VIH-1 - John Libbey Eurotext

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Virologie 2011, 15 (1) : 23-35
Rôle des anticorps neutralisants dans l’infection
par le virus de l’immunodéficience humaine de
type 1 (VIH-1)
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Martine Braibant
Antoine Chaillon
Francis Barin
Université François-Rabelais,
Inserm U966, CHRU de Tours,
10, boulevard Tonnellé,
37032 Tours, France
<[email protected]>
Résumé. La plupart des vaccins viraux induisent la production d’anticorps neutralisants contribuant à la protection vis-à-vis de l’infection ultérieure. Dans le cas
du VIH-1, aucun immunogène n’est capable de générer des anticorps capables
de neutraliser ses nombreux variants circulants. Néanmoins, les travaux de ces
dernières années ont grandement amélioré notre compréhension du rôle de ces
anticorps dans l’infection, des mécanismes développés par le virus pour y échapper ainsi que des modes d’action de certains rares anticorps de large spécificité.
Si ces derniers ne semblent pas jouer un rôle majeur dans le contrôle de la
progression de la maladie, on sait aujourd’hui qu’ils sont capables de conférer une immunité stérilisante dans des modèles animaux expérimentaux et cela
à des concentrations proches de celles qui sont retrouvées chez certains individus infectés. Les mieux caractérisés reconnaissent des épitopes conservés de
l’enveloppe virale, tels que le site de liaison au récepteur CD4, la région externe
de la gp41 proximale à la membrane virale (membrane-proximal external region
ou MPER), un épitope glycanes-dépendant, ou encore un épitope quaternaire sur
les trimères de glycoprotéines d’enveloppe. Toutefois, des épitopes ciblés par
des anticorps neutralisants de large spectre contenus dans de rares sérums restent
encore à identifier. Leur caractérisation est essentielle pour arriver à concevoir
des immunogènes présentant les épitopes majeurs de neutralisation.
doi:10.1684/vir.2011.0381
Mots clés : VIH, neutralisation, anticorps, vaccin, épitope
Abstract. Most viral vaccines induce the production of neutralizing antibodies
that prevent infection. In the case of HIV-1, no immunogen is able to generate antibodies that neutralize the highly diverse variants. Nevertheless, studies conducted
these recent years greatly improved our understanding of the role of these antibodies during natural infection, the mechanisms developed by the virus to escape
neutralization, and the modes of action of some rare antibodies with broad specificity. If neutralizing anibodies do not seem to play a major role in controlling the
disease progression, we now know that several broadly neutralizing antibodies
are able to confer sterilizing immunity in experimental animal models, even at
concentrations close to those found in some infected individuals. The best characterized antibodies recognize conserved envelope epitopes, such as the CD4
receptor binding site, the membrane-proximal external region (MPER) of gp41,
a glycan-dependent epitope, and a quaternary epitope of the trimeric envelope
glycoprotein spikes. However, other epitopes targeted by broadly neutralizing
antibodies remain to be identified. Their characterization is a major step towards
the development of immunogens presenting major neutralization epitopes.
Key words: HIV, neutralization, antibody, vaccine, epitope
Tirés à part : M. Braibant
Virologie, Vol 15, n◦ 1, janvier-février 2011
23
Pour citer cet article : Braibant M, Chaillon A, Barin F. Rôle des anticorps neutralisants dans l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1). Virologie 2011; 15(1) : 23-35
doi:10.1684/vir.2011.0381
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Introduction
Malgré les progrès constants des traitements contre le virus
de l’immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1), le
développement d’un vaccin efficace dans la prévention de
l’infection et/ou le contrôle de la progression de la maladie
reste aujourd’hui un objectif majeur. Grâce aux nombreux
travaux visant à établir des corrélats de protection vis-à-vis
de l’infection par le VIH-1, confortés par l’expérience des
stratégies vaccinales utilisées dans d’autres maladies virales
comme la grippe ou la poliomyélite, il est actuellement
admis que la réponse humorale, par le biais des anticorps
neutralisants, constitue un élément central dans le développement d’un vaccin préventif. L’association de cette
réponse humorale à une réponse cellulaire T cytotoxique
détruisant toute cellule infectée par des virus qui auraient
échappé aux anticorps neutralisants devrait théoriquement
permettre d’obtenir une réelle immunité stérilisante visà-vis de l’infection par le VIH-1. Malheureusement, les
échecs relatifs des essais cliniques vaccinaux réalisés chez
l’homme ces dernières années rappellent la complexité de
cet objectif dans le cas de ce pathogène très particulier
qu’est le VIH [1-4].
Le VIH, un virus particulier ?
Face aux agents pathogènes bactériens ou viraux, le système
immunitaire développe une réponse immunitaire adaptative
impliquant, d’une part, des anticorps neutralisants capables
d’inhiber l’infectiosité des particules virales et, d’autre part,
des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques qui reconnaissent et
détruisent les cellules cibles infectées. La coordination de
ces réponses est médiée par les lymphocytes T CD4+ auxiliaires. Dans le cadre d’une infection par le VIH, la réponse
immunitaire est inefficace et ne permet pas d’éliminer le
virus. En effet, aucun cas de guérison spontanée d’une
personne séropositive n’a été décrit à ce jour. Différentes
propriétés propres au VIH-1 permettent d’expliquer le
manque d’efficacité de la réponse immunitaire et les difficultés de conception d’immunogènes efficaces.
Parmi celles-ci il y a tout d’abord l’extraordinaire diversité du VIH-1. De par son énorme capacité réplicative
(1010 virions produits par jour au sein d’un individu), sa
propension à se recombiner et le taux d’erreur élevé de la
transcriptase inverse (3,4 × 10−5 mutations par base et par
cycle), la capacité de mutation et d’adaptation du VIH-1
est particulièrement élevée. L’extraordinaire diversité génétique du VIH est illustrée tant par les nombreux sous-types
circulants à l’échelle de la planète que par la multiplicité des variants viraux constituant les « quasi espèces »
à l’échelle d’un individu. Le groupe M du VIH-1 est divisé
en neuf sous-types purs et 43 formes recombinantes circulantes. Au sein d’un même sous-type, la diversité du VIH-1
24
peut atteindre 20 % et, dans certaines régions d’Afrique où
plusieurs sous-types circulent, les virus circulants peuvent
présenter une diversité allant jusqu’à 38 % dans certaines
régions variables de leur glycoprotéine d’enveloppe. Chez
un seul individu, la diversité génétique du VIH-1 générée après six années d’infection serait supérieure à celle
des virus de la grippe A sur la planète en une année [5].
Cette diversité du VIH-1 constitue un obstacle majeur au
développement d’immunogènes représentatifs de tous les
variants circulants. Elle lui permet en effet d’échapper aux
lymphocytes T CD8+ cytotoxiques ainsi qu’aux anticorps
neutralisants.
Un second obstacle rencontré est lié au fait que le VIH
infecte les cellules du système immunitaire, en particulier
les lymphocytes T CD4+ , cellules clés de la mise en place
des réponses immunes adaptatives. La chute rapide et précoce du nombre de lymphocytes T CD4+ , en particulier
dans les organes lymphoïdes associés au tractus digestif,
dans lesquels 60 % de la quantité totale des lymphocytes T
CD4+ sont présents, constitue un élément déterminant de
l’échec de la clairance virale [6, 7].
Enfin, la capacité du VIH-1 à établir, dès la primo-infection,
un réservoir latent de lymphocytes T CD4+ infectés constitue un obstacle majeur à l’élimination du virus. Dans ce
réservoir latent, le virus dont le génome est intégré dans
celui de la cellule hôte n’est pas reconnu par le système
immunitaire et ne peut pas être éliminé par les traitements
dont on dispose actuellement [8-10].
Cela signifie que, pour être optimale, une stratégie vaccinale
préventive nécessiterait le développement d’une réponse
immunitaire humorale large reconnaissant des virus très
divers et agissant très rapidement afin d’éviter tout archivage génomique [11, 12].
Les anticorps neutralisants : définition et
méthodes d’étude
Les anticorps neutralisants sont classiquement définis par
un rôle fonctionnel d’inhibition de l’infection des cellules
cibles déterminé in vitro. Ces anticorps agissent aux stades
précoces de l’infection en empêchant la fixation du virus
à la surface cellulaire et/ou sa libération dans le cytoplasme cellulaire [13]. Comme rappelé dans une revue
antérieure, il est considéré que, dans les modèles viraux
où une protection par vaccination est obtenue, les anticorps protecteurs in vivo sont neutralisants in vitro [14]. Les
tests de détermination de l’activité neutralisante de sérums
de patients ou d’anticorps monoclonaux utilisent désormais comme cellules cibles, soit des cellules mononuclées
du sang périphérique (PBMCS), soit des lignées cellulaires adhérentes modifiées pour exprimer les récepteurs
et co-récepteurs du VIH. Bien qu’il soit toujours nécessaire d’améliorer la robustesse des tests pour des études
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comparatives, les lignées génétiquement modifiées sont
maintenant communément acceptées du fait de résultats
généralement concordants [15, 16]. L’une des lignées
les plus utilisées est la lignée TZM-bl qui héberge des
gènes rapporteurs, ␤-galactosidase et luciférase, sous la
dépendance du LTR du VIH-1, facilitant ainsi énormément la quantification de l’infection environ 48 h
post-inoculation [17, 18]. Les virus sont soit des isolats
primaires soit des virus pseudotypés porteurs des glycoprotéines d’enveloppe d’intérêt obtenus par co-transfection
d’un vecteur d’expression porteur du gène env d’intérêt et
d’un vecteur contenant l’ensemble du génome du VIH-1
mais défectif au niveau du gène d’enveloppe (figure 1).
Il sera question dans cette revue uniquement des anticorps neutralisants sériques détectés et quantifiés selon
ces définitions et ces approches « classiques », et non
des anticorps bloquant d’autres propriétés fonctionnelles
telles que l’inhibition de la transcytose, ou de la cytotoxicité à médiation cellulaire dépendant des anticorps
(antibody-dependant cell-mediated cytotoxicity ou ADCC)
qui pourraient également jouer un rôle majeur dans la protection [19].
La réponse neutralisante anti-VIH-1 au
cours de l’infection naturelle
Neutralisation autologue
La réponse immunitaire humorale de l’hôte vis-à-vis du
VIH-1 se traduit par le développement dès les phases
précoces de l’infection d’anticorps dirigés contre de multiples épitopes viraux majoritairement localisés sur les
glycoprotéines d’enveloppe. Cette réponse est principalement dirigée contre la « face non neutralisante » de la
gp120 masquée à l’intérieur de la forme native trimérique
gp120-gp41 de la glycoprotéine d’enveloppe (figure 2).
Cette face n’est donc pas accessible aux anticorps qui n’ont,
par conséquent, aucun pouvoir de neutralisation. La réponse
anticorps intense contre cette face « non neutralisante » est
liée au fait que cette face est fréquemment et rapidement
exposée au système immunitaire du fait de la probable faible
stabilité des trimères à la surface des virions ou des cellules infectées productrices et donc au relargage important
de monomères de gp120. À l’opposé, la majorité des anticorps neutralisants, définis comme étant capables d’inhiber
in vitro l’infectiosité virale, reconnaissent la face exposée
du trimère appelée « face de neutralisation » qui contient
notamment les sites de liaison au récepteur CD4 et aux
co-récepteurs. Le développement chez un individu infecté
d’anticorps neutralisants dirigés contre les variants de la
quasi espèce virale présente chez cet individu définit la
réponse neutralisante autologue.
Décrite dès 1986 par Weiss et al. [20], la réponse neutralisante autologue a fait l’objet de plusieurs études visant à
déterminer sa cinétique d’apparition, ses épitopes cibles sur
la glycoprotéine d’enveloppe et les mécanismes développés
par le virus pour y échapper. Les travaux de Richman et al.
ont montré que la réponse neutralisante autologue apparait très rapidement, dès les premières semaines suivant
la primo-infection, chez la plupart des individus infectés
par des virus de sous-type B [21]. Cette apparition précoce d’anticorps neutralisants autologues a été confirmée
chez des sujets infectés par des virus de sous-type C [22].
Néanmoins, la compréhension de l’impact de cette réponse
neutralisante autologue sur le contrôle de la réplication
Gène env
d’intérêt obtenu
par PCR ou RTPCR
Virus pseudotypés
porteurs des protéines
d’enveloppe d’intérêt
Incubation des virus
pseudotypés en présence
d’anticorps monoclonaux
ou sérums
Production de
virus pseudotypés
Vecteur
d’expression
(co-transfection)
Plasmide contenant
un génome du VIH
délété ou défectif au
niveau du gène env
Infection de cellules indicatrices
permissives contenant un gène
rapporteur sous contrôle du LTR
du VIH-1
Figure 1. Schéma représentant le principe des tests de neutralisation utilisant des virus pseudotypés.
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A
B
C
Face
non-neutralisante
Boucles
variables
V1-V2
V3
D
Face silencieuse
Face neutralisante
Figure 2. Organisation des glycoprotéines d’enveloppe du VIH-1. (A) Cliché de microscopie électronique montant les spicules d’enveloppe
à la surface d’un virion. (B) Représentation schématique d’un trimère de glycoprotéines d’enveloppe. Vert pâle : gp41 ; bleu: face dite « silencieuse » de la gp120 ; jaune : face dite « neutralisante » de la gp120 ; rose : boucles variables V1-V2 et V3 ; vert foncé : chaînes glycaniques.
(C) Représentation schématique des différentes régions antigéniques d’un monomère de gp120. Gris: face dite « non neutralisante ». Autres
couleurs: idem que B. (D) Représentation schématique des différentes régions antigéniques de la gp120 associée en trimères. Schémas
inspirés de Kwong et al. [42].
virale reste incomplète. En raison de la sélection permanente de variants résistants à la neutralisation, les anticorps
neutralisants autologues sont incapables de neutraliser les
variants majoritaires contemporains [21, 23] (figure 3).
La réponse neutralisante autologue apparaît donc inefficace pour contrôler la réplication virale. Il a néanmoins
été montré que les sujets non progresseurs à long terme
possédaient des anticorps neutralisants plus puissants et
de plus large spécificité que les sujets progresseurs, ce
qui suggérait que ces anticorps pourraient contribuer au
contrôle de l’infection chez ces individus [24-26]. Deux
études récentes montrent cependant très clairement que le
développement d’anticorps neutralisants puissants résulte
d’une forte stimulation antigénique en début d’infection,
mais n’influence pas la progression de la maladie [27, 28].
La présence de tels anticorps chez les sujets non progresseurs serait donc plutôt le reflet de la conservation d’une
bonne fonctionnalité du système immunitaire associée à
une stimulation antigénique importante qu’une des causes
de la non-évolution clinique de ces patients. L’absence ou
le faible taux d’anticorps neutralisants chez les rares sujets
26
non progresseurs avirémiques qualifiés de « controlleurs
élites » renforce cette hypothèse [29].
Bien qu’apparaissant peu efficace dans le contrôle de
l’infection, la réponse neutralisante autologue semble
cependant exercer une pression de sélection dirigeant
l’évolution du virus [21, 30]. Plusieurs travaux ont montré
l’apparition précoce de variants d’échappement présentant une extension de la taille des régions variables de
la gp120, ainsi qu’une augmentation et/ou une redistribution des sites potentiels de N-glycosylation [23, 31, 32].
Cette observation a fait naître l’hypothèse d’un bouclier glycanique dynamique à la surface de la gp120
qui empècherait par encombrement stérique l’accès aux
anticorps neutralisants. La longueur et la glycosylation des régions variables V1V2 en particulier semblent
jouer un rôle déterminant dans l’échappement à la
réponse neutralisante autologue, probablement par un
mécanisme de camouflage d’épitopes neutralisants relativement conservés de l’enveloppe virale [22, 31-35].
Enfin, outre le bouclier glycanique, des substitutions ponctuelles d’acides aminés sont également responsables de la
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4000
T0
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Temps (Mois)
Figure 3. Évolution de la réponse neutralisante au cours des premiers mois suivant la primo-infection et échappement du virus aux anticorps
neutralisants autologues. Illustration d’un cas décrit dans [21]. Le code couleur correspond aux différents prélèvements séquentiels (T0,
. . ., T18). La partie haute du schéma illustre l’augmentation progressive du titre des anticorps neutralisants autologues vis-à-vis de la
population virale présente aux différents temps. La partie basse est une représentation schématique de l’apparition progressive des
anticorps neutralisants vis-à-vis des différents variants générés au cours du temps. Cette simplification graphique montre que la réponse
neutralisante est efficace vis-à-vis des variants de la quasi-espèce antérieurement présents, mais en général inexistante vis-à-vis du variant
émergent contemporain.
diversification de l’enveloppe et de l’échappement aux anticorps neutralisants [30].
Malgré cette extraordinaire capacité d’échappement, différents travaux suggèrent que l’évolution de l’enveloppe
virale sous pression de sélection n’est certainement pas
sans conséquence fonctionnelle pour le virus. En étudiant
les caractéristiques des enveloppes de virus présents chez
des couples hétérosexuels dont l’un des partenaires infecté
(« donneur ») venait de transmettre le virus (essentiellement
de sous-type C) à son conjoint (« receveur »), Derdeyn
et al. ont en effet montré que les variants retrouvés précocement chez le « receveur » étaient plus sensibles à la
neutralisation et leur enveloppe plus compacte (nombre
d’acides aminés plus faible) et moins glycosylée (nombre
de sites potentiels de N-glycosylation plus faible) que la
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plupart des variants retrouvés chez le partenaire « donneur » [36]. Cela peut signifier qu’il existe un avantage
réplicatif pour les virus dont l’enveloppe est plus faiblement glycosylée (meilleure fitness) et que l’acquisition d’un
phénotype résistant à la neutralisation se fait au détriment
de cette capacité réplicative. Des observations similaires
ont été rapportées dans d’autres études, lors de la transmission sexuelle de virus de sous-types A ou C [37-39].
Cette hypothèse est également confortée par quelques rares
travaux portant sur l’étude de la réponse neutralisante autologue en phase tardive d’infection [31, 40]. Les travaux de
Bunnik et al. ont montré que, dans un contexte de moindre
pression immune, au stade tardif de l’infection, il y a une
réversion des changements dans la longueur et le nombre
de sites potentiels de N-glycosylation de la glycoprotéine
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d’enveloppe [31]. Les travaux de Deeks et al. ont quant à eux
montré une intensification de la réponse autologue de l’hôte
contre les variants majoritaires contemporains au cours du
temps chez les patients chroniquement infectés confortant
l’hypothèse d’une limitation des capacités d’échappement
du VIH [40]. Cependant, la capacité réplicative de virus
isolés au cours de l’infection de sujets progresseurs dont
certains ont développé une forte réponse neutralisante a été
analysée récemment et aucune association entre échappement à la neutralisation et capacité réplicative in vitro n’a
pu être démontrée [41].
De nombreuses interrogations persistent quant aux régions
ciblées par les anticorps neutralisants autologues. En raison de la structure trimérique instable et de la faible densité
des spicules d’enveloppe du VIH-1, la plupart des cibles
de neutralisation potentielles ne sont pas exposées à la
surface du virion ou ne le sont que de façon transitoire.
C’est le cas notamment du site de fixation au CD4, des
épitopes exposés suite au changement conformationnel de
la gp120 après liaison au CD4 (épitopes CD4 induits) ou
encore de la région V3 très immunogène, mais masquée
semble-t-il à l’intérieur du trimère de nombreux isolats primaires [42, 43]. En dépit de ces facteurs limitants, la plupart
des sujets infectés développent précocement une intense
réponse neutralisante autologue, que ceux-ci soient infectés par des virus de sous-type B ou C [21, 22, 31]. Quelques
travaux récents visant à explorer les épitopes précocement
ciblés par ces anticorps montrent que le spectre étroit de
la réponse repose sur le caractère hautement variable des
régions ciblées. Les régions V1V2 ainsi que C3V4 seraient
les principales cibles de cette réponse étroite durant les
premières étapes de l’infection même si les mécanismes
d’échappement diffèrent selon l’individu [44, 45]. À noter
également que des différences d’immunogénicité semblent
exister entre les glycoprotéines d’enveloppe des sous-types
B et C. Les titres en anticorps neutralisants chez les sujets
infectés par des virus de sous-type C semblent plus élevés
que chez les sujets infectés par des virus de sous-type B.
Néanmoins, ces anticorps sont spécifiques de l’isolat et ne
présentent pas ou très peu de neutralisation croisée vis-à-vis
d’isolats hétérologues [22].
Réponse de large spectre
On sait actuellement que, si la majorité des individus infectés par le VIH-1 développent une réponse neutralisante
contre leur propre virus dans les quelques semaines suivant
la primo-infection, une large réponse capable de neutraliser
des isolats primaires hétérologues de différents sous-types
n’est observée que chez certains individus après plusieurs
années d’infection. C’est ce type de réponse qu’il serait
souhaitable d’induire par immunisation dans le cadre du
développement d’un vaccin préventif contre le VIH-1. Il
28
se trouve que c’est chez les sujets chroniquement infectés, virémiques, asymptomatiques et non traités, que l’on
retrouve le plus fréquemment des anticorps neutralisants
de large spectre [46-50]. On estime qu’approximativement
30 % des sujets asymptomatiques chroniquement infectés
développent des anticorps de spécificité large, avec néanmoins une certaine variabilité dans les titres observés. Dans
l’étude très récente de Simek et al. réalisée sur 1 798 sujets
asymptomatiques chroniquement infectés, une prévalence
en anticorps neutralisants de large spectre de 34 % est
observée, avec 1 % des sujets étudiés considérés comme
« neutralisateurs élites » car possédant des titres particulièrement élevés (titre IC50 ≥ 1:300) en anticorps neutralisant
des isolats primaires appartenant à au moins quatre soustypes différents [51]. Ces travaux montrent que le système
immunitaire est capable de générer des anticorps largement
neutralisants contre le VIH-1, même si on ne connaît pas
précisément le titre en anticorps neutralisants préexistants
qu’il faudrait atteindre pour protéger efficacement contre
une infection.
Plusieurs travaux montrent que l’étendue de la réponse
neutralisante est liée à la fois à la durée de l’infection et
à la charge virale plasmatique [49, 50, 52]. Ces données
suggèrent une maturation de la réponse immune au fur et
à mesure que la population virale se diversifie, sans que
l’on sache à l’heure actuelle, si cette maturation résulte
d’une focalisation de la réponse immune cellulaire de type
B contre un ou quelques épitopes hautement conservés
de l’enveloppe virale ou, de l’accumulation temporelle
d’anticorps neutralisants dirigés contre de nombreuses
régions distinctes de l’enveloppe. À noter que dans notre
expérience, la présence d’anticorps neutralisants de large
spectre chez des patients asymptomatiques à long terme
(ALT) est plus fréquemment détectée chez les patients ALT
ayant une évolution clinique ultérieure défavorable, confirmant le peu de rôle de ces anticorps dans le contrôle tardif
de l’infection [52].
Parmi les régions structurales de l’enveloppe virale, conservées au sein des différents isolats du VIH-1, on trouve les
régions fonctionnellement importantes pour l’attachement
et l’entrée du virus dans les cellules cibles.
L’une d’entre elles est le site de liaison au récepteur CD4
présent à la surface des cellules cibles (cellules T, monocytes et macrophages). Cette région est très immunogène
chez les sujets infectés par le VIH-1 et de nombreux anticorps monoclonaux dirigés contre ce domaine ont été isolés
(figure 4). La plupart d’entre eux ne sont cependant pas
capables de neutraliser des isolats primaires du VIH-1 car
inaptes à se fixer sur la structure native trimérique de la
glycoprotéine d’enveloppe [42]. Jusqu’en 2009, après plus
de 20 ans de recherche sur le VIH-1, un seul anticorps
monoclonal humain largement neutralisant reconnaissant
spécifiquement le site de liaison au CD4 avait été mis en
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PG9, PG16
(boucles variables martinebraibant V1/V2 et V3)
b12, VRC01, HJ16
(CD4bs)
2G12
(bouclier glycanique)
2F5, 4E10
(MPER)
Figure 4. Modélisation de la localisation des épitopes cibles des anticorps monoclonaux humains largement neutralisants sur un trimère
de glycoprotéines d’enveloppe. La structure des spicules est issue des données de cryomicroscopie électronique. Les boucles V1-V2 et V3
correspondent respectivement aux cercles jaunes et roses. Le site de liaison au CD4 (CD4bs) apparaît en vert. Les glycanes apparaissent
en périphérie en bleu et orange (en orange, les glycanes impliqués dans l’épitope reconnu par 2G12). D’après Walker et Burton [101],
reproduite avec l’aimable autorisation de D. Burton et Elsevier.
évidence [53]. Il s’agit de l’anticorps monoclonal b12 qui
empêche la fixation de la gp120 sur le CD4. La structure
tridimensionnelle de l’anticorps b12 a révélé que cet anticorps possède une région CDRH3 inhabituellement longue
en forme de doigt (finger-like) qui lui permet d’obstruer le
« cœur » du site de liaison au CD4 [54]. Très récemment de
nouveaux anticorps monoclonaux humains largement neutralisants dirigés contre le site de liaison au CD4 viennent
d’être isolés. Il s’agit de l’anticorps HJ16 et des anticorps
VRC01, VRC02 et VRC03 [55-57]. L’anticorps VRC01
semble notamment capable de neutraliser environ 90 % des
isolats testés, représentatifs des sous-types prédominants
[56]. Ces dernières années, différentes méthodologies ont
été développées de façon à explorer les spécificités des anticorps neutralisants contenus dans des sérums d’individus
infectés, sélectionnés pour leur forte et large activité neutralisante. Il s’agit de techniques d’inhibition de l’activité
neutralisante des sérums par absorption sélective à l’aide
soit de glycoprotéines mutées au niveau de certaines régions
d’intérêt, soit de glycoprotéines chimères présentant des
épitopes spécifiques. Ces travaux montrent que, dans de
rares cas, l’activité neutralisante de large de spectre des
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sérums est presque exclusivement due à des anticorps spécifiques du site de liaison au CD4, soulignant l’importance
potentielle de ce site comme région à cibler dans la perspective d’un vaccin inducteur d’anticorps neutralisants [48].
Dans la majorité des cas cependant, les anticorps dirigés
contre le site de liaison au CD4 ne contribuent qu’en partie, voire pas du tout au pouvoir largement neutralisant des
sérums [47, 58, 59]. Nous avons également montré que les
anticorps ciblant le site de liaison au CD4 de la gp120 sont
présents dans la quasi totalité des sérums de patients infectés par le VIH, à des titres élevés, sans que cela soit associé
à une activité neutralisante de large spectre [46].
Des anticorps dirigés contre le site de liaison au corécepteur de la gp120 (récepteur de chimiokines CCR5
ou CXCR4) semblent également contribuer à l’activité
neutralisante large de certains sérums [47]. Bien que très
immunogène chez les sujets infectés par le VIH-1, le site
de liaison au co-récepteur n’est cependant exposé que de
façon transitoire au système immunitaire de l’hôte, lors de la
fusion des membranes virales et cellulaires, après la liaison
de la gp120 au CD4, ce qui limite fortement son accessibilité [22, 60]. En effet, parmi les anticorps monoclonaux
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revue
dirigés contre le site de liaison au co-récepteur, isolés à ce
jour, la plupart d’entre eux ne sont pas capables de neutraliser efficacement différents isolats primaires du VIH-1.
Néanmoins, un anticorps monoclonal largement neutralisant, l’anticorps HGN194, reconnaissant un épitope linéaire
conservé au sein de la région variable V3 situé au sein du
domaine d’interaction avec CCR5 ou CXCR4 vient d’être
isolé [57].
Une troisième région de l’enveloppe virale, très conservée
au sein des différents isolats du VIH-1, est la région externe
de la gp41 proche de la membrane virale (membraneproximal external region ou MPER, figure 4). Cette région
d’environ 35 acides aminés joue un rôle critique dans le
processus de fusion des membranes virale et cellulaire, et
constitue la cible de deux anticorps monoclonaux largement neutralisants bien caractérisés. Il s’agit des anticorps
2F5 et 4E10 qui reconnaissent des épitopes linéaires adjacents situés dans la partie distale de la région heptamérique
en hélice 2 (HR-2) de cette région [61]. L’attachement de
ces anticorps sur leur épitope est de plus grande affinité
lorsque ces épitopes sont associés à la membrane plasmique
[62]. Ces anticorps se caractérisent par une longue région
CDRH3 hydrophobe qui leur assure une grande flexibilité et une probable réactivité avec la membrane lipidique,
contribuant à leur pouvoir de neutralisation [63, 64]. Parmi
les sérums largement neutralisants récemment étudiés, de
très rares sérums possèdent des titres élevés en anticorps
neutralisants dirigés contre la région MPER de la gp41
[46, 47, 50, 59, 65]. Certains de ces anticorps neutralisants ont cependant une spécificité différente de celle des
anticorps 2F5 et 4E10, ce qui renforce le potentiel de la
région MPER comme région à cibler dans le cadre d’un
vaccin préventif inducteur d’anticorps neutralisants [59].
À noter que ces deux anticorps ont également une réactivité anti-cardiolipide in vitro [66], et que l’association
entre anticorps anti-cardiolipide et anticorps anti-MPER
a été confirmée in vivo au cours de l’infection naturelle
[67]. Très récemment, un anticorps monoclonal largement
neutralisant, l’anticorps HK20, ciblant la région HR-1 de
l’ectodomaine de la gp41 a également été isolé [57]. Tout
comme HR-2, cette région joue un rôle essentiel dans les
processus de fusion des membranes cellulaire et virale.
Tous ces travaux ont cependant montré que, si l’activité
neutralisante de certains sérums peut être liée à la présence
d’anticorps ciblant des régions conservées et fonctionnellement bien caractérisées de l’enveloppe virale, notamment
le site de liaison au CD4, une fraction importante
des anticorps neutralisants contenus dans de nombreux
sérums reconnaît d’autres épitopes de l’enveloppe virale
non encore identifiés. Leur identification pourrait apporter de nouvelles cibles importantes pour la conception
de vaccins inducteurs d’anticorps neutralisants contre le
VIH.
30
Il est possible que ces épitopes non identifiés soient formés par certains résidus carbohydrates couvrant la gp120.
Les carbohydrates de la gp120, essentiellement des Nglycanes, comptent pour environ 40 à 50 % de la masse
totale de cette protéine. Les glycanes dérivés de l’hôte sont
naturellement très peu immunogènes. Un anticorps monoclonal humain largement neutralisant, l’anticorps 2G12,
reconnaissant un épitope conformationnel impliquant des
N-glycanes relativement conservés (figure 4), a cependant pu être produit à partir d’un mélange de cellules
mononucléées du sang périphérique de sujets séropositifs
asymptomatiques [68]. La structure cristalline du fragment
Fab de 2G12 complexé à des glycanes hautement mannosylés montre que 2G12 possède une structure inhabituelle,
résultant d’un échange de domaine au niveau des domaines
variables des chaînes lourdes, qui lui permet une interaction de plus forte affinité qu’un anticorps classique [69].
Par des techniques d’Elisa compétitifs ou de capture de
virions, des anticorps de type 2G12 ont pu être mis en évidence dans certains sérums largement neutralisants [58], et
cela à des taux significativement plus élevés que dans des
sérums ne montrant pas d’activité neutralisante [46]. La
contribution directe de ce type d’anticorps dans l’activité
neutralisante large des sérums n’a cependant pas encore été
démontrée.
Il est possible également que ces épitopes de neutralisation ne soient présentés que dans le contexte de la structure
trimérique native de la glycoprotéine d’enveloppe. Très
récemment, deux anticorps monoclonaux largement neutralisants (neutralisation de plus de 70 % des 162 isolats
testés), PG9 et PG16, reconnaissant un épitope exprimé
exclusivement sur la glycoprotéine d’enveloppe trimérique,
ont été générés à partir de lymphocytes B d’un donneur
africain dont le sérum contenait des anticorps neutralisants
de large spectre [70]. Cet épitope est constitué essentiellement de résidus localisés dans les régions conservées des
boucles V2 et V3 de la gp120 (figure 4). La structure cristalline du fragment Fab de l’anticorps PG16 montre à nouveau
que cet anticorps possède une structure particulière avec
un long domaine CDRH3 sulfaté sur une tyrosine, jouant
un rôle dans la liaison et la neutralisation. Une structure
similaire est retrouvée pour l’anticorps PG9 par modélisation [71, 72]. Des travaux futurs détermineront si ce type
d’anticorps peut être induit dans le cadre d’un vaccin préventif.
La région variable V3 de la gp120 avait été initialement
considérée comme la cible majeure des anticorps neutralisants anti-VIH [14]. Il avait été ensuite rapidement montré
que les anticorps anti-V3 avaient une spécificité très étroite,
dite spécifique de souche. Malgré cela, la description de très
rares anticorps monoclonaux anti-V3 largement neutralisants, d’une part, et la conservation de certains éléments
structuraux de la région V3 impliquée dans la liaison au
Virologie, Vol 15, n◦ 1, janvier-février 2011
revue
co-récepteur, d’autre part, justifient un intérêt continu pour
cette région afin de tenter de générer des anticorps potentiellement protecteurs [73, 74].
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Implication pour le développement d’un
vaccin anti-VIH-1
Anticorps neutralisants et immunité stérilisante
De nombreuses études d’immunisation passive à l’aide
des anticorps monoclonaux largement neutralisants reconnaissant des régions conservées et fonctionnellement
importantes décrites ci-dessus ont été réalisées dans des
modèles animaux, tout particulièrement ceux utilisant
des virus chimères Simian-human immunodeficiency virus
(SHIV) chez le macaque. L’administration de ces anticorps,
individuellement ou mélangés, protège de l’infection lors
d’épreuves virulentes réalisées par voie intraveineuse ou par
voie vaginale, y compris vis-à-vis de virus SHIV contenant
une enveloppe d’isolat primaire R5 [75-78]. Si l’activité
largement neutralisante des anticorps utilisés est liée à la
spécificité des fragments Fab, le rôle des fonctions effectrices médiées par le fragment Fc dans la protection reste à
ce jour peu étudié. Il a néanmoins été démontré que lorsque
l’anticorps monoclonal b12 est dépourvu de sa capacité à
se lier aux récepteurs Fc–R, l’effet protecteur de cet anticorps est réduit, ce qui suggère que les fonctions effectrices
des anticorps neutralisants sont également contributives à
la protection in vivo [79].
La plupart des essais d’immunisation passive suggérait
que seule l’administration de concentrations très élevées d’anticorps monoclonaux neutralisants permettrait
d’observer une protection totale, de l’ordre par exemple de
25 mg/kg de b12, atteignant ainsi des concentrations plasmatiques de l’ordre de 75 fois celle requise pour inhiber
la réplication virale à 90 % (IC90 ) in vitro dans des cellules mononucléées du sang périphérique, et de 3 000 fois
celle nécessaire pour inhiber la réplication virale à 50 %
(IC50 ) dans des tests de neutralisation utilisant des virus
pseudotypés [78, 79]. Cependant, une étude récente montre
que cette évaluation a été surestimée du fait de la charge
virale élevée inoculée par voie intraveineuse aux macaques
lors de l’épreuve de virulence pour obtenir leur infection
en une seule administration, alors qu’il est bien établi que
lors de la transmission humaine par voie sexuelle, les taux
de transmission par acte sont faibles, nécessitant très vraisemblablement des expositions répétées à de plus faibles
quantités de virus [80]. Cette étude montre en effet que des
concentrations plasmatiques plus modérées de l’ordre de
seulement 5 IC90 (dans des tests avec PBMC) ou 200 IC50
(tests utilisant des virus pseudotypés), atteintes et maintenues par l’administration répétée de seulement 1 mg/kg
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de b12 par semaine, permettent de protéger les macaques
exposés de manière itérative à de plus faibles doses de
SHIV administrées par voie vaginale. Ces concentrations
en anticorps neutralisants sont proches, voire même en dessous de celles qui sont décrites dans les sérums largement
neutralisants de sujets infectés, suggérant que de tels titres
en anticorps neutralisants pourraient être obtenus avec des
immunogènes appropriés [47-50, 81]. Une étude similaire
du même groupe a également montré une protection avec
l’anticorps monoclonal 2G12 à concentration « physiologique » [82].
Par ailleurs, dans une étude complémentaire, Johnson
et al. ont récemment construit et exprimé in vivo chez des
macaques des immunoadhésines (molécules de type anticorps dans lesquelles les domaines fonctionnels de liaison
à l’antigène [VL et VH ] ou de liaison au CD4 [domaines
1 et 2] sont liés au fragment Fc [CH2 et CH3 ] d’une IgG)
dirigées contre la gp120 du virus de l’immunodéficience
simienne (VIS) [83]. Pour cela, ils ont utilisé un système de
transfert de gènes dérivé du virus adéno-associé qui, délivré
dans les cellules musculaires, permet l’expression directe
et continue du transgène, et ainsi la libération de l’immunoadhésine dans l’organisme pendant une période prolongée.
En utilisant cette approche, une activité neutralisante persistante (> un an) dans les sérums des macaques immunisés
est observée et protège de l’infection lors d’une épreuve
virulente réalisée par voie intraveineuse. Tous ces travaux
montrent donc que des anticorps neutralisants présents de
façon continue, même à des concentrations relativement
faibles, sont capables de conférer une immunité stérilisante
contre le VIH.
Anticorps neutralisants et thérapeutique
L’effet des anticorps neutralisants sur la charge virale lors
d’une infection VIH-1 établie a été étudié chez des sujets en
phase chronique ou aiguë d’infection par l’administration
d’un cocktail d’anticorps monoclonaux neutralisants après
interruption du traitement antiviral [84]. Ces anticorps n’ont
permis de contrôler l’infection chez aucun des 14 sujets
infectés. Seul un retard dans la réapparition du virus suite
à l’arrêt du traitement a été observé chez certains d’entre
eux, ce qui démontre l’activité partielle in vivo des anticorps
administrés. L’inefficacité dans le contrôle de la réplication virale est liée à l’émergence de mutants d’échappement
témoignant d’une pression de sélection exercée par les anticorps, notamment 2G12 [84, 85].
Ces travaux démontrent que si une immunité stérilisante est
possible lorsque des anticorps neutralisants sont présents à
des quantités suffisantes au moment de l’infection, ce n’est
pas le cas une fois que l’infection est établie, le virus s’étant
diversifié au préalable et échappant ainsi à ces anticorps
neutralisants.
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revue
De la caractérisation des épitopes de
neutralisation à la conception d’immunogènes
Le site de liaison au récepteur CD4 reconnu par l’anticorps
monoclonal largement neutralisant b12 est une région qui
a suscité beaucoup d’intérêt en tant que cible potentielle
d’anticorps neutralisants. Cela est d’autant plus justifié
aujourd’hui avec l’identification de l’anticorps remarquablement neutralisant VRC01 dirigé contre cette même
région. Plusieurs stratégies ont été utilisées pour tenter
d’induire des anticorps neutralisants contre cette région.
L’une d’entre elles est basée sur l’adjonction de N-glycanes
sur les régions immunodominantes non neutralisantes de la
g120, de manière à en réduire leur accessibilité et ainsi à
focaliser la réponse immune sur l’épitope lié au site de liaison au CD4 [86, 87]. Cette stratégie a permis de démontrer
une modification de la spécificité des anticorps induits sans
pour autant en augmenter leur pouvoir neutralisant. Une
autre stratégie a consisté à tenter de stabiliser la gp120 dans
la conformation prise par cette protéine lorsqu’elle est liée
au CD4, l’idée étant que l’incapacité d’induire des anticorps
neutralisants à l’aide de gp120 recombinantes pourrait être
liée à une trop grande flexibilité de cette glycoprotéine [88].
Cependant cette approche n’a permis d’augmenter que de
façon très modérée le pouvoir neutralisant des anticorps
induits et des améliorations dans la stabilisation de la gp120
sont encore à apporter.
Plusieurs travaux ont également été entrepris afin de diriger la réponse humorale vers le motif conservé composé
d’oligomannoses (Man9 GlcNAc2 ), reconnu par l’anticorps
2G12. Pour cela, différentes approches, allant de la synthèse
chimique de glycosides mimant l’épitope de 2G12 (mimotopes) [89, 90] à l’utilisation de levures modifiées exprimant
des glycanes hautement mannosylés [91], ont été utilisées.
Ces approches n’ont cependant pas permis d’obtenir des
anticorps de type 2G12 capables de neutraliser efficacement
des virions VIH-1.
De très nombreuses tentatives d’induction d’anticorps neutralisants à l’aide de la région MPER de la gp41, présentée
dans de nombreux contextes différents ont également été
rapportées ces dix dernières années sans véritable succès
[92-99]. Ces difficultés ont conduit à étudier la structure
cristalline des fragments Fab des anticorps largement neutralisants 2F5 et 4E10 complexés sur leur épitope [63, 64].
Ces travaux ont révélé la présence d’une longue région
CDRH3 hydrophobe qui est probablement impliquée dans
des interactions avec la membrane virale. On pense actuellement que le pouvoir de neutralisation de ces anticorps
est en partie lié à cette capacité à se fixer aux lipides de
la membrane plasmique et que de nouvelles approches
de présentation de la région MPER stabilisée dans un
contexte lipidique permettront peut-être d’induire des anticorps neutralisants anti-MPER. Les premières tentatives de
32
présentation de cette région dans un contexte proche de
celui du trimère natif (sous forme de virus-like particles
[VLP]) tout en limitant les régions immunodominantes de
la gp120 n’ont cependant pas donné les résultats attendus puisqu’aucun anticorps neutralisant n’a pu être obtenu
[100].
Conclusions et perspectives
Le développement d’un vaccin empêchant ou contrôlant
l’infection par le VIH reste un des plus grands défis de
la médecine. Bien que dans cette revue nous nous soyons
focalisés sur les anticorps neutralisants, il est très probable
qu’à la fois des réponses humorales et cellulaires seront
nécessaires. À l’heure actuelle il n’existe aucune preuve de
concept qu’un immunogène soit capable d’induire des anticorps neutralisants de spécificité suffisamment large pour
empêcher l’infection par les isolats très divers responsables
de la pandémie. Néanmoins, grâce aux nouvelles technologies développées récemment pour identifier des anticorps
largement neutralisants dans les sérums de sujets infectés, il est vraisemblable que de nouveaux épitopes ciblés
seront caractérisés. Améliorer notre compréhension de la
structure de ces anticorps complexés à leur épitope viral
est essentiel afin d’orienter vers la conception rationnelle
d’immunogènes présentant les épitopes majeurs de neutralisation. L’observation récente d’une protection conférée
chez le macaque à l’aide d’anticorps largement neutralisants à des concentrations proches de celles présentes chez
les individus infectés renforce l’espoir d’arriver à générer un
vaccin prophylactique inducteur d’anticorps neutralisants
protecteurs. Un des futurs défis sera de déterminer comment
diriger le système immunitaire vers les épitopes conservés
peu immunogènes ou peu accessibles tout en empêchant les
réponses vis-à-vis d’épitopes très immunogènes, mais non
protecteurs.
Remerciements. Nos travaux sur la neutralisation du VIH
bénéficient du soutien de l’ANRS et de Sidaction.
Conflits d’intérêts : aucun.
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