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La Chine inquiète, l’ « Empire du milieu » fait peur…. Au cours des dernières
années, une littérature relativement abondante et de nombreux articles ont été
publiés, la plupart allant dans le même sens : la Chine est LA menace, le nouvel
empire du mal, avec en toile de fond, une rivalité économique, diplomatique,
militaire, de plus en plus vive entre les Etats-Unis, futur ex-première puissance
mondiale et parfois présentée comme un super-hégémon en déclin
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, et la Chine, avide
de davantage de puissance. Une nouvelle « guerre froide » en perspective ? Ces
craintes ne sont pas uniquement le fait de journalistes farfelus, certains milieux
politiques, notamment à Washington, brandissent sérieusement cette nouvelle
menace « rouge ». En Europe aussi, peu de dirigeants politiques n’ont pas conscience
aujourd’hui du formidable développement économique chinois qui placera bientôt ce
géant de 1,272 milliards d’habitants
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probablement dans le quinté de tête des pays
industrialisés.
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Or, lorsque la presse et les analystes évoquent la Chine, c’est non seulement bien
souvent sous des termes teintés d’alarmisme, mais aussi vue sous l’angle quasiment
uniquement de la performance économique (à travers en particulier la menace
représentée par les bas salaires, qui accroitrait les délocalisations vers l’Asie et
grèverait notre commerce extérieur
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). Certes, on parle aussi d’autres aspects,
notamment diplomatiques (tensions avec Taiwan, situation délicate au Tibet, conflits
frontaliers avec l’Inde, progrès de l’influence chinoise en Afrique et en Amérique
latine). Mais le constat est là : que l’on craigne la puissance actuelle et à venir de
Pékin, que le système politico-économique chinois nous fascine, et quelles que soient
les conséquences politiques sur lesquelles ces sentiments débouchent, le prisme sous
lequel on analyse la montée en puissance de la Chine est essentiellement économique.
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Des théories existent, en droit international public, sur le déclin des hégémons. Nous pensons
notamment à celle de Paul Kennedy, « Naissance et déclin des grandes puissances-transformations
économiques et militaires de 1500 à 2000 ».
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Chiffre tiré du dossier « Chine, un colosse émerge », du Monde dossiers et documents n° 324, octobre
2003. Selon les derniers chiffres du Bureau des Statistiques chinois, la population chinoise a atteint 1,
308 milliards de personnes au 28 février 2006, dernière estimation officielle.
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En 2004, selon les statistiques fournies par les autorités chinoises, la Chine était classée au 6
ème
rang
mondial des pays industrialisés. Cette année, la Chine prendra sans doute le second rang mondial en
termes d’exportations derrière l’Union européenne et devant les Etats-Unis. Elle est déjà la 4
ème
puissance industrielle mondiale et serait la première agriculture au monde selon diverses sources.
Mais les chiffres donnés pas les officiels chinois faisant l’objet de contestations et de débats entre
économistes, nous nous garderons ici de donner des chiffres très précis concernant la place de la Chine
dans l’économie mondiale.
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On pourrait citer ici le livre « La mondialisation n’est pas coupable » du célèbre économiste
américain Paul Krugman qui explique bien le mécanisme des délocalisations et du « dumping social »,
thème en vogue et qui a été largement repris par les différents candidats à la récente élection
présidentielle en France.