Intervention Conférence de presse Rio+20 C’est avec soulagement que les Verts constatent que tant le Conseil fédéral que la communauté internationale ont pris conscience du fait que la priorité, en matière de développement durable, est aujourd’hui de réformer fondamentalement notre économie. Mais encore faut-il le faire de manière crédible. Pour beaucoup, l’économie verte se limite au développement ciblé du secteur des technologies propres ou des énergies renouvelables. Pour les Verts, en revanche, l’instauration d’une économie verte exige une réforme structurelle et à long terme de l’ensemble de l’économie, qui doit désormais parvenir à répondre aux besoins des consommateurs dans les limites des ressources dont nous disposons. La Suisse, dans le cadre de ses propositions pour les délibérations de Rio + 20, va heureusement dans ce sens. Elle affirme en effet qu’il ne peut y avoir d’avenir durable que si l’économie parvient à déconnecter la consommation des ressources de la croissance du bien-être et propose à la communauté internationale une feuille de route pour l’économie verte. Celle-ci devrait formuler une vision et des objectifs communs, ainsi qu’un calendrier pour les mettre en oeuvre. Il s’agira aussi de proposer un éventail d’instruments ad hoc et de mettre en commun les bonnes pratiques. Ces propositions de la Suisse bénéficient du soutien clair des Verts. Mais la Suisse met-elle toutes les chances de son côté pour être entendue à Rio? Aux yeux des Verts, c’est là que le bât blesse, et pour deux raisons. Nous nous trouvons à Rio dans une configuration assez proche de celle qui a valu lors des négociations internationales sur le réchauffement climatique. Une série de pays industrialisés, a priori pleins de bonne volonté, tentent de convaincre des pays en développement de modifier leur modèle économique. Or, pour être persuasif dans des négociations de ce type il faut, d’une part, répondre de manière crédible aux demandes légitimes de ceux que l’on souhaite convaincre et, d’autre part, appliquer à soi-même les directives que l’on tente de vendre à autrui. Malheureusement, la Suisse peine à remplir ces deux conditions. Les discussions préparatoires qui ont précédé la conférence de Rio+20 ont montré que les pays en développement étaient sceptiques face au concept d’économie verte. On peut les comprendre. Alors que les objectifs de durabilité fixés il y a 20 ans en matière de lutte contre la pauvreté n’ont pas été atteints, ils ont d’autres priorités vitales à poursuivre. L’économie verte, pour convaincre de tels acteurs, doit aussi être une économie équitable. Il s’agit tout d’abord, pour les pays développés, de prouver qu’ils sont capables de réduire eux-mêmes leur empreinte écologique, car tant que des pays comme la Suisse consommeront l’équivalent de près de trois planètes, les dés seront pipés pour les pays du Sud, dont les velléités de développement sont absolument légitimes. Mais il s’agit aussi de régler la responsabilité des pays industrialisés concernant les dégâts environnementaux et humains majeurs causés impunément dans les pays en développement par certaines entreprises multinationales. Nous ne pouvons pas décemment prôner une économie verte auprès de pays dont les populations et l’environnement sont malmenés par des entreprises dont le siège se situe dans nos propres frontières et qui sont protégées par notre propre législation. Les récents scandales autour d’entreprises comme Glencore ou Syngenta montrent que la Suisse n’est à ce jour absolument pas cohérente en la matière. Enfin, la question de la rétribution équitable des matières premières puisées dans les pays que nous cherchons à convaincre doit être abordée de front. Les ressources naturelles, en particulier lorsqu’elles sont non-renouvelables, sont précieuses et leur rareté doit être répercutée sur leur prix, au 1 bénéfice de ceux qui les détiennent originairement et non des entreprises étrangères qui les exploitent sur place. Deuxième faiblesse de la Suisse dans le cadre des négociations à Rio : sa manière de promouvoir l’économie verte sur ses propres terres. Nous ne pouvons être entendus par la communauté internationale que si nous appliquons nous-mêmes, sur notre propre territoire, les mesures que nous proposons à nos partenaires d’adopter. Or à ce jour, la Suisse ne dispose pas d’une stratégie cohérente en faveur de l’économie verte. Le Conseil fédéral s’est limité jusqu’ici à nous présenter six domaines d’interventions hétéroclites. Il veut améliorer l’efficience dans les technologies de l’information et de la communication, mieux informer les consommateurs sur l’impact environnemental des produits, éviter les incitations fiscales négatives, compléter le PIB avec d’autres indicateurs de bien-être et examiner l’impact sur les ressources des nouveaux actes législatifs. Le sixième domaine d’intervention, le Masterplan Cleantech, qui vise à positionner la Suisse comme leader dans le domaine des technologies vertes, est le point qui nous semble le plus abouti et nous nous réjouissons par ailleurs d’entendre les propositions de Mme Widmer-Schlumpf en matière de fiscalité écologique. Nous n’attendons cependant pas de miracle du rapport sur l’économie verte que le Conseil fédéral nous a promis pour la fin de l’année, compte tenu du contenu de son projet de départ. Pour les Verts, une stratégie crédible en matière d’économie verte ne peut se limiter à un éventail de mesures hétéroclites et non contraignantes. Elle devrait impliquer un objectif à atteindre clair et déterminé dans le temps, une définition précise de ce que l’on entend par économie verte, une procédure contraignante pour atteindre l’objectif fixé, un éventail d’instruments efficaces et un financement suffisant. C’est ce que le Conseil fédéral doit appeler de ses vœux à Rio, mais c’est aussi ce qu’il doit mettre en œuvre en Suisse. S’il ne le fait pas de lui-même, les Verts demanderont au peuple de l’exiger en soutenant notre initiative pour une économie verte, dont le délai de récolte échoit dans quelques mois. Je vais maintenant passer la parole à Bastien Girod qui va vous montrer en quoi cette initiative constitue une stratégie convaincante en matière de promotion de l’économie verte, et comment les Verts portent aujourd’hui cette thématique au parlement. Conférence de presse, 14 juin 2012 à Berne Discours Adèle Thorens 2