2. Nous avons aussi à mieux comprendre les musulmans
Nous nous reconnaîtrons peut-être dans cet aveu de Mathieu-Robert Sauvé, après qu'il eut
constaté que son voisin musulman n'allait pas plus souvent à la mosquée que
Lui à l‘église: « Je ne connais pas grand chose de la religion musulmane. Je ne vois que des
barbes et des regards sombres là où je devrais voir des humains venus d'ailleurs, qui apportent
ici une partie de leur culture... Je vois des groupes d'hommes en prière, déchaussés, prosternés
en direction de la Mecque. On ne voit jamais les femmes prier. Je vois les terroristes d'al-Qaida
qui foncent sur New York et Washington en criant Allâh Akbar (Allâh est le plus grand). Je suis
conscient d'être victime de l'image que les médias véhiculent. En réalité, la grande maiorité des
108 000 musulmans du Québec ont honte de savoir que les auteurs des attentats d u 11
septembre 2001 se réclamaient de leur Dieu. Ça leur fait mal.
En guérissant notre ignorance au sujet des musulmans, nous éviterons de tomber dans
l'intolérance que nous reprochons aux islamistes. Nous devons en particulier nous libérer du
traumatisme causé par les événements tragiques de septembre 2001, qui portent à associer
musulmans et terroriste. L'attentat contre les tours jumelles de New York surexploité par les
médias, a en effet été le catalyseur d'une vision manichéenne ., paranoïaque du monde
arabomusulman. Il a durci les préjugés et les stéréotypes. Musulmans et arabes sont devenus
des mots qui font peur. Or la peur est souvent la fin de la sagesse.
Pensons un instant à notre attitude devant une femme musulmane qui porte le voile. Prenons
lucidement conscience de nos préjugés probables... Écoutons maintenant les témoignages de
deux femmes du Québec. Celui d'une journaliste, Claire-Andrée Cauchy, laïque et féministe, qui
a revêtu le voile pendant quelques jours en 2006. Elle résume ainsi son aventure : « Cette
expérience a changé ma façon de percevoir les musulmanes d'ici. J'ai rencontré d'authentiques
féministes voilées. Des femmes qui, tout en pratiquant leur culte, tentent de faire avancer la
religion dans le sens d'une plus grande égalité. » Puis celui de Geneviève Lepage, une
Québécoise convertie à l’Islam depuis 2002 : « Je devais me sentir convaincu avant le voile
définitivement, mais une fois ma décision prise, je ne l'ai plus quitté. Porter le hidjab pour moi
est un acte d'adoration, d'affirmation et de libération. J'ai noté un changement positif dans la
façon dont les hommes interagissent avec moi, soit un plus grand respect pour ma personne
dans leurs regards et leurs propos. Je suis consciente de ma valeur en tant que femme et je
désire une relation fondée sur ce qui compte vraiment. Dans l'islam, la sexualité n'est
aucunement taboue; elle est seulement réservée au couple. Si je porte le hidjab, ce n'est pas
par crainte, mais par conviction religieuse et confiance en moi. Le droit de montrer mon corps
n'appartient qu'à moi. Ces deux femmes ont-elles réussi à ébranler nos préjugés?
Si nous identifions les causes profondes de la violence de certains musulmans, nous réaliserons
que les pays occidentaux ne sont pas innocents. L'islamisme est en effet une réaction à une
situation de domination, de pauvreté, de sentiment d'infériorité, une situation largement
façonnée par l’Occident au XXe siècle. L'échec des États-nations - mis en place par les pouvoirs
coloniaux – à procurer le bien-être des populations a fait naître l'idée de l'islam comme base de