.~
les Immunoglobulines
INTRODUCTION
Les immunoglobulines (Ig) sont les molécules de l'immunité spécifique qui sont fabriquées
par les lymphocytes
B,
en réponse àun agent stimulateur, l'antigène, et qui sont dirigées contre cet
antigène.
L'immunoglobuline est
la
plaque tournante de
la
réponse immunitaire dite humorale, car c'est
elle qui possède
la
capacité àinteragir avec l'antigène. Alors que le terme immunoglobuline désigne
la structure moléculaire,
le
terme anticorps (Ac) désigne
la
fonction de reconnaissance de
l'antigène. Cependant, ces deux termes sont synonymes dans
le
langage courant.
En
tant que
récepteur de membrane pour l'antigène àla surface du lymphocyte 8, elle est impliquée dans
l'activation, la différenciation et
la
mort cellulaire de ces lymphocytes
B.
En
tant qu'anticorps sécrété
dans le plasma et les autres liquides biologiques, elle est capable de neutraliser directement
l'antigène, ou d'activer le système du Complément ou des mécanismes effecteurs cellulaires
comme
la
cytotoxicité dépendante des anticorps.
L'ensemble de ces propriétés est assuré par des régions distinctes de ces molécules, un
pôle présentant la capacité de varier àl'infini, pour pouvoir reconnaître les antigènes, dont
la
variabilité est sans limite, l'autre pôle étant au contraire conservé, pour pouvoir assurer des
fonctions effectrices spécialisées, dont le nombre est beaucoup plus restreint.
1- RAPPELS HISTORIQUES
von
Behring en 1890 :notion d'antitoxine
le
sérum d'animaux survivant à
la
diphtérie contient
un
facteur
qui
confère de façon spécifique
la
protection vis àvis
de
cette maladie chez des animaux non infectés.
Paul Ehrlich en 1900 :théorie de la complémentarité entre les antigènes et les antitoxines, qui
sont appelées anticorps.
2- HETEROGENEITE DES
D'ALLOTYPIE ET D'IDIOTYPIE
2-1- Isotvpie
IMMUNOGLOBULINES: NOTION D'ISOTYPIE,
Les isotypes définissent des catégories (classes, sous-classes) d'immunoglobulines présentes
chez tous les individus normaux d'une même espèce. Au niveau génétique, cela correspond àla
région du gène de l'immunoglobuline qui code pour
la
région constante.
Il
y a
un
gène par
isotype.
Il
existe 5types de chaînes lourdes, définissant autant de classes d'immunoglobulines:
chaÎRe
~
classe IgM
ôIgD
yIgG
aIgA
EIgE
Pour les IgG et les IgA,
on
distingue en plus des sous-classes:
pour les IgG :
yI
sous-classe
IgG1
y2
IgG2
y3
IgG3
y4
IgG4
pour les
IgA:
al
a2
IgA1
IgA2
Il
Y a donc 9isotypes de chaînes lourdes. Malgré cette diversité isotypique, l'homologie
de
séquence entre les différentes sous-classes est grande (>95% pour les IgG).
Il
existe deux types (= deux isotypes) de chaînes légères:
2-2-
Allotypie
K(kappa)
le
(lambda)
L'allotypie correspond àune variabilité allélique des immunoglobulines au sein de l'espèce:
il
existe pour certains isotypes des variations de structure des immunoglobulines d'un individu à
l'autre. Elles sont mineures et n'ont pas de répercussions sur
la
reconnaissance de l'antigène.
Le nombre d'allotypes est
faible:
les IgM, IgO
et
IgA1n'ont aucune variabilité allotypique connue tandis
qU'à
l'opposé il existe 13 allèles différents
pour
les IgG3, et de 2 à 5
pour
les autres isotypes. Ce
sont
les
systèmes
Gm,
A2m
et
Em
pour
les IgG, IgA2
et
IgE.
Il s'agit surtout de mutations ponctuelles d'acides
aminés, essentiellement dans la région constante.
2-3-
Idiotypie
C'est
la
plus importante forme de variabilité antigénique des immunoglobulines. Cette variabilité
est àl'origine
du
répertoire Bde chaque individu. Elle est
la
conséquence
de
la
recombinaison à
l'intérieur des gènes des immunoglobulines et des mutations qui ysurviennent (voir cours
lymphocyte Bet BCR).
L'idiotypie désigne une propriété antigénique de l'immunoglobuline qui est associée à
la
région
variable de
la
molécule. Ces déterminants antigéniques appelés idiotopes apparaissent à
la
suite de l'immunisation avec
un
antigène.
Lorsqu'elle apparaÎt àla suite d'une immunisation
par
un antigène quelconque, une immunoglobuline
peut
àson tourinduire une immunisation contre son idiotype et ainsi générerdes anticorps anti-idiotypes
(par définition, il ne
peut
yavoir d'immunisation anti-isotype
et
allotype chez l'individu qui produit cette
immunoglobuline). Ces anticorps à
leur
tour
peuvent être immunogènes chez l'individu qui les produit. Il
se créé ainsi un réseau idiotypique
qui
pourrait avoir un rôle d'immunorégulation (les anticorps anti-
idiotypes neutralisentles anticorps dirigés contre l'antigène). Cette théorie estdiscutée.
3- STRUCTURE DES IMMUNOGLOBULINES
3-1-
Structure
générale:
Les immunoglobulines sont les molécules solubles les plus hétérogènes de l'organisme. A
l'électrophorèse des protéines sériques en gel d'agarose, qui sépare les protéines selon leur
charge électrique, les immunoglobulines migrent de
la
région alpha-2 globulines à
la
fin de
la
région gammaglobulines. Outre les 9isotypes qui présentent des charges électriques
différentes, cette hétérogénéité de charge dépend aussi des régions variables.
Une immunoglobuline est constituée
de
4chaînes protéiques:
2chaînes
10urdes
identiques: chaînes Hpour «heavy
»,
de 450 à600 acides aminés
2chaînes légères identiques: chaînes Lpour «light
»,
de 210 à220 acides aminés.
Une immunoglobuline contient toujours deux exemplaires identiques des mêmes chaînes
légères et des mêmes chaînes lourdes.
La
structure d'une immunoglobuline est symétrique et
peut-être schématisée par
la
formule:
(H2L2)n
nvarie de 1(lgM membranaires, IgG, IgA,
IgO,
IgE) à2-4 (lgA
oligomériques) ou à5(lgM plasmatiques). Quand nest égal ou supérieur à
2,
les immunoglobulines contiennent
en
plus une chaîne Jpour permettre
l'association.
2
3-2- Organisation dans l'espace d'une immunoglobuline:
3-2-1-le
domaine de type immunoglobuline:
Une chaîne Lcontient deux domaines globulaires d'environ 110 acides amines chacun.
Le
domaine amino-terminal est variable (VU,
le
domaine carboxy-terminal (CL) est constant. Son
poids moléculaire est d'envÎron 25
kOa.
Une chaîne lourde contient quatre (lgG, IgA, IgO) ou cinq (lgM, IgE) de ces domaines.
Le
domaine
le
plus amino-terminal est dit variable (VH), les autres sont constants (CH1àCH3 ou 4
selon
le
nombre total de domaines). Son poids moléculaire est d'environ 50 ou 60 kOa.
Le
domaine immunoglobuline peut être glycosylé. Ainsi, les chaînes lourdes sont glycosylées
sur les domaines CH2, et portent des chaînes oligosaccharidiques contenant des résidus
d'acide sialique. Ces glycosylations peuvent varier d'une molécule àl'autre. Oans certaines
maladies auto-immunes comme
la
polyarthrite rhumatoïde,
il
existe des anomalies de
glycosylation des immunoglobulines.
Ces domaines globulaires ont une forme en tonneau ou «beta-sandwich
»,
contenant 7à9
feuillets beta
en
2plateaux. Cette structure est maintenue grâce à
un
pont disulfure
intracaténaire.
La conformation donnée
par
ce
domaine est retrouvée dans
un
grand nombre
de
protéines
de
l'organisme, constituant
la
((
superfamille des immunoglobulines ». On retrouve dans cette
famille plus
de
70
protéines dont les molécules
du
CMH,
les
TCR,
le
CD3,
les chaïnes
associées au BCR, le
CD2,
le
CD4,
le
CDB,
la
famille B7/CD2B, les récepteurs aux
immunoglobulines
par
exemple Ces protéines dériveraient toutes d'un gène ancestral commun
3-2-2- association de chaînes:
Les chaînes légères s'associent chacune avec la région amino-terminale d'une chaîne lourde
par
un
pont disulfure, les deux domaines variables se retrouvant ensemble et
le
domaine
constant de
la
chaîne légère avec
le
domaine
CH
1.
La
région située entre le domaine
CH1
et
le
domaine CH2 est appelée charnière. Cette zone
assure
la
flexibilité des deux «bras)} contenant les parties variables, qui sont mobiles. Cette
zone contient aussi des résidus cystéine impliqués dans des ponts disulfure intercaténaires qui
permettent l'association des deux chaînes lourdes.
1\
n'y apas réellement de région charnière
dans les IgM (remplacée par
le
domaine CH2).
L'interaction directe entre les deux chaines lourdes met aussi en jeu les domaines
CH3,
alors
que les domaines CH2 interagissent très peu.
Les portions situées entre les domaines sont linéaires (par opposition aux domaines globulaires)
et peuvent être
la
cible de protéases, qui vont cliver l'immunoglobuline:
>-
La
papaïne libère un fragment Fc et deux fragments Fab car elle coupe avant les ponts
disulfure entre les chaînes lourdes
Fc =fragment cristallisable =[CH2-CH3 (et CH4 quand
il
existe)]2, c'est donc un
dimère
Fab =fragment «antigen-binding
)}
=chaîne légère +VH-CH1
~
La pepsine libère
un
fragment F(ab')2 bivalent
et
des peptides pFc',
car
elle coupe après les ponts disulfure
entre les chaïnes lourdes.
En
fonction des isotypes,
la
structure spatiale de l'immunoglobuline présente des variations,
notamment àcause de
la
longueur de
la
région charnière (15 acides aminés pour les IgG sauf
les IgG3 :60). .
Ceci ades conséquences
sur
les propriétés eff,ectrices
de
ces immunoglobulines: flexibilité des
IgG1
et
IgG3,
opposée à
la
rigidité des IgG2 et des
IgG4.
3-3- Oligomérisation des immunoglobulines:
3-3-1- Chaîne J :
Elle est synthétisée par
la
cellule productrice de l'anticorps, et est associée de façon covalente
aux immunoglobulines oligomériques (lgA et IgM) pour créer
un
pont entre deux monomères.
3
Elle se fixe àl'extrémité carboxyterminale du fragment
Fc.
Pour les IgMpolymériques, la chaÎne
Jrelie deux monomères, les autres étant associés
par
des ponts disulfure.
3-3-2- Pièce sécrétoire:
Elle est produite par les cellules qui se chargent de l'exportation des immunoglobulines dans les
sécrétions. C'est le récepteur membranaire polylgR qui se lie aux immunoglobulines
polymériques circulantes.
Ensuite,
le
complexe estintemalisé
et
transporté jusqu'à l'autre pôle
de
la
cellule. Après clivage
de
la
membrane,
la
partie du récepteur qui lie l'immunoglobuline yreste attaché, et l'ensemble
est libéré dans les sécrétions. Ce composant pourrait avoir un rôle protecteur vis àvis des
protéases.
4- FONCTIONS DES IMMUNOGLOBULINES
4-1- Fonctions de
la
région variable:
La
région variable ala capacité àinteragir avec l'antigène. L'ensemble VH+VL est appelée le
fragment Fv.
L'analyse de
la
structure primaire d'immunoglobuline (séquence en acides aminés) apermis de
montrer que l'hétérogénéité de séquence était concentrée dans trois zones de
la
région variable
(diagramme de Kabat), pour les chaînes lourde et légère.
Ce
sont les zones hypervariables ou
COR (complementarity determining region) :COR1, COR2 et COR3.
Ils sont situés aux positions (acides aminés) 31 à35, 50 à
64
et
95
à102
pour
la
chaÎne lourde,
et
25
à34,
55
à60
et
89
à
97
pour
la
chaÎne légère. Le reste
de
la
région variable constitue
la
charpente (framework).
Les 6COR (trois sur chaque chaîne, lourde et légère) participent tous ensemble àla
reconnaissance de J'antigène, bien qu'ils soient éloignés les uns des autres. C'est la théorie du
site partagé. Ceci est lié au repliement de
la
protéine (structure tertiaire et quaternaire). En fait,
les COR sont localisés dans les boucles qui joignent les feuillets beta des domaines variables.
Ce site anticorps est appelé paratope.
La
spécificité de la liaison antigène-anticorps est déterminée par
la
nature des chaînes latérales
des acides aminés des
COR,
qui établissent des liaisons de Van der Waals, des liaisons
électrostatiques, des liaisons hydrogène ou des interactions hydrophobes avec l'antigène. Il
s'agit donc d'une complémentarité de structure et de charge électrique entre antigène
et
anticorps. L'interaction n'est donc pas covalente, et est toujours réversible. On peut mesurer son
affinité (Kd de 10-8à10-
11
Mpour des anticorps d'affinité suffisante).
L'épitope reconnu peut être conformationnel (c'est àdire l'anticorps ne le reconnaît plus lorsque
l'antigène est déplié), ou séquentiel (c'est àdire l'anticorps
le
reconnaît quelque soit sa forme
dans l'antigène).
La simple reconnaissance de l'antigène est insuffisante pour en neutraliser les effets, sauf pour
les anticorps dits bloquants ou neutralisants (par exemple en empêchant l'interaction d'un agent
pathogènes avec son récepteur cellulaire).
Certaines maladies auto-immunes sont associées àdes anticorps bloquants, d'autres sont
associées àdes anticorps stimulants (jouant le rôle de l'agoniste naturel d'un récepteur).
4-2- Fonctions de,la région constante:
La
région constante et plus particulièrement la région Fc possède des fonctions effectrices
qui permettent d'exercer une action sur l'antigène, ce qui est indispensable pour les anticorps non
bloquants.
4-2-1- Catabolisme:
La demi-vie des immunoglobulines varie selon l'isotype.
Les IgG ont une demi-vie plus longue (environ 3semaines) car elles peuvent se lier à
un
récepteur (RFc néonatal ou RFcn) cellulaire qui après internalisation les protège de
la
protéolyse
dans les lysosomes et permet leur relargage dans le milieu extracellulaire.
4
Dans les cellules endothéliales
ce
relargage s'effectue vers le sang. Dans les cellules
épithéliales muqueuses il s'effectue vers
la
lumière
ce
qui fait que l'on retrouve des IgG dans
les sécrétions.
Les IgE tissulaires ont une demi-vie longue üusqu'à quelques mois, contre quelques jours dans
le plasma), car
ell.es
sont liées àdes récepteurs cellulaires (RFcE1) à
la
surface des mastocytes.
4-2-2- Transfert placentaire:
Seules les IgG peuvent traverser le placenta. Ce transfert est actif et utilise le récepteur RFcn
situé sur le trophoblaste.
Ce transfert est faible jusqu'au rmois de grossesse et maximal en fin de grossesse. Le sang
du cordon contient alors des concentrations d'lgG identiques àcelles du sang maternel.
4-2-3- Transport transépithélial :
Ce transport utilise
le
récepteur polylgR, qui se lie aux immunoglobulines possédant une chaîne
J(lgM, IgA oligomériques).
Il
est présent sur les cellules épithéliales des muqueuses et des
canaux excréteurs des glandes exocrines. "permet le transport intracellulaire du pôle basal vers
le pôle apical (transcytose) des immunoglobulines.
4-2-4- Activation du Complément:
Les IgM, IgG1, IgG3 et les IgG2 (du plus au moins efficace) activent
la
voie classique du
Complément. Ceci est à
la
liaison du facteur du Complément C1q sur leur domaine CH2.
4-2-5- Liaison aux membranes cellulaires:
Mise àpart l'action cytotoxique directe consécutive àl'activation du Complément, les autres
fonctions des immunoglobulines nécessitent l'interaction de
la
région Fc avec une membrane
cellulaire: cytotoxicité cellulaire dépendante des anticorps pour les cellules NK, phagocytose
pour les polynucléaires et les macrophages. Cette propriété de faciliter ces actions est appelée
opsonisation.
La liaison aux membranes met en jeu des récepteurs RFc.
Ces récepteurs sont soit de haute affinité
et
se lient alors aux immunoglobulines
monomén"ques, ou
de
basse affinité et se lient alors àdes immunoglobulines agrégées ou
complexées àdes antigènes multivalents. Pour les récepteurs de haute affinité, c'est
l'agrégation des immunoglobulines et des récepteurs auxquelles elles sont liées, au moment de
l'interaction avec l'antigène, qui déclenche l'activation cellulaire.
Les différents récepteurs:
~
Récepteurs pour les IgG :RFcyl (ou CD64) de haute affinité:
RFcyli (ou CD32) et
RFcyl1i
(ou CD16) de basse affinité
Ils sont exprimés sur les polynucléaires neutrophiles et éosinophiles, monocytes et
macrophages notamment
~
Récepteurs pour les
IgE:
RFcel de haute affinité présent sur les basophiles et les
mastocytes
RFcEIi (ou CD23) de basse affinité présent sur les éosinophiles,
monocytes et macrophages notamment
~
Récepteûr pour les 19A: RFca (ou CD89) présent sur les neutrophiles, éosinophiles,
monocytes et macrophages notamment
,
4-2-6- particularités des différentes classes d'immunoglobulines:
4-2-6-1- IgM :
II>
les IgM sont des anticorps de faible affinité pour l'antigène, mais ceci est compensé par la
polymérisation, qui leur confère une forte avidité.
Ce sont des anticorps fortement agglutinants et précipitants, surtout
si
l'antigène présente des
épitopes répétitifs.
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