DOMINIC LÜDIN, URSULA SIEGFRIED, PETRA WINIGER GROUPE B CERUTTI
relèvement économique. La conférence ressemble cependant à un « curieux dialogue de
sourds » 2 ; elle échoue en raison des divergences entre Occidentaux et Soviétiques. Le plan
Marshall se heurte à deux intérêts de l’URSS : éviter une ingérence américaine dans les pays
qu’elle considère comme sa zone d’influence et les réparations allemandes. Pour les
Soviétiques, ces dernières sont une question de valeur économique autant que symbolique,
pendant que pour les Occidentaux, il n’est pas question de faire payer l’Allemagne. Son rôle
dans l’économie européenne est trop important pour ne pas la faire participer au programme
de relèvement économique. Il paraîtrait en effet absurde d’accorder de l’aide à l’Allemagne
qui serait tout de suite prélevée par les Soviétiques sous forme de réparations. L’échec de la
Conférence franco-anglo-soviétique fait du Plan Marshall un projet exclusivement occidental.
D. Le Comité de Coopération Économique Européenne (CCEE) : l’établissement d’un
programme européen commun
Du 4 juillet au 22 septembre 1947 le CCEE se réunit à Paris avec 16 pays participants pour la
coordination d’un programme de relèvement économique. L’Espagne franquiste en est exclue,
et les pays de l’Europe de l’Est ont dû rejetter l’invitation sous pression de l’URSS.
Pendant les travaux du CCEE, des divergences concernant la vision de la reconstruction
européenne se cristallisent entre les Américains et les Européens. Les Américains préconisent
l’institution d’organes supranationaux et d’un marché européen libéralisé. Les Européens
préfèrent des solutions intergouvernementales et veulent accorder plus de poids à l’Etat dans
l’économie. On aboutit avec le Rapport Général quand même à un compromis, puisque les
enjeux pour les deux parties sont considérables : l’aide économique est urgente pour les pays
européens et la pression américaine forte. Les Etats Unis pour leur part ont un grand intérêt à
la réalisation du plan Marshall pour refouler la menace communiste.
E. Le Foreign Assistance Act : la condition pour la réalisation du programme de
relèvement économique de l’Europe
Le European Recovery Program doit obtenir l’accord du Congrès américain, mais l’opinion
publique craint un impacte négatif sur l’économie des Etats Unis. L’impulsion décisive vient
du Coup de Prague du 25 février 1948 par lequel les communistes s’emparent du pouvoir en
Tchécoslovaquie. C’est un choc pour le monde occidental. Convaincus que la détresse
économique constitue un terrain favorable au communisme, les américains craignent que
l‘«effet domino » puisse se produire en toute l’Europe. Le 2 avril 1948, le Congrès vote le
Foreign Assistance Act qui cré l’European Cooperation Administration et qui prévoit
l’obligation pour les pays européens de signer des accords bilatéraux avec les Etats Unis pour
assurer l’utilisation effective de l’aide américaine. Cette obligation est perçue par les
Européens comme une ingérence américaine dans les affaires européennes puisque les
accords bilatéraux donnent aux Etats Unis un contrôle sur l’utilisation de l’aide.
II. L’Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE)
Le 16 avril 1948 seize pays signent la Convention de Coopération économique européene,
l’acte constitutif de l’OECE. Elle est instituée sous la pression des Etats Unis pour collaborer
avec l’ECA et pour répartir l’aide. Les conceptions de la nature institutionnelle de l’OECE
sont très divers. Ainsi la France se prononce en faveur d’un caractère supranational après
avoir dû accepter la participation des zones d’occupation allemandes qu’elle veut alors voir
intégrées à un maximum, avec toutes leurs ressources clefs, notamment le charbon et l’acier.
2 BITSCH, M.-T., Histoire de la construction européenne, Editions Complexe, Bruxelles, 1996, p. 36