Soc. 201a La construction des innovations et la dynamique sociale. I. Qu’est que l’innovation. L’innovation n’est pas forcément liée à la technique. Dans sa définition la plus large, c’est l’action d’innover c’est-à-dire introduire quelque chose de nouveau dans une autre chose établie. Ce mot s’apparente à nouveauté, découverte, création, invention. Les sociologues définisent l’innovation comme une transformation qui va résulter d’un individu ou plusieurs et qui affecte selon le cas l’économie, la société, la culture ou la politique. L’innovation est un «phénomène social total» (Mauss). Elle a donc bien s a place dans la dynamique sociale. En sociologie, on ne parle d’innovation que lorsqu’elle est socialement acceptée, donc s u s c e p t i b l e d ’ ê t re diffusée et imitée. On parle de simple amélioration à la véritable m u t a t i o n . Le propre de l’innovation c’est qu’elle vient boulverser les situations acquises; c’est ce qui intéresse les sociologues. L’innovation participe à la promotion d’autres acteurs qui aboutit à un certain nombre de contraintes (rapports aux valeurs, rentabilité, etc.). La capacité d’assimiler une innovation ne va pas de soi. Son introduction doit être compatible avec la distribution des pouvoirs. II. Caractéristique de l’innovation. 1. La production de l’innovation. Il existe plusieurs niveaux : source officielle (résultat de l’analyse des pratiques sociales) et source non-officielle (plus diffuse, provient des pratiques sociales elles-mêmes et échappe donc à tout contrôle social; c’est une i n n o v a t i on s po nta née et autonome, subversive). Selon les objectifs, on freine ou accélère l’innovation. Tantôt les innovations se superposent (effets cummulés), tantôt elles vont s’imposer et de ce fait elle risque de contredire un fonctionnement habituel. Cette innovation doit être légitimée, elle repose sur son éfficacité mais également sur leur «employabilité». Il y a deux types de légitimités : d’une façon externe car elle p e rmet d’obtenir des résultats. Légitimité i n t e rne, si elle est capable de structurer un g roupe social (univers de lois et de règles). Il y a aussi deux types d’innovations : celle portée par des innovateurs qui n’en font pas usage et d’autre, inventeurs/utilisateurs. 2. Sociologie des usages sociaux des innovations. L’individu analyse les propriétés de l’objet en fonction des usages et avantages qu’il peut en tirer. On parle alors de propriété sociale de l’objet. La validité des innovations est liée au succès de leur application, nécéssité donc d’une pertinence sociale. Page 9 Soc. 201a III. L’innovation et le progrès. Tarde explique l’évolution sociale par la combinaison de l’invention et de l’imitation. Le changement social résulte d’inventions, d’imitations, et d’adaptations. Les inventions se succèdent à partir «d’inventions mère» par progrès de substitution et par accumulation d’inventions. Tarde explique qu’il existe deux type d’inventions : besoin et désir d’innovation. Il s’agit soit de répondre à des questions posées (ces besoins d’inventions justifient un progrès nécessaire), soit un besoin de luxe, un progrès superflu. Schumpeter et la théorie de l’évolution économique : le développement économique résulte de l’introduction de produits nouveaux, de méthodes de production nouvelle, ou de matière première inédite. C’est l’invention qui crée le dynamisme économique et le profit. La sociologie des sciences : elle s’intéresse à l’innovation dans le sens de la génèse et de la diffusion des innovations. Boudon a un mot assassin :les véritables innovateurs ne sont pas ceux qui répondent efficacement aux questions que tout le monde se pose, mais ceux qui savent poser des questions nouvelles. Les travaux de la sociologie des sciences montrent qu’il n’y a pas d’innovation en soi, il n’ y a innovation qu’au regard d’un état initial. Le système technique et le social ont des rapports étroits, des interdépendances. L’innovation représente toujours un enjeu. Gille Berthand : “les techniques forment système”. La machine transforme le monde du travail mais par contrecoup elle transforme aussi la position sociale de ceux qui l’utilise. L’innovation technique n’est pas neutre, elle introduit des déséquilibres et pousse à la recherche de nouvelles cohérences. La sociologie de l’innovation s’intéresse au contexte qui préside à l’émergence des innovations et aux processus de sa mise au point. Cette sociologie est aussi celle du changement social mais surtout celle de la régulation sociale. IV. L’innovation et la régulation sociale. Innover c’est introduire du changement qui implique une modification des régles formelles. Mais cela implique que les individus doivent s’adapter, ou peuvent s’y opposer et produire de nouvelles règles concurrentes. Pour faire face à cette production le groupe doit investir dans un plus grand contrôle social. Lorsqu’une innovation est introduite, ces boulversements peuvent produire des changements. L’organisation va donc se préparer à l’introduction de l’innovation (formations, reconversions, recrutements,etc.). La régulation se décrit comme un compromis, définie par les limites de la négociation par les régles imposées et acceptées. L’innovation redéfinit les régles du jeu, modifie les règles formelles mais aussi celles informelles (ou clandestines). Cela pose le problème de l’efficience des règles et boulverse l’ordre établit. L’innovation s’introduit dans l’équilibre précaire des logiques en présence. Cela s’accompagne de négociation pour mettre en place les anciennes règles ou de nouvelles; c’est l’ensemble de mise en cohérence.. Page 10 Soc. 201a V. Innovation et dynamique sociale (construction de pratiques sociales). On va créer des besoins et des stratégies pour succiter de l’intérêt. Les grands acteurs produisent ces besoins. Ils vont contrôler assez bien les marchés économiques qui créent mais pas les conséquences sociales que l’innovation induit. Les inventeurs anticipent sur l’utilisation des inventions des appareils. Ils parient sur les capacités à les assimiler. Les inventeurs élaborent de nouvelles pratiques sociales. Les innovations mettent en cause les habitudes et pratiques aux changements dans le domaine de la culture. L’innovation est d’abord portée par une conduite de distinction, puis elle se propage en chaîne pour toucher la majorité de la population, donc se banalise. L’invention devient commune et plus novatrice. Sa possession peut alors devenir le signe d’une nouvelle distinction. L’innovation modifie aussi le rapport au temps (sociologie de la technique). Les techniques entrent dans le domaine domestique et impose un nouveau rapport au temps. Autres effets : son introduction induit la redéfinition des rôles de chacun. Les nouvelles techniques sont porteuses de mouvements qui modélent la société future. Les innovations techniques sont en quelque sorte des gènes d’innovations sociales. Page 11