L`utilisation des stimulants dans le traitement du trouble de déficit de

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La démarche d’évaluation et de traitement des enfants
atteints de trouble de déficit de l’attention avec hyper-
activité (TDAH) a changé depuis 1990, lorsque la Société
canadienne de pédiatrie a publié son énoncé sur l’utilisation
des stimulants chez les enfants ayant des troubles de l’atten-
tion (1).
À l’époque de l’énoncé précédent, une grande contro-
verse entourait la prescription de stimulants, et cette con-
troverse existe toujours. Bien des recommandations
présentées à l’époque demeurent valables, y compris le
besoin de procéder à une évaluation convenable des princi-
paux symptômes et des troubles connexes, le besoin de ti-
trer la dose de médicament utilisée, l’évaluation de
l’amélioration des principaux symptômes, la surveillance
des effets secondaires et des paramètres physiques, la pres-
cription de médicament personnalisée selon la fréquence et
la quantité ainsi que la participation de l’enfant au processus
de prescription du médicament (1).
Le présent énoncé vise à :
repérer et résumer les sources d’information et les
directives récentes sur l’évaluation des enfants
présentant un TDAH éventuel;
mettre à jour les recommandations relatives à
l’utilisation de stimulants d’après les observations
actuelles.
L’analyse des autres traitements médicaux du TDAH
dépasse la portée du présent énoncé.
Plusieurs organisations ont récemment publié des recom-
mandations relatives à la fois au diagnostic et au traitement
des enfants atteints de TDAH. Parmi ces organisations,
soulignons les National Institutes of Health (2), l’American
Academy of Pediatrics (3,4) et l’American Academy of Child
and Adolescent Psychiatry (5,6). Une vaste étude a récem-
ment été publiée au sujet de diverses méthodes de traite-
ment du TDAH, intitulée Multimodal Treatment Study of
Children with ADHD, ou étude MTA (7).
Les critères diagnostiques de TDAH sont établis par
l’American Psychiatric Association et publiés dans le Manuel
diagnostique et statistique, quatrième édition (DSM-IV)
(8). Ces critères sont utilisés dans toutes les disciplines pour
des besoins cliniques et de recherche, et ils conviennent en
pédiatrie. La décision d’intervenir d’un point de vue médi-
cal dépend de ces critères, qui sont acceptés par l’American
Academy of Pediatrics et représentent la démarche la plus
validée.
Le TDAH a une prévalence de 3 % à 5 % dans la popu-
lation infantile, les garçons étant de deux à quatre fois plus
touchés que les filles (9,10). Une fois le diagnostic posé, les
symptômes diminuent au fil du temps, mais la majorité des
personnes atteintes continuent d’afficher des symptômes
importants pendant l’adolescence et la vie adulte (11-13).
Ce phénomène exige une démarche de prise en charge pro-
longée du TDAH et des familles.
L’ÉVALUATION
L’évaluation consiste à mesurer la présence des symptômes
dans les divers milieux que fréquente l’enfant, la gravité des
symptômes et le degré de déficit que vit l’enfant. Pour ce
faire, il faut colliger de l’information auprès de la famille et
des milieux d’enseignement. Les médecins doivent évaluer
la présence d’autres troubles et situations qui peuvent expli-
quer les symptômes manifestés ou ceux qui coexistent
fréquemment avec le TDAH. Le TDAH peut s’accompa-
gner ou non de troubles d’apprentissage comorbides, de
troubles des conduites ou d’autres troubles affectifs. Le guide
unilingue anglais de la Société canadienne de pédiatrie,
intitulé Children with School Problems (14), présente une
démarche détaillée qui peut être utilisée pour évaluer les
enfants aiguillés vers un médecin en raison de problèmes à
l’école.
Les diverses recommandations d’évaluation publiées
récemment figurent au tableau 1. Elles varient pour refléter
les diverses perspectives des organisations éditrices.
Le recours à des questionnaires, selon les critères du
DSM-IV, peut s’ajouter à l’information objective reliée aux
descriptions des symptômes de l’enfant et peut servir à éva-
luer des symptômes à la fois à la maison et dans le milieu
d’enseignement. Il est essentiel que les symptômes soient
L’utilisation des stimulants dans le
traitement du trouble de déficit
de l’attention avec hyperactivité
ÉNONCÉ (PP 2002-02)
Correspondance : Société canadienne de pédiatrie, 2204, chemin Walkley, bureau 100, Ottawa (Ontario) K1G 4G8, téléphone : 613-526-9397,
télécopieur : 613-526-3332, Internet : www.cps.ca, www.soinsdenosenfants.cps.ca
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souvent ou très souvent présents. Un pourcentage beaucoup
plus élevé de la population sera diagnostiqué pour des symp-
tômes sporadiques.
Le médecin doit envisager d’autres explications pour le
comportement de l’enfant et les troubles connexes, y compris
les troubles d’apprentissage, le trouble oppositionnel avec
provocation, le trouble des conduites et les troubles anxieux.
LA PRISE EN CHARGE
Une fois le diagnostic de TDAH posé, plusieurs principes de
prise en charge fondamentaux s’appliquent. Ces principes
incluent le soutien des familles par de l’information sur le
TDAH et sa prise en charge, la formation des parents, les
interventions comportementales et la médication.
L’intervention doit être planifiée sur une longue période et
inclure des rencontres régulières avec la famille au sujet des
progrès et de la performance. Les exigences scolaires
changent à mesure que les programmes exigent des apti-
tudes organisationnelles et d’étude plus poussées.
L’élaboration de mesures de soutien à l’école pour l’enfant
représente un facteur crucial de succès.
Les stimulants sont étudiés depuis de nombreuses
années. Il existe une controverse constante sur leur usage en
général et sur le nombre croissant d’enfants traités. Dans
certaines régions, plus de 10 % des enfants d’âge scolaire
prennent des stimulants (11), tandis que la plupart des
enquêtes font état d’une utilisation beaucoup plus faible
(15,16). Ces constats laissent supposer que la surutilisation
constitue une préoccupation et qu’une méthode diagnos-
tique attentive représente un élément essentiel des soins
aux enfants atteints de TDAH éventuel. L’utilisation de
stimulants est très sûre, et les effets secondaires graves sont
très rares (4,6,17).
Il est important de faire participer les parents à la déci-
sion d’entreprendre le traitement médical du TDAH. Les
parents s’inquiètent des effets secondaires potentiels, à
court et à long terme, de même que de la manière dont les
médicaments bénéficieront directement à l’enfant, et non
seulement aux adultes qui seront mieux aptes à s’occuper de
lui. Si l’enfant prend des médicaments, les parents veulent
généralement la dose la plus faible possible pour permettre à
l’enfant de réussir. Il est important de faire participer l’en-
fant, compte tenu de son étape de développement.
Selon des observations fiables, les stimulants peuvent
réduire les principaux symptômes de TDAH, et surtout les
symptômes d’hyperactivité ou d’impulsivité (7). L’étude
MTA portait sur l’évaluation des issues en l’espace d’un an
et a permis d’établir que le titrage attentif de la dose, pou-
vant aller jusqu’à trois fois par jour, ainsi que des contacts
fréquents afin de surveiller l’état de l’enfant, assurent des
améliorations de la situation globale de l’enfant par rapport
aux soins de santé communautaire habituels. Ce
phénomène s’avère, même si 67 % du groupe de soins de
santé communautaire ont reçu des médicaments à un cer-
tain moment pendant la période de l’étude.
Par le passé, on pensait que l’anxiété laissait présager une
mauvaise réaction aux médicaments, mais les études les plus
récentes ne l’ont pas démontré. L’étude MTA a confirmé
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TABLEAU 1
Les recommandations pour évaluer les enfants aiguillés vers un médecin par suite de problèmes à l’école, tirées
des directives récemment publiées
American Academy American Academy of Child and
Organisation National Institutes of Health (2) of Pediatrics (3) Adolescent Psychiatry (4)
Manœuvre Besoins d’un ensemble de démarches Information obtenue directement Entrevue des parents pour évaluer les
d’évaluation plus uniforme auprès des parents au sujet des symptômes et les facteurs
principaux symptômes et d’autres contributifs
critères
Enfant Examens physique et neurologique Entrevue de l’enfant pour envisager
des diagnostics comorbides
Antécédents médicaux et examen
physique effectués au cours des
12 mois précédents
École Documentation des principaux Tests psychoéducatifs reliés aux
symptômes troubles d’apprentissage
Exposé des faits par l’enseignant Observation clinique officieuse en
Éléments des travaux scolaires classe
en cours
Échelles d’évaluation Option clinique d’échelles propres Recommandées; procurent des
au TDAH pour l’évaluation tant des renseignements précieux
parents que des écoles
Autres tests médicaux Seulement lorsque les observations Seulement lorsque les observations
cliniques le justifient cliniques le justifient
ces résultats. Les enfants anxieux profitaient le plus d’un
soutien comportemental ajouté à la médication, tandis
qu’en cas de TDAH sans comorbidité, les interventions
comportementales supplémentaires n’apportaient pas
grand-chose de plus à l’amélioration de l’état de l’enfant.
Les parents de tous les groupes étaient toutefois plus satis-
faits lorsque des stratégies comportementales étaient inclu-
ses dans le traitement (18).
Le premier principe de prise en charge médicale consiste
à choisir un stimulant, d’ordinaire du méthylphénidate. La
dose de départ est de 5 mg ou de 10 mg par dose, la dose la
plus élevée étant prescrite aux enfants de plus de 25 kg.
Dans l’étude MTA, les enfants recevaient des doses de 5 mg,
10 mg ou 15 mg deux ou trois fois par jour, et des doses pou-
vant atteindre 20 mg par dose chez les enfants de plus de
25 kg. La troisième dose, si elle était administrée, corres-
pondait à la moitié des premières doses. Il est nécessaire de
titrer la dose au niveau le plus efficace, selon les symptômes
ciblés. Par le passé, une dose de 0,3 mg/kg à 0,7 mg/kg était
recommandée. Pourtant, rien ne démontre qu’une
démarche fondée sur le poids assure une meilleure réponse,
mais le poids peut être utilisé pour juger de la quantité rela-
tive qu’un enfant reçoit. Les symptômes ne réagissent pas
tous de la même manière à chaque dose de médicaments. Il
est donc important que les symptômes ciblés soient définis
avant l’amorce de la médication. Le médecin devrait com-
muniquer avec la famille au sujet de l’état de l’enfant envi-
ron une semaine après le début du traitement, et le titrage
de la dose du médicament devrait tenir compte de l’amélio-
ration et des effets secondaires. Il existe des manières objec-
tives de surveiller à la fois les effets voulus et indésirables au
moyen d’échelles d’évaluation. Aucune indication ne justi-
fie un bilan sanguin systématique associé à l’utilisation de
stimulants. Dans l’étude MTA, un contact mensuel avec les
familles était privilégié afin de surveiller et de rajuster la
dose, une fois la dose la plus efficace établie. Ce suivi étroit
s’associe à de meilleures issues que les soins de santé com-
munautaire (7). Il est possible de planifier des périodes
occasionnelles pour réduire ou interrompre la médication, en
collaboration avec les familles, mais aucune donnée ne corro-
bore le besoin de telles « vacances » de médicaments (4,6).
Si le méthylphénidate n’est pas efficace ou en présence
d’effets secondaires graves, la possibilité suivante demeure
la dextroamphétamine. La dose est deux fois moindre que
celle du méthylphénidate. Toutefois, dans certains cas, les
stimulants ne sont pas efficaces. Le recours aux substances
psychoactives dépasse la portée du présent énoncé, mais des
consultations supplémentaires peuvent être pertinentes
dans des situations difficiles.
Si le diagnostic est bien posé, le taux de réponse aux
stimulants oscille entre 80 % et 96 % environ (19). Il n’est
donc pas nécessaire de procéder à un essai en aveugle dans
tous les cas, mais cette démarche convient lorsque la réac-
tion n’est pas claire, lorsque des avis divergent quant à la
réponse au médicament ou lorsque la famille désire faire
appel à la mesure la plus objective de l’efficacité du traite-
ment. Il est possible de prendre des dispositions à cet effet
avec une pharmacie.
Lorsque le schéma thérapeutique est stabilisé, le
médecin devrait conserver un contact constant avec l’en-
fant et la famille pour offrir un soutien continu, pour éva-
luer l’évolution des troubles comorbides, s’il y a lieu, pour
évaluer les effets secondaires et pour surveiller les
paramètres physiques de taille, de poids et de tension
artérielle. Certains effets secondaires s’associent aux
sautes d’humeur susceptibles d’émerger après deux ou trois
mois de traitement (20).
D’après les études longitudinales, les symptômes de
TDAH se poursuivent chez la majorité des individus pen-
dant de nombreuses années, ce qui sous-tend que les
médicaments peuvent constituer un facteur clinique pour
un patient pendant une longue période, peut-être même
après l’âge adulte (13).
CONCLUSION
Bref, les stimulants continuent de constituer un traitement
efficace contre les principaux symptômes de TDAH. Le
traitement doit toutefois être personnalisé, et d’autres sup-
ports, y compris l’information et la formation des parents, le
traitement comportemental et les interventions pour régler
les troubles comorbides, sont des éléments essentiels de
prise en charge d’un enfant présentant ce trouble.
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Énoncé de la SCP : PP 2002-02
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Énoncé de la SCP : PP 2002-02
COMITÉ DE LA PÉDIATRIE PSYCHOSOCIALE
Membres : Docteurs Anne-Claude Bernard-Bonnin, département de pédiatrie, Hôpital Sainte-Justine, Montréal (Québec); Kim Joyce Burrows,
Kelowna (Colombie-Britannique); Anthony Ford-Jones, département de pédiatrie, Joseph Brant Memorial Hospital, Burlington (Ontario); Sally
Longstaffe (présidente), clinique du développement de l’enfant, Children’s Hospital, Winnipeg (Manitoba); Theodore A Prince, pédiatrie générale et
du développement, Calgary (Alberta); Sarah Emerson Shea (administratrice responsable), IWK Health Centre, Halifax (Nouvelle-Écosse)
Conseillers : Docteurs Rose Geist, The Hospital for Sick Children, Toronto (Ontario); William J Mahoney, Children’s Hospital, Hamilton Health
Sciences Centre, Hamilton (Ontario); Peter Nieman, Calgary (Alberta)
Représentants : Docteurs Joseph F Hagan, collège de médecine de l’université du Vermont, Burlington (Vermont) (comité des aspects psychoso-
ciaux de l’enfant et de la famille, American Academy of Pediatrics); Anton Miller, Sunnyhill Health Centre for Children, Vancouver
(Colombie-Britannique) (section de la pédiatrie du développement, Société canadienne de pédiatrie)
Auteur principal : Docteur William Mahoney, Children’s Hospital, Hamilton Health Sciences Centre, Hamilton (Ontario)
Les recommandations du présent énoncé ne constituent pas une démarche ou un mode de traitement exclusif. Des variations tenant
compte de la situation du patient peuvent se révéler pertinentes.
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