© Frédéric Demarquet - Coaching / Formation / Consulting
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Notions de réalité
Qu’est-ce que la réalité ? Voilà une question bien complexe auquel il est très difficile
de répondre. Chacun pourra vous dire avec conviction que c’est ce qu’il voit, ce qu’il entend,
ressent, suppose… mais comment savoir ce que chacun perçoit par ses sens, déduit par son
intelligence ? Est-ce la même chose pour tout le monde ? Si c’était le cas, alors il n’y aurait
aucune difficulté à communiquer, pourtant, il semblerait que la communication ne soit pas
toujours simple. La notion de réalité aurait-elle quelque-chose à voir dans cette affaire ? Je me
propose d’éclairer un peu cette notion complexe et dont on ne sait peut-être encore pas grand
chose.
Les deux réalités
Voilà déjà un élément nouveau pour certain : il existe deux réalités, ou plutôt devrais-
je dire deux types de réalités car de réalités, il en existe en fait au moins autant que d’être
vivants sur notre planète. Mais n’anticipons pas !
Le premier type de réalité est ce qu’on appelle la réalité de premier ordre. Ce type de
réalité est attribuable à tout ce qui repose sur des preuves scientifiques irréfutables. Par
exemple, on connaît aujourd’hui les propriétés de l’or pur et il est peu vraisemblable que
celles-ci se modifient dans le futur. On peut donc dire qu’il s’agit d’une réalité de premier
ordre. De même, on peut tomber d’accord sur le fait qu’une vache est un mammifère et non
un poisson, à condition bien sûr d’être d’accord sur ce qu’est un mammifère et ce qu’est un
poisson.
Le second type de réalité, et c’est celui qui nous intéressera en communication, est la
réalité de second ordre. Celle-ci correspond à la représentation que nous nous faisons des
choses, des personnes, des évènements, du rôle que nous leurs attribuons. Par exemple,
concernant l’or, nous pouvons vérifier ses propriété physiques à tout instant et donc sa réalité
de premier ordre, mais cela n’a rien à voir avec le fait que la valeur de l’or est revue tous les
jours par quelques hommes qui en déterminent la cote et que ceci influence directement notre
vie quotidienne sous plusieurs aspects. Cela n’a rien à voir non plus avec le rôle joué par l’or
depuis des siècles. Un autre exemple serait celui des divergences culturelles et des difficultés
de communication que ces divergences entraînent. Pour nous occidentaux, si nous invitons
une personne originaire de certains pays du moyen orient à dîner et qu’à la fin du repas celle-
ci rote bruyamment, nous penserons que cette personne est bien impolie alors que peut-être
elle exprimait ainsi sa satisfaction d’avoir bien mangé et qu’elle remerciait ainsi ses hôtes.
Ces réalités sont donc des réalités de second ordre et sont la cause de bien des conflits
interpersonnels et de difficultés de communication.
Dans la réalité de second ordre, il est absurde de vouloir définir ce qui est réel de ce
qui ne l’est pas et même de vouloir le discuter. Il n’existe aucune règle objective.
Malheureusement, nous n’avons que très peu conscience de l’existence de ces deux réalités et
bien souvent nous les confondons. De ce fait, nous croyons tous que la réalité est la façon
dont nous voyons les choses et que les autres doivent de ce fait la voir comme nous. Le pas
peut très vite être franchi de penser que ceux qui ne la voient pas comme nous sont aveugles,
idiots peut-être, ou même fous. Penser qu’il n’existe qu’une réalité de second ordre qui serait
réelle (la notre) et que toutes les autres sont irréelles est une illusion et entraîne bien des
difficultés dans de nombreux domaines.
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La vision du monde
Lorsque je parle de vision du monde, j’entends la façon dont chacun se représente sa
propre réalité de second ordre. Au cours de la vie, nous faisons diverses expériences que nous
nous représentons selon nos perceptions propres, nous sommes influencés par notre culture,
notre famille. Ce vécu va progressivement déterminer une certaine façon de voir les choses,
de les ressentir, de les penser, de les dire : il s’agit de notre vision du monde.
Immanquablement, cette vision, bien que riche et variée, apportera un aspect limitant dans
notre perception. Le cybernéticien Alfred Corzybski avait coutume de dire La carte n’est pas
le territoire. En effet, toute carte ne sera jamais qu’une représentation d’un territoire et ne
pourra jamais rendre compte de la richesse infinie de ce territoire et de tous les trésors qu’il
recèle. De même, notre vision du monde est un filtre au travers duquel nous voyons le monde
qui nous entoure. Ce filtre est d’un grand intérêt puisqu’il nous permet de trier les
informations, de faire des abstractions, d’élaborer des théories. C’est grâce à lui que le
langage est apparu, langage qui lui-même devient à l’instant même de sa création partie
intégrante du filtre, car il faut bien traduire en mots nos expériences pour les faire partager, se
faire comprendre. Pour se faire, on doit se référer à des expériences passées, à des
apprentissages et donc à notre vision du monde. On ne peut que faire des comparaisons avec
ce que l’on a déjà créé dans notre réalité. On sait tous que le langage est limitant et comme il
est difficile de traduire certaines expériences, certaines émotions en mots. Et une fois que l’on
trouve une traduction à peu près proche de notre réalité, on la livre à l’autre qui va la recevoir
au travers du filtre de sa propre réalité. Si vous faites décrire une même scène à dix personnes
différentes, vous en aurez dix versions qui seront toutes justes, dans la réalité de chacun. Il
serait absurde de penser que l’une d’elle est fausse : elle est juste pour la personne qui la
décrit. Alors vous allez vous faire une idée à partir de ces dix descriptions, idée qui sera une
abstraction de ces dix expériences passée au filtre de votre propre représentation, de votre
propre vision du monde. A partir de là, vous allez établir une théorie sur cette scène. Et, si
vous travaillez en binôme, votre collègue va en établir une autre, très différente. Vous allez en
discuter et peut-être, à force de gociation, vous tomberez d’accord sur une théorie qui sera
satisfaisante pour vos deux alités. Mais de quelle réalité s’agira-t-il ? Les enquêteurs de
police connaissent bien cette difficulté lorsqu’ils recueillent les témoignages de différentes
personnes après un accident. Aucune ne décrira la même chose ! On voit bien par ces
exemples en quoi la vision du monde de chacun va influencer la communication et aboutir
parfois à des impasses. Il n’existe sûrement pas de communication idéale (elle ne serait
d’ailleurs pas la même pour tout le monde), mais on peut néanmoins communiquer de
manière satisfaisante et atteindre ainsi ses objectifs.
Conclusion
En guise de conclusion, je voudrais simplement attirer l’attention sur le fait que le
meilleur moyen d’entrer en communication est de le faire dans la conscience de ces notions de
réalités. Inconscient de ces aspects, nous prenons le risque d’un affrontement de points de vue
plutôt que d’un échange. Conscient, nous allons pouvoir progressivement nous ouvrir à la
vision du monde et à la réalité des autres et enrichir ainsi notre propre alité. Il existe pour
cela des techniques qui seront l’objet d’autres cours, telles que la communication circulaire, le
feed-back, la communication interactionnelle, la notion d’information…
Il est utopique de penser que l’on peut comprendre la réalité d’un autre, cependant, on
peut écouter, dans l’ouverture et en faisant taire ses préjugés. De même, il est impossible de
faire comprendre sa propre réalité, qu’il est déjà fort difficile de comprendre soi-même !
Comme vous le savez, l’être humain n’aime pas beaucoup de vide et lorsque nous entendons
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un message mais qu’une information semble manquer, le premier réflexe sera de combler ce
manque et donc ce vide en le remplissant de ce que nous savons déjà. Nous allons compléter
le message et l’information, mais cela veut dire qu’une partie du message est intégrée.
L’intégration, dans ce contexte, n’est-il pas de laisser entrer dans notre réalité des bribes
d’autres réalités afin de créer un mouvement, un changement, un apprentissage ?
Pour ceux qui souhaitent approfondir cette notion de réalité, je conseille le livre « La
réalité de la réalité » de Paul Watzlawick aux Editions Point-Essais
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