Impact des vaccins dans les pays à bas et
hauts revenus
Ann Nestlé [Fr] 2008;66:55–70
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T u b e r c u l o s e
Le rapport annuel «Global tuberculosis control 2007»
[9] conclut que «l’incidence globale de la tuberculose a
atteint un pic entre 2000 et 2005… L’épidémie globale de
tuberculose est à présent sur le point de décliner».
Aujourd’hui, le principal mécanisme pour l’atteinte de
cet objectif est basé sur le succès de la stratégie DOTS
(Traitement directement observé, court terme) intro-
duite en 1995. Ce rapport ne cite jamais le vaccin bacille
Calmette-Guérin (BCG), et la question est de savoir si ce
vaccin a encore un futur.
Selon des estimations, environ un tiers de la popula-
tion globale est infectée de façon asymptomatique par le
bacille tuberculeux et environ 5–10% sont atteints de tu-
berculose clinique
[10] . La tuberculose est directement
responsable de plus d’un quart de l’ensemble des décès
évitables. La plupart des nouveaux cas et décès sur-
viennent dans des pays en développement, où des enfants
sont souvent infectés.
Les pays industrialisés ont pu enregistrer une diminu-
tion de l’incidence de la tuberculose pendant un certain
nombre d’années, mais cette tendance positive s’est mo-
difiée vers la fin du 20
ème siècle. Cette situation est impu-
table à une immigration à partir de zones d’endémie, à
des sujets positifs pour le VIH, à des toxicomanes et à des
détenus
[10] .
Le vaccin BCG a été utilisé pour la première fois en
1921 (administration par voie orale chez des nourrissons
[11] ) et est l’un des vaccins les plus utilisés malgré des
données conflictuelles quant à son efficacité protectrice.
Il exerce un effet documenté (50–80%) contre la ménin-
gite et la tuberculose disséminée chez l’enfant mais ne
prévient pas la primo-infection ni, fait plus important, la
réactivation d’une infection pulmonaire latente, qui est la
principale source de dissémination de la bactérie dans la
communauté. Cet échec, avec la pandémie croissante de
VIH/sida et l’apparition de mycobactéries multirésis-
tantes, menace d’annihiler les effets des stratégies actu-
elles de contrôle de la tuberculose.
Dans les pays où la charge pathologique due à la tuber-
culose est élevée, une dose de BCG doit être administrée
à tous les nourrissons dès que possible après la naissance.
Les exceptions sont les enfants infectés de façon connue
par le VIH
[12] . Dans les zones où la charge due à la tu-
berculose est basse, le BCG est uniquement administré
aux groupes à risque de contracter cette maladie, ou est
totalement remplacé par une détection des cas et un trai-
tement précoce. La vaccination des adultes et les vaccina-
tions réitérées ne sont pas recommandées par l’OMS
[10] .
Le vaccin BCG demeure l’un des trois facteurs sur les-
quels repose le contrôle de la tuberculose, avec un dia-
gnostic précoce et un traitement adéquat et un traçage
des sujets contacts. Il existe un besoin urgent d’un vaccin
plus efficace qui pourrait également prévenir la réactiva-
tion de la bactérie.
D i p h t é r i e
La diphtérie a été l’une des maladies infantiles les plus
redoutées, se caractérisant par des épidémies dévasta-
trices. La plupart des infections par Corynebacterium
diphtheriae ont heureusement une évolution clinique bé-
nigne ou sont totalement asymptomatiques, mais la mor-
talité a atteint 50% au cours d’une épidémie majeure en
Europe et aux États-Unis dans les années 1880. La mor-
talité a diminué à environ 15% au cours de la première
guerre mondiale (principalement en raison de l’adminis-
tration de l’antitoxine) mais peut encore atteindre, mal-
gré le traitement moderne, 10% dans des zones d’endémie
[13, 14] . Des estimations indiquent que, avant que le vac-
cin ne soit facilement disponible, il se produisait environ
1 million de cas de diphtérie, résultant en 50 000–60 000
décès, chaque année dans les pays en développement
[13] .
Le vaccin a été inclus dans le PEV en 1974 et, très proba-
blement en conséquence, le nombre global de cas rappor-
tés de diphtérie a diminué de plus de 90% ( fig. 1 ) de 1980
à 2000.
Dans certains pays, particulièrement en Afrique sub-
saharienne mais également dans certaines zones d’Amé-
rique du Sud et d’Asie de l’Est, la couverture vaccinale par
3 doses de vaccin antidiphtérique (administré sous forme
de vaccin diphtérie/tétanos/coqueluche à cellules entiè-
res, DTCce) est de moins de 50% de la population des
nouveau-nés
[13] . Dans ces pays, où la diphtérie est en-
core endémique, la morbidité et la mortalité dues à cette
maladie demeurent élevées, et ce sont les enfants d’âge
préscolaire et scolaire qui sont le plus souvent atteints.
Dans la plupart des pays industrialisés, où la couver-
ture vaccinale est élevée, la diphtérie endémique a dis-
paru ou est extrêmement rare, mais des épidémies sur-
viennent encore. Des études sérologiques menées au
cours des années 1980 ont indiqué que, même en Europe
et aux États-Unis où la couverture vaccinale était élevée,
une importante proportion de la population adulte, allant
souvent jusqu’à 50%, était sensible à la diphtérie
[15] .
Deux importantes raisons sont les suivantes: 1) l’immu-
nisation induite par le vaccin disparaît au cours du temps
tant que des rappels périodiques ne sont pas effectués et