple,
la question est de savoir si la cité a le droit de punir et
de se venger sur un mort, ou si elle doit se borner à châ-
tier les vivants, et laisser les morts aux dieux. Toute tra-
gédie met en scène des problèmes qui se posent à la
collectivité, et ses enjeux sont toujours politiques.
La comédie, elle, est par tradition une satire poli-
tique. On y brocarde les puissants du jour, on critique
leur politique, on utilise absolument toutes les armes:
on raille un trait de caractère, on caricature, on rappelle
telle ou telle anecdote où Untel s’est ridiculisé, ou a
montré son vrai visage. Cléon, le démagogue, chef du
parti populaire et partisan de la guerre, est la cible privi-
légiée du poète, mais d’autres personnalités en vue sont
égratignées par un jeu de mots, une allusion, comme
Hyperbolos*, ou Cléonyme* ou Lamachos dans la
Paix. La comédie ne vise pas seulement les politiques et
les militaires, mais tous les personnages en vue dans la
cité, Euripide, Socrate ou Hiéroclès – Sacripan le devin.
C’est que, profondément, la comédie ancienne est
par nature politique. Les premières pièces
d’Aristophane suivent en général un certain schéma:
face à une cité envahie par les malfaisants, et dont les
institutions ne fonctionnent plus, le héros comique va
fonder une nouvelle cité ou restaurer l’ancienne en uti-
lisant les moyens les plus absurdes. Il combattra ceux
qui refusent d’abandonner leurs prérogatives. C’est
d’ailleurs sur ce schéma que repose la Paix.
Mais la comédie n’est pas comme on a voulu le mon-
trer le représentant d’un certain parti. Elle est conserva-
trice par nature car elle craint la nouveauté et idéalise le
passé où Athènes n’était pas aux mains des hommes
politiques contemporains, toujours pires que ceux du
REPÈRES 9