MtmR n°4 vol7 - John Libbey Eurotext

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MtmR n°4 vol7
6/10/05
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Actualités
Les kisspeptines stimulent directement
la sécrétion de GnRH
identification récente des kisspeptines comme régulateur de la
puberté repose sur des analyses de liaison génétique, sur l’identification d’un
récepteur orphelin et sur son invalidation. L’histoire commence par la publication presque simultanée au cours du
dernier trimestre de 2003 de trois publications importantes. La première en date
est française [1]. N. De Roux et al ont étudié une famille où cinq enfants souffraient
d’hypogonadisme hypogonadotrophique
isolé (c’est-à-dire sans l’anosmie qui définit le syndrome de Kallmann). Une étude
de liaison génétique a permis de localiser l’anomalie génétique responsable en
19p13 et un séquençage plus précis a mis
en évidence une délétion de 155 nucléotides dans la partie codante du gène du
récepteur orphelin GPR54. Une étude
analogue réalisée par SB Seminara et al
[2] dans une autre famille a montré chez
les sujets atteints une mutation 443 t > C
dans l’exon 3, qui substitue une sérine à
la place d’une leucine en position 148.
Seminara et al [2] et aussi Funes et al [3]
ont réalisé des invalidations de GPR54
chez la souris. Les animaux GPR54 -/étaient viables mais présentaient une
absence de développement des gonades
et des organes sexuels. La concentration
circulante des hormones gonadotropes
était basse.
Le récepteur GPR54 avait été identifié en
1999 par Lee et al [4] comme un récepteur orphelin, lié aux protéines G, partageant une homologie de séquence de
40 % avec deux des récepteurs de la galanine, mais incapable de lier cette dernière. Les ligands endogènes ont été identifiés en 2001 par quatre groupes
indépendants [5-8] comme les membres
d’une famille de peptides, les kisspeptines. Le composé principal est un peptide de 145 acides aminés, doté d’une
séquence Arg-Phe en C-terminal. Il est à
l’origine de fragments protéolytiques Cterminaux de 54 (le plus abondant), 14,
13 et 10 acides aminés qui tous se lient
à GPR54. Le fragment de 54 acides aminés, qui inhibe aussi la chémotaxie et le
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L’
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caractère invasif de cellules exprimant
GPR54 [7, 9], a été aussi appelé mestatine. Deux articles récents ont apporté
des précisions sur le mécanisme d’action
des kisspeptines.
Résultats
Dans un article de la revue Endocrinology, Navarro et al ont montré que le
décapeptide de rongeur administré par
voie intraventriculaire chez le rat prépubère et adulte entraînait une sécrétion
significative de FSH avec une ED50 100
fois plus élevée que pour la sécrétion de
LH. La sécrétion de FSH était aussi augmentée par l’administration systémique
(par voies intra-péritonéale [IP] et veineuse[IV]) du peptide. Cette action était
abolie par l’administration d’un antagoniste synthétique puissant de la GnRH.
Elle persistait dans différents modèles
d’insuffisance de leptine (privation de
nourriture, immuno-neutralisation de la
leptine ou résistance à la leptine) ou après
blocage des voies de l’oxyde nitrique ou
des acides aminés excitateurs.
Dans un gros article de PNAS, Messager
et al ont aussi étudié ces mécanismes
chez la souris. Ils ont tout d’abord montré que les transcrits de GPR54 étaient
colocalisés dans l’hypothalamus de souris avec les neurones à GnRH, ce qui suggère une action directe des kisspeptines
à ce niveau. Ces neurones sont anatomiquement normaux chez les souris
GPR54 -/- et ont des projections dans
l’éminence médiane. L’hypogonadisme
chez ces souris n’est donc pas dû à une
migration anormale des neurones à
GnRH comme dans le cas de la mutation
KAL1, mais provient plutôt d’un défaut
de la libération de GnRH. La kisspeptine
injectée ip, qui entraîne une augmentation nette de FSH et LH chez les souris
normales, est sans effet chez les souris
GPR 54 -/-, ce qui montre que le peptide
agit uniquement par l’intermédiaire du
récepteur GPR54. Enfin, une mesure
directe montre que la kisspeptine administrée de manière centrale par voie intraventriculaire entraîne une forte libération
mt médecine de la reproduction, vol. 7, n°4, juillet-août 2005
de GnRH dans le liquide céphalorachidien avec une augmentation parallèle de
LH dans le sang.
Discussion
L’ensemble de ces données, et d’autres
de la littérature, montrent que les kisspeptines stimulent la sécrétion de LH et
aussi de FSH, qu’ils soient administrés
par voie périphérique ou centrale. Cet
effet est bloqué par l’administration d’un
antagoniste du GnRH ou bien chez les
souris dont le récepteur GPR54 a été invalidé. Bien que le récepteur GPR54 soit
aussi très abondant dans l’hypophyse,
une action directe à ce niveau des kisspeptines n’est pas, à l’heure actuelle, supportée par les résultats expérimentaux.
Conclusion
Les kisspeptines agissent sur l’hypothalamus pour augmenter la sécrétion de
GnRH et donc secondairement celle de
LH et FSH. Cette action a lieu en aval, ou
indépendamment, des autres facteurs
régulateurs neuro-endocriniens.
Jacques Hanoune
Navarro VM, Castellano JM, Fernandez-Fernandez R, et al. Effects of KiSS-1 peptide, the
natural kigand of GPR54, on follicle stimulating hormone secretion in the rat. Endocrinology 2005 ; 146 :1689-97.
Messager S, Chatzidaki EE, Ma D, et al. Kisspeptin directly stimulates gonadotropinreleasing hormone release via G proteincoupled receptor 54.
Proc Nat Acad Sci USA 2005 ; 102 : 1761-6.
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5. Muir AI, et al. J Biol Chem 2001 ; 276 :
28969-75.
6. Kotani M, et al. J Biol Chem 2001 ; 276 :
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8. Clements MK, et al. Biochem Biophys Res
Commun 2001 ; 284 : 1189-93.
9. Hori A, et al. Biochem Biophys Res Commun 2001 ; 286 : 958-63.
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