SOMMAIRE - URPS Occitanie

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SECTION MÉDECINS
info
MIDI-PYRÉNÉES
UNION RÉGIONALE DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ I JUIN 2015 I N O 10
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Partir du quotidien du patient
et du médecin traitant
Dr Michel COMBIER
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Pourquoi un DSPP en Midi-Pyrénées :
Dr Maurice BENSOUSSAN
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Le DSPP du Sud des Yvelines
Pr Marie-Christine HARDY-BAYLE
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Donner toute sa place à la pratique
médicale
Dr Laurent LESGOURGUES
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SOMMAIRE
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie - DSPP
Le DSPP Un dispositif apprenant
Pr Laurent SCHMITT
Les partenariats villes-hôpital
s’enrichissent
Pr Bernard PRADERE
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DSPP vu du CHU de Toulouse
Jacques LEGLISE
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« Améliorer la coordination entre le
médecin généraliste et les différents
acteurs de soins dans la prise en charge
des troubles mentaux » : le projet de la
Haute Autorité de Santé pour soutenir la
mobilisation des professionnels
Anne DEPAIGNE LOTH et
Dr Marielle LAFFONT
BRÈVES
Le site :
www.rempla-midi-pyrenees.org
Médimail : la messagerie régionale
de tous les professionnels de santé
URPS des Médecins
Espace Pierre-Gaubert
33, route de Bayonne
31300 Toulouse
Ce bulletin de l’URPS Midi-Pyrénées est le dernier avant
les prochaines élections du 12 octobre, amenées à renouveler notre instance. Les élus actuels restent en place
jusqu’au 31 décembre : ils auront notamment en charge la
transition-fusion vers la nouvelle URPS de la grande région
Midi-Pyrénées Languedoc-Roussillon qui sera installée le
1er janvier 2016.
Je sais que nombre d’entre vous s’interrogent encore sur la place des
URPS dans l’organisation de la santé en région. J’admets volontiers
cette remarque et si ce sentiment perdure au sein de notre profession
c’est que, malgré nos vingt-et-une années d’existence (URML puis
URPS), nous n’avons certainement pas assez communiqué et agi. Les
futurs élus devront en tenir compte.
éditorial
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Chers confrères,
Tél. : 05 61 15 80 90 – Fax : 05 61 15 80 99
[email protected] – www.urps-mp.org
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION :
Docteur Jean-Louis Bensoussan
COMITÉ DE RÉDACTION ET DE LECTURE :
Les docteurs Jean-Louis BENSOUSSAN, Maurice BENSOUSSAN,
Michel BISMUTH, Michel COMBIER. Catherine MALGOUYRESCOFFIN. Pr Marie-Christine HARDY-BAYLE, Laurent LESGOURGUES,
Pr Laurent SCHMITT, Bernard PRADERE, Jacques LEGLISE, Anne
DEPAIGNE et Dr Marielle LAFFONT.
TIRAGE : 6 900 exemplaires
MAQUETTE ET MISE EN PAGES : Groupe Composer
IMPRESSION : Équinoxe
Dans ce bulletin vous trouverez justement un des moyens d’action
de l’URPS médecins concernant l’organisation des soins. Ce DSPP,
Dispositif de Soins Partagés en Psychiatrie, peut, s’il se met en place,
modifier considérablement notre quotidien avec nos patients présentant des pathologies d’ordre psychiatrique.
Tout le dispositif est largement détaillé dans les pages qui suivent. Ce
projet ambitieux revêt toutes les facettes de nos missions : information des patients, organisation des soins, amélioration de la réponse
de soins, utilisation des systèmes d’information, lien ville-établissements, place essentielle des libéraux, etc.
Nous œuvrons pour qu’il puisse trouver un financement de l’ARS et
qu’il puisse se mettre en place dans les prochains mois, avant la fin de
notre mandature.
Nous avons été et nous sommes toujours fortement mobilisés par
plusieurs éléments de la Loi de Santé qui ne sera débattue au Sénat
qu’en septembre et au final adoptée par l’Assemblée qu’en octobre
au plus tôt.
Je souhaite que la campagne électorale, qui va s’ouvrir pour ces élections professionnelles du 12 octobre, soit un vrai débat d’idées et de
propositions de l’ensemble de nos organisations syndicales représentatives.
C’est ce débat qui vous donnera envie de participer et de voter pour
vos futurs représentants.
Confraternellement,
Le Président
Dr Jean-Louis Bensoussan
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie
DSPP
Partir du quotidien du patient
et du médecin traitant
Dr Michel COMBIER
Médecin spécialisé en
médecine générale,
Secrétaire général
adjoint de l’URPS des
médecins
2
Les médecins généralistes face aux troubles psychiatriques fréquents de leurs patients ont une position
souvent compliquée par des ressources d’aval qui ne
permettent pas fréquemment une démarche spécialisée rapide, sans être urgente, confrontée avec l’état
du patient, le ressenti du médecin, les difficultés de
l’entourage.
Un dispositif de soins partagés en psychiatrie doit relever ce défi.
Face à un patient pour lequel le médecin traitant pense
avoir besoin d’un avis spécialisé afin de permettre une
prise en charge pertinente et complète, il doit pouvoir
disposer d’un accueil rapide (trois jours à trois semaines
selon le cas dans le dispositif du sud-Yvelines) pour établir en coordination le meilleur soin pour le patient. Cela
peut être un besoin urgent, un avis unique, un démarrage de psychothérapie, une prise en charge complexe
ou tout autre besoin. L’intérêt doit résider dans tous les
cas dans la coordination et l’information du processus
de soins psychiatriques comme nous le vivons dans
d’autres spécialités. Le partage de la décision de la prise
en charge du patient doit permettre la gestion des crises
futures, si elles doivent survenir, l’amélioration des sorties d’hospitalisation et en plus sécuriser le médecin trai-
URPS info juin 2015 NO 10
tant face à un certain nombre de situations complexes
en améliorant par l’expérience la gestion des cas auxquels il est confronté.
On le voit, il s’agit pour l’URPS des médecins de MidiPyrénées d’un projet ambitieux dont nous avons eu
l’initiative. Il a regroupé dès le début l’hôpital public, le
secteur psychiatrique, les établissements de soins privés, les médecins spécialistes de médecine générale
et de psychiatrie dans leur représentation, la communauté municipale de santé, entre autres, et bien sûr les
associations de patients. L’Agence Régionale de Santé
semble accorder une attention favorable à ce projet.
Nous allons devoir le faire vivre dans notre exercice
quotidien pour apporter une meilleure fluidité au parcours du patient ayant des troubles psychiatriques
fréquents et pour pouvoir être les partenaires les plus
pertinents pour les accompagner dans un parcours de
soins souvent difficile à identifier depuis nos cabinets.
Du dialogue entre les intervenants, organisé par une
structure souple, véritable service à notre exercice quotidien, doit émerger une amélioration pour le patient en
concordance avec un meilleur confort de soins pour le
médecin traitant.
Pourquoi un dispositif
de soins partagés en psychiatrie
en Midi-Pyrénées est indispensable
Quelle place pour l’exercice libéral en
psychiatrie ?
Les plans de santé, nationaux ou régionaux, ont maintenant pris la fâcheuse habitude de systématiquement oublier toute référence à la psychiatrie libérale.
Si celle-ci apparaît, c’est toujours secondairement, de
raccroc, suite à l’intervention de quelques-uns.
Subrepticement, à la faveur de réunions de la démocratie sanitaire, le modèle technocratique se dévoile
à mesure. Ce n’est pas une question de pure sémantique, quand les tutelles parlant d’ambulatoire ne font
référence qu’aux seules pratiques hospitalières organisées par l’hôpital hors ses murs. Sous la dépendance, le contrôle et le fonctionnement du modèle
hospitalier, des pratiques ambulatoires se développent, le modèle du centre médico-psychologique
(CMP), anciennement appelé dispensaire d’hygiène
mentale, n’étant qu’un exemple parmi d’autres. Il n’y
a là aucune critique du travail remarquable et indispensable de nos collègues hospitaliers, mais juste
la démonstration que les mots préfigurent les évolutions socio-culturelles et organisationnelles. Dans ces
plans, l’exercice libéral de la psychiatrie est exclu des
schémas organisationnels technocratiques de la psychiatrie et de la santé mentale.
Le processus est connu : l’ambulatoire ainsi défini
administrativement n’a plus qu’à être articulé avec
le premier recours des professionnels de santé. Et
oui, la loi HPST, sous cette terminologie a décloisonné médecins et paramédicaux pour permettre à la
future Loi de santé de faire encore mieux, en créant
les « professionnels du territoire de santé ». C’est le
début de la fin du cloisonnement des compétences :
outre les professionnels de santé, d’autres intervenants, non professionnels de santé, les assistants
sociaux, les éducateurs, les psychologues, les pédagogues etc. sont regroupés. Personne ne peut être
oublié et les psychothérapeutes définis par décret
seront là aussi. Ainsi le système est bouclé.
Dans cette tendance de rationalisation et d’organisation de la proximité, le débat porte sur la place des
médecins libéraux spécialistes autres que généralistes. Pour la psychiatrie, un premier modèle, est de
vouloir différencier trouble mental fréquent qui justifierait d’un traitement ambulatoire de premier recours
et trouble mental sévère qui justifierait d’un traitement hospitalier. Les psychiatres seraient à l’hôpital
et les professionnels de premier recours s’organiseraient pour les pathologies mentales fréquentes. Des
améliorations seraient préconisées, des protocoles
signés entre généralistes et psychiatres hospitaliers
pour améliorer les collaborations pour des pathologies définies. Ce modèle méconnait la place actuelle
du psychiatre libéral, le service médical qu’il rend, du
fait de sa disponibilité de proximité, de sa thérapeutique personnalisée, inscrite dans un exercice spécialisé de suivi des patients.
La HAS chargée du projet : « Améliorer la coordination entre le médecin généraliste et les différents
acteurs de soins dans la prise en charge des troubles
mentaux »(1), n’a pas spontanément intégré les psychiatres libéraux. Leur donner une place ne procède
pas d’une évidence et oblige ces derniers à montrer
la qualité et la pertinence de leur exercice coordonné.
Les constats de la coopération entre
généralistes et psychiatres
Les évolutions socio-culturelles modifient l’exercice
médical, dont la pratique libérale. Alors que longtemps le pouvoir a cru que l’offre de soins créait la
demande, la question de la démographie médicale,
agitée bien avant la baisse programmée et concertée
des effectifs médicaux, ne semble pas être le prisme
adapté pour aborder les problèmes d’accès et de
continuité des soins. L’amélioration de la couverture
sociale, le progrès médical, l’explosion de la demande
de soins et la diversification des attentes des usagers
dérégulent le système. La notion de clientèle disparait. Il n’est pas rare aujourd’hui de voir un psychiatre,
récemment installé, indiquer sur son répondeur téléphonique ne plus pouvoir assumer la demande de
soins de nouveaux patients. Les médecins généralistes, eux, se plaignent des difficultés à trouver des
psychiatres pour rendre un avis, ou s’engager dans
un suivi.
Dr Maurice
BENSOUSSAN
Psychiatre, Secrétaire
général adjoint de l’URPS
des médecins
Le problème de la coopération entre généralistes
et psychiatres se pose donc d’emblée et fait l’objet,
documenté dans la littérature internationale(2), d’un
large consensus sur le déficit de cette coopération,
tant pour les troubles mentaux sévères que fréquents. Ces derniers ont pourtant une forte prévalence en médecine générale (près de 30%), un caractère invalidant pour le patient et la collectivité. Il existe
ainsi des obstacles à l’accès et à la qualité des soins,
un recours excessif aux services d’urgence, un déficit
de prévention et de suivi, des ruptures dans les parcours de soins et des complications aggravées.
Le médecin traitant souhaite un délai approprié
pour obtenir un avis psychiatrique et des réponses
différenciées en fonction d’un besoin de conseils,
d’orientation spécialisée, de consultation ou de suivi
conjoints. Le psychiatre libéral attend une demande
mieux régulée pour s’engager dans une pratique de
soins non programmés, d’avis d’expert ou de suivi.
Les hôpitaux projettent d’éviter les hospitalisations
aux urgences et d’obtenir des relais spécialisés en
aval des urgences.
(suite page 4)
URPS info juin 2015 NO 10
3
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie
DSPP
(suite de la page 3)
Le dispositif de soins partagés en
psychiatrie de Midi-Pyrénées
Le contexte est celui d’une offre de soins psychiatriques conséquente à Toulouse et de zones désertiques en région. Par contre, paradoxalement, les difficultés d’accès aux soins existent sur tout le territoire.
(1) http://www.has-sante.fr/
portail/jcms/c_2032142/fr/
ameliorer-la-coordination-entrele-medecin-generaliste-et-lesdifferents-acteurs-de-soins-dansla-prise-en-charge-des-troublesmentaux-note-de-cadrage
(2) . http://www.has-sante.fr/
portail/jcms/c_1050358/fr/
les-courriers-echanges-entremedecins-generalistes-etpsychiatres-lors-dune-demandede-premiere-consultation-parle-medecin-generaliste-pourun-patient-adulte-presentantun-trouble-mental-avere-ou-unesouffrance-psychique
(3) Comment améliorer la
coopération entre médecins
généralistes et psychiatres ? M-C.
Hardy Baylé, N. Younès 04/2014
in Information psychiatrique.
S’inspirant de dispositifs de soins partagés en psychiatrie qui existent en région parisienne(3), l’URPS
médecins Midi-Pyrénées prend l’initiative de promouvoir une telle organisation dans la région. Cette
volonté libérale vise à répondre à une forte demande
des médecins généralistes concernant l’amélioration
de leur coopération avec les psychiatres. La première
intention est d’y associer les psychiatres libéraux
volontaires pour organiser et promouvoir une dynamique de valorisation de l’offre de soins libérale de
proximité en psychiatrie. Une enquête de motivations
est réalisée par l’URPS auprès des généralistes et
des psychiatres libéraux. Plusieurs réunions vont par
la suite regrouper les acteurs pour réfléchir à la mise
en œuvre de ce dispositif de soins partagés en psychiatrie (DSPP). Ainsi se constitue un premier groupe
autour de généralistes et de psychiatres libéraux
associant dans une complémentarité entre médecins
et administration, le CHU (avec une implication active
et précoce), les cliniques psychiatriques privées, le
centre hospitalier G. Marchant, ainsi que la ville de
Toulouse (contrat local de santé mentale), le département universitaire de médecine générale, des associations d’usagers.
Ce projet présenté à l’Agence Régionale de Santé
pourrait se décliner simplement comme un DSPP
visant à intervenir là où des difficultés d’accès aux
soins et de fluidité des parcours apparaissent. Il
n’aura aucune pertinence dans les situations où la
coopération généralistes - psychiatres fonctionne
suffisamment bien et il se veut être un support à la
pratique en psychiatrie du médecin traitant.
Ce dernier sollicite directement le DSPP pour exposer sa demande d’aide à la prise en charge de son
patient. Une infirmière lui répond et, en fonction de
ses attentes, prépare la consultation psychiatrique
conjointe par un recueil d’informations auprès du
patient et du médecin si nécessaire. Le but est de
construire avec le médecin traitant une trajectoire de
soins en fonction du partenariat. L’offre de soins proposée se limite à l’évaluation, à l’élaboration conjointe
d’un projet de soins et le cas échéant à l’accompagnement vers un nouveau professionnel. C’est une
pratique clinique orientée vers la construction, l’explicitation et la délégation du projet de soins, qui par cet
aspect a aussi une action de formation en direction
des médecins généralistes avec la rédaction d’un
compte-rendu à visée formative.
Ce dispositif doit fédérer les acteurs en aval de
son intervention avec en particulier les articulations
nécessaires avec les psychiatres libéraux exerçant en
ville et en clinique privée, les psychiatres hospitaliers
dans leurs activités de secteur ou intersectorielles. Il
va contribuer à l’établissement, et l’enrichissement
du répertoire opérationnel des ressources (ROR) en
demandant par exemple aux psychiatres libéraux
leurs disponibilités pour recevoir un patient ainsi
régulé, mais aussi leurs spécificités de pratique et
souhaits d’intervention : psychiatrie générale du sujet
âgé, de l’adulte jeune, etc. Les psychiatres diront
aussi leurs disponibilités pour pratiquer des suivis et
leurs orientations psychothérapeutiques : TCC, psychanalyse, psychothérapies d’inspiration analytique,
psychothérapies interpersonnelles, etc.
Le même travail sera fait avec les secteurs de psychiatrie.
Une réunion des psychiatres libéraux déjà impliqués
et des volontaires aura lieu prochainement à l’URPS
pour établir le questionnaire qui sera adressé aux psychiatres libéraux afin de spécifier ce ROR.
Conclusion
Notre objectif n’est pas de remplacer ce qui fonctionne de manière satisfaisante, mais juste de tenter
de répondre à ce qui ne fonctionne pas, dans l’objectif secondaire de modifier les organisations de soins
afin d’en améliorer la pertinence.
C’est aussi l’occasion de montrer la capacité des
acteurs de la psychiatrie à s’organiser pour faire des
propositions innovantes en termes d’organisation
et d’amélioration des pratiques de soins. Répondre
ainsi aux enjeux d’une médecine moderne valorise
les pratiques médicales, au plus près des besoins
des patients. Les aspects relationnels, comme de
coordination de la médecine, ne sont pas oubliés et
privilégient l’indispensable colloque singulier, médecin-patient, socle d’un exercice médical de qualité.
4
URPS info juin 2015 NO 10
Le Dispositif de Soins Partagés
du Sud Yvelines
Dans le cadre des constats effectués par les acteurs du Groupement
de Coopération Sanitaire du Sud Yvelines (RPSM Sud Yvelines), créé en
1999, l’amélioration de la coopération entre médecins généralistes et
psychiatres s’est imposée comme une priorité.
Cette priorité rejoignait les constats internationaux d’une difficulté dans la
coopération entre le premier recours et l’offre de soins spécialisés.
Une enquête réalisée sur le territoire Sud Yvelines montrait que :
• 67% des médecins généralistes étaient insatisfaits ou très insatisfaits
de la collaboration avec les psychiatres, libéraux ou hospitaliers ;
• les médecins généralistes suivaient seuls une patientèle psychiatrique
de typologie comparable à celle suivie par les psychiatres libéraux, donc
sévère, et 60% des patients adressés à la psychiatrie l’étaient trop tardivement d’après les psychiatres qui les recevaient ;
• pour 81% des patients adressés par un médecin généraliste à un psychiatre, aucun retour du psychiatre n’était apporté au médecin généraliste.
Sur la base de ces constats, les acteurs du territoire ont proposé de créer
un dispositif dédié aux médecins généralistes, visant à répondre à toutes
leurs demandes dans des délais compatibles avec les besoins du patient.
En somme, ce dispositif se voulait être un support à « la pratique en
psychiatrie du médecin traitant » comme le formule le Docteur Maurice
Bensoussan.
En pratique, le patient lui-même s’adresse au dispositif pour obtenir un
rendez-vous. Il peut être en possession d’un courrier de son médecin
généraliste, ce qui est attendu ou non, le médecin généraliste sera de
toute façon contacté par le dispositif.
Le premier contact du patient est une infirmière et non une secrétaire.
Cette première accroche est en effet essentielle pour, d’une part, recueillir de manière cliniquement pertinente les informations utiles pour décider du délai pour le premier rendez-vous ou d’un ré-adressage direct
au système spécialisé et, d’autre part, établir une relation de confiance
notamment en apportant au patient les premiers conseils et en proposant de rester en contact avec eux, si besoin, dans l’attente du premier
rendez-vous. En somme, il s’agit d’un entretien d’orientation clinique et
déjà thérapeutique. La qualité de cette première accroche a permis d’observer de manière continue un taux d’absentéisme très faible de moins
de 5%, là où les études montrent un taux d’absentéisme pouvant aller
jusqu’à 40% pour le premier rendez-vous avec un psychiatre.
Le patient est informé dès ce premier contact que son médecin généraliste, si celui-ci n’a pas adressé de courrier, sera sollicité. Les patients
sont satisfaits de ce contact avec leur médecin généraliste proposé par le
dispositif, le nombre d’entre eux s’y étant opposé, depuis l’ouverture en
2000 se compte sur les doigts d’une main. Le contact avec le médecin
généraliste est systématique et permet d’affiner sa demande et d’apprécier la place qu’il souhaite prendre dans le projet de soins.
L’ensemble des demandes est discuté chaque jour avec le psychiatre et
le délai le plus approprié pour l’obtention du rendez-vous est évalué. Il ne
s’agit pas en effet de répondre le plus vite possible mais de la manière la
plus appropriée à la situation du patient. La moyenne est de dix jours pour
le premier rendez-vous mais ce délai peut être plus long ou plus court si
l’état du patient le justifie.
Les consultations effectuées par le psychiatre, avec ou sans le concours
d’un psychologue, relève d’une véritable séquence thérapeutique. Il
ne s’agit pas simplement de donner un avis mais de construire avec le
patient, son entourage s’il est présent et son médecin généraliste, un
projet de soins et de travailler sur la demande du patient afin de le rendre
possible.
Le projet de soins est ainsi négocié (élaboré) avec le patient et son entourage et coordonné avec le médecin généraliste afin que sa place et celle
du spécialiste dans ce projet soit bien établie.
Le projet de soins implique donc toujours le médecin généraliste que
Pr Marie-Christine
HARDY–BAYLE
celui-ci reste le référent de la prise en
Chef du pôle psychiatrie
charge psychiatrique ou non. Dans le preau centre hospitalier de
mier cas de figure, le dispositif de soins
Versailles.
partagés reste un recours du médecin
généraliste pour assurer le suivi du patient
avec lui lors de moments d’aggravation
du patient ou pour intervenir ponctuellement à la demande du médecin
de premier recours (on parle de soins partagés). Dans les autres cas de
figure le suivi psychiatrique est assuré par le système spécialisé, psychiatre libéral ou hospitalier, ou par un psychologue si seule une psychothérapie est proposée. Le dispositif se charge d’assurer le lien avec le
spécialiste, à la grande satisfaction des médecins généralistes.
La qualité de la réponse apportée par le dispositif de soins partagés
dépend ainsi des ressources psychiatriques qu’il pourra mobiliser pour
assurer le suivi psychiatrique lorsque celui-ci est nécessaire. Ce dispositif
doit donc, afin d’assurer sa mission, entretenir des liens avec la psychiatrie libérale et la psychiatrie de secteur afin qu’un adressage soit possible
en cas de besoin. Un répertoire des ressources doit être à la disposition
du dispositif et les modalités de recours au système spécialisé doivent
être établies par le dispositif en concertation avec les acteurs du libéral
et du public.
Depuis sa création le nombre de médecins généralistes ayant utilisé le
dispositif est de 453 soit la quasi-totalité des médecins du territoire (le
nombre total de médecins généralistes se situant autour de 500). Près
de 45% des patients ont nécessité quatre consultations ou plus, inscrivant ainsi le dispositif dans le soin partagé plus que dans une intervention
unique, qui se limiterait à un avis ponctuel sans assurer le travail sur la
demande du patient et la mise en œuvre initiale du projet de soins.
Le nombre d’actes effectués chaque année se situe aux alentours de
1400. Le nombre d’adressage direct au système spécialisé sans prise
en charge initiale par le dispositif de soins partagés est stable depuis cinq
ans, autour de 5% des demandes.
La satisfaction des patients reçus au dispositif et des médecins généralistes pour lesquels le dispositif a été mis en place est évalué on line à
chaque patient reçu selon cinq niveaux : excellente, très bonne, bonne,
moyenne et mauvaise. En 2014, 84,6% des patients et 92,3% des
médecins généralistes ont exprimé une satisfaction excellente ou très
bonne et 15,4% des patients et 7,7% des médecins généralistes, une
bonne satisfaction.
Enfin, la coopération établie entre médecins de premier recours et médecins spécialistes dans le cadre du dispositif est un levier particulièrement
efficace de délégation de compétences aux médecins généralistes pour
le suivi psychiatrique des patients. A l’origine du dispositif, le recours au
système spécialisé pour le suivi psychiatrique était de 30% des patients
reçus, aujourd’hui pour des patients de typologie comparable il est de
70%.
L’activité de ce dispositif est assurée par un psychiatre plein temps (1,5
ETP afin de couvrir les absences de ce psychiatre), une infirmière plein
temps (2 ETP) et un mi-temps de psychologue. La mise en place du
dispositif a été confiée à un psychiatre expérimenté dont la mission était
de superviser l’équipe et de construire le réseau de partenaires, libéraux
et hospitaliers, nécessaire au bon fonctionnement de la structure. Le dispositif est localisé à l’hôpital général, lieu déstigmatisé nécessaire au bon
fonctionnement du dispositif, et est sous la responsabilité d’un établissement public, les psychiatres libéraux n’ayant pas souhaité, dans le Sud
Yvelines, assumer cette mission. Le recours aux psychiatres libéraux, de
même que le recours aux secteurs de psychiatrie se fait en seconde
intention, après évaluation et prise en charge initiale au dispositif de soins
partagés.
Le périmètre couvert par ce dispositif est d’environ 500 000 habitants
(les 2/3 du Sud Yvelines).
URPS info juin 2015 NO 10
5
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie
DSPP
Donner toute sa place
à la pratique médicale
Dr Laurent
LESGOURGUES
Psychiatre, Conseiller
délégué à la diversité et
à l’égalité à la mairie de
Toulouse
6
Les psychiatres libéraux de Toulouse et de la région
ont la particularité de disposer d’une offre de soins
en hospitalisation privée sans comparaison par
rapport au reste du territoire français. Ces moyens
modifient leur pratique car ils proposent un exercice psychiatrique alternatif et complémentaire à
celui du service public hospitalier et du dispositif
de sectorisation. Des générations de psychiatres
toulousains ont ainsi développé des pratiques originales, innovantes et de référence. L’avènement
des territoires de santé, après d’autres réformes
organisationnelles, aurait pu être l’occasion de permettre les conditions du développement d’une offre
psychiatrique privée complémentaire, dynamique et
de qualité. Malheureusement, de choix politiques
en contraintes économiques, les psychiatres libéraux ont constaté la paupérisation de leur outil de
travail, faute de financements laissant à des initiatives personnelles de rares possibilités de changement et d’évolution des pratiques professionnelles.
Aujourd’hui, la psychiatrie est la discipline médicale
pour laquelle la différence de moyens alloués au
secteur privé par rapport au public est la plus importante. C’est presque la création de deux disciplines
différentes ; quel paradoxe dans un pays en souffrance faute d’une vraie réforme de santé et dans
une région dont la spécificité de l’offre de soins
aurait pu constituer un vrai incubateur d’innovations
URPS info juin 2015 NO 10
fondé sur un partenariat public-privé performant.
En oubliant les psychiatres libéraux par le passé, nos
dirigeants ont fait l’impasse sur une vraie opportunité d’économies et de mutation. Aujourd’hui, leur
indépendance par rapport à l’actionnariat des cliniques privées doit être garantie pour leur permettre
de suivre ou d’anticiper les progrès de la psychiatrie.
Leur place uniquement consultative dans le management des établissements où ils exercent n’est
plus aujourd’hui suffisante. Ils doivent être force de
proposition, de management et de décision, faute
de quoi les exigences du soin seront une simple
dimension règlementaire administrée par des entreprises de soins.
Pour ces motifs nous soutenons et sommes déjà
impliqués dans ce dispositif de soins partagés en
psychiatrie, véritable initiative médicale, libérale de
surcroît, qui vise à intégrer tous les acteurs de la
psychiatrie, ainsi que les administrateurs, les établissements privés. C’est une de nos réponses pour
replacer le patient au centre même d’une organisation de soin, c’est tenter de résoudre les difficultés
largement reconnues de notre profession et revenir
à ce qui constitue le cœur de notre métier. C’est
enfin une démarche responsable qui doit être perçue par nos partenaires institutionnels comme une
manifestation parmi tant d’autres de notre force de
proposition.
Le dispositif de soins partagés :
un dispositif apprenant
Un dispositif apprenant permet à chaque membre
du tandem, médecin généraliste et psychiatre, de
bénéficier de l’expertise de l’autre. Le psychiatre
apprend du médecin généraliste des informations
sur le milieu et la famille de son patient ainsi que
des connaissances sur son état de santé cardiaque,
métabolique ou addictologique. Le psychiatre utilise
toutes les informations sur l’ensemble des pathologies du patient pour rédiger la meilleure prescription
pour éviter des effets secondaires ou indésirables
des médicaments. Il sait que le médecin généraliste réalisera un excellent relais pour les suivis de
santé, l’observance des traitements mais aussi les
dépistages des grandes maladies générales dont le
cancer.
Le généraliste a des attentes similaires vis-à-vis du
psychiatre. Il peut avoir besoin d’un avis ponctuel sur
un diagnostic, une question de personnalité ou une
thérapeutique à initier. Il peut souhaiter un appui de
plusieurs consultations dans des états de crise suicidaire, de pathologies chroniques ou des comorbidités de plusieurs pathologies psychiatriques comme
une schizophrénie compliquée de toxicomanie.
Le dispositif de soins partagés est apprenant par une
méthodologie strictement pédagogique. D’une part
les échanges téléphoniques permettent de faciliter
le lien, d’autre part les courriers suivent les recommandations de la HAS pour donner des échanges
complets et structurés entre le généraliste et le psychiatre. Enfin, ceci est original, existe la possibilité
d’une consultation conjointe une à deux fois par
an. Consulter en commun crée une clinique translationnelle où chacun apprend de l’autre. Le patient
reste au cœur du dispositif mais surtout perçoit
l’amélioration du lien et la réalité d’un échange, une
vraie concertation entre son généraliste et son psychiatre. Il y a donc un déplacement clinique depuis la
proposition de consulter un psychiatre et la réponse
habituelle : « Je ne suis pas fou », que pourrait faire
le patient et une autre manière de procéder. Dès lors
que son médecin de famille dit : « Pour mieux vous
soigner, j’ai besoin de mieux comprendre les aspects
psychiatriques de votre souffrance » ou bien « nous
allons travailler à mieux vous soigner en réduisant
votre détresse morale » et nous allons travailler en
commun, le contexte relationnel se modifie.
Telle est la dimension pédagogique mais surtout
relationnelle de ce nouveau dispositif de type dispositif de soins partagés entre généralistes et psychiatres. Ce dispositif fonctionnera pour les différentes tranches d’âge et améliorera la qualité des
échanges et du soin.
Pr Laurent SCHMITT
Chef du pôle de
psychiatrie des Hôpitaux
de Toulouse
URPS info juin 2015 NO 10
7
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie
DSPP
Les partenariats ville-hopital
s’enrichissent !
Pr Bernard PRADERE
Président de la C.M.E. des
Hôpitaux de Toulouse.
8
Les partenariats entre l’hôpital et la médecine de
ville constituent un enjeu essentiel autour du meilleur soin pour le patient. De multiples initiatives renforcent progressivement le lien entre la médecine
de ville et l’hôpital. Médimail permet des courriers
rapides à la disposition des médecins, des fiches
d’adressage de la ville vers l’hôpital ou de sortie
fournissent les renseignements indispensables au
lien et au suivi d’une hospitalisation. Des numéros
téléphoniques commencent à être dédiés à une activité ou à un secteur d’activité spécifique pour éviter au médecin de ville d’être confronté au silence
sidéral lors d’un appel vers le CHU.
Dans ce contexte, le projet de dispositif de soins
partagés entre médecins généralistes et psychiatres
représente un apport original. En souhaitant que
les médecins généralistes puissent disposer d’avis
ponctuels, d’évaluations cliniques ou de séquences
de soins en lien avec des psychiatres, il renforce
le partenariat dans ce secteur de la médecine. En
souhaitant que des psychiatres libéraux puissent
travailler avec des psychiatres de l’hôpital public, il
réduit les distances, souvent très artificielles, entre
le secteur public et le secteur privé.
URPS info juin 2015 NO 10
De plus, les urgences psychiatriques convergent
toutes en première intention vers l’hôpital public.
Certaines ne sont devenues des urgences que
parce qu’un conseil ou un avis antérieur n’avait pu
être obtenu facilement, ceci tendra à se réduire.
D’autres urgences avérées après avoir été traitées
à l’hôpital nécessitent la meilleure coordination
pour un suivi extra-hospitalier entre toutes les
facettes publiques ou libérales de la psychiatrie.
Le dispositif de soins partagés cherche de façon
originale à réduire le recours aux urgences de
l’hôpital mais aussi tente d’améliorer les liens
de travail entre les différentes facettes d’exercice de la psychiatrie. L’originalité de ce dispositif consiste à créer une plateforme où plusieurs
métiers peuvent fournir leurs compétences dans
le but en amont ou bien en aval d’assurer un soin
de meilleure qualité.
Le lien entre le CHU et la médecine libérale, représenté par l’URPS des médecins dans ce domaine,
est novateur puisqu’il n’existe que deux ou trois
dispositifs de ce type en France. Les Hôpitaux de
Toulouse se sont résolument engagés dans ce
partenariat.
Dispositif de soins partagés
en psychiatrie
Le CHU de Toulouse a un triple intérêt à agir pour
soutenir activement le projet de consultation partagée entre médecin généraliste et spécialiste psychiatre en Haute-Garonne.
Tout d’abord, notre hôpital a fait de l’ouverture aux
professionnels de ville, médecins généralistes au
premier plan, une des priorités majeures de notre
stratégie à cinq ans, Horizon 2018. A l’heure où les
pouvoirs publics, à l’occasion des discussions au
parlement de la loi sur la modernisation du système
de santé, invitent les acteurs du système de soins
à repenser leurs modes d’exercice, le CHU de Toulouse s’est résolument engagé dans la voie de l’ouverture, convaincu que l’hôpital-bunker et l’hospitalocentrisme sont dépassés. Cette politique est servie
par le développement de nouveaux outils comme
la promotion de la messagerie sécurisée (près de
30000 comptes-rendus d’hospitalisation ou de
consultation partent chaque mois via Médimail vers
les médecins traitants), la mise en place de numéros
d’appels séniorisés dédiés aux professionnels de
ville ou l’expérimentation de la lettre d’adressage.
Un comité d’interface a été mis en place et travaille
sur des parcours de soins coordonnés, spécialité par
spécialité, en commençant par la pédiatrie.
Deuxièmement, le CHU de Toulouse, acteur régional de soins, de prévention, d’enseignement et de
recherche de premier plan mais aussi acteur de santé
publique, dans une région où la démographie reste
extrêmement dynamique (entre +10000 et +15000
habitants supplémentaires à Toulouse chaque
année), se doit de réfléchir à des modes de prise en
charge adaptés à cette croissance populationnelle
et des besoins de santé en hausse constante. Le
partenariat avec les professionnels de ville, la négo-
ciation de parcours de soins partagés, constituent
une perspective très intéressante dans ce contexte.
Toujours preneur d’expériences innovantes qui ont
fait la preuve de leur valeur ajoutée en termes de
qualité des soins ou sur le plan organisationnel, le
CHU ne peut que s’intéresser aux résultats très
probants, qui plus est étayés par près de quatorze
ans de recul, une satisfaction des acteurs, médecins
généralistes et patients, et des projets de recherche
solides, du Réseau pour la Promotion de la Santé
Mentale en Yvelines Sud et ses consultations d’avis
spécialisé et de suivi conjoint.
Dernier argument, la Haute-Garonne connaît une
situation particulièrement difficile pour ce qui est
du fonctionnement de la filière santé mentale
dans son ensemble, avec une cristallisation de
l’engorgement des prises en charge aux urgences
du CHU. Un travail de fond a été engagé depuis
2013 entre l’ensemble des acteurs de santé du
département afin de repenser le fonctionnement
amont et aval des urgences psychiatriques. Le
futur dispositif collaboratif ne pourra qu’apporter
son concours à l’amélioration de la continuité des
soins, l’accès aux soins spécialisés et l’anticipation des situations de crise. L’expérience des Yvelines a, là aussi, montré que le dispositif concourait de façon très probante à la détection précoce
des pathologies psychiatriques et l’évitement du
recours aux urgences.
Amélioration de la qualité des soins, prévention
de la crise, plus grande collaboration entre professionnels, chacune de ces motivations explique
le soutien actif du CHU de Toulouse à la mise en
place du dispositif partagé médecin généralistespécialiste psychiatre en Haute-Garonne.
Jacques LÉGLISE
Directeur général du CHU
de Toulouse
URPS info juin 2015 NO 10
9
Le Dispositif de soins partagés en Psychiatrie
DSPP
« Améliorer la coordination entre le médecin gé
dans la prise en charge des troubles mentaux »
le projet de la Haute Autorité de Santé pour so
La qualité de la prise en charge des patients présentant des troubles mentaux pourrait être améliorée de
manière significative par une meilleure coordination
entre les médecins généralistes et les acteurs de la
psychiatrie. La Haute Autorité de Santé soutiendra les
efforts et la mobilisation actuels des professionnels en
proposant un bilan des données scientifiques sur ce
sujet et des repères pour l’amélioration des pratiques.
Anne DEPAIGNELOTH
Haute Autorité de Santé
La prise en charge des troubles mentaux par les
médecins généralistes : une prévalence et une incidence importantes dans leur pratique, des difficultés
de coordination interprofessionnelle, des ruptures de
soins pour les patients et pour leur entourage.
Les médecins généralistes accueillent au quotidien
la détresse psychique qui peut se manifester chez les
patients sous la forme de pathologies mentales caractérisées1. Le rôle de la médecine générale dans la
prise en charge des troubles mentaux est bien connu,
notamment grâce à des études nationales qui ont mis
en lumière ce rôle, plus particulièrement dans la prise en
charge de la dépression et des troubles anxieux.
On peut mentionner notamment :
Dr Marielle LAFONT
Haute Autorité de Santé
Gallais JL, Alby ML. Psychiatrie,
souffrance psychique et médecine
générale. Encycl. Méd. Chir.
Psychiatrie 2002;37-956-A-20
• L’enquête Baromètre santé en population générale qui
fait apparaitre que 61% des personnes souffrant d’un
épisode dépressif caractérisé et ayant eu recours à un
professionnel de santé déclarent avoir été prises en
charge en médecine générale pour ce problème.2
• Une enquête auprès d’un panel de 2 114 médecins
généralistes qui a montré que chaque semaine la
majorité des médecins généralistes sont confrontés
à des patients présentant un état dépressif (67%) ou
des troubles anxieux (82%).3
1
Briffault, X., Morvan, Y.,
Rouillon, F., Dardennes, R., &
Lamboy, B. (2010). Recours
aux soins et adéquation des
traitements de l’épisode dépressif
majeur en France. L’Encéphale,
Supplément 2, 48-58. Etude
sur les données du Baromètre
Santé 2005 concernant les 1404
personnes présentant un épisode
dépressif caractérisé.
2
La prise en charge de la
dépression en médecine générale
de ville, études et résultats, N°
810 • septembre 2012
3
Verdoux H, Cougnard A, Grolleau
S, Besson R, Delcroix F. How
do general practitioners manage
subjects with early schizophrenia
and collaborate with mental health
professionals? A postal survey
in South-Western France. Soc.
Psychiatry Psychiatr. Epidemiol.
2005;40(11):892-8
4
10
Les médecins généralistes sont aussi amenés à suivre
des patients présentant des pathologies chroniques
sévères, schizophrénies et troubles bipolaires notamment4. La prise en charge de ces patients présentant
des risques accrus de morbidité et de mortalité par
rapport à la population générale5 est particulièrement
complexe (non demande, problèmes de compliance et
d’observance, intrication des angoisses corporelles et
des problèmes somatiques, errance médicale, précarité, négligence des soins…).
Cependant, très souvent les médecins généralistes
font état de difficultés dans la prise en charge de ces
patients. Des études6 montrent qu’en France la coordination entre médecins généralistes et acteurs de la
psychiatrie est peu développée et peu formalisée entraînant :
• des difficultés d’accès aux services et avis spécialisés, qu’il s’agisse de structures publiques ou de professionnels libéraux ;
URPS info juin 2015 NO 10
• des retours d’information peu fréquents et une insuffisance d’échanges de courriers et d’échanges téléphoniques ;
• une absence de recours organisé en cas de situation
de crise avec pour conséquence des réponses parfois
inadaptées du médecin généraliste (par exemple un
adressage aux urgences qui aurait pu être évité) par
manque d’informations notamment pour des patients
chroniques non connus du médecin (renouvellement
d’ordonnance avant un week-end, prise en charge
d’une pathologie somatique aigue - tels qu’une fièvre,
des vomissements, une diarrhée aigue – décompensation aigue de la pathologie psychiatrique).
Un problème de cultures professionnelles et une difficulté à clarifier les rôles de chacun semblent impacter
la collaboration et à la communication entre professionnels dans ce domaine7.
Il existe bien sûr d’autres obstacles :
• les patients peuvent s’opposer à la communication
d’informations entre les professionnels, dans un
contexte où les maladies mentales sont encore stigmatisées ;
• chez les personnes présentant des pathologies mentales sévères, plusieurs facteurs, dont la difficulté à
exprimer une demande de soins, impactent la coordination des soins ;
• la difficulté pour orienter rapidement les patients vers
des psychothérapies structurées, gratuites ou remboursées, freine la mise en place de traitements adéquats.
Au bout du compte ce sont les patients et leur entourage qui subissent les conséquences de ce manque
de coordination comme le montrent les rapports successifs sur la psychiatrie et la santé mentale pointant la
fréquence des ruptures dans les parcours de vie et de
soins des personnes souffrant de troubles psychiques8.
La mobilisation des professionnels français : des
expériences de terrain, des outils d’amélioration, une
charte, des thèses et un congrès
Les acteurs professionnels se sont mobilisés pour
répondre à ces défis et proposer une meilleure articulation des interventions des différents professionnels
dans la prise en charge des personnes présentant des
troubles mentaux :
• plusieurs expériences ont montré qu’il était possible
de mettre en œuvre des solutions dans le contexte de
l’organisation actuelle du système de santé français9 ;
• le Collège National pour la Qualité des Soins en Psychiatrie a initié la réflexion sur les pratiques professionnelles en proposant une recommandation sur les
échanges de courriers entre médecin généraliste et
psychiatre10;
néraliste et les différents acteurs de soins
:
utenir la mobilisation des professionnels
• le Collège de la Médecine Générale et la Conférence
Nationale des Présidents de CME de centres hospitaliers spécialisés ont signé une charte de partenariat
en mars 2014 qui constitue une étape importante,
marquant la volonté de promouvoir une collaboration
renforcée entre la médecine générale et la psychiatrie. Des expérimentations se mettent en place. Par
ailleurs, une démarche complémentaire permettant
d’intégrer les acteurs de la psychiatrie libérale et associative est prévue.
Le nombre toujours plus important de thèses de médecine générale consacrées à la communication entre les
médecins généralistes et les professionnels de la psychiatrie et la place majeure donnée à ce thème dans le
programme du dernier Congrès de la Médecine Générale de mars 2015 témoignent de la dynamique professionnelle qui se met en place.
La contribution de la HAS : le projet 2015-2016. Améliorer la coordination entre le médecin généraliste et
les différents acteurs de soins dans la prise en charge
des troubles mentaux.
La Haute Autorité de Santé a souhaité soutenir cette
dynamique, dans le cadre de ses missions et de ses
compétences. Le dialogue avec le comité de suivi mis
en place en 2013 pour accompagner le programme
Psychiatrie et santé mentale de la HAS a permis de
construire un projet qui réponde aux préoccupations et
aux attentes des représentants des usagers, des partenaires professionnels et des pouvoirs publics.
Les échanges avec le comité de suivi ont montré :
• l’intérêt de mettre à disposition des acteurs une synthèse des données scientifiques et des expériences
internationales sur les modes d’organisation de la
prise en charge des troubles mentaux en soins primaires11 ;
• la nécessité de ne pas s’en tenir à un savoir théorique
mais de prendre en compte dans toute leur complexité les situations rencontrées en médecine générale en France. En effet, les enjeux de la coordination
sont différents :
- selon le rôle du médecin généraliste - médecin traitant dans la prise en charge, selon qu’il est ou non
le référent de la prise en charge du trouble mental ;
-
selon l’interlocuteur principal du médecin généraliste : psychiatre libéral, équipes pluridisciplinaires de
psychiatrie de secteur, psychologues…
- selon le type de pathologies qui peuvent nécessiter la mise en place d’un suivi conjoint avec un psychiatre ou un accès à des psychothérapies structurées ;
- selon le mode d’exercice, individuel ou collectif.
Le projet, Améliorer la coordination entre le médecin
généraliste et les différents acteurs de soins dans la
prise en charge des troubles mentaux de la HAS, se
déclinera en deux volets :
• volet 1 : l’élaboration d’un rapport dit socle de
connaissances pour mettre à disposition des acteurs
l’état des lieux des pratiques et la synthèse des données scientifiques ;
• volet 2 : la formulation de préconisations pour améliorer la coordination et les échanges d’informations entre
professionnels dans la prise en charge des personnes
présentant des troubles mentaux.
Le socle de connaissances sera publié début 2016 ; les
préconisations, qui prendront la forme d’une fiche point
clé et solutions, seront diffusées fin 2016.
Le groupe de pilotage du projet est présidé par le Dr
Jacques Glikman, psychiatre, chef de pôle au Centre
Hospitalier Les Murets à La Queue en Brie et le Pr
Albert Ouazana, professeur de médecine générale à
l’Université de Versailles. Un groupe de travail élargi,
composé de professionnels et de représentants d’usagers sera mis en place en 2016. La concertation ira bien
au-delà de ce groupe puisque, comme cela est prévu
par les méthodologies de la HAS, l’avis de l’ensemble
des acteurs concernés par les productions sera sollicité
à différentes étapes du projet.
http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2032142/fr/ameliorer-lacoordination-entre-le-medecin-generaliste-et-les-differents-acteurs-desoins-dans-la-prise-en-charge-des-troubles-mentaux-note-de-cadrage
Danel T, Deconstanza P, Deprince J, Elouahi F, Ethuin C, Haddouche A, et al. La santé physique des personnes
souffrant de schizophrénie : implication du dispositif de soins psychiatriques. Info Psy 2011;87(3):215-22.
5
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, Dumesnil H, Cortaredona S, Cavillon
M, Mikol F, Aubry C, et al. La prise en charge de la dépression en médecine générale de ville. Etudes et Résultats
2012;(810).
Kovess-Masféty V, Saragoussi D, Sevilla-Dedieu C, Gilbert F, Suchocka A, Arveiller N, et al. What makes people
decide who to turn to when faced with a mental health problem? Results from a French survey. BMC Public Health
2007;7:188.
Mercier A, Kerhuel N, Stalnikiewitz B, Aulanier S, Boulnois C, Becret F, et al. Enquête sur la prise en charge des
patients dépressifs en soins primaires : les médecins généralistes ont des difficultés et des solutions. L’Encéphale
2010;36(Suppl 2):D73-D82
Milleret G, Benradia I, Guicherd W, Roelandt JL. États des lieux. Recherche action nationale. Place de la santé
mentale en médecine générale. Info Psy 2014;90(5):311-7
Younes N, Gasquet I, Gaudebout P, Chaillet MP, Kovess V, Falissard B, et al. General Practitioners’ opinions on their
practice in mental health and their collaboration with mental health professionals. BMC Fam. Pract. 2005;6(1):18.
6
Collège national pour la qualité des soins en psychiatrie. Améliorer les échanges d’informations. Quelles sont les
informations utiles au MG que le psychiatre doit lui transmettre après un premier adressage d’un patient adulte
présentant un trouble mental avéré ou une souffrance psychique. Recommandation de bonne pratique sur le thème
de la coopération psychiatres-médecins généralistes. Pacé: CNQSP; 2011
7
Robiliard,D. Rapport d’information en conclusion des travaux de la mission sur la santé mentale et l’avenir de la
psychiatrie. Paris: Assemblée nationale; 2013.
8
L’information psychiatrique, Médecine générale et psychiatrie, 2014, 90(5); Defromont L, Verriest O, Dudenko P.
Les médecins généralistes au coeur de la santé mentale. Rev. Hosp. Fr. 2012;(547):20-3.
9
10
Collège National pour la Qualité des Soins en Psychiatrie. Améliorer les échanges d’informations, op. cit.
Funk M, Benradia I, Roelandt JL, Santé mentale et soins de santé primaires : une perspective globale,
L’information psychiatrique, Médecine générale et psychiatrie, 2014, 90(5) :331-339 ; Organisation for Economic
Co-operation and Development. Making mental health count. The social and economic costs of neglecting mental
health care. Paris: OECD; 2014.
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