Chine – Conjoncture : Stable sur sable
Sylvain LACLIAS
sylvain.laclias@credit-agricole-sa.fr
N° 16/283 – 26 octobre 2016
Certes, on pourra arguer que Pékin s’est fixé 6,5%
de croissance minimale (en moyenne) d’ici 2020,
n’en démordra pas et dispose d’encore de pas mal
de moyens pour y parvenir. Sa marge de ma-
nœuvre tend néanmoins à se réduire. Il y a
l’endettement domestique évoqué à l’instant. Mais
aussi la complexité accrue de l’environnement
économique, ces réalités différentes d’une région à
l’autre, d’un secteur à l’autre, qui compliquent le
pilotage de l’économie et posent de façon aiguë la
question de l’efficacité du policy-mix chinois.
Certes, on pourra également dire que des
réformes sont menées en parallèle. Mais à l’instar
du programme présenté début octobre par le
Conseil d’État pour contenir l’endettement des
entreprises (dans lequel cinq pistes sont plus
particulièrement évoquées : fusions et acquisitions,
ajustement des bilans des entreprises par elles-
mêmes, échange de dette contre actions, finan-
cement par actions, faillites et liquidations), elles
ne sont pas toujours la panacée sur le papier.
L’échange de dette contre actions est par exemple
susceptible d’altérer les ratios de capitalisation et
de profitabilité des banques. Surtout, la question
de l’application des réformes se pose systéma-
tiquement. On pense cette fois-ci aux faillites, leurs
répercussions sur l’emploi et, du coup, la difficile
tâche pour Pékin d’aller jusqu’au bout de cette
idée.
Le fait est que deux des enjeux clés derrière les
réformes sont l’amélioration de l’efficacité des
entreprises publiques comme privées et le
deleveraging de l’économie. Ce n’est pour le
moment pas visible, ni dans les chiffres, ni ailleurs.
Et plus cela tarde à l’être, plus il y a des raisons de
craindre un ajustement ultérieur plus coûteux et de
la volatilité, sur les variables économiques et
financières, éventuellement forte.
Des sorties de capitaux encore
importantes
C’est sans doute cela d’ailleurs qui sous-tend pour
une part les mouvements observés sur la partie
basse de la balance des paiements ces derniers
mois. Le fait est que les réserves de change ont
baissé de 19 Mds USD en septembre. Ce qui porte
leur diminution totale à 39 Mds USD au troisième
trimestre. Alors que l’excédent commercial s’est
élevé à près de 145 Mds USD durant cette période
et que le surplus courant pourrait, de ce fait, s’être
stabilisé aux alentours de son niveau du trimestre
précédent, à savoir 65 Mds USD. Cela laisse
inévitablement entrevoir des sorties de capitaux
durant l'été. Sans prendre en considération l'effet
change sur la valorisation des actifs en devises,
vraisemblablement d'au moins 100 Mds USD.
C'est certes moins que les 226 Mds USD enre-
gistrés à cette même époque l’an passé, mais c'est
plus que les presque 80 Mds USD du deuxième
trimestre, et cela reste substantiel.
Qu’y-a-t-il derrière ? À la fois plus d'IDE chinois à
l'étranger et moins d'IDE étrangers en Chine. Ce
n'est pas complètement négatif. Les entreprises
chinoises s'internationalisent, vont chercher de
nouveaux marchés, de la compétitivité, du savoir-
faire et de la technologie à l'étranger. Elles
s'adaptent et adoptent une attitude active face aux
contraintes de l'environnement économique.
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Q3 2006 Q3 2008 Q3 2010 Q3 2012 Q3 2014 Q3 2016
Chine : dette domestique
crédit obligations shadow banking "officiel"
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oct.-11 oct.-12 oct.-13 oct.-14 oct.-15 oct.-16
mds USD
Chine : flux de capitaux et réserves
réserves (dr.) flux nets de capitaux