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… malgré les
difficultés
qu’elle
rencontre à
rééquilibrer son
économie au
profit de la
consommation
intérieure.
Le poids de ce
dernier sera en
2011 le même
qu’en 2010, soit
39% du PIB,
tandis que les
investissements
fixes se
multiplient à
vive allure.
Entre abondance
de liquidités,
hausse des taux
d’intérêt et
inflation
galopante, la
Chine reste
fragile.
L’Inde est dans
une même
situation de
trompe l’œil
dynamique :
entre croissance
et inflation, le
potentiel du pays
se gâte.
souffle. On sait depuis longtemps que « l’usine du monde » doit muer au profit de la
consommation intérieure, parce que trop de dépendance aux exportations est source de
fragilités : on l’a vu dans cette année noire qu’était 2009, on fait exactement la même
constatation depuis l’été 2011, où les indicateurs ne cessent de régresser mois après
mois. Parce que l’on sait aussi que les salaires augmentent désormais en Chine de
l’ordre de +15 à +20% par an. Il y a certes encore de belles marges de manœuvre,
quand on sait que le salaire ouvrier (charges comprises) n’est encore que de 1,50 dollar
par heure. Mais des pans entiers d’industries d’entrée de gamme ont déjà migré, soit
dans les pays limitrophes, soit dans cet autre pays qu’est la vaste Chine de l’intérieur,
ce qui revient presque au même pour les régions côtières dynamiques.
Le relai est-il pris par la consommation intérieure, comme chacun, à domicile ou à
l’étranger, l’appelle de ses vœux ? Les données récentes ne dénotent aucun
infléchissement sérieux. En 2011, le poids de la consommation intérieure sera
exactement le même qu’en 2010 : 39% du PIB, à peine plus qu’en 2009. Il n’y a
vraiment pas de quoi pavoiser. Pendant ce temps là, l’autre moteur de l’économie
chinoise continue à croître et à embellir : les investissements fixes, qui passent dans
ces mêmes trois ans de 66% à 70% puis à 75% du PIB en valeur. Qu’ils soient publics
ou privés, dans la construction (plus de la moitié du total estimé) ou ailleurs, ces
fameux investissements fixes recouvrent en vrac la dotation aux infrastructures (bravo
la Chine !), mais aussi l’immobilier de haute spéculation, les projets mirobolants des
collectivités locales ou l’accumulation de capacités de production en dépit de tout
calcul économique et sans aucun égard pour l’environnement ou l’énergie (la Chine
utilise six fois plus d’énergie par dollar de PIB que l’Europe, par exemple). Le
gouvernement le sait et l’a dit, mais il y a encore bien loin de la coupe aux lèvres,
malgré quelques projets phares complaisamment présentés aux médias.
Le gouvernement chinois a largement « sur-réagi » à la crise financière de 2008, en
injectant l’équivalent de 580 milliards de dollars sur deux ans dans l’économie (plan
de stimulation de novembre 2008, équivalent à 12% du PIB de l’époque !). Et comme
le cash n’était pas disponible ad libitum, les banques d’Etat ont été priées d’ouvrir le
robinet du crédit sans limites. On a aujourd’hui le plus grand mal à faire rentrer cette
masse invraisemblable de liquidités dans la boîte à ressorts. Il s’ensuit que les tours de
vis mensuels sur les taux d’intérêts, sur les ratios de réserves des banques etc… ne
fonctionnent pas, comme si le gouvernement n’était pas maître chez lui. Il avait fixé la
masse maximale de crédits à 500 milliards de Yuans au mois d’août : on en a
enregistré 548 ! L’inflation est revenue en force, très au-delà des chiffres (déjà élevés)
des taux officiels (+6,5% par mois cet été). Se loger ou acheter des légumes ou du porc
devient problématique. L’immobilisme des bureaucrates et la corruption vivace (sujets
tabous…) n’ont d’égales que les manifestations récurrentes du ras-le-bol des citoyens,
qui ont pris une nouvelle ampleur cette année, qu’il s’agisse de graves questions
d’environnement (à Dalian, dans le Zhejiang, dans le Guangdong) ou de transparence
lors de catastrophes (celle du TGV en juillet). On les connaît désormais beaucoup
mieux grâce à ce gruyère qu’est devenu l’Internet. Circulez, il n’y a rien à voir… sauf
que, pour faire passer son économie de la phase pionnière à la phase de maturité, les
vieilles recettes sont de moins en moins pertinentes, donc sources de fragilités
croissantes.
L’Inde est dans une même situation de trompe l’œil dynamique. Une classe
moyenne vivement émergente, une croissance robuste (+7,4% prévus en 2011) d’un
côté. Voilà pour ce rêve qu’est cette notion dévoyée de « potentiel ». Mais l’inflation,
bête noire de l’économie indienne, s’accélère depuis plus d’un an. C’est le neuvième
mois consécutif que l’indice des prix à la consommation, tiré par une pression sur les