Molière
Dom Juan
Classiques Contemporains
&
LIVRET DU PROFESSEUR
établi par
PIERRE BRUNEL
professeur à la Sorbonne
CLAUDIA JULLIEN
professeur de lettres en classes préparatoires
SOMMAIRE
DOCUMENTATION COMPLÉMENTAIRE
Les décors ............................................................................................................ 3
La modernité de Dom Juan .................................................................... 5
Lectures complémentaires .................................................................. 14
POUR COMPRENDRE:
quelques réponses, quelques commentaires
Étape 1 Vue d’ensemble de la comédie ................................ 15
Étape 2 Ouverture et exposition................................................. 16
Étape 3 Dom Juan, homme-théâtre.......................................... 18
Étape 4 L’idylle troublée ............................................................... 20
Étape 5 L’ombre du Quémandeur ............................................ 22
Étape 6 La provocation inutile.................................................... 23
Étape 7 La galerie des fâcheux.................................................. 23
Étape 8 Invitation et contre-invitation ................................ 25
Étape 9 Dom Juan Tartuffe ............................................................ 26
Étape 10 Le triomphe du surnaturel ........................................ 27
Conception : PAO Magnard, Barbara Tamadonpour
Réalisation : Nord Compo, Villeneuve-d’Ascq
DOCUMENTATION COMPLÉMENTAIRE
Les décors
Au sujet du décor de l’acte I
René Pintard le rapproche du Luxembourg de la Grande Mademoiselle,
devenu un lieu quasi public. Il ne s’agit donc pas d’un intérieur où logerait
Dom Juan nouvellement arrivé au pays, mais d’une galerie propice aux
effets de perspective comme les affectionne la scénographie à l’italienne,
mi-intérieur mi-extérieur, avec sa façade rejetée sur la perspective transver-
sale. C’est un lieu naturel de rencontres.
Au sujet du décor de l’acte V
René Pintard a cette fois tort d’expliquer le décor d’après la version de
Thomas Corneille, qui situe son dénouement dans une « campagne »
proche du tombeau Dom Juan aurait eu affaire.
Le marché de peinture nous apprend sans contestation possible que la
scène se situe à l’intérieur de la ville, dans une rue où Dom Juan a fait ren-
contre de son père, puis de Don Carlos, alors qu’il se dirige vers la « porte
de ville », peut-être pour gagner le mausolée où l’attend la Statue.
Objections :
Les frères d’Elvire se voient « obligés […] à tenir la campagne » sans
pouvoir trop se risquer à « vouloir entrer » en ville (III, 4).
Dom Juan n’a-t-il pas occulté dans son esprit le scandale de la statue
et son invitation à souper, dont il n’est pas soufflé mot ? Le décor du fond
aurait une fonction moins dramatique que symbolique, comme désignant
l’espace du surnaturel, à l’abri duquel, à l’acte V, Dom Juan croit s’être mis
intra muros.
On ne peut confondre ce fond du décor avec le décor de l’acte III :
« théâtre de statues à perte de vue » qui est un lieu ouvert, alors que le décor
du tombeau était un lieu fermé lieu ouvert aux rencontres et dans lequel
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« l’Ombre entre » seulement à la fin. La ville de Molière est une avenue en
perspective. La confusion vient du fait que les comédiens, pour représenter
des lieux différents, ont pu réutiliser dans l’acte III et dans l’acte V des élé-
ments d’un même décor, le « théâtre de statues ».
Des machines pour l’acte V
La métamorphose du Spectre en Temps : chute de Dom Juan en enfer
pendant que la Statue prend son vol vers le Ciel.
Existence d’un livret dauphinois : « Description de superbes machines et
des magnifiques changements de théâtre du Festin de Pierre ou l’Athée fou-
drode M. de Molière ».
Pour une dramaturgie de « Dom Juan » : les effets spectaculaires sont sus-
ceptibles d’un enjeu sérieux, le théâtre profane est rarement coupé complè-
tement de ses répondants religieux ; le merveilleux, mythologique ou chré-
tien, plonge ses racines dans la psyché profonde. Le théâtre jésuite était un
théâtre des merveilles. Les procédés du théâtre à machines sont identiques
chez les jésuites et au Marais, au palais Barberini et chez Molière, même si
l’état de la salle du Palais-Royal en 1665 limite les possibilités de ce dernier.
On trouve dans le théâtre de ce temps l’équivalent de la métamorphose,
de la statue parlante, du foudroiement du rebelle abîmé dans les dessous du
théâtre, tous éléments qui paraissent contraires à la règle classique de la
vraisemblance.
Le merveilleux mythologique ou d’apparente fantaisie comme dans
Dom Juan, volontiers taxé de féerie avec sa figure plutôt païenne du Temps,
consonne avec l’enseignement de l’Église dramatisé par le théâtre propre-
ment religieux, et d’autant mieux que l’image antique du Temps, père de la
Vérité, remise à l’honneur par Érasme d’après Aulu-Gelle, est après lui fré-
quemment allégorisée dans un sens chrétien, même parfois dans un
contexte païen, pour annoncer et célébrer le triomphe de la foi.
Le motif des déguisements du Démon est fréquent dans le théâtre de
l’époque. Dom Juan est-il le Démon déguisé ? Tentateur et séducteur, vêtu
de rouge et or, le grand seigneur méchant homme est de mieux en mieux
reconnu comme un sujet du Démon, dont il tient l’ironique volonté de
sacrilège en enlevant à Dieu une épouse au couvent, en dérobant un mort
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à la paix du repos éternel et en contrefaisant les véritables dévots de la reli-
gion du Christ.
La vocation du théâtre à machines est de fondre des composantes hété-
rogènes. Différents registres sont présents dans Dom Juan. On peut parler
de « structure ironique » à propos d’une pièce déconsidérant l’un par l’autre.
La modernité de Dom Juan
Nous proposons un corrigé de dissertation sur le sujet suivant : « Dom
Juan est-il moderne, comme l’a suggéré Théophile Gautier ? »
Introduction
La redécouverte du Dom Juan de Molière est l’un des moments les plus
saisissants de l’évolution du théâtre moderne et peut-être du goût moderne.
On sait que c’est le 15 janvier 1847 que la Comédie-Française redonna
enfin la version originale de la pièce, abâtardie et affadie pendant près de
deux siècles par la version en vers de Thomas Corneille. Ce fut une révéla-
tion : on découvrait qu’une pièce du
XVIIe
siècle pouvait être « moderne ».
Aussi ne faut-il pas s’étonner de trouver l’épithète sous la plume de
Théophile Gautier. L’ancien « Jeune France » de 1830, celui qui arborait le
fameux « gilet rouge » lors de la bataille d’Hernani, reste fidèle à l’enthou-
siasme de sa jeunesse. Mais enthousiasme pour quoi ? – Pour le personnage
de Dom Juan ? pour le fantastique répandu dans la pièce ? ou pour une
forme de théâtre plus libre que celle à laquelle les classiques nous avaient
accoutumés ? On ne saurait répondre à ces questions sans tenir compte du
fait que Molière a eu au moins un prédécesseur en la personne de Tirso de
Molina dont L’Abuseur de Séville, antérieur de trente-cinq ans à Dom Juan,
inaugurait brillamment le mythe littéraire.
I. Le personnage de Dom Juan
Il a de quoi séduire un romantique. Mais il restait fruste chez Tirso de
Molina. Et peut-être est-il d’une manière générale encore trop tributaire
d’un ordre.
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