Les modes ou registres de communication publique
Communication publique
Conseil d’Etat - Place du Palais Royal 75100 Paris Cedex 01 - Tél 01.40.20.92.00 - Télécopie : 01.42.61.05.58
Directeur de la publication : Pierre Zémor - Rédactrice en chef : Myriam Lemaire - Diffusion : Pierre-Alain Douay - Secrétariat de rédaction : Sandrine Gaillard.
2
ISSN 1156 - 0444
LES DIX REGLES D’OR
1. Les échanges de l’espace public
Mis à part les entretiens ou la correspondance interpersonnels et les trai-
tements de l’information par des groupes privés (familiaux, profession-
nels, associatifs…), tout échange dans la société civile se fait sur la place
publique. Cette publicité du partage de l’information s’amplifie avec
l’instantanéité de la médiatisation audiovisuelle et de la diffusion numé-
rique. Le développement des relations entre tous les acteurs et la diver-
sification des supports appellent une délimitation des responsabilités
des registres de la communication publique, en tant que celle-ci est “la
communication formelle qui tend à l’échange et au partage d’informa-
tions d’utilité publique, ainsi qu’au maintien du lien social et dont la
responsabilité incombe à des institutions publiques ou à des organisa-
tions investies de missions d’intérêt collectif”.
2. L’information due au citoyen
Celui-ci est censé connaître la loi. La publicité des règles et des décisions
est nécessaire pour qu’une disposition légale soit opposable à un admi-
nistré ou un justiciable. La publication peut d’ailleurs constituer une
condition de l’égalité (affichage d’un permis de construire, publicité
d’une délibération municipale, d’un appel d’offre…).
3. La mise à disposition des données publiques
Les informations utiles au citoyen et à la vie de la cité, sans être toujours
juridiquement requises, doivent être mises à disposition du public pour
faire connaître les droits et obligations, les procédures à suivre
(démarches, déclarations, autorisations, formulaires proposés…) ainsi
que des données recueillies (économiques, démographiques, sociales,
culturelles…, renseignements pratiques) en vue d’organiser la vie col-
lective. La diffusion ou la commercialisation de ces données publiques
posent des questions délicates de concurrence avec les opérateurs privés
(édition, presse) ainsi que de protection des libertés.
4. Le compte-rendu de l’action publique
L’article 15 du Préambule (Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen) de la Constitution prescrit : “La société a le droit de demander
compte à tout agent public de son administration”. Au-delà des réponses
dues aux questions des citoyens et de l’accès aux documents adminis-
tratifs (loi du 17 juillet 1978 modifiée en 2005 relative à l’amélioration
des relations entre l’administration et le public et CADA), les institu-
tions publiques remplissent un devoir de reddition des actes (recueil
des actes administratifs des préfectures ou des collectivités territoriales)
ou de compte-rendu de leur activité (rapports périodiques).
5. Le dialogue des services et pouvoirs publics
Le droit à l’information des citoyens implique un devoir de communica-
tion, c’est-à-dire d’échanges pour expliquer et ajuster, en les délivrant,
les contenus des informations applicables.
Cette communication est pratiquée dans la relation entre les usagers-
citoyens et les agents publics (bureaux, guichets, lieux publics) ou les
élus (rencontres, entretiens, permanences, réunions).
Ce registre de communication implique en pratique des modalités pré-
cises d’accueil, de dialogue, de notification, de motivation des décisions
(lois des 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs et 12
avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations).
6. La promotion des services offerts au public
Les registres promotionnels et publicitaires de communication sont sol-
licités pour faire connaître les services d’utilité publique ou collective
qu’offrent les administrations de l’Etat ou les collectivités territoriales,
leurs établissements, leurs agences. On fait également savoir la portée
des politiques publiques qui ont été adoptées. On soutient aussi des
causes humanitaires ou des missions d’intérêt général.
Même si les démarches sont voisines, les modalités et les styles de cette
communication diffèrent de ceux des entreprises placées sur les mar-
chés concurrentiels. Ici la communication s’attache à expliquer des
mesures, à faire évoluer les comportements, à convaincre plus qu’à pro-
mouvoir. En particulier les campagnes d’informations publicitaires évi-
tent d’être signées de manière personnelle ou partisane.
7. La valorisation des institutions
La communication institutionnelle des entreprises, avec ses modes pro-
motionnels (image de marque, relations publiques, manifestations évé-
nementielles) est une référence de faible utilité. Les actions de valorisa-
tion d’un service administratif, d’une mission ou d’un organisme
public font ici aussi appel à la pédagogie et à la conviction sur les règles
du fonctionnement collectif de la société. Dans une relation pérenne
avec le citoyen, les communications institutionnelles ont une vocation
civique. Leur incombe cette fonction didactique de conférer du sens à la
conduite de l’action publique, dans sa part durable et consensuelle.
8. La consultation, la concertation, le débat public
Ces modes, plus ou moins formalisés d’échange entre institutions et
citoyens, s’instaurent selon des règles pré-établies ou empiriquement éla-
borées. A divers niveaux de compétences, la communication permet ainsi,
- par le dialogue, d’adapter une disposition ou d’y déroger,
- par la négociation, de rechercher un compromis sur une décision
prise ou à venir,
- par la consultation, de recueillir des avis de personnes intéressées ou
des instances prévues à cet effet,
- par la concertation, d’accepter les influences qui peuvent modifier un
projet de décision ou de réforme, voire d’en dénier l’opportunité.
Le débat public est un registre essentiel propre à la communication
publique.
9. La communication interne du service public
En premier lieu, elle contribue à la qualité de l’action et des conditions
de travail des agents, à leur mobilisation vers les objectifs de service du
public et à l’animation de la structure. Elle suppose une proche collabo-
ration ente les directions des personnels et les responsables de la com-
munication. En second lieu, la communication interne conditionne la
communication externe, notamment en assurant la transparence atta-
chée aux procédures. Elle contribue au devoir d’authenticité des institu-
tions publiques en évitant le divorce entre le sentiment d’appartenance
de l’identité vécue par les agents et l’image projetée vers l’extérieur.
10. La communication politique
On doit remarquer préalablement qu’en démocratie, par l’élection, la
nomination, la délégation, par le contrôle par les représentants élus,
toute communication publique est dans son principe politique.
Dans la pratique, au-delà des situations hybrides (cabinets politiques,
porte-parole), les modes de communication se distinguent.
La communication politique partisane de conquête du pouvoir a
recours aux registres publicitaires de promotion concurrentielle.
La communication de l’exercice des pouvoirs (délibératifs, exécutifs),
par mimétisme électoraliste et sous la pression médiatique, privilégie le
court terme et se détourne de l’inscription dans le long terme institu-
tionnel de l’action publique. Ainsi, en n’identifiant pas assez clairement
les degrés de liberté et les choix, elle prend le risque de dévaloriser la
place durable du politique et de voir se dégrader le lien civique.
Fiche tirée des enseignements et publications de Pierre Zémor (notamment “La com-
munication publique” Que Sais-je ? PUF (1995, 1999, 2005)
1 / 1 100%