l'unesco
Asimov
-fr
Thuillier
-fr
Wickramasinghe
Le
temps
des
peuples
O
TCHAD
Porteuses
d'eau
"De
l'eau.
vais-je
la
cher¬
cher
?
Oh,
je
mets
deux
heures
chaque
fois
pour
y
aller
et
deux
heures
pour
revenir.
Je
fais
deux
fois
par
jour..."
Ces
propos
d'une
jeune
Soudanaise
décrivent
une
réalité
vécue
aujourd'hui
par
une
grande
partie
de
la
popula¬
tion
du
globe.
Selon
les
chiffres
pour
1980,
environ
trois
person¬
nes
sur
cinq,
dans
les
pays
en
développement,
qui
comptent
plus
de
deux
milliards
d'habi¬
tants,
n'ont
pas
d'eau
salubre
à
leur
portée
immédiate.
Ainsi
les
femmes
et
les
enfants
des
campa¬
gnes,
auxquels
incombe
la
plu¬
part
du
temps
cette
tâche,
font
-ils
souvent
jusqu'à
10
kilomètres
par
jour
pour
aller
chercher
l'eau
nécessaire
à
satisfaire
les
besoins
les
plus
élémentaires.
Les
consé¬
quences
de
cette
situation
pour
la
santé,
pour
le
développement,
sont
catastrophiques.
En
1981
l'Assemblée
générale
des
Nations
Unies
a
lancé
la
Décennie
inter¬
nationale
de
l'eau
potable
et
de
l'assainissement,
effort
concerté
à
l'échelle
mondiale
pour
mettre
"eau
salubre
et
assainissement
adéquat
à
la
portée
de
tous
en
1990".
Sur
notre
photo
:
deux
paysannes
près
du
lac
Tchad,
en
Afrique.
Courrier
de
l'unesco
Une
fenêtre
ouverte
sur
le
monde
MAI
1982
35»
ANNÉE
PUBLIÉ
EN
26
LANGUES
Français
Tamoul
Coréen
Anglais
Persan
Kiswahili
Espagnol
Hébreu
Croato-Serbe
Russe
Néerlandais
Macédonien
Allemand
Portugais
Serbo-
Croate
Arabe
Turc
Slovène
Japonais
Ourdou
Chinois
Italien
Catalan
Bulgare
Hindi
Malais
Une
édition
trimestrielle
en
braille
est
publiée
en
français,
en
anglais
et
en
espagnol.
Mensuel
publié
par
l'UNESCO
Organisation
des
Nations
Unies
pour
l'Éducation,
¡a
Science
et
la
Culture
Ventes
et
distributions
:
Unesco,
place
de
Fontenoy,
75700
Paris
Belgique
:
Jean
de
Lannoy,
202,
avenue
du
Roi,
Bruxelles
6
ABONNEMENT
1
an
:
48
francs
français
;
deux
ans
:
84
francs
français.
Paiement
par
chèque
bancaire,
mandat,
ou
CCP
3
volets
12598-48,
à
l'ordre
de
:
Librairie
de
l'Unesco.
Retourner
à
Unesco,
PUB/C,
7,
place
de
Fontenoy
-
75700
Paris.
Reliure
pour
une
année
:
36
francs.
Rédacteur
en
chef
:
Edouard
Glissant
pages
5
LE
HASARD
ET
LE
GÉNIE
par
Magnus
Pyke
12
LES
REPONSES
DE
DARWIN
par
Isaac
Asimov
13
DES
SOURIS
ET
DES
PHALÈNES
19
LE
VOYAGE
DU
"BEAGLE"
24
LES
GALAPAGOS
:
l'origine
de
"l'Origine"
par
Jorge
Enrique
Adoum
28
L'UNESCO
ET
LA
FONDATION
DARWIN
29
L'ÉVOLUTION
DE
L'ÉVOLUTION
par
Pierre
Thuillier
30
DARWIN
ET
LE
RACISME
33
L'ORDINATEUR
:
DARWIN
A
RAISON
par
Boris
Mednikov
36
L'ASTRONOME
:
ET
SI
DARWIN
AVAIT
TORT
?
par
Chandra
Wickramasinghe
2
LE
TEMPS
DES
PEUPLES
TCHAD
:
Porteuses
d'eau
¿2V¿
h¿¿¿¿¿¿¿
¿z¿¿
tn&tô-
CETTE
année
marque
le
cente¬
naire
de
la
mort
de
Charles
Darwin,
celui
dont
la
théorie
de
l'évolution
par
la
sélection
natu¬
relle
a
été
sans
conteste
la
plus
grande
innovation
scientifique
du
19e
siècle.
Notre
propos,
avec
ce
numéro
du
Courrier
de
l'Unesco
qui
lui
est
entièrement
consacré,
est
de
rendre
hommage
au
grand
savant
qui
a
jeté
les
bases
de
la
biologie
moderne.
Nous
laissons
à
d'autres
le
soin
d'évaluer
les
répercussions
morales
et
religieuses
d'une,
théorie
qu'un
philosophe
moderne
a
qualifiée
de
«programme
de
recherche
métaphy¬
sique».
A
la
différence
de
la
théorie
créa-
tionniste
traditionnelle,
selon
la¬
quelle
toutes
les
formes
de
vie
sont
restées
pratiquement
immuables
depuis
qu'elles
ont
été
créées
à
l'aube
des
temps
biologiques,
la
théorie
darwinienne
de
l'évolution
affirmait
que
toutes
les
espèces
exis¬
tantes,
y
compris
l'homme,
ont
évo¬
lué,
pendant
des
millions
et
des
mil¬
lions
d'années,
à
partir
d'une
seule
forme
de
vie
initiale.
Toutefois,
quand
parut
L'origine
des
espèces,
en
1859,
la
théorie
de
l'évolution
avait
déjà
une
longue
his¬
toire;
Darwin
lui-même,
dans
la
notice
historique
qu'il
a
ajoutée
comme
préface
aux
éditions
ultérieu
res
de
son
grand
livre,
a
recensé
plus
de
trente
devanciers.
Pourquoi
donc
revient-il
à
Darwin,
et
à
lui
seul,
l'honneur
d'être
le
symbole
mê¬
me
du
plus
grand
bouleversement
qu
'aient
connu
les
sciences
de
la
vie
?
La
réponse
est
la
suivante:
alors
que
les
théories
précédentes
de
l'évo¬
lution
avaient
un
caractère
spécula¬
tif,
Darwin
a
su
rassembler,
dans
L'origine
des
espèces,
une
incroya¬
ble
quantité
de
/
preuves
pour
appuyer
l'idée
qué
s'était
produite
une
évolution
des
êtres
vivants
et
que
la
sélection
naturelle
en
était
le
mécanisme.
Devant
la
force
de
cette
démonstration,
Thomas
Huxley,
qui
allait
devenir
le
plus
habile
défenseur
de
Darwin,
remarqua,
admiratif;
«
Comme
c'est
bête
de ne
pas
y
avoir
pensé!».
Cependant,
la
publication
de
L'o¬
rigine
des
espèces
déclencha
une
révolution
non
seulement
dans
les
sciences
de
la
vie
mais
aussi
dans
¡es
conceptions
philosophiques,
mora¬
les
et
religieuses
de
l'homme
occi¬
dental.
Bien
que
Darwin
ait
affirmé
qu
'il
ne
«
voyait
aucune
raison
vala¬
ble
pour
que
les
opinions
exprimées
dans
ce
livre
heurtent
les
sentiments
religieux
de
quiconque»,
son
mes¬
sage
menaçait
tout
l'édifice
de
la
pensée
chrétienne
rationnelle,
repré¬
sentée
par
la
théologie
naturelle,
puisqu
'il
niait
la
notion
de
progrès
et
de
finalité
inhérents
à
l'évolution
et
introduisait
le
spectre
du
hasard.
Samuel
Wilberforce,
évêque
d'Oxford,
dénonça
«l'idée
infaman¬
te
de
l'origine
bestiale
de
celui
qui
a
été
créé
à
l'image
de
Dieu».
Moins
excessif,
mais
tout
à
fait
révélateur
de
l'attitude
de
rejet
que
suscita
cette
attaque
des
valeurs
bien
pensantes
et
conformistes
de
la
société
victo¬
rienne,
fut
ce
commentaire
de
l'épouse
de
l'évêque
de
Worcester:
«Descendre
du
singe!
Cher,
espé¬
rons
qu'il
n'en
est
rien,
mais
si
c'était
vrai,
de
grâce,
que
cela
ne
se
sache
pas
!
».
La
comparaison
avec
la
révolution
copernicienne
est
inévitable.
Comme
l'a
dit
Freud:
«Au
cours
des
temps,
la
science
a
infligé
deux
affronts
au
naïf
amour-propre
de
l'humanité.
Le
premier,
quand
on
a
compris
que
la
Terre
n
'était
pas
le
centre
de
l'uni¬
vers,
mais
seulement
un
point
dans
un
système
aux
dimensions
à
peine
concevables
(...).
Le
second,
lorsque
la
science
de
la
vie
a
retiré
à
l'homme
son
statut
privilégié
de
créature
par¬
ticulière
et
l'a
relégué
au
simple
rang
de
descendant
du
monde
animal».
Sur
notre
couverture
:
détail
de
la
couverture
d'un
album
offert
par
des
savants
à
Darwin
à
l'occasion
de
son
77e
anniversaire.
Photo
©
Down
House
et
le
Royal
College
of
Surgeons
of
England
(maiEs
mKMK
1809-1882
LE
HASARD
ET
LE
GÉNIE
par
Magnus
Pyke
s
A
27
ans
Charles
Darwin
avait
déjà
en
sa
possession
c'est-à-dire
dans
sa
tête
et
dans
ses
carnets
toute
l'information
concernant
les
végétaux
et
les
animaux
sur
laquelle
il
devait
plus
tard
édi¬
fier
la
théorie
de
l'évolution
et
fonder
sa
conception
de
l'origine
des
espèces,
idées
qui
ont
bouleversé
son
siècle.
Tous
les
hom¬
mes
qui
ont
vécu
après
lui
ont
su
que
le
monde
n'est
pas
celui
auquel
leurs
pères
avaient
cru.
Il
arrive
que
d'importantes
conséquences
sociales
et
éthiques
suivent
les
travaux
d'auteurs
dont
les
activités
paraissent
sans
avenir,
voire
sans
intérêt
:
c'est
ce
que
mon¬
tre
la
vie
de
Darwin.
Jeune
homme,
il
n'avait
rien
de
bien
prometteur,
et
ses
préoc¬
cupations
n'annonçaient
pas
de
grandes
découvertes
scientifiques.
En
1876,
à
l'âge-
de
67
ans,
il
écrivit
à
l'intention
de
ses
enfants
un
charmant
petit
livre,
Souvenir
du
développement
de
mon
intelligence
et
de
mon
caractère,
dont
il
ne
pensa
jamais
qu'il
pût
être
publié.
Il
y
raconte
qu'à
ses
débuts
à
l'école
il
apprenait
beaucoup
moins
vite
que
sa
s
cadette,
Catherine,
et
qu'à
bien
des
égards
il
était,
croyait-il,
un
vilain
petit
garçon.
En
même
temps
il
avait
la
passion
du
col¬
lectionneur,
et
engrangeait
toute
sorte
d'objets,
des
plantes,
des des
coquil¬
lages,
des
minéraux
et
aussi
des
pièces
de
monnaie
et
des
sceaux-à-cacheter.
En
outre,
il
essayait
d'apprendre
les
noms
des
plantes.
Il
aimait
la
pêche
à
la
ligne,
qui
l'aidait
peut-
être
à
compléter
ses
collections
et
qui
en
tout
cas
lui
procurait
de
longs
moments
de
calme
MAGNUS
PYKE,
homme
de
science
et
vulgari¬
sateur
scientifique
anglais,
fut
Secrétaire
de
l'Association
britannique
pour
l'avancement
des
Sciences
et
président
de
son
Conseil
de
1973
à
1977.
Cet
article
est
l'adaptation
d'un
chapitre
écrit
par
Magnus
Pyke
dans
un
livre
publié
ce
mois-
ci
par
l'Unesco
et
le
Mendelianum
du
Musée
morave
¡Tchécoslovaquie)
:
From
Biology
to
Biotechnology,
édité
par
Colette
Kinnon,
Alexandre
Kholodilin
et
Viteslav
Orel.
et
de
contemplation
au
bord
de
l'étang
ou
de
la
rivière.
A
cette
époque,
personne
n'aurait
deviné
qu'il
deviendrait
un
homme
de
science.
Quand
il
eut
neuf
ans
on
l'envoya
à
la
"grande
école
de
M.
Butler
à
Shrewsbury"
il
resta
sept
ans,
jusqu'en
1825.
Cet
éta¬
blissement
l'on
enseignait
le
latin
et
le
grec,
avec
un
peu
de
géographie
et
d'histoire
ancienne,
ne
lui
apprit
rien
qui
pût
lui
servir
dans
la
vie.
D'ailleurs
il
en
sortit
avec
des
notes
ni
bonnes
ni
mauvaises
;
on
le
consi¬
dérait
en
général
comme
assez
médiocre.
Son
père,
qui
pourtant
l'aimait
bien,
lui
dit
un
jour
:
"Tu
ne
t'intéresses
à
rien,
qu'à
tirer
des
coups
de
fusil
et
attraper
des
chiens
et
des
rats.
Tu
seras
la
honte
de
la
famille".
Jugement
sévère,
sans
doute.
Quand
le
jeune
Darwin,
pourvu
d'un
-précepteur,
découvrit
la
géométrie
d'Euclide,
il
fut
émerveillé
par
la
limpidité
des
démonstra¬
tions:-
Et
c'est
avec
le
même
ravissement
qu'il
écouta
un
jour
son
oncle
(qui
avait
une
meilleure
opinion
de
ses
aptitudes
que
son
père)
lui
expliquer
le
principe
du
vernier
d'un
baromètre.
Toutefois
à
seize
ans
il
s'enthousiasmait
surtout
pour
la
chasse
et,
c'est
une
passion
qu'il
garda
longtemps.
Il
est
vrai
que
durant
toute
sa
scolarité
il
conti¬
nua
à
collectionner
des
minéraux,
encore
qu'il
s'y
prît
sans
aucune
méthode
scientifi¬
que,
en
cherchant
simplement
à
ajouter
des
spécimens
à
d'autres
spécimens.
Les
coléop¬
tères
aussi
attirèrent
son
attention,
pour
leurs
belles
couleurs,
et
après
des
vacances
au
Pays
de
Galles
à
l'âge
de
dix
ans
il
faillit
prendre
la
décision
de
commencer
une
col¬
lection
d'insectes.
Mais
c'est
peut-être
un
embryon
de
curio¬
sité
scientifique
qui
le
poussa
à
servir
d'assistant
à
son
frère,
qui
étudiait
la
chimie
et
s'était
installé
un
laboratoire
de
fortune
dans
la
cabane
à
outils
au
fond
du
jardin.
Plongés
dans
leurs
expériences,
les
deux
gar¬
çons
y
travaillaient
souvent
fort
tard
le
soir,
ce
que
condamna
publiquement
le
redoutable
M.
Butler,
quand
il
apprit
la
.
chose,
en
accusant
le
pauvre
Charles
de
"perdre
son
temps
à
des
matières
inutiles".
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