Séminaire Thématique SE 2007 « Fonctions Zêta et Corps quadratiques », PRESENTATION 3 : Caractères de Dirichlet par Christine Sèbe 29 mars 2007 0.1 Motivation Dans la suite de l’ouvrage, Don Zagier introduira des fonctionsPplus spécifiques, les L∞ χ(n) séries de Dirichlet. Il s’agit de fonctions de la forme L(s, χ) = n=1 ns , où χ est un caractère de Dirichlet, s une variable complexe avec une partie réelle plus grande que 1. Dans cette optique, il est au préalable nécessaire de se pencher sur la notion de ‘caractère’. 1 Caractère sur un groupe fini 1.1 Définition Un caractère sur un groupe fini G est un homomorphisme1 χ : G → C∗ ; i.e. χ(g1 g2 ) = χ(g1 )χ(g2 ), ∀g1 , g2 ∈ G. De plus, on peut définir le produit et l’inverse de cet homomorphisme : – χχ0 (g) = χ(g)χ0 (g), où χ, χ0 sont des caractères sur G ; – χ−1 (g) = χ(g)−1 . Donc l’homorphisme ‘caractère sur G’ construit un groupe, qu’on note Ĝ. 1.2 Théorème Si G est un groupe fini commutatif, alors Ĝ ∼ = G; et |Ĝ| = |G|. Preuve (idée) : Grâce au thm fondamental concernant la structure des groupes commutatifs de type fini, G ∼ = G1 ⊗...⊗Gk , où Gi est un groupe cyclique ayant comme générateur (gi ) d’ordre ni . Par conséquent, r tout élément de g peut s’écrire sous la forme unique g = g1r1 ...gkk , avec r1 , ..., rk ∈ Z. Ainsi en connaissant ∼ G1 ⊗ ... ⊗ Gk ∼ χ(gi ), on connait χ(g) ∀g ∈ G. On a donc Ĝ = = G. Remarque : ∀ caractère χ |χ(g)| = 1 ; i.e. χ est une racine de l’unité. C ∗ est à considérer en tant que le groupe des nombres complexes différents de 0, avec la multiplication comme opération de groupe. 1 2 2 caractères de Dirichlet Caractère de Dirichlet modulo N 2.1 Définition Un caractère de Dirichlet modulo N, pour N ∈ N, est un caractère défini sur le groupe des unités de (Z/N Z), à savoir sur (Z/N Z)× = { n (modN ) t.q. (n, N ) = 1}. D’autre part, on peut définir un caractère de Dirichlet modulo N comme étant une fonction χ : Z → C, χ( n (modN )) si (n, N ) = 1 χ(n) := 0 si (n, N ) > 1. qui possède les propriétés suivantes : – χ(n) = 0 ⇔ (n, N ) > 1, i.e. χ(n) = 0 ∀n possédant un diviseur en commun avec N ; – χ est complètement multiplicatif, i.e. χ(1) = 1 et χ(mn) = χ(m)χ(n), ∀m, n ∈ Z ; – χ(n) dépend uniquement de n (modN ) . Remarque : 1. Il existe donc deux manières de définir un caractère modulo N ; à savoir : – soit grâce à l’homomorphisme χ : (Z/N Z)× → C∗ , – soit grâce à la fonction multiplicative χ : Z → C. 2. La fonction d’Euler de N φ(N ) On dénote par φ(N ) le nombre d’entiers positifs plus petit ou égal à N et premier avec N , i.e. l’application φ : N → N est définie par φ(N ) := # n t.q. 0 < n ≤ N et (n, N ) = 1 , φ(1) = 1. Or si un nombre n est sans diviseur commun avec N , il en est de même pour tout nombre x congru à n modulo N . On peut donc aussi écrire φ(N ) = # n (modN ) t.q. (n, N ) = 1 = Card((Z/N Z)× ) Par conséquent, le caractère χ modulo N est une φ(N )-ième racine de l’unité. Par ailleurs, un théorème nous donne également l’égalité : Q φ(N ) = N · p|N 1 − p1 , où p désigne les premiers qui divisent l’entier N . 2.2 Exemples de Caractères modulo N 1. Pour tout N , on appelle caractère principal χ0 (modN ), la fonction multiplicative χ0 : Z → C, définie par 1 si (n, N ) = 1 χ0 (n) := 0 si (n, N ) > 1. On la désigne parfois par caractère neutre ou trivial de (Z/N Z)× ; en effet, en utilisant la définition usant de l’homomorphisme, le caractère χ0 : (Z/N Z)× → C∗ est défini par a 7→ 1. 2. Détermination des caractères modulo N pour N = 2, 3, 4, 6. (se conférer à la présentation orale) 2. Caractère de Dirichlet modulo N 3 3. Pour tout p ∈ P, on appelle ‘symbôle de Legendre’ le caractère modulo p de Z → C, n 7→ {−1, 0, 1} défini par si p|n 0 n 1 si p - n, mais ∃ un entier k t.q. n = k 2 (modp) := p −1 sinon. Consécutivement à ces exemples, voici deux théorèmes et leurs corollaires concernant les caractères de Dirichlet modulo N , mettant en évidence la place particulière qu’occupe la fonction d’Euler de N , à savoir : 2.3 Théorème Soit χ un caractère de Dirichlet modulo N . Alors X φ(N ) si χ = χ0 χ(n) = 0 sinon. n(modN ) Preuve du théorème 2.3 (idée) : er 1 cas : χ = χ0 , trivial. 2eme cas : χ 6= χ0 . On choisit un entier m, sans diviseurs avec n et avec χ(m) 6= 1. Srlg, on obtient qu’un P entier, 6= 0, dépendant de notre m, multiplié avec n(modN ) χ(n) = 0. 2.4 Corollaire Soit χ1 et χ2 deux charactères de Dirichlet modulo N. Alors X 1 1 si χ1 = χ2 χ1 (n)χ2 (n) = 0 sinon. φ(N ) n(modN ) Preuve du corollaire 2.4 (idée) : Remplacer simplement, dans le théorème 2.3, χ par χ1 χ2 et utiliser le fait que χ0 est l’élément neutre de Ĝ. 2.5 Théorème Soit n ∈ N . Alors X χ χ(n) = φ(N ) si n ≡ 1 (modN ) 0 sinon. 2.6 Corollaire Soit a, b ∈ Z, (b, N ) = 1. Alors 1 X χ(a)χ(b) = φ(N ) χ 1 si a ≡ b (modN ) 0 sinon. Preuve du théorème 2.5 et du corollaire 2.6 (idée) : Par la propriété d’orthogonalité, cette preuve est contruite de la même manière que celle du théorème précédent, elle diffère uniquement du fait qu’ici n est fixe, on détermine donc les caractères χ en n en vue d’avoir ce mutliple non nul comme précédemment. Quant au corollaire, il suffit également d’effectuer un remplacement dans le théorème, à savoir, remplacer n ∼ a(modN ). par nb = 4 3 caractères de Dirichlet Caractère induit et Caractère primitif et χ0 un caractère modulo N . Soit N un diviseur de M, N 6= M , Considérons le diagramme (Z/kN Z)× χ z }| { (Z/M Z)× π - C∗ χ0 ? (Z/N Z)× 3.1 Définition χ = χ0 ◦ π est un caractère de Dirichlet modulo N . On dit que χ est induit par χ0 , et on qualifie un tel caractère de ‘caractère non-primitif ’. 3.2 Définition Un caractère qui ne peut s’obtenir de cette manière est qualifié de ‘caractère primitif ’ ou ‘propre’. 3.3 Définition Le nombre N ayant la propriété que le caractère découlant du groupe (Z/M Z)× soit induit par le caractère primitif χ0 modulo N , s’appelle le conducteur de ce dernier. 4 Caractère de Dirichlet primitif réel Par la suite, Don Zagier se restreind aux caractères réels χ : (Z/N Z)× → R∗ . Or un caractère étant une racine de l’unité pour toute classe de départ, on peut préciser la restriction, à savoir χ : (Z/N Z)× → {−1, 1}. Consécutivement à cette restriction, il existe un théorème permettant d’obtenir tous ces caractères réels. Mais au préalable, il convient de définir les notions utilisées : 4.1 Définition Un nombre cardinal ou discriminant fondamental est un nombre entier D avec : – soit D ≡ 1(mod4), et D est un entier sans facteur carré ; D – soit D ≡ 0(mod4), et D 4 est un entier sans facteur carré, et 4 ≡ 2 ou 3 (mod4). 4.2 Définition Pour un discriminant fondamental D, on définit une fonction χD : N → Z par D (p) si D 0 1 si D χD (n) := −1 si D χ (pn1 )...χ D 1 si n = p, un premier impair ≡ 0 (mod4) ≡ 1 (mod8) ≡ 5 (mod8) nk D (pk ) si n = 2 si n = pn1 1 ...pnk k , un composé RÉFÉRENCES 5 4.3 Théorème Chaque caractère de Dirichlet primitif réel est une fonction χD : N → Z comme définie ci-dessus. En particuliers, la fonction – est périodique modulo |D|, – a la propriété : 1 si D > 0 χD (−1) = −1 si D < 0. C’est cette dernière clause du théorème qui nous procure la propriété escomptée, à savoir qu’on possède un moyen d’obtenir toutes les fonctions caractères de Dirichlet primitives réelles. r r Preuve (idée) : On considère l’isomorphisme (Z/N Z)× ∼ = (Z/p11 Z)× × ... × (Z/pkk Z)× . Ainsi χ = χ1 · ... · χk , où χi sont des caractères induits modulo pri i avec pi des premiers tous différents. Par conséquent χ est primitif ssi chaque χi est prmitif. Il convient alors de distinguer les cas, à savoir lorsque p = 2, dans quel cas il faut considérer tour à tour r = 1, r = 2, r = 3, r > 3, et lorsque p = nombre premier impaire. On trouve ainsi tous les caractères primitifs réels possibles induits par pri i , à savoir ( np ), 4 , 08 , 008 . Ainsi relativement à notre isomorphisme initial, pour que χ soit primitif réel, il suffit qu’il soit le produit de tels caractères. Suit à quoi, en réécrivant tous ces caractères primitifs réels sous une forme similaire au symbôle de Legendre, il s’avère que leurs indices correspondent aux discriminants fondamentaux et que le produit de ces derniers redonne un discriminant fondamental. La détermination univoque entre discriminant fondamental et caractère primitif réel étant prouvé, il ne reste qu’à montrer la propriété du théorème, et l’on procède à nouveau cas par cas. Références [1] Zagier, D.B., Zetafunktionen und quadratische Körper, Eine Einführung in die höhere Zahlentheorie, publié par les éditions Springer-Verlag, Berlin Heidelberg New York 1981, §5 pp. 33-41. [2] Leutbecher, Armin, Zahlentheorie, Eine Einführung in die Algebra, publié par les éditions Springer, Berlin Heidelberg 1996. [3] Davenport, Harold, Multiplicative number theory, publié par les éditions SpringerVerlag, Berlin Heidelberg New York 1967, §4-5 pp. 27-42.