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anvier 2015
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Le Canada accuse encore du retard sur le plan de la productivité, et la
reprise des investissements privés est encore insuffisante pour combler
l'écart. Par ricochet, le dollar canadien se raffermirait sans doute à la
suite d'une majoration des taux, compromettant ainsi le redressement
vigoureux au chapitre des exportations enregistré récemment. Le fait
que le gouverneur de la Banque du Canada ait indiqué qu'il préférait
avoir affaire à une inflation légèrement supérieure à la cible, plutôt que
se retrouver constamment sous celle-ci, a de quoi rassurer les
investisseurs. Par contre, le récent retrait des indications prospectives
de la Banque du Canada quant à l’orientation de la politique monétaire
laisse craindre qu'une croissance et une inflation supérieures aux
attentes puissent surprendre les participants du marché et inciter la
Banque à intervenir plus tôt que prévu.
Sur le plan budgétaire, le gouvernement fédéral a annoncé des
réductions d'impôts aux particuliers depuis l'automne dernier. Celles-ci,
combinées à la diminution du prix de l'essence à la pompe,
augmenteront le revenu discrétionnaire des consommateurs. L’effet sur
la croissance économique en 2015 dépendra entre autres de la
propension à consommer, qui pourraient s’avérer moindre que de
coutume, puisque les ménages sont endettés.
Il sera quelque peu plus difficile pour le gouvernement fédéral
d’annoncer autant de mesures incitatives durant la première moitié de
l’année 2015, avant les élections d’octobre, dans la mesure où la chute
du prix du pétrole risque de gruger le coussin annuel de 3 milliards de
dollars et les modestes surplus projetés lors de la mise à jour financière
de l’automne dernier. La nouvelle réalité de prix du pétrole plus bas
pourrait freiner le désir du gouvernement fédéral d'offrir de nouveaux
allégements fiscaux.
Enfin, un prix du pétrole plus bas qu’escompté pendant de nombreux
mois pourrait signifier des déficits budgétaires considérables pour
l’Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador. Ces provinces
pétrolières pourraient alors prendre les moyens pour s’approcher de
l'équilibre budgétaire, une situation qui prévaut déjà au Québec et en
Ontario. Ainsi, des décisions à l’échelle provinciale visant à assainir les
finances publiques, pourraient annuler une partie de l’apport fiscal
positif du budget fédéral.
L'année 2014 aura également été marquée par l'abandon des
politiques d'austérité européennes. Et même si cela est encore peu
perceptible, le président de la Banque centrale européenne, Mario
Draghi, a déjà annoncé que l'Europe s'apprêtait à adopter d'autres
mesures de relance monétaire dès que les obstacles politiques et
institutionnels auront été franchis. La stratégie de croissance de
l'Europe constituerait essentiellement une réplique du plan mis en
œuvre par les États-Unis depuis cinq ans, qui s'est révélé plus efficace
que les mesures d'austérité européennes. Pour être pleinement
efficaces, les mesures de stimulation monétaire devront cependant être
accompagnées de politiques budgétaires accommodantes; un autre
obstacle important à franchir, puisque les Allemands y sont fortement
opposés et que le niveau d'endettement élevé des autres pays leur
laisse peu de marge de manœuvre à cet égard. Si une entente est
conclue à cet effet au début de 2015, l'euro devrait poursuivre son
déclin et pourrait même atteindre la parité avec le dollar américain d'ici
la fin de 2016. Deux autres évènements risquent d’affecter les marchés
financiers en 2015 : les attentes et le résultat des élections générales
en Grèce (qui auront lieu le 25 janvier) et en Espagne (qui auront lieu
au plus tard le 20 décembre).
Ailleurs dans le monde, le Japon a mis sur pied un ambitieux
programme d'achat d'obligations l'an dernier. Il s’agit d’une autre
tentative de sortir l’économie japonaise du marasme et d'échapper à la
déflation qui mine le pays depuis deux décennies.
La Chine, aux prises avec ses propres vents contraires, mais
déterminée à atteindre sa cible de croissance de 7,5 %, a récemment
abaissé ses taux d'intérêt et injecté des capitaux importants dans son
secteur bancaire dans l'espoir de stimuler les investissements et la
consommation, d'une part, et de gérer efficacement le recul en cours
dans le secteur immobilier, d'autre part. Le niveau élevé des stocks
immobiliers, entrainant une chute des prix des logements dans la
plupart des villes chinoises pour la première fois depuis de nombreuses
années, inquiète les autorités chinoises. L'offre excédentaire de
logements se répercute non seulement sur les marges bénéficiaires
des promoteurs mais aussi sur le bilan des banques, affaiblies par
l'augmentation des prêts délinquants. D’autre part, ce ralentissement
immobilier exerce des pressions à la baisse sur le prix des matières
premières contribuant en partie à absorber le choc.
En Inde, le mandat fort obtenu par le nouveau premier ministre
réformiste, Narendra Modi, a ranimé l'espoir de voir se réaliser une
réforme profonde de l’économie.
Dans cette partie du monde, de nombreux pays du Moyen-Orient sont
toujours aux prises avec de graves crises politiques, guerres civiles et
insurrections. La baisse des prix du pétrole et des recettes fiscales
subséquentes risquent d'envenimer les choses en obligeant les
dirigeants politiques à sabrer les programmes sociaux et les
subventions pétrolières. Dans une région en proie à des remous, de
nouvelles coupures dans les dépenses exacerberont les revendications
populaires pour de meilleures conditions de vie et une amélioration de
la gouvernance publique, contribuant à aggraver davantage l’instabilité
politique.
La Russie, aux prises avec la crise en Ukraine, est également touchée
par la guerre des prix du pétrole. Les sanctions occidentales
l'empêchent de recourir aux marchés financiers pour combler son
déficit budgétaire croissant et compenser la diminution de ses réserves
de devises. La chute subséquente du rouble, qui a poussé l'inflation et
les taux d’intérêt à la hausse, a plongé le pays dans une sévère
récession. Si, craignant que l'inflation ne rogne leur pouvoir d'achat, les
citoyens décident d'abandonner la monnaie nationale au profit du dollar
américain, la dégringolade du rouble se poursuivra.
Les pays les plus touchés par l'instabilité du marché du pétrole
comprennent le Venezuela et l'Iran (qui font tous deux l'objet de
sanctions et sont en butte à l'agitation sociale), de même que l'Irak et le
Nigeria (deux pays minés par des insurrections). Ces quatre pays sont
des producteurs relativement importants qui n'ont ni la volonté ni la
capacité de réduire leur production en vue d'assurer la discipline du
cartel de l’OPEP, et qui ont besoin d'une hausse considérable des prix
du pétrole en vue d'équilibrer leur budget.
Perspectives des marchés des capitaux pour 2015
D'après plusieurs mesures que nous suivons, une correction boursière,
telle que celles que nous avons connues en octobre et en décembre
dernier, reste plus que probable dans les prochains mois et pourrait
offrir aux investisseurs un point d'entrée plus opportun.