Négocier des accords et résoudre les conflits collectifs La poursuite de l’activité malgré la grève Référence Internet WHP.04.4.040 Saisissez la Référence Internet WHP.04.4.040 dans le moteur de recherche du site www.editions-tissot.fr pour accéder à cette fiche actualisée En cas de grève, les capacités de production de votre établissement sont logiquement réduites. Pourtant, les nécessités d’ordre économique mais aussi et surtout l’obligation de continuité des soins vous amènent à rechercher les moyens de poursuivre votre activité. Pour autant, votre entreprise se trouve dans une situation particulière et la loi encadre fortement les moyens auxquels vous pouvez avoir recours pour remplacer les grévistes. Comment procéder pour poursuivre l’activité et maintenir la production de l’entreprise en temps de grève ? De quelle manière pouvez-vous procéder pour pallier l’absence des grévistes et quelles sont les erreurs à ne surtout pas commettre ? WHP.04.4.040 La bonne méthode Étape 1 Déterminer l’obligation de soins à laquelle est soumis votre établissement Il existe une obligation générale de secours et de soins aux personnes en danger pour les établissements autorisés à exercer l’activité de médecine d’urgence : ils sont tenus « d’accueillir en permanence dans la structure des urgences toute personne qui s’y présente en situation d’urgence ou qui lui est adressée, notamment par le SAMU ». Cette obligation existe également pour les établissements n’ayant pas l’autorisation d’exercer l’activité de médecine d’urgence, lesquels sont tenus : – de dispenser des soins immédiats à un patient qui se présente aux heures d’ouverture des consultations et, s’il y a lieu, de l’adresser ou le faire transférer, après régulation par le SAMU, dans un établissement de santé ayant l’autorisation d’exercer cette activité ; – de dispenser des soins non programmés à tout patient adressé par un médecin libéral exerçant en cabinet, après examen et consentement du patient, lorsqu’un accord préalable direct a été donné par le médecin de l’établissement qui sera appelé à dispenser les soins nécessaires ; – de dispenser des soins non programmés à tout patient qui lui est adressé par le SAMU lorsqu’un accord préalable à l’accueil dans l’établissement a été donné. 488 Enfin, les établissements autorisés en obstétrique sont tenus d’accueillir les patientes tous les jours de l’année, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. L’interruption de ces activités serait de nature à engager la responsabilité de l’établissement à l’égard d’une victime éventuelle. Au regard de l’autorisation elle-même, l’établissement serait susceptible de voir celle-ci suspendue ou retirée et d’être sanctionné au titre du manquement grave par une suspension de son contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens. L’organisation de l’offre de soins doit en effet garantir au patient admis dans un établissement de santé la délivrance de l’ensemble des soins qu’il requiert au sein de cet établissement ou, après son transfert, dans un autre établissement mieux à même de délivrer ces soins. Étape 2 Organiser la poursuite de l’activité Dans la mesure du possible, nous vous conseillons : – de différer les admissions programmées ; – de mettre en place un dispositif permettant de satisfaire aux obligations rappelées ci-dessus en : – identifiant les services dont le fonctionnement ne peut être interrompu, – assurant la conservation des installations et du matériel, D H P © E T La poursuite de l’activité malgré la grève – assurant la continuité des prestations hôtelières aux hospitalisés, – déterminant les effectifs dont la présence est indispensable ; – de négocier un service minimum avec les salariés grévistes limité à la délivrance des soins indispensables à la sécurité des patients présents : – négociation d’un accord d’entreprise avec les organisations syndicales sur la mise en œuvre d’un service minimum de sécurité pendant la grève, – consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des représentants du personnel, et du CHSCT en vue d’engager une discussion sur la mise en œuvre du service minimum de sécurité ainsi que sur les conditions de travail pendant la grève, – en application de l’accord d’entreprise, ou suite à la consultation du comité d’entreprise, les salariés grévistes doivent se déclarer tels afin qu’il soit possible d’organiser le service minimum de sécurité. Concernant les effectifs dont la présence est indispensable, il ne s’agit pas ici d’encadrer ou de limiter le droit de grève des salariés mais bien d’assurer la continuité des soins. L’appréciation de ces effectifs indispensables sera bien entendu fonction de la durée de la grève, de la nature de l’activité et des services concernés. Poursuivre l’activité en recourant aux nongrévistes Lorsque vous êtes confronté à une grève partielle, vous avez la possibilité d’affecter certains des non-grévistes dont les qualifications le permettent sur les postes laissés vacants par les grévistes, pour poursuivre l’activité de l’entreprise. Attention Si le changement de poste demandé constitue une modification du contrat de travail, le salarié pourra la refuser librement. En revanche, s’il ne s’agit que d’un changement de ses conditions habituelles de travail, votre demande s’imposera à lui et il commettrait une faute en la refusant. D H P © E T Exemple Votre comptable est en grève. Vous demandez à votre secrétaire d’occuper ce poste. Elle pourra valablement refuser votre demande si elle n’a pas les qualifications requises en comptabilité ou si son contrat de travail ne prévoit pas qu’elle peut être amenée à effectuer ce genre de tâche. La recherche d’un accord sera donc nécessaire. Vous avez également la possibilité, en vertu de votre pouvoir de direction, que ce soit en maintenant les salariés sur leurs postes habituels ou en les affectant sur des postes vacants, d’imposer l’accomplissement d’heures supplémentaires pour maintenir la production. Le refus des salariés constituerait une faute passible de sanction disciplinaire. Attention, cependant, de respecter les durées maximales de travail et les temps de repos obligatoires. Convention collective Hospitalisation privée Accords nationaux (n° 3307) : pas de dispositions particulières Trouver des solutions de remplacements externes Trois solutions peuvent être utilisées pour remplacer les grévistes. Faire appel à des bénévoles La jurisprudence autorise cette possibilité, à condition qu’il n’existe pas de lien de subordination entre l’employeur et le bénévole. Si celuici était établi, le risque encouru serait celui du délit de travail dissimulé. Recourir à des entreprises de service Ceci peut s’effectuer sans difficulté. Rappelons simplement que ce type de personnel sera dirigé par une personne de sa propre entreprise dans vos murs. On peut, par exemple, avoir recours à une entreprise extérieure de nettoyage pour remplacer les personnes du service d’entretien qui se sont mises en grève. Sous-traiter certaines tâches Reprenons l’exemple d’une grève ayant touché votre service d’administration du personnel. Cette situation est d’autant plus problématique pour vous qu’elle survient en pleine période de réalisation de la paie et que, dans l’entreprise, personne ne détient les compétences pour assurer ce travail. Vous pouvez alors le soustraiter auprès d’une entreprise spécialisée en concluant un simple contrat de sous-traitance. 489 WHP.04.4.040 – assurant la sécurité des personnes hospitalisées dans l’établissement en définissant les postes nécessaires, La poursuite de l’activité malgré la grève Convention collective Hospitalisation privée Accords nationaux (n° 3307) : pas de dispositions particulières Étape 3 Entreprendre des démarches auprès de l’agence régionale de santé Il est recommandé aux établissements de santé d’informer sans délai l’ARS du risque de grève et de lui transmettre la liste des revendications des grévistes. WHP.04.4.040 Suite à un mouvement social, il est recommandé de formaliser en concertation avec la tutelle les mesures prises pour assurer : – la continuité des soins : les dispositions, l’organisation et les moyens mis en œuvre en interne pour assurer un « service minimum » doivent être précisées ; – l’évacuation éventuelle et le transfert des patients vers tout autre établissement en cas d’impossibilité de toute prise en charge du fait du nombre trop élevé de grévistes dans l’établissement ; – la communication en privilégiant notamment les discussions avec les représentants des grévistes de manière à souligner les efforts mis en œuvre par l’établissement pour assurer la sécurité des patients maintenus dans l’établissement. La copie de ces documents doit être adressée pour information à la préfecture du département. Étape 4 Mettre éventuellement en action la procédure de réquisitions Dans le cas où l’établissement n’est en mesure ni d’assurer la continuité des soins, à défaut d’accord sur un service minimum, ni de pouvoir transférer dans d’autres établissements ces patients, il peut se tourner vers la puissance publique afin de recourir à la réquisition. À cet effet, le responsable de l’établissement doit demander au préfet, par lettre recommandée avec accusé de réception, de prendre un arrêté préfectoral de réquisition en formulant les raisons motivant cette demande et en fai- 490 sant état des démarches menées antérieurement pour assurer le service minimum ainsi que des raisons de leur échec. Une copie de cette demande doit également être envoyée à l’ARS qui va, en pratique, signer le dossier. L’exercice du droit de réquisition est soumis à la réunion de trois conditions : – l’urgence ; – une atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publique ; – l’impossibilité de solution alternative, notamment dans le service public. Le refus par le salarié d’obtempérer à un ordre de réquisition est sanctionné pénalement (amende et emprisonnement). La rétribution des personnels grévistes appelés par voie de réquisition à reprendre le travail est normalement à la charge de l’employeur. Évitez les erreurs Ne faites pas appel à des contrats à durée déterminée (CDD) ou à des intérimaires pour remplacer les grévistes Le Code du travail interdit strictement à l’employeur de faire appel à des intérimaires ou à des CDD pour remplacer les salariés grévistes. En revanche, vous êtes en droit, durant la grève, de recourir à ce type de contrat pour remplacer un salarié malade. Le recrutement d’intérimaires ou de CDD est également possible avant le début du conflit collectif, à condition que ceci n’ait pas été fait en prévision de la grève. À l’issue de celle-ci, il vous est possible de recourir à nouveau à ce type de contrat pour faire face au surcroît d’activité généré par la période de grève. Ne faites pas récupérer les heures de travail perdues du fait de la grève Lorsque le conflit est terminé, le retard de production doit souvent être rattrapé. Pour autant, vous ne pouvez pas mettre en place de récupération lorsque la grève est interne à l’entreprise. Il faudra opter pour l’accomplissement d’heures supplémentaires majorées. En revanche, si une grève extérieure à votre entreprise a paralysé votre activité et empêché D H P © E T La poursuite de l’activité malgré la grève Ne suspendez pas le salaire si la grève est due à un manquement de l’employeur Si vous n’avez pas respecté les droits acquis des salariés (ex. : retard volontaire et économiquement non justifié dans le paiement des salaires, baisse des salaires, conditions de sécurité non respectées, etc.) et que vos salariés se sont mis en grève pour cette raison, vous ne pouvez pas cesser le versement de leur salaire. N’abusez pas du recours à la réquisition Si vous mettez en œuvre de manière trop fréquente une demande de réquisition auprès du préfet sans faire usage des autres possibilités qui vous sont offertes en cas de conflit collectif, vous risquez de voir opposer un refus catégorique à votre demande. Le rôle des représentants du personnel Vous n’avez pas à consulter les représentants du personnel pour décider, durant une grève, des moyens que vous souhaitez utiliser pour remplacer les grévistes. Si vous décidez de le faire, cela devra procéder d’une volonté de votre part d’associer vos représentants du personnel à votre action. En revanche, à l’issue du conflit, il sera nécessaire de les consulter si vous décidez de modifier l’horaire collectif de travail (il faudra également transmettre un double de celui-ci à l’inspection du travail). Les sanctions possibles Lorsque l’employeur décide de recourir à des CDD ou à des intérimaires pour remplacer des grévistes, il commet un délit pénalement sanctionné et s’expose à une amende de 3.750 euros (7.500 euros en cas de récidive) et/ou à une peine d’emprisonnement de 6 mois. D H P © E T Notre conseil Gardez à l’esprit votre pouvoir disciplinaire Il peut arriver que les grévistes mènent des actions pour empêcher les salariés qui le souhaitent de travailler. Il est important de garder à l’esprit que ceci constitue une faute lourde et que vous serez alors en droit de licencier les salariés grévistes. Gardez à l’esprit vos droits particuliers en cas de grève Par ailleurs, lorsque les grévistes décident d’installer des piquets de grève ou d’occuper vos locaux pour empêcher les salariés de travailler et si vos tentatives pour faire cesser le trouble n’ont pas abouti (à l’issue du délai accordé par le juge des référés aux grévistes pour quitter les lieux), vous pouvez considérer que vous êtes alors dans une situation contraignante qui vous met dans l’impossibilité de faire fonctionner votre entreprise. Dans ce cas, rappelez-vous que vous êtes délivré de votre obligation de fournir du travail aux autres salariés et de maintenir leur salaire. Questions/Réponses Est-il possible de réquisitionner les grévistes pour travailler ? La réquisition des grévistes est utilisée principalement dans les services publics pour assurer leur continuité. Cette possibilité est très exceptionnellement mise en place au bénéfice des entreprises privées. Pour cela, il faut que l’interruption de votre activité soit de nature à compromettre l’ordre public et qu’il y ait une situation d’urgence. Si tel est le cas, alors il vous faudra saisir le préfet, seul compétent en ce domaine. Peut-on imposer un préavis aux grévistes afin de s’organiser plus facilement durant le conflit ? Ce n’est pas possible dans le secteur privé. Le préavis de grève n’est utilisé que dans le secteur public. La grève peut donc débuter à n’importe quel moment et un accord d’entreprise ne peut valablement imposer un préavis. 491 WHP.04.4.040 vos salariés de travailler de manière collective (grève des services publics, des transports, etc.), la mise en place de la récupération est possible. La poursuite de l’activité malgré la grève Convention collective Hospitalisation privée Pas de dispositions particulières WHP.04.4.040 Accords nationaux (n° 3307) Saisissez la Référence Internet WHP.04.4.040 dans le moteur de recherche du site www.editions-tissot.fr pour accéder à cette fiche actualisée ainsi qu’aux rubriques suivantes : Modèles téléchargeables Tableau récapitulatif des moyens d’action face à une grève (CCN hospitalisation privée) MOD.4060 Pour aller plus loin sur le sujet Le lock-out et la fermeture de l’entreprise en période de grève - WHP.04.4.020 Droits et devoirs de l’employeur et des grévistes en cas de conflit - WHP.04.4.030 Comment gérer une grève ? - WHP.04.4.050 Convention collective mise à jour quotidiennement Références aux textes officiels rattachés à cette fiche 492 D H P © E T