Centre de Recherche : Poétiques et Histoire Littéraire (CRPHL) EA 3003
Section des LANGUES ANCIENNES
du département des LETTRES
Université de Pau & des Pays de l'Adour
COLLOQUE INTERNATIONAL
organisé les
jeudi 12, vendredi 13, samedi 14 mars 2009
Antiquité méditerranéenne : à la rencontre de « l’autre »
Perceptions et représentations de l’étranger dans les littératures antiques
« Un honnête homme, c’est un homme mêlé » : c’est sous la référence à Michel de
Montaigne
que se place le visiteur qui pénètre aujourd’hui dans le Musée du Quai Branly.
Mais ce propos aurait-il pu être tenu dans l’Antiquité ? Xénophon ne fait pas référence
à cette notion dans l’Economique pour définir l’homme kalos kagathos, et le statut de
métèque isotèle de Lysias prouverait même le contraire ! Il est difficile de définir « un homme
mêlé » dans l’Antiquité, les notions de « barbare » et d’ « étranger » étant souvent utilisées
par ceux qui écrivaient en étant eux-mêmes grecs ou romains ou qui, tout en ne l’étant pas,
jouissaient de certains des droits de citoyens.
Eloignons-nous donc d’Athènes et de Rome, ou mieux des « classiques » citoyens
athéniens écrivant à Athènes ou citoyens romains écrivant à Rome, pour nous intéresser aux
figures de « l’autre » et étudier l’étranger, le barbare, celui qui n’est ni Grec ni Romain, par
ses origines, par sa naissance, par sa terre natale ou par sa langue. Si nous regardons les
périphéries, et non les centres, nous voyons une mosaïque de peuples : Perses, Scythes,
Carthaginois, Numides, Juifs, Ibères, Gaulois, Germains… qui peuvent se lire comme un
kaléidoscope des terres connues et habitées.
Notre point de départ sera l’époque homérique et le point d’arrivée celle des
invasions « barbares », l’époque de ceux qui attaquèrent l’empire romain au point de le
faire changer de visage. Nous nous attacherons à étudier comment chacun s’est situé et a
situé « l’autre » dans cet espace sans cesse en évolution.
La langue de « l’autre »
La question de l’identité peut être saisie en partie à travers la langue : que signifie être
« barbarophone » par rapport à « être grec » ou « être romain » ? Que signifie pour un Ancien
« parler barbare » ? Le métèque n’est pas un barbare, la frontière entre les deux est-elle
simplement une question de langue maîtrisée ou non ?
Comment les langues grecque et latine parlent-elles de « l’autre » ? Comment se
manifestent, en langue, la différence ou le rapprochement, l’interpénétration ou la limite ?
Que devenait la « langue de la terre » en pays colonisé par les Grecs ou par les Romains ? Y
avait-il « concurrence » entre les langues autochtones, le grec et le latin, ou pouvaient-elles
vivre en harmonie ? La question de la diversité des langues était-elle un problème ?
Qui est « l’autre » ?
Le Barbare est-il présenté comme l« être soumis par nature » dont parle Aristote dans
La Politique ? Eratosthène avait-il des prédécesseurs quand il écrivit dans le second livre de la
Geographica que les hommes ne devraient pas être divisés en Grecs et Barbares, mais en bons
et mauvais, « car de nombreux Grecs sont mauvais, et de nombreux barbares sont civilisés,
notamment les Indiens et les Ariens, et encore les Romains et les Carthaginois, qui bénéficient
de formes de gouvernements admirables ». « Etre l’autre » est-il alors la présentation « en
creux » de soi ? Par préservation de sa propre identité « l’autre » se définit-il par l’inverse de
soi, par l’inversion de ses propres coutumes, lois et valeurs ? « Etre l’autre » n’est-ce pas
aussi, parfois, la perte de soi pour devenir autre, tel Alexandre devenant roi perse… ou
Antoine « s’orientalisant » ? N’arrive-t-il pas de voir que le Barbare n’est pas nécessairement
celui que l’on pense et que la sagesse barbare découverte par Alexandre peut nourrir la
sagesse grecque ? Les Romains pouvaient-ils concevoir ce rapprochement avec les
« Barbares » ?
Le contact avec « l’autre »
Comment s’établit le premier contact ? Quelle perception les Anciens se faisaient-ils
des « autochtones » ? Face à ce kaléidoscope de peuples, est-ce une image globale et
stéréotypée qui nous est renvoyée ou une image spécifique liée aux espaces naturels ? Une
volonté d’affirmation d’identité ou au contraire un désir de rejoindre le plus possible le
« moule » proposé ou imposé ? placements de population, butins de conquêtes, émigration
– de Troie à Rome -, que fut ce brassage des populations ? Quel fut le rôle du mariage dans la
perspective de la conquête de « l’autre » et de son territoire ? Se situe-t-on par rapport à un
pouvoir contre lequel il faut lutter ou au service duquel on peut mettre son talent ?
L’hospitalité antique fonctionne comme un « marqueur de civilisation », et pourtant
les termes grec xenos et latins hospes/hostis ne reposent-ils pas sur l’ambivalence de
« l’hôte » qui peut devenir « un ennemi » ? Quelle est la nature du lien qui s’établit dans la
lutte avec « l’autre » ou contre « l’autre » ?
Une politique d’intégration ?
« On appelle Grecs ceux qui participent à notre culture », écrit Isocrate dans le
Panégyrique. Parle-t-on d’intégration de l’étranger dans la cité grecque ou romaine ?
Comment définit-on juridiquement le métèque ou l’étranger ? A quels devoirs sont soumis les
étrangers à Athènes ou à Rome, et – inversement - le citoyen grec ou romain en terre
étrangère ?
Quelle est la politique menée envers les métèques ? Politique de repli ou politique
d’ouverture ? Une intégration est-elle possible ou reste-t-on toujours métèque ? Quel statut
ont leurs enfants ainsi que les enfants nés d’étrangers sur terre grecque ou romaine, nés d’un
couple mixte ou nés sur terre colonisée ? Comment acquiert-on le droit de cité et est-ce une
véritable intégration à la communauté civique ? Comment se définissent le panhellénisme et
la citoyenneté romaine par rapport au citoyen de souche ?
En fait cherchait-on réellement à intégrer les étrangers ? Etre promoteur du
panhellénisme ou de l’impérialisme romain paraît exclure tout intérêt porté à l’autochtone en
tant que personne ; cela répond-il à une volonté de l’assimiler ou de le faire exister, et à
quelles conditions ?
La quête d’un idéal
Construire une appartenance commune au sein d’une politique impérialiste, n’est-ce
pas engendrer la construction d’un contre-modèle commun : le Barbare ? Cependant les
interpénétrations, les mises en contact de populations et les échanges ont eu une incidence sur
les uns et sur les autres, parfois au point de bouleverser leur vie ; de nouveaux centres
intellectuels se créent pour un rayonnement toujours plus grand de la pensée.
On peut faire œuvre de géographe ou d’ethnologue dans la présentation des mœurs et
de la pensée de « l’autre », mais n’est-ce pas toujours une quête de soi et de sa propre
présence au monde à un moment précis de son évolution ?
Le dialogue des cultures est-il une réalité, une utopie, une construction anachronique ?
Ce cosmopolitisme, ces déplacements de populations et ce brassage d’idées ne vont-ils
pas trouver un dénominateur commun avec l’affaiblissement des cités-phares que furent
Athènes et Rome ? La cité idéale, celle du « Barbare-frère », n’est pas encore née, mais les
« citoyens d’un même monde » sachant « qu’un seul ciel s’étend par-dessus [leurs] terres
ensanglantées », comme l’écrit Vintila Hora, vont œuvrer à son édification.
Le christianisme est né, mais n’est-ce pas déjà la perspective d’un autre colloque ?
Nous tenterons donc à travers l’étude des textes antiques de mieux cerner qui
était « l’autre » pour un Grec et pour un Romain, « l’autre » dans sa réalité historique et
géographique, mais aussi « l’autre » construit par la subjectivité d’un écrivain qui ne cherche
pas nécessairement à transcrire le réel mais à créer par son imaginaire une autre forme de réel
s’inscrivant dans la fiction qu’est toute écriture.
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Les propositions de communications (titre et résumé de trois cents mots maximum) sont à
adresser avant le 30 septembre 2008 à l’un(e) des trois organisateurs du colloque :
Marie-Françoise MAREIN marein.marie-franç[email protected]
Patrick VOISIN [email protected]
Julie GALLEGO [email protected]
Les communications se feront uniquement en français.
Une publication écrite des actes est prévue après acceptation du comité de rédaction.
Tout courrier sera envoyé à l’adresse complète suivante :
Centre de Recherches : Poétiques et Histoire littéraire
Colloque Antiquité méditerranéenne : à la rencontre de « l’autre »
A l’attention de Madame Marie-Françoise Marein
U.F.R. Lettres, Langues et Sciences humaines
Av. du Doyen Poplawski
B.P 1160
64013 PAU Université Cedex
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