Onze des 24 patients étaient séropositifs. Dans sept cas sur 11, les patients ne se savaient pas porteurs du VIH.
Les médecins ont découvert la co-infection après avoir commandé des tests exhaustifs pour écarter la possibilité
d’autres causes infectieuses des problèmes oculaires.
Les 11 patients séropositifs étaient tous des hommes, et la plupart de ceux qui se savaient séropositifs ne suivaient
pas de multithérapie parce qu’ils avaient un compte de CD4+ modérément élevé, soit entre 500 et 800 cellules. Un
tel compte de CD4+ laissait supposer que le système immunitaire de ces patients était en bon état. Il paraît toutefois
qu’un tel compte de CD4+ n’offre aucune protection contre la syphilis lorsque le VIH est présent.
Signes avertisseurs
Chez 14 patients sur 24, les chercheurs ont observé une inflammation des muqueuses (tissus humides de l’anus,
du pénis, du vagin et de la bouche), des éruptions cutanées sur la paume de la main et la plante des pieds ou encore
des ulcères dans la bouche. Tous ces symptômes laissaient soupçonner la présence de la syphilis.
Des tests sanguins ont permis de confirmer le diagnostic de syphilis, sauf chez un patient. Le fait que ces tests aient
échoué à déceler la syphilis chez ce dernier, malgré des symptômes évidents, semble confirmer que le système
immunitaire de certaines PVVIH pourrait être trop faible pour réagir aux tests de dépistage de la syphilis (cette
observation a déjà été faite lors d’études antérieures). De plus, chez les hommes séropositifs inscrits à cette étude
berlinoise, le taux sanguin d’un marqueur d’inflammation appelé protéine C-réactive avait tendance à être plus élevé
que la normale. Enfin, neuf des patients présentant des symptômes d’une syphilis de stade précoce ont fait l’objet
d’un diagnostic de neurosyphilis (forme grave et redoutable de cette maladie), ce qui laissait croire que les
tréponèmes s’attaquaient au cerveau et à la moelle épinière.
Traitement
Les médecins ont prescrit une antibiothérapie intraveineuse de 10 jours comportant de la pénicilline et de la
ceftriaxone. Dans tous les cas sauf un, on a constaté une amélioration de certains symptômes, notamment la
sensation de douleur et d’inconfort dans l’œil. Personne n’est devenu aveugle, mais les patients n’ont pas tous
bénéficié d’une amélioration de leur vue.
Autres études
Les résultats d’études antérieures sur la syphilis chez les PVVIH portent à croire que le risque de neurosyphilis
augmente lorsque le compte de CD4+ glisse sous la barre des 350 cellules. Toutefois, dans l’étude dont nous
rendons compte ici, la neurosyphilis s’est déclarée chez des personnes comptant davantage de cellules CD4+, soit
450 en moyenne. Certains chercheurs maintiennent que la syphilis oculaire devrait être considérée comme une
forme de neurosyphilis. De plus, des recherches réalisées par des experts de la syphilis des États-Unis ont révélé
que les tréponèmes peuvent envahir le cerveau peu de temps après l’infection et ce, que le VIH soit présent ou pas.
Pas seulement en Allemagne
Des cas de syphilis oculaire ont été observés par des médecins dans plusieurs autres pays aussi, y compris
l’Australie, la France, les Pays-Bas, le Pérou, l’Espagne et les États-Unis. Les cas en question concernaient
majoritairement des hommes qui avaient des relations sexuelles avec d’autres hommes. Il est donc clair que les cas
de syphilis sont à la hausse dans le monde entier.
Les résultats de cette étude allemande soulignent l’importance du sécurisexe et d’un suivi médical régulier pour les
personnes sexuellement actives. Le dépistage de la syphilis et du VIH revêt une importance particulière à cet égard.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
1. Lukehart SA, Hook EW 3rd, Baker-Zander SA, et al. Invasion of the central nervous system by
Treponema
pallidum
: implications for diagnosis and treatment.
Annals of Internal Medicine
. 1988 Dec 1;109(11):855-62.
2. Kunkel J, Schürmann D, Pleyer U, et al. Ocular syphilis—indicator of previously unknown HIV-infection.
Journal
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. 2009;
in press
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