Beaucoup de médecins doivent faire face à des
questions liées aux soins de n de vie et c’est pourquoi
les membres de l’ACPM devraient bien connaître les
enjeux médico-légaux connexes. Il y a certes d’autres
enjeux qui ont trait aux soins de n de vie, comme le
fait de ne pas prodiguer un traitement ou d’y mettre
n, mais ce document porte avant tout sur les enjeux
des soins de n de vie particuliers à l’aide médicale
à mourir, y compris l’objection de conscience, les
directives préalables, le consentement et l’accès aux
soins palliatifs.
LA DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME
La suspension pendant 12 mois de la décision unanime de
la Cour suprême donne au Parlement et aux assemblées
législatives provinciales le temps d’adopter des lois, et aux
Collèges d’élaborer des politiques et des lignes directrices à
l’intention des médecins. L’Association médicale canadienne
(AMC) a produit un projet de cadre de réglementation visant
à aider les responsables des politiques, qu’elle révisera au
cours de son Conseil général en août 2015.3 Les médecins
ont un rôle important à jouer en faisant avancer les
discussions et veillant à ce que toutes les nouvelles
mesures législatives et politiques tiennent compte de leurs
points de vue.
L’AIDE À MOURIR : MESURES DE
PROTECTION ET CRITÈRES
Les mesures de protection adéquates dans le cas de l’aide à
mourir préoccupent les patients, leur famille et les médecins.
Toutes les parties savent qu’il peut y avoir des volontés
contradictoires, sont conscientes de la qualité et du caractère
sacré de la vie, et cherchent des moyens de protéger les
intérêts des patients vulnérables. Les mesures de protection
pourraient inclure notamment l’évaluation du patient par
deux médecins indépendants, les périodes d’attente, la
révocation verbale de la demande par le patient à n’importe
quel moment et l’information complète au patient au sujet
des soins palliatifs possibles.
Les critères d’admissibilité à la demande d’aide médicale
à mourir préoccupent aussi beaucoup de médecins. La
Cour suprême a déclaré qu’un patient devrait être jugé
« personne adulte capable » qui « consent clairement
à mettre n à sa vie », étant affectée de « souffrances
intolérables » attribuables à des « problèmes de santé graves
et irrémédiables ».4 Au Québec, la loi prévoit qu’un patient
doit être une personne majeure, apte à consentir aux soins,
qui est à la n de sa vie et qui se trouve dans une situation
médicale caractérisée par un déclin avancé et irréversible de
ses capacités. Le patient doit aussi être atteint d’une maladie
grave et incurable qui entraîne des souffrances physiques
ou psychiques constantes, insupportables, ne pouvant
être apaisées dans des conditions qu’il juge tolérables.5 La
Cour suprême a certes essayé de clarier certaines de ces
conditions, mais les appréhensions des médecins persistent
au sujet des dénitions réelles, des zones grises et des
questions sans réponse comme le droit de ceux qui ont une
maladie mentale grave. Certains médecins peuvent se sentir
à l’aise de fournir de l’aide à mourir aux patients qui ont
certaines affections ou une maladie à un stade donné, mais
non à d’autres problèmes. Dans tous les cas, les médecins
souhaitent qu’il existe un processus robuste à suivre pour
identier correctement les patients pouvant avoir droit à
l’aide à mourir et étant clairement capables de répondre aux
exigences de la Loi ayant trait au consentement.
OBJECTION DE CONSCIENCE
En 2014, l’AMC a mis à jour sa politique sur l’euthanasie
et l’aide à mourir. Elle y afrme appuyer l’accès pour les
patients à l’éventail complet des soins de n de vie qui sont
légaux au Canada. Elle appuie aussi le droit des médecins,
compte tenu des limites de la législation, à suivre leur
conscience lorsqu’ils décident de fournir ou non une l’aide
médicale à mourir.6 C’est important parce que certains
médecins préféreraient un système reconnaissant leur
droit de ne pas participer à des activités médicales allant
à l’encontre de leurs croyances morales ou religieuses, ce
qui peut inclure le droit de ne pas diriger des patients vers
d’autres professionnels de la santé pouvant leur offrir les
services en question.
La préoccupation soulevée par l’obligation d’envoyer en
consultation un patient recherchant une aide médicale à
mourir émane en partie des positions adoptées auparavant
par certains Collèges, qui ont afrmé que les médecins
qui ne veulent pas fournir certains services médicaux
(p. ex., avortement) en raison de leurs croyances morales
ou religieuses doivent diriger le patient vers un autre
professionnel de la santé.7 On ne sait pas trop si un Collège
imposerait des demandes de consultation en ce qui a trait à
Les soins de n de vie : Enjeux médico-légaux
L’AIDE MÉDICALE À MOURIR :
TOUJOURS ILLÉGALE
La décision de la Cour suprême qui a déclaré
inconstitutionnelle la prohibition criminelle de l’aide médicale
à mourir est certes importante, mais l’ACPM veut que les
médecins sachent que, tant qu’une mesure législative n’aura
pas été adoptée, il demeure illégal pour
quiconque, y compris les médecins, de
donner des conseils ou de l’aide à une
personne pour qu’elle se suicide ou pour
lui faciliter la tâche à cet égard.